Assis sur mon lit, mes yeux étaient posés sur Charlotte, qui jouait sur le tapis. Elle ne me prêtait aucune attention. Perdu dans mes pensées, je la regardais sans réellement la voir. J'étais infiniment fatigué. Ces dernières semaines n'avaient pas été de tout repos. Il y avait eu le cyclone, qui avait frappé Miami et qui ne m'avait pas épargné ; puis, il avait fallu que je fasse un aller-retour au Mexique pour aller chercher Charlotte, et que je me débrouille avec toute la paperasse administre bien propre aux États-Unis ; et enfin, ma période d'examens intensifs à l'université avait débuté. Et bien évidemment, j'avais dû jongler entre les études et Charlotte, qui était perturbée par ce changement brutal d'univers. J'étais même pas vraiment sûr qu'elle me reconnaissait. Après tout, elle avait vécu toute sa vie avec sa mère, avant que je décide (sous l'impulsion d'Hannah, en plus), de devenir un vrai père pour elle. En un sens, j'étais persuadé qu'Adela avait été soulagée quand je lui avais demandé de garder Charlotte pendant un moment. J'avais beau ne pas l'apprécier plus que cela, je me sentais assez mal à l'idée que je l'avais laissé avec la petite pendant si longtemps. Enfin... Quand j'avais appris sa grossesse, il y avait maintenant deux ans, j'avais cru que mon monde s'effondrait. J'étais encore un gamin moi-même, et même pas capable de se tenir en vie ; comment est-ce que j'allais m'occuper d'un gosse ? Et voilà, je me retrouvais ici, à Miami, si loin de mon Mexique natal, avec ma fille en train de jouer sur le sol de la chambre.

Je n'avais pas une seconde de repos. Charlotte, perturbée par le changement, pleurait la nuit et me posait des questions, avec les quelques mots de vocabulaire qu'elle connaissait. Elle ne marmottait que l'espagnol, et elle ne comprenait pas du tout quand je tentais de lui apprendre quelque chose en anglais. J'avais par miracle réussi à lui trouver une nourrice pour la garder pendant la journée. En rentrant des cours, je passais la chercher puis je rentrais ; là, je devais jongler entre mon travail et l'attention qu'elle me réclamait. Je devais l'admettre, j'étais dépassé. Je n'avais pas conscience qu'un enfant demandait autant d'investissement. De plus, ma situation financière était assez catastrophique. J'avais eu moins de temps pour gérer mes "affaires", et les rentrées d'argent se faisait désormais rares pour moi. Ces temps-ci, j'avais tout simplement l'impression que tout me pesait sur les épaules. J'avais le moral assez bas, en réalité. Conséquence, ma consommation de drogues avaient augmenté alors que je m'étais promis d'arrêter dès l'arrivée de Charlotte. J'en avais vraiment honte. Quelle genre d'image allais-je lui donner ? Un père dépassé, qui se droguait pour oublier ? Qui dealait pour gagner sa vie ? Cette putain de vie était impitoyable. Je n'avais que vingt ans et l'impression d'avoir le monde sur mes épaules. Je soupirais. C'était bien beau de se lamenter sur son sort, mais ce n'était pas ça qui allait me nourrir. Les placards de l'appartement était pratiquement vides ; d'ordinaire, c'était Cassidy qui s'occupait de faire les courses, mais elle était absente pour la semaine. Après lui avoir mis son manteau, je lui pris la main et nous descendîmes acheter quelques bricoles à la supérette.

Fatiguée, elle s'était endormie dans mes bras sur le chemin du retour. Elle pesait son poids, et avec les sacs dans les mains, j'avais du mal à attraper mes clés. Finalement, à ma grande surprise, la porte de l'appartement était ouverte. Bizarre. En entrant, je tombais nez à nez avec Hannah. Merde. Cela faisait un mois et demi que nous ne nous étions pas vus et j'aurais aimé que nos retrouvailles se fassent dans de meilleures conditions. Elle avait une expression assez froide sur le visage, qui ne laissait rien présager de bon. " Elle est très belle " fit Hannah à voix basse. Malgré ses précautions, Charlotte fut réveillée et regarda Hannah d'un air intrigué. « Ella dice que ères hermosa » fis-je à Charlotte. Comme elle ne comprenait pas l'anglais, je lui traduisais presque tout. « Dices holà ? » continuai-je. Elle sourit et déclara : « Holaaaa! » d'une voix enjouée. Sa réaction me fit sourire. « Je vais la porter dans ma chambre, je reviens ». Une fois cela fait, je rejoignis Hannah dans le salon. J'étais assez gêné, bizarrement, surtout quand je remarquai qu'elle avait rangé l'appartement. « Oh, euh, merci d'avoir rangé... Enfin tu n'étais pas obligée ». Je n'osais ni l'embrasser ni la prendre dans mes bras, c'était étrange. « Comment tu vas ? Tu veux que je te serve quelque chose ? » commençai-je. Allant chercher deux verres dans la cuisine attenant au salon, je continuai de lui parler. « Je suis vraiment désolé, j'ai été plus qu'occupé ces derniers temps... ».

C O D E © W H A T S E R N A M E .

Qu'est-ce que j'avais fait ? Qu'est-ce que j'avais fait pour que les choses soient ainsi entre Hannah et moi ? J'avais l'impression d'avoir dormi pendant ces un mois et demi où nous ne nous étions pas vus. J'avais été tellement occupé que j'avais tout oublié. Je ne pensais qu'à mes cours et à Charlotte. Mais qu'est-ce qui m'avait pris ? J'avais pris notre relation comme un acquis, j'avais cru comme un idiot que la faire passer en second plan pendant quelques temps ne changerait rien... Je m'étais lourdement trompé. Je me sentais sacrément con, là maintenant. Pourquoi je faisais toujours tout de travers, sérieusement ? C'était comme si quelque chose en moi était incapable de faire les choses bien, il fallait que je rate tout. J'en venais parfois à croire qu'être en couple n'était pas fait pour moi. Et pourtant, Hannah, je l'aimais. Je l'aimais terriblement, comme un fou. J'aurais tout fait pour elle, je crois. Je l'aimais tellement que j'avais l'impression d'étouffer sous cet amour. Le seul soucis, c'était que je ne savais pas comment lui montrer. J'étais maladroit, intimidé par la force même de cet amour... J'avais jamais su aimer correctement, voilà tout. Même avec Andrea, notre relation était bancale. Andrea m'aimait de façon constante, régulière, tandis que mon amour pour lui était à la fois fulgurant et fugace, passionné et dangereux. Avec Hannah, c'était différent. Je n'osais rien faire par peur de faire un faux pas, et finalement, c'était mon inaction qui était en train de causer notre perte.

Je lui demandai maladroitement si elle voulait quelque chose à boire, et esquissai des semblants d'excuses. J'étais vraiment pathétique, je le savais. Je ne savais pas quoi faire, de peur d'empirer les choses. Qu'est-ce qu'elle voulait que je fasse, sérieusement ? Que je me mette à lui faire un grand discours lyrique et que je tombe à genoux, en pleurant ? Elle savait bien que ce n'était pas mon genre. J'étais fier, un peu trop sans doute. " Tu me demandes vraiment comment je vais ? Un mois et demi que tu n'as pas vu ta petite copine et c'est tout ce que tu es prêt à me dire. Désolé ? Non franchement tu plaisantes ? tu oses me dire cela comme si c'était rien " lâcha-t-elle, visiblement très énervée. J'avais la terrible impression que la même scène se répétait en boucle et en boucle. C'était toujours pareil, toujours les mêmes disputes qui se répétaient. Tout allait bien et puis soudainement, pouf, rien n'allait plus. C'était comme ça avec nous, mais cette dispute-ci avait un goût particulièrement amer. « Eh, pour ma défense, quand j'ai essayé de te contacter t'étais même pas là, t'étais je ne sais où avec ce type, là, que j'connais même pas » lançai-je doucement. Mon ton laissait paraître une rage amère. Je n'étais pas particulièrement jaloux mais je n'aimais pas la savoir traîner avec un autre. Je n'aimais pas quand elle me lançait sa colère comme ça, d'un coup. Elle aurait dû savoir, depuis le temps, que c'était le meilleur moyen pour que je me braque.

" Si je n'étais pas venue te voir j'ai bien l'impression que tu serais par toi venu tu sais comme si c'était normal. Tu m'as complètement laissé tomber tu avais promis d’être là pour moi de me soutenir et après tout ce qu'on a traversé j'ai voulu le croire je te pardonnais après te mensonge j'ai tout fait pour être patiente et j'arrive chez toi et je trouve encore cela " cracha-t-elle en me lançant un petit sachet que j'aurais reconnu entre mille. Eh merde, voilà que l'on en revenait encore et toujours au même sujet. Je soupirai, et m'éloignai un peu d'elle par dépit. J'attrapai une cigarette dans mes lèvres et la fumai. J'en avais besoin, sinon je sentais que j'allais péter un câble. " Charlotte aurais pu tomber sur cela elle aurait pu le mettre dans sa bouche je croyais tu avait arrêter encore un mensonge ". Je lui lançai un regard noir. Je ne savais pas pourquoi je me mettais dans cet état. À vrai dire, le fait qu'elle se soit trouvé avec le frère de Nessa (je ne connaissais cette Nessa que de nom, d'ailleurs, je ne savais même pas qui elle était vraiment) au moment où j'avais voulu la contacter m'avait fortement contrarié. « Je sais très bien qu'elles sont les promesses que j'ai faites et ça me fait chier aussi de ne pas les avoir tenues, figure toi ! Tu crois que j'ai pas honte de continuer ça alors que Charlotte est ici ? Tu ne m'aides pas en faisant ça, Hannah ! Ce combat c'est à moi de le mener et tes sermons n'y feront rien. Je suis comme je suis, alors oui peut-être que je suis pas le prince charmant mais c'est comme ça ! ». Comme d'habitude quand j'étais énervé, mon accent hispanique refaisait surface. Je m'appuyai sur le plan de travail et passai mes mains dans mes cheveux. Je regrettai déjà d'avoir dit tout cela. Pourquoi étais-je aussi impulsif ? Je dirais toujours tout et n'importe quoi sous l'effet de la colère. Je me braquais trop vite et je ne savais pas prendre de recul, ça me tuait. Toujours en train de réagir comme un gamin.

Je trouvais soudainement qu'Hannah avait l'air fatiguée, voire carrément à bout. Merde. Pourquoi je lui faisais toujours du mal, hein ? Cette question me hantait régulièrement. " Je suis fatigué de tout cela j'ai plus la force Bellamy je pensais qu'on formerait une famille tous les 4 mais c'était encore qu'une illusion. Je crois que je te suffit plus .. " Ces paroles me firent l'effet d'un électrochoc. Moi aussi, je m'imaginais fonder une famille, tous les quatre, avec Hannah, moi, Charlotte et son petit. Je me raccrochais à cette idée et elle était littéralement ma motivation pour tout. L'entendre dire que ce n'était qu'une illusion brisait tous mes espoirs, tout ce que j'avais espéré pour notre avenir. C'était pour cela que j'avais travaillé plus dur encore, pour pouvoir à l'avenir avoir un vrai travail et non plus être le petit narcotrafiquant de service. Je ne voulais d'une vie entière dans le cartel de drogue —si l'on imaginait bien sûr que je puisse en sortir un jour. « Hannah... C'est pas une illusion. J'suis désolé de m'emporter comme ça, mais comprend moi... J'essaie de faire des efforts, vraiment, j'essaie de devenir quelqu'un de bien, pour toi, pour ton petit et pour Charlotte. C'est pas facile tous les jours, c'est tout » Je m'étais un peu calmé. « T'es la seule dans ma vie, Hannah ».

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Je savais parfaitement que, dans cette histoire, j'étais en tort. Comme toujours, ceci étant dit. Mais ma fierté, et peut-être l'espèce de jalousie irrationnelle que je ressentais pour ce type avec qui elle trainaît, m'empêchait d'admettre complètement mes erreurs. Je n'étais pas d'un naturel jaloux, j'avais une confiance presque aveugle en elle. Bien sûr, je n'aimais pas que des hommes la regardent de façon insistante dans la rue, mais qui appréciait cela après tout ? J'avais tellement fou d'elle que je lui portais une confiance totale. Néanmoins, apprendre qu'elle était en dehors de la ville avec ce dénommé Enaël ne m'avait pas vraiment plu. Certes, elle n'avait pas à être à ma botte, à ma disposition dès que je le désirais, mais cela m'avait un peu chiffonné. C'était surtout cette dispute qui m'agaçait prodigieusement. C'était toujours, toujours, la même chose. Nos disputes tournaient généralement autour de moi, car bizarrement, j'étais le seul à commettre des erreurs dans notre couple. Je savais que je faisais des erreurs et que ses reproches étaient justifiés, mais j'avais parfois l'impression qu'Hannah était trop exigeante envers moi. Elle me demandait beaucoup. Pourtant, elle me connaissait ; elle savait que j'avais besoin d'avoir une certaine indépendance et que je n'étais pas du genre à montrer facilement mes sentiments. En général, j'agissais sous le coup de la colère et je me refusais aux déclarations lyriques. J'avais une sorte de coeur de pierre et j'avais la conviction qu'Hannah s'en rendait de plus en plus compte.

Hannah m'avait balancé au nez le sachet de drogue qu'elle avait trouvé en rangeant mon salon. Génial. Nous en revenions toujours aux mêmes sujets. Bon, je pouvais comprendre sa colère. Je lui avais promis que j'arrêterais, surtout depuis ma rechute cet été et l'arrivée de Charlotte. Et pourtant, même si j'étais encore une fois en tort, je ne pouvais pas contenir ma colère. Une colère injustifiée et qui se basait sur la honte que j'avais, la colère que j'éprouvais contre moi-même. Je n'arrivais pas à stopper, à me réguler, à sortir de ces conneries et ça m'énervait plus que tout. Et le fait qu'Hannah pointe du doigt ce que je n'arrivais pas à faire m'énervait particulièrement. En fait, c'était pas vraiment contre elle que j'étais agacé, mais contre moi. C'était juste que... Bah, je ne sais pas, mais tout m'énervait là. Rien n'allait et je n'arrivais plus à recoller les morceaux. is pas cela et je me rappelais sa promesse d’arrêter, un mensonge. " Non tu te trompes ce n'est pas ton combat tu crois que je vais accepter d’élever mon fils comme cela ? au milieu de la drogue et des plans foireux que tu fais. Commence à grandir bon Dieu tu as une petite fille de deux ans dans la chambre à coter qui compte sur toi alors oui tu vas me dire que tu à dois la nourrir mais tu crois que c'est la meilleure solution et surtout viens pas me dire que je comprends par car j'ai de l'argent car je te promets que je risque de faire un carnage " Et pourtant c'était exactement ce que j'avais envie de lui dire. Qu'est-ce qu'elle en savait, elle, de ce que cela faisait de ne pas avoir d'argent ? « J'hallucine ! Tu crois que je fais ça pour le plaisir ? Tu crois HONNÊTEMENT que je suis fier de faire ce que je fais ? Non mais je rêve ! Non, ça ne me fait pas plaisir de nourrir ma fille avec de l'argent sale, ça me fait pas plaisir de mener cette vie, ça me fait pas plaisir de voir ma mère se démener pour au final ne pas arriver à payer ses factures, rien ne me fait plaisir dans tout cela, et pourtant je le fais parce que c'est comme ça. On n'est pas tous nés avec la cuillère en argent dans la bouche et dans ces cas-là on se démène comme on peut. Si je fais des études et que je me donne à fond dedans c'est pour justement arrêter de mener cette vie là, et je pensais que tu me soutiendrais sur ce coup-là, que tu comprendrais ». J'avais vidé tout ce que j'avais sur le coeur.

J'avais à peine fini ma phrase que mon téléphone vibra. J'avais décidé de m'abonner au compte de Nightmare, pas parce que j'aimais particulièrement les ragots, mais parce qu'il révélait parfois des choses que les gens ne disaient pas. J'y avais par exemple appris la grossesse d'Hannah... et j'étais loin de me douter que j'apprendrais encore quelque chose de terrible. Je lus rapidement le message et, immédiatement, une colère sourde monta en moi. Je n'arrivais même pas à parler. En fait, non, je ne voulais même pas ouvrir la bouche car sinon j'allais commencer à hurler sans pouvoir m'arrêter. Je n'avais aucun mot à mettre sur l'intensité de ma rage. Je lançai mon poing contre le mur, pour extérioriser un peu. « C'est comme ça, Hannah ? Tu viens me faire des reproches alors que tu fricotes avec je sais pas quel type ???!!! Et en plus, l'effrontée, tu m'racontes que tu traînes avec lui ?? » hurlai-je. J'étais hors de moi. Cette fois ci, ma colère ne se puisait pas dans la honte, mais dans ce sentiment intense de trahison que je ressentais. Hannah m'avait terriblement blessé, mais pour l'instant, cela se traduisait par une hargne purement viscérale. Terrifiée par mon attitude, elle se contentait de rester sans bouger, en bredouillant des excuses que je n'entendais pas. Elle n'imaginait pas à quel point elle me faisait mal. Tout ce temps que j'avais mis pour lui faire confiance, tout ce que j'avais investi dans cette relation, les efforts que j'avais fait pour changer ma façon d'être... Tout ça pour qu'au final elle tombe dans les bras d'un autre. Je nageais en plein rêve. « Bravo, Hannah, bravo! J'te félicite ! Alors ça pour le coup j't'avoue que je ne m'y attendais pas ! » continuai-je de crier. « Tu vas m'dire quoi maintenant, hein ? Tu vas trouver des excuses, me dire que c'est de ma faute et bla bla bla ? Putain mais tu t'es bien foutu de ma gueule en fait ! Toutes tes belles promesses, là, de famille et tout l'bordel, c'était que du vent en fait ! Bah putain bravo, j'y ai vu que du feu figure toi !!! » J'étais littéralement fou de rage. Tous mes espoirs venaient de partir en fumée. Je continuai d'envoyer mon poing contre le mur ; mes muscles tremblaient et ma main était en sang. J'avais conscience que je ne me calmerais pas de sitôt. Je détestais la sensation de trahison. « Tu voulais voir qui j'étais vraiment, c'est ça ?? Et bah là crois moi que tu vas en voir, du grand Bellamy » fis-je d'un ton mauvais. « Maintenant, tu sors de chez moi !! Pars, dégage!! » lâchai-je finalement, la voix tremblante. Voir son visage me faisait trop mal.

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