J'avais l'impression qu'à peine retrouvé, j'avais déjà perdu mon frère. Il travaillait, moi aussi, et c'était quasiment impssible de se voir. Il faut dire qu'il avait toujours quelque chose de prévu. Un vrai ministre! Du coup, je ne l'avais pas revu depuis bien deux mois, si ce n'était pas plus. Cette situation me peinait car au final, il était le seul membre de ma famille qui me restait (Hormis Enzo bien sûr). Je n'avais pas envie de le perdre, mais j'avais parfois l'impression que c'était déjà fait... Néanmoins pendant deux mois, je n'avais pas désespéré à trouvé une date! Enzo avait hâte de rencontrer son oncle et commençait à penser que se dernier ne voulait pas le connaitre. Difficile d'entendre ça d'un gamin de 4 ans, surtout quand on ne sait plus quoi dire pour expliquer l'empêchement de l'oncle en question, à savoir Erwan. Autant vous dire que quand je lui ai annoncé qu'il allait enfin pouvoir rencontrer son tonton, il avait sauté de joie! Cela faisait une semaine qu'il comptais avec impatience les dodos qui lui restaient à faire avant de voir Erwan!

Aujourd'hui était le grand jour et j'étais peut-être tout autant excité que lui, si ce n'était plus!! J'allais enfin lui présenter mon fils et clairement, ce n'était pas rien! Au delà de l'excitation, cela me stressait quelque peu. J'avais nettoyé l'appartement de fond en comble! Il n'avait jamais était aussi niquel et surtout bien rangé. Enzo m'avait aidé à cuisiner le repas. Enfin cuisiner était un bien grand mot, car on ne pouvait pas dire que j'étais un as des fourneaux. J'arrivais à préparer des plats simples, voilà tout! Du coup, à midi, cela serait: salade et lasagne. Erwan devait s'occuper du dessert.

Je rangeais les derniers jouets d'Enzo qui traînaient dans le salon quand on sonna à la porte. Je me précipitais pour ouvrir et découvris un Erwan, les bras chargés de paquets. Le plus haut, qui semblait être un paquet de pâtisserie, voulait se faire la malle. "Woh, qu'est-ce que tu fais avec tout ça?!" m'exclamais alors que mon frère me demandait de récupérer le dessert avant qu'il n'y ait un accident. Je m'exécutai et fis signe à mon frère de me suivre à l'intérieur. Je posai le dessert dans le frigo avant de retrouver mon frère dans le salon. Enzo débarqua en courant de sa chambre avec je ne sais combien de dessins qu'il avait fait pour Erwan. Il devait bien y en avoir une vingtaine, si ce n'est plus!! "Depuis trois jours il arrête pas!" dis-je dans un léger rire avant de reprendre. "Bon beh Erwan, je te présente ton neveu, Enzo. Et Enzo, voici tonton Erwan!" Enzo, les yeux pétillants de joie, le salua en langage des signes. "Il te dit bonjour là." dis-je pour traduire.

Mon frère devait débarquer d'une minute à l'autre et autant dire que j'étais plutôt stresser. Je l'invitais pour la première fois chez moi et en plus, il allait rencontrer son neveu. J'espérais qu'il ne soit pas déçu! Le repas était près et l'appartement rangé. Il ne manquait plus qu'Erwan, et il ne tarda pas à arriver. Il était chargé. Comme convenu, il avait ramené le dessert, mais pas que! Je l'aidai à porter tout ça, en sauvant le dessert d'un suicide certain! Après avoir posé tous les paquets, Enzo débarqua dans le salon. Depuis qu'il attendait la venue de son oncle, il était plus que ravi! Il avait fait tout un tas de dessin, plus ou moins réussis, il faut l'avouer! Il était fier d'avoir quelque chose à offrir à Erwan, quelque chose qu'il avait fait lui même. Mon frère lui avait ramené un cadeau et comme tout enfant qui se respecte, Enzo trépignait d'impatience de découvrir de quoi il s'agissait. Le paquet cadeau ne fit pas long feu. En moins de deux, il se retrouva émietter en mille morceaux sur le parquet du salon. Des legos, de quoi ravir un enfant de 4 ans, qui n'attendait plus qu'une chose, de pouvoir jouer avec. Enzo remercia Erwan (trop de E dans nos prénoms!), avant de se jeter dans ses bras. C'était un enfant très tactile même avec les personnes qu'il ne connaissait pas beaucoup. Erwan m'avait aussi ramené un petit présent. Chose qu'il n'aurait pas dû faire. C'était gentil de sa part, mais je ne l'avais pas invité pour ça. "Oh t'aurais pas dû!" dis-je néanmoins touché par cette attention. Il s'agissait d'un machine à smoothies. Cadeau utile agréable. Encore faudrait-il que j'ai la patience d'en faire. Ca c'était un tout autre histoire! "Merci!" Souriais-je avant d'aller poser le paquet dans la cuisine. Sur le passage, j'embarqua un ciseau pour ouvrir le carton de Légo d'Enzo. J'ouvris le paquet avant de me tourner vers mon frère. "Tu as fait un heureux là!" souriais-je. Le jeune homme me parla de l'appartement et je me rendis compte que j'avais totalement oublié de le lui faire visiter de suite. Okay, je n'étais pas le meilleur hôte qu'il soit! "Oui, c'est pas immense, mais pour nous deux, ça suffit largement. Je vais te faire visiter, viens." souriais-je. La visite fut rapide bien évidemment. Je commençai par la cuisine, avant de continuer sur la salle de bain et les deux chambres. La décoration n'était pas des plus belle. Il faut dire que majoritairement, les femmes ont plus de goûts que les hommes pour ça! Du coup, il n'y avait pas grand chose, c'était plutôt épuré. "Je suis content que tu sois là." dis-je alors que nous venions de retourner dans le salon. "Et Enzo aussi crois moi." Ce dernier était déjà en pleine construction et nous avait totalement oublié. "J'ai fait des lasagnes, mais elle seront clairement moins bonnes que celles que nous faisaient mamie!"

Mon frère était enfin là et même si nous avions probablement des tas de choses à nous dire, c'était bizarre, pas vraiment naturel. Il faut dire qu'on ne renoue pas un lien comme ça, par un claquement de doigts. Il nous faudrait probablement du temps mais je m'en fichais car nous étions enfin réunis. Il n'était pas venu les mains vides puisqu'il avait porté un présent mon fils mais aussi pour moi. J'espérais sincèrement qu'il ne s'était pas ruiné. Après tout, je n'avais aucune idée de sa situation financière actuelle. Il m'avait bien parlé de son boulot actuel mais... il avait été plutôt vague concernant ses véritables fonctions. J'espérais que cela ne cachait rien mais dans le doute, je comptais lui en toucher deux mots. Après tout, si nous voulions retrouver un semblant de relation fraternelle, nous devions être franc l'un envers l'autre. Et côté boulot, je ne voyais pas ce qu'il pourrait bien me cacher. Quoi qu'il en soit, pour le moment, ma mission était de lui présenter mon appartement. Ce fut plutôt rapide.

L'heure de passer à table était enfin arriver et heureusement car, comme souvent, je mourrais de faim. Il faut dire que j'étais plutôt un gros mangeur. Mon corps me le permettait, alors j'en profitais. "Je sais, je m'en rappelais. C'est pour ça que j'en ai fait." souriais-je. Peu de chance qu'en 5 ans, il change totalement de goût. Du moins c'est ce que je m'étais dit. Je fis signe à Enzo d'aller se laver les mains et il s'exécuta de suite. Enzo était un petit garçon adorable. Il piquait parfois des crises mais aujourd'hui, il jouait l'enfant modèle et je savais que cela était dû à la présence de mon frère. On s'installa à table et mon frère me demanda comment j'allais. C'était probablement une question de politesse, histoire de combler un peu les blancs mais il fallait bien commencer par quelque chose. Cette situation n'était vraiment pas évidente. Peut-être même plus difficile que je ne l'aurais pensé. "Ca va..." dis-je pour commencer avant de me rendre compte que ce n'était pas assez. "Avec Enzo ça se passe bien et c'est le principal. Par contre, niveau boulot, c'est pas la joie. Dans le sens ou clairement je m'ennuie. Il n'y pas vraiment d'action tu vois. Mais j'ai pas me plaindre." souriais-je. Oui j'étais toujours à me dire que la situation pourrait être bien pire. Jake m'avait bien proposé de me faire rentré dans la police mais... même ça, je trouvais ça ennuyeux. Faire souffler les gens dans un ballon pour savoir s'ils sont aptes à conduire, très peu pour moi! "Et toi alors, ça va?" demandais-je en servant l'entrée. Ma question englobait plusieurs points. La dernière fois qu'on s'était vu, il avait pris la décision d'abandonner sa carrière naissante de chanteur et venait de se séparer avec Orel. Autant dire que ça n'avait pas été la joie pour lui et j'espérais sincèrement que ça allait mieux.

Je n'étais clairement pas le meilleur cuisinier au monde mais j'avais dû apprendre à me débrouiller seul lorsque mes parents m'avaient foutu à la porte. A cette époque, je n'avais pas un sous alors acheter des plats tout près était tout simplement impossible! Quant aux habituels pâtes en sauce, je m'en étais vite lassées! Du coup j'avais appris à gérer petit budget et repas simple et équilibré! Voilà pourquoi les lasagnes étaient dans ma liste de plats que je savais faire. Rien d’extraordinaire mais au moins j'étais quasi sûr de ne pas me louper. J'espérai simplement qu'Erwan les trouve à son goût et ne soit donc pas trop difficile!

On s'installa donc dans ma cuisine pour manger et l'ambiance était plutôt pesante. Pesante, dans le sens où ce n'était pas très naturel pour nous. Où plutôt, ça ne l'était plus. Il me demanda si ça allait et je lui parlai de mon boulot qui était bien trop calme à mon goût. En fait je m'ennuyait totalement. Le boulot de garde du corps était très éloigné des clichés qu'on pouvait se faire. On ne sauvait pas des vies tous les jours! En réalité, on a plus de chance de se faire attaquer par un chien enragé que de se faire tirer dessus en voulant protéger notre client! Au final, je m'imposais un programme sportif dans l'éventualité qu'on agresse mon client... C'était beaucoup de travail, pour pas grand chose! C'est ce que j'avais plus ou moins expliqué à mon frère. Je lui retournai la question, et pas seulement par politesse. Je voulais vraiment savoir comment il allait! Sa situation n'était pas évidente. Il avait abandonné son rêve et venait de se séparer d'Orel. Autant dire que sa situation était loin d'être désirée. Je ne savais pas vraiment comment aborder le sujet. Peut-être n'avait-il pas envie de m'en parler... Pourtant il le fit... du moins vaguement, mais c'était déjà un bon début, non? "Et ça te plait au moins ce boulot?" Bon c'était l'hôpital qui se foutait de la charité puisque moi-même, j'occupais un poste qui ne me plaisait pas vraiment. "Et tu vis où? Parce que si tu n'as plus ton appartement, je peux t'héberger! Bon j'ai qu'une chambre ouais, mais le canapé fait lit." expliquais-je. Ca m'arrivait de passer devant son appartement que j'avais occupé un temps mais les volets étaient toujours fermés. Voilà pourquoi je me demandais s'il ne l'avait pas vendu!

Il était certes fatigué par son boulot, mais il n'y avait clairement pas que ça qui le travaillait: Orel. Leur rupture était encore fraîche et puis c'était Orel. Ce n'était pas un amour de vacance, où une connerie du genre, non. C'était son premier amour et peut-être le seul jusqu'à présent! Pour le coup, je ne savais pas vraiment quoi dire. Ce n'était pas un sujet pour lequel j'étais vraiment à l'aise! Puis autant dire que je n'étais pas le mieux placé pour donner des conseils! "Il te faut du temps c'est tout." Okay... eje n'avais rien trouvé de mieux que cette réponse totalement stupide. "Je veux dire... c'est récent tout ça et ... c'est pas comme si vous vous étiez quitté car il n'y avait plus d'amour entre vous. Il va te falloir du temps pour passer à autre chose, c'est normal." Okay, pas beaucoup mieux en réalité!

Parler boulot semblait être un bon début pour renouer le contact. Personnellement, j'avais dû mal à m'épanouir totalement dans mon rôle de garde du corps mais j'espérais qu'Erwan, lui, ne soit pas dans le même cas que moi. Au fond de moi, j'en doutais quand même un peu. Il était passé de future star à... employé de boite de nuit... Il y avait mieux à espérer, non? Il devait probablement aspirer à autre chose! Quoi qu'il en soit, son boulot le fatiguait énormément. Je me demandais d'ailleurs s'il avait toujours son appartement. Je ne le voyais que très rarement ouvert, alors je me posais dès questions. S'il avait dès soucis de ce côté là, il pouvait venir ici. Ce n'était pas bien grand et très luxueux mais au moins il ne serait pas à la rue. Il me rassura sur ce point là, me précisant qu'il avait toujours son appartement mais qu'il avait une petite chambre sur son lieu de travail. Qui avait accès à ce genre de chose? Bon okay, moi j'avais eu une chambre chez mes patrons, mais c'était différent. J'étais là-bas pour les protéger jour et nuit. Ce n'était pas vraiment le cas d'Erwan. "Un chambre? genre ton boss a une chambre au dessus de sa boite? Qui à ce genre de chose?" si ce n'est les établissement peu fréquentables, faillis-je rajouter. Je me ravisai au dernier moment, de peur de le blesser. Il n'avait pas un passé facile et je ne voulais pas qu'il ressasse ses mauvais souvenirs par ma faute! Néanmoins cette petite information n'était pas passée dans l'oreille d'un sourd. Elle me trottait dans l'esprit et je me posais beaucoup de questions. Je ne pouvais pas et je ne voulais pas croire que mon frère avait recommencé à se prostituer mais ... qui a une chambre chez son patron?...

Ce n'était pas le moment d'aborder le sujet. Premièrement, il y avait Enzo et ce n'était pas vraiment un sujet adapté à son âge. Deuxièmement, je ne voulais pas le braquer alors qu'il venait à peine d'arriver. J'étais probablement en train de me faire des films... Il valait mieux que je me taise... C'est ainsi qu'arriva le sujet d'Orel dans la conversation... Orel ou la raison du coeur brisé de mon frère. Cela me faisait mal au coeur de le voir ainsi! Leur histoire avait commencé alors qu'ils n'étaient qu'adolescents. Je me rappelle encore du jour ou j'avais débarqué dans le salon. Orel et mon frère n'étaient pourtant qu'en train de parler mais... ça m'avait semblait une évidence. Le regard qu'avait mon frère pour Orel n'était pas un regard qu'on donne à un simple ami. Mes parents n'en avaient rien su...Du moins au début... Et ça avait été mieux ainsi... Orel n'avait pas été que l'ami d'Erwan. Il avait été le mien aussi. Cependant, je lui en avais beaucoup voulu de n'avoir rien fait au départ de mon frère... Certes, il n'avait pas été là au moment des faits, mais je l'avais appelé pour l'informer et il ne s'était pas bougé! Je lui en voulait toujours d'ailleurs et probablement encore plus depuis leur séparation...Je tentai tant bien que mal de réconforter mon frère, mais je n'étais clairement pas bon à ce sujet. Ma dernière histoire remontait à 4 ans et ... on ne peut pas dire qu'elle s'était terminé très bien. "Je ...c'était probablement pas évident pour lui mais... il te connaissait toi... Pas le toi qui s'est fait embarqué dans de sombres histoires mais le vrai toi. Celui qui a un coeur énorme et qui ferait tout pour les gens qu'il aime... Vous vous aimiez... le problème c'est que quand on aime trop quelqu'un, on souffre forcément... C'était peut-être pas le bon moment, tout simplement." dis-je. Un amour d'adolescents, ça ne dure jamais. Pendant des années mon frère s'est raccroché à ça, à cet espoir mais... peut-être que son histoire avec Orel était déjà terminé depuis le jour où il avait quitté la maison. "Je... j'en ai toujours voulu à Orel tu sais... quand les parents t'ont foutu dehors, il n'a pas levé le petit doigt, rien, alors que j'ai dû l'appeler une bonne vingtaine de fois. Je lui demandais juste de passer pour expliquer la situation aux parents. Je lui avais même proposé de lui payer le billet d'avion! Mais rien... Comme si tu n'avais jamais existé... Pendant longtemps je lui en ai plus voulu à lui qu'au parent... Puis quand ça été à mon tour de les décevoir, j'ai réalisé qu'au final, je n'avais rien fait pour toi non plus... Rien... je m'en veux tu sais... Je me dis que si j'avais tenté de parler aux parents, ça aurait pu etre différent. J'en ai pas eu le courage à cette époque et... je suis désolé..." Au final, nous étions un peu tous responsable de ce qu'avait pu vivre Erwan. Mes parents étaient des monstres, mais ils n'étaient pas les seuls. Nous l'étions tous, y compris moi!