Depuis mon agression, aucun matin n'était le même. J'avais peur toute la nuit sans relâche, je me réveillais en sueur, serrant mon doudou contre moi. Je pleurais, je criais même parfois seule dans mon studio. Je ne sortais plus, du moins au minimum. Je ne pouvais plus supporter de faire un shooting photo, même si mes maquilleurs, qui me connaissent bien, me proposaient de faire disparaître ça en trois coups de pinceau. Je ne supportais pas les marques que j'avais sur le visage, sur le corps et surtout sur le cou. J'avais kidnappé un châle que ma mère m'avait laissé d'Europe quand j'y étais allé avec June que je ne lâchais pas d'un pouce, juste pour cacher ce bleu/ou violet énorme, que pourtant William a essayé d'estomper le plus possible. J'avais des coups sur le corps et pour ça c'était pareil, je ne mettais plus de robe mais des jean slim ou autre depuis ce soir là, quand je sortais, ce qui restait rare. J'avais du mal à croiser un miroir, et là je me maquillais pour sûr, essayant de faire passer les quelques bleus que j'avais sur ce dernier. Aujourd'hui, je me forçais à sortir. Un groupe de soutien se réunissait au parc (histoire de pas faire trop "médical" et "psychiatrique" je suppose) pour les gens qui avaient besoin de soutien au milieu d'autres personnes souffrant de traumatisme face à un souvenir. Je ne parlerais sûrement pas - de toute façon j'avais trop mal quand je parlais comme ça à cause de ma gorge - mais quand même. Je me disais que ça me ferait du bien de me sentir un peu dans un "groupe" et soutenue. C'était peut-être une très mauvaise idée, d'ailleurs. Je me faisais discrète, même pas munie de ma légendaire paire d'escarpins (ça me remontait le souvenir de devoir courir avec et les enlever) mais d'une paire de mocassins féminins, d'un pantalon, d'un haut et de mon sac à main, cheveux détaché mais maquillée évidemment. Je m'asseyais sans rien dire le long de la réunion, jusqu'à ce que l'organisatrice propose qu'on se parle entre nous. Je n'étais pas très à l'aise, regardant autour de moi, m'enfonçant dans ma chaise, portant ma main doucement à mon cou.

La jeune femme à côté de moi parlait de prise de drogue. Je fronçais les sourcils de manière peinée. Comment pouvait-on en arriver là? J'avais déjà essayé, c'est vrai, mais pour m'amuser pas pour me dire tiens j'irais mieux après ça. J'avais toujours eu peur de finir ainsi, car j'aurais pu, et de nombreuses fois. Je n'ai pas une vie toute rose pleine de paillettes non plus, j'ai mes moments de faiblesses et de doutes mais, j'ai toujours cherché à rester forte quoiqu'il arrive et de m'en sortir au plus possible seule. Mais là aujourd'hui, je donnais mon coup de grâce car je n'y arriverais pas seule. C'était en étant seule qu'il m'était arrivé cette chose-là et c'était d'ailleurs la première fois de ma vie que j'avais réellement ressenti ce truc de "putin je suis seule là" et j'avais dû appeler à l'aide. Alors qu'est-ce qu'il pouvait bien être arrivé à cette jeune femme ravissante à côté de moi? On me coupait mes idées pour me donner la parole, je levais alors la main à ma gorge que je râclais en grimaçant légèrement. Je ne préfère pas prendre la parole aujourd'hui mais.. Je suis Louise et.. je vous écouterais pour l'instant. dis-je alors à peine audible à trois mètres de moi. J'avais trop mal à la gorge pour me lancer et puis, je n'avais pas encore - drôle à dire quand il s'agit de moi - la force pour mettre des mots sur ce qu'il m'était arrivé. Vint le temps où la réunion fut finie et où les membres commencèrent à papoter entre eux. Ils se connaissaient, évidemment, et moi j'étais nouvelle. Je regardais autour de moi, moi qui suis si sociable d'habitude, je me sentais tâche. Je tournais la tête vers ma voisine qui avait parlé plus tôt. Je lui adressais un sourire. Par exemple, elle, je me serais jetée dessus dans mon état "normal". Là, je testais quand même. « tu as dû vivre quelque chose d'horrible pour en arriver là.. » soufflais-je alors malgré mon mal à parler.

Mon tour était enfin passé et je pouvais enfin me replonger dans mes pensées. Cependant la nouvelle prit la parole alors d'une oreille j'écoutais tout de même ce qu'elle avait à dire. Ça voix était faible mais elle arriva tout de même à se présenter. C'était un jolie prénom Louise et au vu de l'énorme bleu sur son cou on se doutait très bien de ce qu'elle avait subi. Une fois la réunion on se levait tous, et comme à chaque fois je ne me mêlée pas à ces gens. J'étais ici contre mon grèsn juste pour faire plaisir à mes parents mais hors de question que je me livre à de parfaits inconnus. C'est alors qu'une petite voix à côté de moi me sortit de ma tourmente et en tournant la tête je posais le regard sur Louise. C'était la première fois que quelqu'un de la réunion venait m'adressait la parole et vu l'état de détresse dans lequel était la jeune femme je ne pouvais pas partir sans lui répondre? « Comme nous tous ici je pense, oh faite moi c'est Danaé. »  En me présentant je lui tendis la main. Je l'a vis faire un pas en arrière avant d'hésiter. Elle non plus n'avait pas dut vivre des choses très faciles et il n'y avait qu'un seul remède, le temps. Je lui fis un petit sourire pour essayer de la rassurer. Apparemment c'était récents les bleu qu'elle avait sur la peau et elle n'avait pas encore dut apprendre à vivre avec, moi cela faisait un an que j'avais eu le temps d'apprendre à camoufler mes émotions. « Ils vont tous boire un café après, je n'aime pas trop quand il y a du monde mais si tu veux il y a un petit café pas très loin du parc... » Je n'étais pas du genre à aller vers les gens mais cette jeune femme avait vécu une chose horrible et si elle avait besoin d'en parler se serait surement à une personne qui comprendrait ce qu'elle vivait.

Je suis quelqu'un qui papote beaucoup, habituellement. J'ai la tchatche et je n'ai pas peur de dire ce que je pense. Je suis quelqu'un d'amical, qui n'hésite pas à aller vers les autres quand je sens qu'ils ne vont pas bien pour arracher un sourire et qu'ils pensent à autre chose. Je suis comme ça, moi. Je ne suis pas censée être, ni faite pour être celle qu'on doit faire sourire, vers qui on doit aller, et surtout pas celle qu'on doit aider. Je déteste au plus haut point être cette nana là, et quiconque qui est de mon entourage le sait très bien. William par exemple, savait très bien que je devais être en de très mauvaises conditions car quand je lui aie envoyé un sms pour de l'aide, ni une ni deux il est venu, il savait que c'était vraiment grave. Je suis une jeune femme indépendante en toute logique alors être assise ici parmi ces gens pour avoir de l'aide, ça ne se verrait pas tous les dimanches. Mais j'essaie de prendre sur moi et d'aller vers les autres. Alors quand la réunion est terminée, je me tourne vers ma voisine qui parlait de se droguer et qui était seule à ne pas parler à quelqu'un. Fallait commencer par quelqu'un, surtout qu'elle m'avait l'air sympathique. Je commençais par une remarque tout à fait idiote, je m'en rends compte et je m'insulte dans ma tête de l'avoir dit. Evidemment, qu'elle avait connu quelque chose d'horrible, sinon elle ne serait pas là, idiote. Bref, elle me propose quand même d'aller dans un café dans lequel on sera plus tranquilles, loin d'eux. Je les regarde puis la regarde, avec un petit sourire. Elle n'a pas l'air d'apprécier venir ici. Elle doit le faire pour le côté médical seulement, pas comme les autres qui ont l'air d'avoir tissé de vrais liens. Je lui fais un "oui" de la tête et entame le pas vers le café dont elle parle que je connais bien aussi, qui me rappelle d'ailleurs un mauvais souvenir dont j'essaierais de faire abstraction. Je me secouais doucement la tête - pour ne pas qu'elle le voit et que je me fasse mal. Je m'assois face à elle dans le café, attendant qu'on commande et je lui souris. Je me raclais la gorge avant de prendre la parole au serveur adorable que je connaissais bien. « un thé aux fruits rouges s'il vous plait » dis-je dans un souffle. Je souris à Danaé. « tu as un joli prénom, d'ailleurs. » lui dis-je repensant à ce dernier. Je vais essayer de faire un effort sur ma voix sinon, la pauvre allait passer un sale moment. « tu fais quoi dans la vie? » entamais-je alors

Nous marchions donc toutes les deux en direction du café qui n'était pas très loin mais quelque chose m'interpella. Louise n'avait pas l'air rassuré de venir dans ce quartier... pourtant la journée il était tout ce qu'il y a de plus tranquille, je venais souvent m'y promener seule quand j'avais un moment de nostalgie. Peut être que les bleus qu'elle avait sur le cou avait un rapport avec cet endroit, la nuit c'est vrai qu'il ne fallait mieux pas traîner seule ici, c'était infestés de jeunes alcoolisé et de vieux à la recherche de proies facile. Nous arrivions enfin dans ce petit café au allure un peu pittoresque mais leur café était vraiment excellent et pas très cher. Et puis il était rarement rempli, ce qui n'était pas pour me déplaire moi qui aimait être seule. Un serveur vint prendre notre commande et Louise commanda un thé d'une voix basse, la pauvre... cela devait vraiment lui faire un mal de chien. « Et moi je prendrais un café s'il vous plais. » Le serveur repartit avec notre commande et Louise me parla de mon prénom. Apparemment il était peu commun car à chaque fois que je rencontré de nouvelle personne on me le faisait remarqué. En tout cas heureusement que j'avais une bonne oreille car la voix de Louise était assez faible mais ce n'était pas de sa faute. « Je viens de reprendre mon boulot, je suis danseuse. Et toi ? » Au vue de son jolie minois elle devait surement être top modèle ou quelque chose dans le genre. Louise est une très jolie femme, elle avait le visage et le corps parfait, celui qu'on rêverait toutes d'avoir. Mon corps lui était encore marqué par ma grossesse, du fait de ma césarienne et des kilos prit. Certes j'en avais perdu beaucoup mais il m'en restait encore quelques uns à perdre, ceux que j'avais pris en faisant ma dépression. Portant la tasse de café à mes lèvres j'en bus une gorgée avant de poursuivre. « Qu'est ce qui... enfin qu'est ce qui t'es arrivé pour avoir tout ses bleus ? » Ma question était délicate mais parfois c'était plus facile de ce confier à une parfaite inconnue qu'à un ami proche. « Mais si tu ne veux pas en parler c'est pas grave... »

Dans le café, nous entamions notre conversation. Je demandais un thé, elle un café. Le café pour moi en ce moment ce n'était pas top, vu ma gorge. Cela me faisait très mal, ça attaquait un peu enfin bref, rien de génial. J'adorais le café de manière général, encore un truc qui ne me correspondait pas. Je faisais abstraction du souvenir qui habitait cet endroit, car en effet depuis l'évènement toutes les choses qui me font mal et que je repousse depuis un certain temps refont surface et j'ai bien du mal, à les combattre. Mais je ne ferais pas comme avec Joana, à raconter ma vie des heures, non. Surtout que, je n'en aurais pas la force mentale ni physique, vu ma gorge. J'entamais quand même une conversation avec Danaé, parlant de son prénom puis demandant des infos sur elle, commençant par le boulot. Elle avait l'air vraiment sympa et je trouvais ça idiot de louper une nana comme ça, surtout que ça pourrait m'aider de rencontrer de nouvelles personnes, de nouveaux visages, de nouveaux horizons. J'attendais sa réponse, la regardant et recevant mon thé. Je remerciais le serveur avec un sourire et la regardais à nouveau, elle me retournait la question. Je baissais les yeux sur mon thé puis sur elle. En fait, ce n'était pas un bon sujet. Avec mes bleus, je refusais d'être devant un appareil photo. « je.. je suis journaliste mode.. enfin je suis modèle aussi normalement mais.. je refuse de.. de faire des shooting depuis.. Enfin je suis hideuse quoi avec tous ces bleus. » lui avouais-je de ma voix faible. Elle devait vraiment faire un effort pour m'entendre, je la plaignais. « désolé, je ne parle pas super fort je.. » Je touchais mon foulard qui cachait mon plus gros bleu, sans en dire plus. Je levais ma tasse à mes lèvres. Je la regardais? Danseuse, c'était super beau ça. « j'ai fais de la danse classique quand j'étais petite, j'adorais ça. J'adore voir les gens danser, je trouve ça super beau. » Des corps en mouvement et en signification, quoi de plus beau? Je lui adressais un petit sourire. Les grands sourires ces derniers temps ne sortaient pas souvent. Même jamais en fait. Je ne faisais que de petits sourires limite timides. Elle me posait LA question. Je la regardais, un peu appeurée. Je baissais les yeux, j'étais vulnérable avec ce derneir regard. Je passais une main dans mes cheveux. Elle me dit que je n'étais pas obligé d'en parler en effet. Je la regardais à nouveau. « c'est juste que rien que d'y penser je.. » les larmes me montèrent aux yeux, je détournais le regard pour les chasser. Je pleurais bien trop en ce moment, rien qu'une larme c'était de trop pour moi normalement. « c'est juste que.. Je sortais de boîte et.. y'avait ce groupe de gars.. enfin tu sais la suite, je suppose. » abbrégais-je très rapidement reprenant ma tasse pour profiter de chasser les pensées et le mal qui était remonté. « et.. et toi? » profitais-je alors.