elea & bellamy

the best you ever had is just a memory

J'avais toujours eu un certain succès auprès des filles. Je n'ai jamais trop su pourquoi, d'ailleurs. J'étais sûrement mignon mais j'étais loin d'être un apollon. Je m'étais toujours trouvé trop maigre, de route façon. Enfin, cela n'empêchait pas les filles de m'apprécier. Mon côté "bad boy" et mon assurance devaient être des atouts. En tout cas, j'avais eu des tas et des tas de copines, sans compter les relations plus ou moins officielles, et celles qui n'étaient que sexuelles. Je ne pouvais même pas me souvenir de toutes. La seule personne qui m'avait profondément et durablement marqué, c'était Andrea. Mais il était hors-compétition. Je l'avais tant aimé. Il n'y avait que lui, en fait. Toutes ces filles que je me tapais ne lui arrivaient pas à l'orteil. Néanmoins, parmi cette foule immense de copines insignifiantes, certaines avaient eu plus d'importances que d'autres. Comme Elea, par exemple.

Elea et moi nous étions rencontrés alors que j'avais quatorze ans. À cette époque, j'étais encore doux et innocent. Je n'étais entré dans les affaires de drogue que l'année suivante. Cet été-là, comme tous les ans, ma famille et moi étions parti un mois en Angleterre, pour voir de la famille. J'avais toujours détesté aller là-bas, il faisait toujours froid et mauvais. Très différent du Mexique, quoi. Et puis, j'avais rencontré Elea, et au final, j'avais passé de très bonnes vacances. On était sortis ensemble ; je n'avais pas été amoureux, mais j'avais envie de faire comme les autres. C'était l'une de mes premières copines, voire la première. Je ne savais plus trop. Ça n'avait duré que l'été, et nous ne nous étions pas revus ni reparlés depuis. Mais je l'avais reconnu au premier coup d'oeil. Un jour, je marchais dans la rue, et je l'avais vu à travers la vitrine du Starbucks. Aucun doute sur son identité. Le lendemain, je me précipitai, à la même, dans la boutique. Je n'avais en réalité jamais mis les pieds dans un Starbucks et je ne comprenais absolument même tout ce mythe qui s'était crée autour de la chaîne. Et puis pourquoi les gens mettent-ils 5$ dans du café ? Ça me dépassait. Je rentrais dans le magasin, qui était quasiment vide, et me dirigeai directement vers la caisse. Elea la tenait. Je m'appuyais sur le comptoir et lui souriait. « Si je m'étais douté que tu deviendrais aussi belle, je ne t'aurais jamais lâché » la complimentai-je. J'essayais même pas de la draguer, en fait, parce qu'elle ne m'intéressait pas plus que ça et que j'avais déjà un coup de coeur pour une autre fille, mais j'avais envie de me faire remarquer. « Qu'est-ce que tu fous à Miami, ma belle ? » Je me demandais si elle m'avait reconnu. J'avais beaucoup changé, ces six dernières années !

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Elea avait sacrément changé. Enfin, je l'avais tout de suite reconnue, mais elle avait tellement grandi ! Nous ne nous étions jamais revus depuis cet été que nous avions passé ensemble, et je devais bien admettre qu'elle m'était complètement sortie de la tête. C'était devenue une vraie petite femme maintenant, alors que je gardais en moi l'image de la gamine de treize ans au teint mat et aux longs cheveux d'ébènes. Elle était vraiment magnifique. Fine, avec des traits fins. Je remarquai qu'elle ressemblait quelque peu à Wayne. Drôle de coïncidence. Mais ils avaient le même teint, et un peu le même regard... Enfin, de toute manière, Elea ne m'intéressait pas. Pour le moment, la seule qui m'intéressait, c'était Hannah. Mais j'avais envie de faire le kéké, parce que c'était dans mon caractère ; et puis Elea non plus ne m'avait pas vu depuis longtemps. J'avais du tellement changé ! Quand nous sommes sortis ensemble, je ne traînais pas encore dans le milieu des drogues.

"Bellamy ?" me demanda-t-elle doucement. Bon, au moins, malgré les années, elle me reconnaissait. Cela faisait tellement longtemps ! Je ne pus m'empêcher de penser à toutes les choses qui avaient changées depuis notre rencontre. Une liste presque interminable, en réalité. J'étais complètement différent. « Le seul et l'unique » répondis-je en souriant. Je n'étais pas si loin de la vérité ; de toute ma vie, je n'avais jamais rencontré un autre portant le même prénom que moi. Je lui demandais ensuite ce qu'elle faisait à Miami. Quelle raison aurait pu la pousser à quitter l'Angleterre ? Après tout, si mes souvenirs étaient exacts, elle avait un peu une vie rêvée là bas. Des parents aimants, aisés... Elle menait une vie agréable, pourquoi l'aurait-elle donc quitté ? Elea devait sûrement avoir une bonne raison, mais bon, peut-être n'avait-elle pas envie de se confier à moi, ce que je pouvais comprendre. "Oh et bien c'est compliqué, quelques histoires familiale.. Hurm.. Et toi que fais tu ici ?" Des histoires familiales ? Ce mot me mit la puce à l'oreille. Elea... Son nom de famille, c'était Everden, le même que Wayne... Et cet air de ressemblance... Je me faisais sûrement des idées, ce ne devait être qu'une coïncidence. Enfin, cela faisait beaucoup de coïncidences. « On a déménagé ici, avec ma famille » répondis-je simplement. Je n'allais quand même pas lui balancer maintenant les raisons de ce déménagement. En effet, un peu trop de gens me voulaient mort au Mexique, à commencer par les membres des gangs ennemis, mais aussi la famille d'Andrea et celle d'Adela... Rester là-bas aurait été du suicide. « Tiens, d'ailleurs, en parlant de famille...» Je sortis mon téléphone (mon iPhone, pas mon vieux Nokia qui me servait pour le deal) et fouillai rapidement dans mes photos. Je montrai à Elea une photo de Charlotte, ma fille. Cette photo avait été prise à la maternité, à sa naissance, par une infirmière ; j'étais allongé sur le lit, à moitié assoupi, et Charlotte dormait sur moi. J'adorais c'te photo, presque autant que j'adorais c'te gosse. J'aurais jamais cru que j'avais l'instinct paternel. (photo ici) « J'suis papa. C'est un truc de fou, non ? T'aurais cru que j'aurais un gosse, toi ? Bon, j't'avoue, c'était un accident. Mais plutôt un heureux accident, en fait » fis-je en rigolant bruyamment. La discrétion et moi, ça faisait 30. « Elle est drôlement mignonne » continuai-je à voix basse, plus pour moi que pour elle. Charlotte me manquait terriblement.

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Je devais admettre que ça me faisait un choc de la voir ici. Je venais de retrouver Kyle, et maintenant, Elea ! Je repensais à l'époque où nous nous étions connus. Nous étions alors des adolescents, et notre relation s'était limitée à des bisous et quelques papouilles dirons-nous. Ce n'était qu'un truc de gosse, mais elle m'avait marqué, mine de rien. La preuve, je me souvenais encore d'elle, alors que j'avais une mémoire très sélective. Je ne me rappelais pas de la moitié de mes exs, et je me souvenais parfaitement d'Elea. C'était surement le seule relation chaste que j'avais jamais eu. Tout cela me rendait quelque peu nostalgique. Un an après notre rencontre, j'avais sombré dans les histoires de drogue. J'étais devenu passeur à seulement quinze ans. Jeune, n'est-ce pas ? C'était exactement ce qu'il me fallait. Avec mon visage enfantin et angélique, je passais beaucoup mieux la frontière américaine que mes collègues baraqués. À partir de ma quinzième année de vie, ma vie était un gros bordel. Tijuana m'avait pris, à cette époque, Tijuana et son âme mécréante, Tijuana et ses vices. Toute cette noirceur m'avait attrapé et ne me lâchait plus, désormais. Elea m'avait connu du temps de mon innocence et elle serait sûrement choquée si elle apprenait ce que j'étais devenu depuis. Une sale bête, un voyou. Je ne me rappelais même plus comment j'étais, à mes quatorze ans. Cela me semblait si lointain ! J'imaginais que je devais être l'esquisse de ce que j'étais désormais. Un gosse peut-être un peu bagarreur, un peu vif. Tout cela s'était bien amplifié depuis. J'étais un grand hyperactif, un cogneur, une teigne, un branleur. C'était généralement les termes que l'on employait pour me qualifier, mais au fond de moi, je savais que je ne me résumais pas à ces mots peu glorieux. J'étais peut-être une mauvaise personne, mais j'étais capable de bien agir, par instants.

Par exemple, je n'aurais jamais fait de mal à Elea. Je n'aurais jamais tenté de l'utiliser ou de la séduire pour ensuite la jeter. Elle faisait partie d'un passé précieux mais révolu, l'époque où ma vie tenait encore debout. J'étais toujours comme cela, trop protecteur. Je venais à peine de la revoir, mais c'était un peu comme si nous ne nous étions jamais quitté. Voilà que je lui montrais une photo de Charlotte, et j'ignorais complètement pourquoi je faisais cela. Quel intérêt pour elle ? Mais j'avais eu envie, sur le moment, de le faire. J'aimais beaucoup ma fille, et peut-être que je voulais lui montrer cet aspect de ma personnalité. Oui, j'avais envie qu'Elea me voit comme quelqu'un de bien. Elle m'avait connu ainsi et je voulais lui montrer qu'il y avait toujours une bonne partie chez moi. Charlotte était la meilleure part de moi-même. C'était l'être pour qui je donnerais tout, celle pour qui je me battais aujourd'hui. Celle qui me donnait envie de devenir un meilleur homme, d'arrêter les conneries et de trouver une situation. Mais elle me manquait tellement. Je n'aurais jamais cru qu'être père me plairait. Quand Adela m'avait annoncé être enceinte, j'avais littéralement pété un plomb. Mais j'avais assumé mes actes et je ne regrettais absolument pas. "Oh vous êtes vraiment adorable, félicitation" me répondit Elea avec un sourire. Elle avait l'air d'être restée authentique ; son sourire ne semblait pas avoir changé après toutes ces années. C'était une fille bien, j'en étais intimement persuadé. « Merci, enfin, elle l'est plus que moi ». J'étais complètement gaga de Charlotte. Et j'aurais fait n'importe quoi pour qu'elle et sa mère puissent être ici, à mes côtés. "Et tu est toujours avec la maman ?" demanda-t-elle, plus bas. Je n'éprouvais aucune gêne à parler de cette partie de ma vie, puisque c'était sûrement l'une dont j'étais le plus fier. C'était d'ailleurs l'une des seules choses dont je parlais facilement. J'étais un garçon très fermé sur le reste, comme me le reprochait souvent Hannah. « À vrai dire, j'ai jamais été avec… C'était pas quelque chose de sérieux, entre nous ». Adela était mon plan cul, mais je n'avais pas envie de dire ça comme ça devant Elea. Je la voyais toujours comme la petite ado qu'elle était. « Au fait, tu ne connais pas un garçon qui s'appelle Wayne ? » dis-je d'un ton faussement innocent. Quand elle parlait, j'avais l'impression d'entendre Wayne. Toutes ces ressemblances m'intriguaient.