Le gynécologue de notre cabinet médical étant en congé maladie pendant un temps indéterminé et n’ayant pas trouvés de remplaçants pour le moment, je le remplaçais dans ses consultations le temps d’avoir une situation plus régularisée. Ma double formation de pédiatre-gynécologue était vraiment un atout pour cet endroit et pour les patientes. J’avais pris l’habitude de découper mes journées en moitié. D’une part la gynécologie et d’autre part la pédiatrie, malheureusement aujourd’hui mon planning avait été quelques peu décalés à cause d’imprévus. Une fois ma consultation terminée avec une jeune femme, je me dirigeais vers la salle d’attente où j’appelais ma patiente suivante : Aloysia Mayer. Son nom ne m’était pas inconnu, elle était la sœur de James.

Je la fis rentrer dans mon bureau et lui je la priai de s’assoir alors que je faisais de même à l’opposer. En tant que professionnelle je ne n’abordais pas le sujet de nos relations privées, elle n’était pas là pour cela et je ne voulais pas la mettre mal à l’aise. J’ouvris un dossier sur mon ordinateur afin de garder toutes les données de cette consultation. Le dossier sous les yeux je relis rapidement les lignes pour me remémorer son problème.

« Ce n’est surement pas grand-chose, vous savez beaucoup de femmes ont des règles très douloureuses et cela peut-être accentuer par le stress quelques fois. Le stress occasionne souvent des troubles d’ordre biologique, mais nous allons faire quelques examens pour voir si tout est en ordre, d’accord ? »

Je lui souris de manière à la rassurée. Je pouvais observer une certaine nervosité dans son comportement. Elle s’excusa d’être aussi angoissée mais elle souhaitait, si c’était le cas, que l’on repère rapidement ce qui n’allait pas.

« Vous allez passer à côté si vous voulez-bien on va faire une petite échographie. Je vous laisse vous installer ? Mettez vous juste en sous-vêtement sur la table d’examen. »

J’attendis quelques minutes avant de rejoindre la jeune femme qui s’était assis sur la table d’examen, m’attendant patiemment. Je lui mis un peu de gel et puis entrepris l’échographie comme dis. Ovaire, utérus, paroi utérine, muqueuse, je vérifiai tout. Je ne remarquais rien d’anormal. Je pris des clichés de l’échographie que j’imprimai.

« L’écho montre que tout est en ordre. Je vais vous faire faire une prise de sang, comme ca nous serons assurés qu’il n’y a pas de problème particulier. » dis-je à ma patiente en lui tendant du sopalin afin qu’elle puisse se nettoyer du gel. « Pouvez-vous enlever votre soutien-gorge je vais vérifier que tout va bien aussi au niveau des seins. Les bras derrière la tête comme si vous faisiez bronzette sur la plage. »

Je fis une palpation afin de vérifier qu’il n’y avait pas de présence de Kyste ou de tumeur, mais là non plus rien. Tout allait bien chez cette jeune femme. Sans doute était-ce seulement des règles douloureuses et rien d’autre.

« Vous pouvez vous peser sur la balance et vous rhabiller ensuite. »

Je repartis dans mon bureau une fois qu’Aloysia m’ait donné son poids. Je notai celui-ci dans son dossier informatique et attendis qu’elle revienne.

Après un examen gynécologique fait sur Aloysia je retournai du côté de mon bureau en attendant que la jeune femme termine de s’habiller avec intimité. Elle ne tarda pas à se réinstaller face à moi à mon bureau. La jeune femme me fit part de ses craintes concernant une interruption de grossesse il y avait quatre années de cela.

« En effet il y a des risques mais ils sont minimes alors je ne pense pas qu’il y ait un quelconque rapport. Pour en être certaine, vous allez faire une prise de sang. » dis-je en lui faisant une ordonnance.

« Vous avez vingt-quatre ans, vous êtes en pleine fleur de l’âge alors ne vous inquiétez pas trop pour de futures grossesses, vous avez le temps devant vous ! Mais comme je vous ai dit, la prise de sang nous révèlera s’il y a un souci particulier. Il y a un test particulier qui permet de dénombrer le nombre d’ovules qu’il vous reste, cela fait partie de la prise de sang, comme ca vous saurez presque exactement combien de temps il vous reste. » J’imprimai l’ordonnance et la lui tendis. « D’autres questions particulières ? »

J’attendis qu’Aloysia me réponde. Peut-être avait-elle d’autres craintes ? C’était mon rôle de médecin aussi de pouvoir réconforter, rassurer mes patients. Elle me régla la consultation et puis nous nous levâmes toutes deux.

« Dès que les résultats vous parviennent vous prenez rendez-vous avec moi et on étudiera tout ca d’accord ? »

Je lui serrai la main en la raccompagnant jusqu’à la porte de mon bureau en souriant. Je lui souhaitais bonne journée et retournais à la paperasse de son dossier. La jeune femme ne m’avait pas reconnu et cela était sans doute pour le mieux, du moins pour elle.

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Trois jours plus tard :

« Madame Mayer Aloysia ? » dis-je dans la salle d’attente.

Je devais revoir Aloysia à propos de ses résultats de sa prise de sang. La jeune femme était venue me voir trois jours plus tôt car elle s’inquiétait de ses menstruations trop douloureuses. L’examen que je lui avais fait n’avait rien révélé de suspicieux, j’avais donc pris la décision de lui faire faire un bilan sanguin au cas où. Il valait mieux être sûr que de passer à côté de quelque chose qui pouvait se révéler pas si anodin que ca. Je l’accueillis dans mon bureau et lorsque nous fûmes installées, elle me tendit la feuille qu’elle avait reçu. Je la parcourais des yeux. Rien ne révélerait une quelconque anomalie. Ma patiente me confia que ca allait mieux depuis la consultation et qu’elle s’était sans doute inquiétait pour rien.

« En effet, vos taux sont tout à fait satisfaisant. Même votre glycémie et votre cholestérol se porte bien. Si jamais les douleurs ne sont pas supportables ou que vous remarquez des symptômes en dehors de votre cycle n’hésitez pas à reprendre rendez-vous. »

Je parcourais ensuite le bilan de « santé » de ses ovules afin de pouvoir lui indiquer le temps qu’il lu restait approximativement avant de ne plus pouvoir faire des enfants. Les chiffres me surprirent pour une jeune femme de son âge. Je relis deux fois pour être certaine de bien comprendre.

« Je vous avais fait un bilan pour évaluer votre stock d’ovocytes … »

Je froissai les sourcils en regardant le taux du dosage sanguin de l’hormone antimullérienne qui était très bas. AMH devait être beaucoup plus haute au vu de son âge. Je posai la feuille sur mon bureau et croisa mes doigts par-dessus en regardant la jeune femme.

« Votre bilan à révéler un taux assez bas de l’hormone antimullérienne qui permet d’évaluer le stock et ainsi pourvoir savoir combien de temps il reste avant la stérilité. Votre taux est assez bas ce qui signifie que vous ne pourrez plus concevoir d’enfants d’ici une dizaine d’années au grand maximum… »

Je savais que cette nouvelle ébranlait la jeune femme en face de moi. Son visage se décomposait. Dans une dizaine d’années elle n’aurait pas encore atteinte trente-cinq ans qu’elle en pourrait plus devenir mère. J’avais annoncé cette nouvelle de manière assez directe, cela compliquerait plus qu’autre chose que de passer par des chemins indirects.

Les analyses de la jeune femme m’étaient revenue et en étudiant le papier tout était normal. Les douleurs n’étaient sans doute dues qu’au stress. Je m’étais intéressée au bilan concernant ses ovules et j’avais pu constater une petite anomalie pour son âge.

« Oui c’est bien ca. Plus les années vont passées plus vos chances de concevoir un enfant naturellement vont être difficiles. »

Le visage d’Aloysia s’était totalement décomposé et je sentais que cette nouvelle l’affectait au plus au point. Je regardai la jeune femme avec un visage neutre. Même si cela me brisait le cœur de voir cette femme pleines de rêves de famille, je ne devais pas laisser transparaitre des sentiments qui n’avaient pas lieu d’être.

La jeune femme n’avait pas encore vingt-cinq ans qu’elle devait déjà se projeter dans un avenir qui se rapprochait à grands pas. Elle aspirait peut-être à une famille mais sans doute pas maintenant. Elle me dit qu’elle n’avait personne dans sa vie et qu’il était peut-être envisageable d’utiliser l’insémination artificielle.

« En effet. Mais nous ne mettrons rien en place sans un délai de réflexion madame Mayer. Avoir un enfant ce n’est pas une décision qui se prend à la légère et il existe d’autres solutions comme les mères porteuses et l’adoption. »

Par conscience professionnelle je ne pouvais dire à la jeune femme que j’étais prête à enclencher un système. Il lui restait tout de même quelques années devant elle et cela ne servait à rien de se précipiter. Je soulevai un petit tas de prospectus sur mon bureau et le carton d’invitation à la soirée que j’avais laissé trainé, glissa jusque devant Aloysia sans que je n’y fasse trop attention. Je choisis minutieusement des prospectus sur les différentes possibilités qui s’ouvraient à la jeune femme. Insémination, mère porteuse et adoption. Je lui tendis avec un sourire.

« Désolée je laisse trainer mes affaires. » Dis-je en reprenant le carton d’invitation que je glissai ensuite dans un tiroir de mon bureau. « Je veux que vous lisiez ca attentivement chez vous à tête reposée. Évitez les recherches sur internet, c’est une mine de foutaise ! »

Je souris à la jeune femme qui avait posé son regard sur les papiers que je venais de lui donner.

Je présentai à la jeune femme en face de moi les options qui pouvaient s’ouvrir à elle en plus de l’insémination artificielle. Certes elle serait une femme stérile plus rapidement que les autres, mais ce n’était pour cela qu’elle ne pourrait avoir de famille. L’adoption, la mère porteuse était deux solutions qui pouvaient lui être proposée. Elle refusa en bloc assez sèchement. Cela me surprit sur le coup et elle se rendit certainement compte car elle se justifia en me disant qu’elle souhaitait porter son enfant. Je lui tendis tout de même de la documentation que je lui conseillai d’étudier à tête reposée chez elle. Elle me parla de l’invitation que j’avais rangée précipitamment.

« Ah oui ? Je ne sais même pas qui est l’hôte de cette soirée, c’est assez étrange. »

Je n’avais pas encore décidée si j’allais m’y rendre ou non. Certainement que oui car j’en avais besoin après la nouvelle de Tia/Derek. D’ailleurs celui-ci m’avait demandé de l’accompagner à la soirée mais j’avais déclinée. Je préférais m’y rendre seule qu’avec lui pour le moment. Je n’avais pas envie de me confronter à l’idée qu’il allait être père. Je reportais mon attention sur Aloysia qui me dit qu’elle allait regarder ca avec attention.

« Je souhaiterais qu’on reprenne rendez-vous d’ici trois semaines, ca vous conviendrait ? Vous aurez le temps d’avoir du recul sur toute cette situation et si vous avez des questions notez les sur une feuille j’y répondrais. »

Je notai mon adresse mail personnelle sur une feuille que je tendis à la jeune femme.

« Au cas où cela ne pourrait pas attendre trois semaines je suis contactable facilement sur ma boite mail, d’accord ? »

Je me levais de mon bureau pour accompagner la jeune femme jusqu’à la porte où elle pourrait quitter la pièce. Avant qu’elle ne s’en aille je lui dis avec un sourire :

« Si vous avez besoin d’un chauffeur, je pourrais vous emmenez à la soirée. Bonne journée Mme Mayer. »

Ma proposition n’était pas très professionnelle mais même si elle ne se souvenait pas de moi, nous avions déjà eu quelques mois auparavant un contact non-professionnel. J’avais quand même embrassé son frère …