C'est indéniable, il n'y a littéralement plus rien dans le frigo. Déjà hier c'était compliqué de trouver de quoi se faire un repas entier, mais là c'est clairement la crise. Tes parents l'ont bien fait remarqué d'ailleurs, surtout étant donné que c'est à toi de faire les courses cette semaine. D'habitude ta mère t'accompagne, mais cette fois elle est sortie en amoureuse avec ton père. Tu as bien demandé à ta petite sœur, mais cette teigne n'en fait qu'à sa tête et préfère parler avec son mec, qui s'avère aussi être ton meilleur ami. Génial. Franchement génial. Toi qui n'aimes pas les foules, là tu vas être servi. Pas vraiment pressé à l'idée d'y aller, tu prends tout ton temps pour te préparer. Tu commences par te prendre une petite douche peinard. Y a rien de mieux qu'une bonne douche tiède, même s'il fait relativement chaud à l'extérieur ces temps-ci. En sortant, tu enfiles quelque chose de plutôt léger, à savoir un t-shirt à manches courtes tout simple, un jean tout aussi banal et ces converses que tu affectionnes tant et que tu ne pourrais lâcher pour rien au monde. Elles sont usées, ne sont plus aussi blanches qu'au début et le logo est quelque peu effacé, certes, mais ce n'est pas pour autant que tu vas t'en débarrasser. Jamais ! Bref, tu finis ta préparation par te brosser les dents, te parfumer, remplacer tes lunettes par des lentilles et pour ce qui est de tes cheveux, ils sècheront sûrement grâce à la chaleur qu'il fait dehors, tu n'en as aucun doute. Et c'est dans ces moments-là que tu te rends compte que tu portes beaucoup plus d'importance à ton apparence qu'avant.
Fraîchement prêt, tu redescends dans le salon pour prendre ton porte-feuilles et les clés de voiture de l'ancienne voiture à ta mère, qu'elle t'a offert comme première voiture. Elle est pas toute jeune mais tant qu'elle roule encore, tout va bien. En ce qui concerne ton portable, tu le laisses sur le plan de travail car tu sais pertinemment que d'ici une demie-heure, une heure, tu seras rentré à la maison. Surtout que tout le monde sait où tu seras puisque tu laisses une petite note sur le frigo, donc tu ne trouves aucune utilité à le prendre avec toi. Ta montre te suffit amplement pour savoir à quelle heure tu dois être rentré. Donc, une fois toutes tes affaires réunies, tu sors de la maison et prends la voiture pour te diriger vers le centre commercial qui se trouve à même pas dix minutes de chez toi. Si tu prends la voiture, c'est tout simplement parce que tu ne te vois certainement pas porter les sacs de courses à bout de bras vue la quantité que tu vas devoir acheter.
Quand tu arrives enfin au centre-commercial, tu prends la voie pour aller te garer directement dans le parking. Tu mets bien quelques minutes à trouver une bonne place. Elle n'est pas vraiment près de l'entrée, mais tant pis, tu n'auras qu'à prendre un caddie pour mettre toutes les poches de courses. Tu verrouilles la voiture - enfin tu essayes parce que la serrure fait des siennes - puis te diriges vers l'ascenseur. Ah, l'ascenseur, ton meilleur ami ! Toi qui est claustrophobe, tu ne comprends toujours pas pourquoi à chaque fois que tu viens ici tu le prends. Sûrement pour vaincre ta peur. Tu appuies sur le bouton d'appel, et ce n'est qu'en relevant la tête de tes chaussures que tu la vois. Oh bordel de cul de chèvre. Elle est là, devant toi, toujours aussi belle que d'habitude. Tu sens tes muscles se raidir et la peau de tes pommettes rougir quand elle te lance un petit sourire. C'est inévitable quand ça vient d'elle, tu es obligé d'être mal à l'aise. T'es dans la merde, dans la grosse merde. Tu as envie de partir, de prendre les escaliers, mais ta raison en décide autrement et tes petites jambes grimpent dans l'ascenseur d'elles-même. Y a quelqu'un là-haut dans ta caboche qui a décidé que tu allais te taper la honte de ta vie aujourd'hui apparemment. Nickel, vraiment. Tu trembles des mains carrément, cette nana là elle te donne chaud. Même la température de Miami c'est un froid d'hiver au Canada à côté de cette fille - Crystal. Le pire c'est quand elle parle, là tu perds complètement les pédales. «
Je...heu...je... » Ton regard s'affole, se pose sur le sol, puis sur le tableau de bord et retourne au sol, sans jamais la regarder dans les yeux. «
Le deu-deuxième... » Rah c'est la honte de bégayer putain, mais quel boulet tu fais...
Sei una canaglia ! Putain... Tu as juste une envie, c'est disparaitre loin, très loin d'elle pour que jamais elle ne te recroise dans cet état là. Bon, le problème c'est que tu la vois toujours à l'université - enfin tu cherches à la voir - mais ça c'est une autre histoire, parce que là tu as comme l'impression d'être épié. Tu n'oses même pas la regarder ne serait-ce que d'un œil, tout ce que tu fais c'est trouver un point fixe dans un coin de la cabine. Ça t'aide aussi à faire passer le temps dans ce foutu ascenseur. Ce foutu ascenseur qui fait un drôle de bruit d'ailleurs, assez pour te faire paniquer un peu. Rien de bien grave, jusqu'à ce que l'habitacle soit totalement dans le noir. D'habitude tu n'as pas peur du noir, mais dans un endroit confiné c'est le pire scénario possible. Déjà, là, tu commences à paniquer beaucoup plus. Ta respiration se fait de plus en plus forte tandis ce que tu essayes de penser à autre chose. Mais la voix de Crystal t'empêche de réfléchir correctement, encore plus la lumière qu'elle te met dans la tronche qui te fait plisser les yeux. Elle s'inquiète pour toi, mais il faut avouer que tu t'inquiètes bien plus pour elle que pour toi tout de suite maintenant vue l'intonation de sa voie peu rassurante. Tu fixes ton regard dans le vide pour ne pas que le sien te déstabilise si jamais tu poses les yeux sur elle. «
Je...oui...je vais bien... » Puis tu la regardes du coin de l’œil, histoire de ne pas te sentir encore plus mal à l'aise que tu ne l'es déjà. «
Et-et vous ? » Tu as un peu peur pour elle quand même, mais tu restes silencieux parce que tu ne vois pas bien ce que tu pourrais dire de plus. Tes yeux se portent à nouveau devant toi pour éviter de partir dans une crise d'angoisse, ce qui ne t'était pas encore arrivé dans un ascenseur depuis bien longtemps mais qui ne tarderait pas à arriver si personne ne fait redémarrer cette putain de machine. Même allumer les lumières ça serait bien.
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