Quand on est petits, on n'imagine pas ce que la vie nous réserve, on vit au jour le jour, sans se soucier grandement du lendemain, on n'est pas égoïstes, on partage tout et avec tout le monde, on est heureux pour un rien, on ne se méfie pas des gens. On arrête de grandir le jour où on prend conscience de notre avenir, le jour où nous devons faire des choix qui influeront sur notre future vie, sur notre voie à suivre. Certains ne s'arrêtent jamais de grandir, d'autres grandissent et vivent longtemps sans angoisses, mais certains enfants sont obligés de se comporter comme des adultes très tôt, à défaut de figure parentale, où encore pour palier à d'autre problèmes. Je faisait partie de ces enfants là. Suite à l'accident de mes parents, qui n'avaient jamais étés vraiment là pour mon frère et moi, j'avais du apprendre à vivre seule, autrement. C'était difficile, on est pas préparés à vivre seuls à 9 ans mais surtout, on vous arrache vos repères, et on vous pousse vers l'inconnu.
Je ne me plaignais pas de mon enfance, j'avais été heureuse malgré tout, j'avais réussi à vivre parmi tous ces enfants, cette grande famille. J'étais adulte tôt, mais j'avais sensiblement gardé mon âme d'enfant, enfouie en moi, qui s'évadait la nuit en rêvant à un prince ou n'importe quelle autre chose joyeuse. Je n'étais pas malheureuse, mais je n'étais pas non plus heureuse. J'évoluais dans un univers hostile, qui tout à coup me paraissait bien fade à côté de la vie que je rêvais d'avoir, et surtout bien étrangère. Je ne me reconnaissait plus, j'avais changé, j'étais tiraillée par mes deux vies parallèles, mais même si cela avait marché jusqu'ici, aujourd'hui je devais choisir. Faire une croix sur mon passé, ou sur mon avenir. Tel était l'insurmontable choix que l'on m'imposait après une nuit blanche et mouvementée. Lorsque Laufti m'avait proposé de partir, c'était comme si une porte s'ouvrait enfin, mais que des chaînes, lourdes de mon passé, me retenaient prisonnières, dans un monde qui ne me convenait plus. J'avais été nous chercher des cafés, pour faire face à notre manque de sommeil, et à la légère brise fraîche au dehors. Un cappuccino pour Laufti, un pour moi, plus un noir, afin de rester éveiller, et de réfléchir à tout ça. Le regard dans le vague, je revenais sur mes paroles un peu abruptes lâchées dans la chambre d'hôpital. Les mots avaient dépassé mes pensées, ou plutôt, mon coeur avait battu ma raison à plate couture.
" Contrairement à ce que vous pouvez peut-être penser, je connais un petit peu la vie, et je peux vous dire que même si c'est votre premier amour, il faut savoir rebondir et passer à autre chose quand quelqu'un vous fait autant de mal que Mike vous en a fait. " me dit simplement Laufti, d'une voix différente. Je posais mon regard sur lui, il était perdu, au loin. Surement que quelque chose l'avait marqué dans le passé, j'étais curieuse, mais je me doutais que parler de ça ne lui ferait pas de bien. Je choisis pour une fois de ne rien dire sur ce sujet, mais enchaînais d'une voix plus calme. " J'ai du paraître odieuse, excusez-moi, je ne connais rien de la vie à part ce qu'elle à bien voulu me donner. Mais vous avez raison, en fait, tout le monde à raison depuis le début..." J'avais les larmes aux yeux. Je n'avais jamais voulu écouter personne au sujet de Mike, ne voulant pas me laisser mener par le bout du nez alors qu'en vérité c'était lui qui me manipulait. La vérité faisait mal, si j'avais tant souffert, c'était purement de ma faute, rien ni personne ne pouvait prendre à ma place. La culpabilité me rongeais tout ce temps, et je ne m'en rendais pas compte. J'avais mis mon amitié avec Lily sur le côté pour lui, pire, j'avais mis ma vie en péril, et de nombreuses fois, par amour.
Aimer ne m'avait apporté que souffrance au final. Et pas que Mike. De nombreux gars avec qui j'étais sortis pendant nos nombreuses ruptures, et toujours la même finalité. De la peine, de la haine et de la solitude, un vide immense en vous. Je n'étais pas faite pour l'amour et encore moins pour cette vie de rue.
Jeff débarqua, rompant le lourd silence qui s'était installé entre le pilote et moi. A la demande de Jeff sur son état, Laufti répondit en riant, comme s'il était décontracté. Il avait retrouvé le sourire et son humour, j'étais rassurée de voir que je ne l'avais pas vexé. Après tout, il était mon seul allié, et je ne pouvais pas me permettre de claquer la porte à un peu d'aide. Jeff me raisonna, comme à son habitude, mais au lieu de me faire sourire, cela m'énerva. Je savais qu'il s'inquiétait réellement pour moi, qu'il suivait régulièrement les méfaits de Mike, et qu'il payait ma caution quand je finissait sous les verrous. Il était comme un frère, mais je n'avais jamais pu lui rendre la monnaie, et peut-être que c'était pour cela que je refusait toujours son aide. C'était plus fort que moi, et lui restait toujours aussi calme, ignorant mes piques et mes insultes parfois. Finalement, je ne valais peut-être pas mieux que ces enfants des rues. Je l'envoyais de nouveau bouler, je n'étais plus une gamine à qui on devait dire ce qu'elle devait faire. Il soupira et se tut.
J'avais chaud maintenant, très chaud, je mourrais d'envie de me tirer en courant, loin de ces deux personnes qui ne voulaient que mon bien. Jeff avait le regard vide, le visage tiré, il n'avait surement pas dû dormir de la nuit, entre le bar et les déclarations aux flics et aux assurances... Mon coeur se serra, pour lui aussi, il valait mieux que je parte. Je me redressais, faisant craquer quelques vertèbres, et le fixait, esquissant un petit sourire désolé. "Excuse moi, tu ne mérites pas que je te parles comme ça..." Il me regarda sans comprendre, il semblait surpris par mes excuses, qui étaient rares. Je ne lui portais pas attention plus longtemps et me tournais vers Laufti, je devais savoir si cela en valait la peine. Il s'humecta les lèvres, et planta son regard dans le mien. " Je pense que c'est la meilleure chose qui puisse vous être offerte que de partir vers Miami. La vie là-bas est très sereine... enfin, elle le sera plus qu'ici pour vous c'est certain. " me dit-il. Il avait l'air toujours un peu à l'ouest, comme si quelque chose le tracassait.
Je soufflais fort, comme pour me préparer à un effort surhumain. "Très bien" dis-je sans regarder personne, "Je crois que je n'ai vraiment pas le choix." Je déplaçais mon regard entre les deux hommes et me rassit sur mon muret. "C'est d'accord, je pars, de toute façon, je n'ai rien à récupérer.... sauf deux trois trucs, à la banque... tu pourras m'y amener Jeff?" Il parut surpris par mes paroles. Il ne s'attendait pas à ce que je lui demande ça. Mes joues virèrent au rouge, pendant tout ce temps, j'avais fait croire que j'étais une véritable enfant des rues, alors qu'en vérité j'avais de quoi vivre comme une reine. "J'ai hérité de mes parents... mais j'ai toujours refusé de m'en servir..." soufflais-je. "Sauf que là, je vais avoir besoin de récupérer la carte du compte qui m'attend et... deux trois affaires. Et je te rembourserais au passage." J'avais un peu honte, je l'avais fait attendre parfois une semaine avant de le payer, mais si Mike était tombé sur ce compte, il m'aurait ruinée et virée ensuite, moi, gosse de riche. C'était le seul bon choix que j'avais effectué depuis la mort de mes parents. Et dans les affaires qui dormaient à la banque, il y avait des contacts de mon père, mais surtout, des photos de mon frère. Il était temps de faire ressurgir le passé, et de voguer vers l'avenir.
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(#)Sujet: Re: Quand la soirée tourne mal... - Laufti | Sam 6 Juin - 12:52
La vie nous réserve parfois des surprises. On croit en quelque chose qui peut nous faire grandir, et quand cette chose n’aboutit par on ressent un grand vide en soi. Hayden avait eu un but dans sa vie ; être aimé, et être reconnue par les siens. Alors, elle avait fait beaucoup de choses pour y arriver. Des choses qui ne sont pas dans la norme de la société, des choses illégales, des choses qui ne correspondaient pas à elle mais à Mike. Elle a vécu sous son aile bien trop tôt dans sa vie pour se rendre compte que tout ce qu'elle faisait était mal. A mon grand désarroi, elle aborda un sujet délicat qui me faisait toujours réalisé à quel point je pouvais être sans intérêt. C'était bien le seul sujet d'ailleurs qui me faisait penser que je ne valais rien, ou que ma vie n'avait aucun sens. J'avais été trompé, non pas par un adultère, c'était bien plus profond et difficile à vivre que ça. Quand on vous enlève la chaire de votre chaire, le sang de votre sang, et qu'en plus de tout cela, on part sans explication aucune. C'est difficile de faire le deuil, et de ne pas culpabilisé. Toute ma vie je m'étais senti coupable par rapport à cette histoire. C'était tellement dur de se dire qu'un fils rodait dans la nature et qu'il ne savait même pas qui était son père.
Alors j'avais le regard dans le vide, dans mes pensées les plus sombres. J'avais cette envie de me lever et de partir loin pour pleurer toutes les larmes de mon corps. Je ne suis pas un grand sensible, c'était vraiment le seul sujet qui pouvait me faire devenir très froid et fermé d'un seul coup. J'avais toujours essayé de l'oublier, mais comment oublier un fils ? Hayden me regardait, je le sentais. Tout le monde a déjà sentit que quelqu'un le regardait, et au moment où l'on détourne les yeux on voit une personne nous fixer. La jolie rouquine avait compris que quelque chose avait changé dans mon regard, que quelque chose m'avait perturbé. C'est vrai, moi qui suis de nature souriant et jovial, voilà que mon humeur avait changé du tout au tout avec quelques mots seulement. Elle s'excusa. « J'ai du paraître odieuse, excusez moi. Je ne connais rien de la vie à part ce qu'elle a bien voulu me donner. Mais vous avez raison, en fait, tout le monde à raison depuis le début... » Je la regardais de nouveau, elle avait les larmes aux yeux. Elle dégageait une sensibilité qu'elle n'avait pas eu depuis longtemps, ça se voyait. Je me taisais, je n'avais rien à dire. J'écoutais juste, comme un prêtre dans son parloir, essayant de prêcher le pardon d'une jeune fille perdue en enfer.
Jeff arriva en cassant le silence de plomb qui régnait depuis quelques minutes maintenant. Jeff fit une grimace quand il entendit les résultats de mes analyses médicales. J'avais retrouvé le sourire. L'homme se planta devant Hayden, essayant de la raison tant bien que mal. Elle n'était pas facile à convaincre c'était certain. Jeff essayait de trouver du soutien de ma part mais rien n'y paraissait, j'étais stoïc. Je n'arrivais plus à parler. Jusqu'à que Hayden s'excusa de son comportement envers son ami. Elle avait été sèche dans ses paroles, elle ne voulait pas comprendre que tout cela était pour son bien. Alors j'ajoutais quelques mots pour lui faire comprendre qu'il fallait se résoudre à partir de cette ville. Elle souffla, et dit finalement ce que nous attendions tous. « Très bien. Je crois que je n'ai pas vraiment le choix. » elle faisait vacillait son regard de celui de Jeff au mien. « C'est d'accord, je pars de toute façon, je n'ai rien à récupérer… sauf deux ou trois trucs, à la banque… tu pourras m'y emmener Jeff ? » Nous échangions un regard succin avec Jeff avant que ce dernier ne replante ses yeux dans ceux de Hayden, il avait un air interrogatif. Elle nous avait caché une fortune ou quoi ? Moi qui croyait qu'elle était ruiner et que son seul solde était le vol. « J'ai hérité de mes parents… Mais j'ai toujours refusé de m'en servir... » ajouta-t-elle comme pour se justifier de son désir d'aller à la banque. J’écarquillais les yeux, elle avait caché à Jeff tout ceci depuis des années, ainsi qu'à Mike et aux autres sans aucun doute… Elle aurait pu vivre normalement dans un appartement, et avoir une vie stable pour une gamine de son âge. « Sauf que là, je vais avoir besoin de récupérer la carte du compte qui m'attend et… deux trois affaires. Et je te rembourserais au passage. » Tout est bien qui finit bien… Elle nous avait soulagés, même si Jeff était très surpris il ne pouvait qu’acquiesçait en découvrant tout cela. C'était bien normal d'ailleurs d'être content pour elle. La fatigue me prit soudainement, elle m’assomma même. Je sentais un liquide couler dans mes veines, une nouvelle dose d'un médicament avait été automatiquement lançait depuis les poches suspendus à mon siège. Mes yeux se fermèrent peu à peu, tous mes membres se relâchaient, j'étais endormi. Jeff fut quelque peu surpris, il appela une infirmière qui leur expliqua ce qui était en train de m'arriver. Rien de grave heureusement, juste une excès d'émotions, de fatigue, et de médicaments. Le cumul faisait que j'étais plus sensible aux doses prescrites qu'un autre patient dans le même cas médical. Ils n’emmenèrent dans ma chambre pour me mettre dans mon lit. Le repos était bien mérité après tant d'aventures vécues. Hayden et Jeff partirent alors chercher les affaires dont elle avait besoin, et son argent qu'elle avait précieusement gardé au frais dans un coffre bien gardé.
***
Quelques jours plus tard, nous nous retrouvions à l'aéroport. Le décollage allait être dans deux heures et Jeff nous avait évidemment accompagné. Nous prîmes un dernier café avant d'aller enregistrer nos bagages et dire au revoir à Jeff. Hayden lâcha quelques larmes dans les bras de son frère de cœur. Elle était émue, qui ne le serait pas dans une telle situation ? Mais ils allaient se revoir, et cela rapidement sans aucun doute. Tourner une page est un acte parfois diffile qu'il faut faire avec beaucoup de courage et d'envie. Ce que Hayden s’apprêtait à faire n'était pas facile et elle le savait. Mais elle allait refaire sa vie, et ça c'était l'essentiel.