Alors il est un salaud. Mais il le comprend malgré tout. Il est juste honnête. Après tout, même lui a vu des choses en étant militaire. Il n'a pas fait énormément de missions à terre, mais il a pu voir des choses malgré tout. Des choses qui resteront dans sa tête. Il ne surenchérit pas, il sait bien que personne ne vit dans un monde de bisounours. Alors il ne l'enfonce pas plus. Il ne le fait pas, juste parce qu'il aime la franchise de Sevastyan. Pour détendre l'atmosphère, il parle de son expérience, et tente une pseudo blague sur laquelle le jeune homme rebondit forcément. « Héééé… c'est nul ça ! » Il ne peut s'empêcher de rire. « Tu peux parler de tête enflée va ! » Tsss ! Le pire, c'est qu'il est ainsi principalement au travail. Comme s'il avait besoin d'avoir quatre fois plus de confiance en lui pour surpasser tout le monde.

****

Et puis viens le moment des massages. Après lui avoir fait la jambe droite, il sourit et passe à la gauche. « Toi et ton déjeuner. » Il secoue sa tête légèrement en sueur, laissant ses cheveux un peu humides. « J'ai ma pause à 13h. » Il s'attarde sur son mollet. « Y'a un restaurant sympa, le Green Bay pas loin d'ici. On s'y retrouve ? » Il ne sait pas si c'est totalement une bonne idée, mais bon. « On a des choses à s'avouer visiblement. » Il rit un peu. « Vu que tu vas survivre au vélo, on peut dire que tu as survécu à ta première séance. » Il lâche la jambe de l'avocat pour venir devant sa tête et lui masser la nuque, les omoplates et les bras. « Je pourrai pas rester pendant que tu finis. J'ai un cours qui va commencer, puis un autre. » Il hausse un peu les épaules. « On se retrouve au resto. »

Une fois les 15 minutes passées, il lui sourit et le laisse en lui ayant montré où se trouve les vélos avant d'aller voir son autre élève, mais surtout, d'enchaîner la matinée. Il se douche, enfile un pantalon de lin beige et un polo blanc. Rien de très compliqué, mais c'est bien suffisant. Il sourit à l'hôtesse. « Je reviens pour 14h ! » Il lui fait un petit signe et pars à pied au restaurant qui se trouve à même pas cinq minutes de là. Il entre et remarque le jeune homme posé à la terrasse. Rapidement, il arrive et se met face à lui, dans un léger sourire. « Ponctuel ! » Il aime ça, il faut bien l'avouer. « T'as vraiment assuré ce matin, tu comptes venir combien de fois par semaine du coup ? » Il commande un cocktail sans alcool et arrête la serveuse pour lui demander le menu découverte pour deux, et pour gros mangeurs. Elle acquiesce dans un sourire et repart une fois les boissons demandées.

Sevastyan se mit à rire à la remarque sur la tête enflée avant de se retrouver quelques minutes plus tard en train de se faire masser. Le jeune homme savoura cet instant, cela lui donnait envie d'aller au spa très prochainement. Reznikov le relança pour le restaurant, il appréciait sa compagnie puis même s'il ne se passait strictement rien, l'assistant pouvait toujours s'en faire un ami. Sev' eu un sourire victorieux et un regard fier lorsqu'il accepta sa demande.

« Bien j'y serai. »

Il lui adressa un sourire complice concernant le fait qu'ils avaient des choses à s'avouer. Au fond, Reznikov espérait ne pas arriver à lui raconter ses affaires de famille et la contrainte de devoir lui raconter son second travail, il en avait parlé à personne de peur d'être jugé, sans compter que ce n'était pas le genre de métier qui permettait d'avoir des relations amoureuses stables. Il savoura les derniers instants de massages quand son coach lui proposa le vélo et lui fit part qu'il avait des cours et donc qu'il devait le laisser finir. Il hocha la tête :

« ça marche, on se retrouve là-bas. Merci pour la séance. »

Il lui adressa un sourire avant de se lever et d'aller faire du vélo pendant quinze minutes. Tout s'enchaîna très vite. Sevastyan repartit chez lui afin de se changer. En rentrant, il prit une douche, il s'habilla ensuite de manière classe en mettant une chemise bleue pastel avec une veste de costume bleu foncé et un pantalon de la même couleur. Reznikov sortit et prit sa voiture, son seul luxe de sa vie passée et il arriva au Green Bay comme promis. Sevastyan s'était assis en terrasse et portait des lunettes de soleil qu'il enleva lorsque son coach arriva à sa table, il lui adressa dès lors un sourire :

« Toujours. » dit-il par rapport à la ponctualité. C'était une notion importante pour son second métier, les clients n'aimaient pas que leur marchandise arrive en retard. « Je vois que tu es toujours aussi sexy même en étant plus habillé. » il lui fit un clin d'œil avant de le remercier sur son compliment. Il commanda ensuite un Mojito avant de répondre à sa question : « Je ne sais pas, tout dépendra de mon emploi du temps, je vais tenter de venir une fois par semaine minimum. » Sevastyan appréhendait déjà sa remarque, il savait pertinemment que ce n'était recommandé de ne pas être régulier, au contraire, ça déréglait les efforts qu'il faisait.

« Alors, Coach, qu'est-ce qui t'as fait accepter mon offre ? Ma jolie gueule ou le fait de manger à l'œil ? » dit-il pour plaisanter, il sourit amusé avant de demander : « Comment se sont passés tes autres cours ? Je suis sûre que tu n'as pas arrêté de penser à moi le reste de la matinée. » encore une autre plaisanterie, il se trouvait d'humeur taquine en sa compagnie. La serveuse arriva et leur apporta les boissons, Reznikov joua avec sa paille.

Il se regarde lorsque le compliment tombe avant de hausser les épaules. « Je suis toujours sexy, je te l'ai dit ! » Secouant sa tête, il s'installe rapidement avant de regarder le jeune homme en se demandant déjà quand est-ce qu'il allait venir, mais honnêtement, la réponse le fait grimacer. « Pitié oui, essaie d'être régulier ! » Il le fixe longuement. « Si tu pouvais te caler un jour fixe, soir ou matin, on s'en fout. C'est ouvert jusque 22h la salle et elle ouvre dès 7h du matin ! J'arrive à 9h en général, parce que je cours pendant une heure avant. C'est bon pour se mettre en forme. » Il hausse ses épaules, hoche la tête. Faire du sport irrégulièrement, c'est la mort et ça ne motive personne réellement.

Il croise ses bras, se penche un peu sur la table et regarde l'horizon, les gens, les immeubles, et le ciel incroyablement bleu. « Hm ? » Il tourne sa tête vers lui et esquisse un simple sourire avant de détourner le regard. « Le repas. » Il aime jouer les chieurs, c'est certain, mais avec modération. Il observe à son autre question, alors que la serveuse s'interpose pour donner les boissons et préciser que le repas arrivera dans moins de dix minutes. Il la remercie et avant une gorgée, attrapant un glaçon au passage pour le croquer avant de fixer le brun assez intensément. « C'est la première fois tu sais ? » Il le regarde toujours. « Qu'un homme me fait autant de rentre dedans. » Il joue aussi, mais avec le petit parasol accompagnant son cocktail. « C'est étrange, et en même temps, flatteur je pense. »

Il se pose dans le fond de la chaise. « Les cours étaient bien à vrai dire. » Rien d'exceptionnel. « J'ai préféré le nôtre. » Il hausse une épaule avant de fixer le vide plus loin. « Et puis, je devais te dire pourquoi je ne suis plus un marine, mais je n'avais pas envie que ça fausse ton jugement sur ma petite personne. » Il se tourne un peu et tend sa mauvaise jambe sur le côté, afin qu'elle soit à la vue du futur avocat. Il remonte son pantalon, assez pour que sa jambe de titane soit visible pour Sev'. « Accident de plongée. L'océan était agité mais gérable, jusqu'à la tempête qu'on a pas vu venir. En remontant à la surface, j'ai été propulsé contre des rochers. Elle s'est brisée en mode : fracture ouverte trop compliquée pour être sauvée. » Il remet son pantalon en place. « C'était y'a deux ans. » Il reboit un peu. « J'me considère pas comme handicapé honnêtement et j'ai pas envie d'être vu comme ça. » Que ce soit clair. Il lui sourit malgré tout et le repas arrive. « Tu veux manger sainement, mange vegan ! » Il regarde les steaks de soja et lentilles grillés à la perfection, les brochettes de légumes et de seitan, les patates rôties et la salade. Il commence à se servir pour manger avec appétit. « Et toi ? Pourquoi ta pause au sport ? »

Sevastyan fit mine de lever les yeux au ciel lorsqu'il se vanta d'être toujours sexy faisant mine d'être exaspéré alors qu'en fait c'était tout le contraire. Il lâcha un énième sourire dont il avait le secret avant de finalement grimacer lorsque ce dernier lui demanda d'être régulier tout en lui rappelant les heures d'ouvertures et de fermetures de la salle de sport. En guise de défense, il ne pu s'empêcher de détourner la conversation à son avantage :

« Tu es très fort pour faire de la pub, il ne manque plus que tu passes à la télévision. » Il se mordilla la lèvre inférieure, joua avec sa paille qu'il observa pour éviter le regard de ce dernier avant de finalement soupirer : « J'ai des horaires compliquées, mon patron me fait travailler à des heures impossibles sans compter mes révisions... »

Il y avait une part de vrai dans ce qu'il disait, néanmoins, c'était surtout parce qu'il était obligé de faire des passes et généralement on le réquisitionnait en début de soirée jusqu'aux alentours de la fin de matinée, ensuite il jonglait entre ses études et le cabinet d'avocat, il avait un emploi du temps de ministre. Reznikov se sentait d'un seul coup stupide d'avoir pensé un seul instant qu'il pourrait reprendre le sport.

« Je te promets de faire de mon mieux pour me libérer une heure dans la semaine...peut-être un dimanche, je ne sais pas... » un silence : « Je comprendrais si à cause de ça tu ne souhaites plus être mon coach, tu sembles détester les gens qui ne sont pas autant impliqués dans ce qu'ils font. »

Sevastyan attrapa son verre de mojito et bu une longue gorgée. L'idée de ne plus faire de sport et en si charmante compagnie le frustrait, peut-être parce qu'il se disait que faire du sport lui permettait un nouveau départ, lui permettrait d'avoir une estime de soi, se regarder dans la glace sans se trouver détestable. La réponse de Benjamin face à sa question l'amusa et détendit l'atmosphère puis celui-ci lui fit une confidence et ses impressions suite à la drague de Sev'.

« Oh tu es donc hétéro ? J'ai cru que si tu ne repoussais pas mes avances c'était parce que...tu l'étais également. » il poussa un petit rire loin d'être moqueur bien au contraire avant de reprendre son sérieux tout en plongeant son regard dans le siens : « Tu me plais, pas que physiquement, ta personnalité m'a plu dès que tu as commencé à me parler. » il était sincère avant d'ajouter : « Je comprendrais si tu souhaites que l'on en reste là, je ne te sauterais pas dessus promis sauf si tu me le demandes. » il rit avant de boire une autre gorgée. Sevastyan apprécia ensuite sa remarque sur le fait qu'il avait préféré leur cours, c'était flatteur. Enfin, Benjamin se jeta à l'eau pour lui avouer pourquoi il avait arrêté la marine. Reznikov était absorbé par ses paroles, il observa également la jambe que lui montrait son acolyte. Sur le moment, le jeune homme fut surpris, mais il n'éprouva aucun dégoût ni aucune pitié, son coach avait été clair, il ne souhaitait pas être considéré comme un handicapé.

« Je comprends mieux tes grimaces à présent. » dit-il calmement avant de lui prouver qu'il n'allait pas le juger sur ça et que ça n'allait pas pour autant cache quoi que ce soit : « Il ne te manque plus que le perroquet et le cache-oeil et tu seras un véritable pirate ! » Il lui adressa un sourire sincère, il souhaitait détendre l'atmosphère : « Tu as l'air de le vivre bien, ça a dû être terrible... » un silence : « En tout cas tu as tout mon respect, tu ne sembles passer outre et profiter de la vie à pleine dent. » Sevastyan imaginait que ce ne devait pas être facile tous les jours. Le jeune homme regarda le plat arriver et son coach lui conseilla de manger Vegan, il rit avant de le dévisager :

« C'est comme être végétarien ? Je ne suis pas un hamster ! »

Il rit et finit par se servir, il était curieux d'y goûter même s'il ne se voyait pas vivre sans viande. Il ignorait tout ce qu'il avait dans l'assiette, mais tant pis. Benjamin le questionna sur sa pause dans le sport. Reznikov ne répondit pas tout de suite, il se contenta de couper le steak de soja, il avait espéré que Lee oublie complètement. Pendant un instant il hésita à lui dire la vérité, mais parce qu'il n'était pas encore prêt, il décida de lui mentir :

« Mon père est décédé. »

Il espérait qu'il se contente seulement de cette excuse. Dans les faits, son père n'était pas mort, mais il l'avait renié alors c'était comme s'il était mort. Son père ne souhaitait plus entendre parler de lui, il en avait été affecté. Il goûta le steak avant de dire :

« Hum...ce n'est pas si horrible que je le pensais. » il rit

Il ne peut s'empêcher de rire. « J'ai déjà plein d'élèves, si je passe à la télé, j'en aurai encore plus, faut bien que je dorme ! » Il sourit en coin et le regarde tout en secouant la tête. Il doit vraiment lui donner la grosse tête alors qu'il est assez humble dans la vraie vie. Il sait ce qu'il veut et.. c'est tout, il va le chercher. Il n'a jamais été du genre vantard, juste honnête, trop honnête sûrement. « Tss, arrête tes bêtises. Si tu ne peux venir que le dimanche, alors on s'arrangera. » Parce que c'est son seul jour de repos, mais si quelqu'un en vaut la peine, alors lui aussi il fera des efforts, parce qu'il est comme ça !

Et puis, il avoue que c'est la première fois qu'un homme le drague autant, et il ne s'attendait pas à autant de choses. « Non… j'suis juste pas con. » Pas homophobe, pas salaud, pas con… Il hausse les épaules, joue avec son verre, mais l'attirance du jeune va au-delà de ce qu'il pensait et s'il était du genre à rougir, il aurait rougi, c'est un fait. Cependant, rien ne se marque sur son visage, il a juste une surprise dans le regard. Ne pas aller plus loin, comprendre, rester en bons termes. A vrai dire, c'est la première fois que les confessions d'un homme le troublent autant. Il n'a jamais été du genre à fantasmer sur les dudes. Il ne s'est jamais vu embrasser un autre mec ou autre chose, non jamais. Pourtant, à cet instant précis, il est troublé. Troublé parce que c'est du rentre dedans, mais qu'en même temps, Sev n'est pas impatient, insistant, salace. Et il a cet façon de le regarder qui ferait craquer tout le monde, sans forcément penser au sexe de la personne derrière. Alors sans rien répondre, il se contente de sourire, la tête un peu baissée, ne sachant pas vraiment quoi faire avec tout ça. En tout cas, il sait que l'homosexualité de Sev ne les empêchera pas d'être au moins amis. Mais il se demande, lui, si son hétérosexualité est solide. Après tout, sa mère vit bien avec une femme maintenant, à presque 50 ans. Ça ne le dérange pas, elle est heureuse et épanouie, elle a juste trouvé quelqu'un à aimer et qui l'aime aussi en retour. C'est pas ça le but du jeu ?

Il se décide à passer à autre chose pour ne pas rester sur ça et lui avoue pour sa jambe. Ce n'est pas quelque chose qu'il exhibe souvent, il faut l'avouer. Peu d'élèves savent qu'il à une jambe qui s'arrête au dessus du genou. Il n'aime pas en parler, pas parce qu'il a honte de lui, non. Ce qu'il hait, c'est le regard plein de compassion et de pitié que l'autre attrape de suite. Regard que Sevastyan n'a pas, ce qui le soulage. « Et le bateau ! » Il hoche la tête dans un sourire avant de le regarder. Oui, oui, c'était terrible. Malgré la tempête, il se souvient encore du bruit que ses os ont fait lorsqu'il a été envoyé de force contre les rochers. Il se souvient de la douleur intense que ça a provoqué, du sang autour de lui. Pourtant, il a réussi à nager sur plusieurs mètres afin de rejoindre les autres. Sans doute pour se prouver qu'il était encore en vie. « Pour les grimaces, quand même, c'est juste le matin, le temps que la prothèse et le reste de ma jambe s'accordent pour ne plus me faire chier ! » Il rit un peu et secoue la tête.

Le repas arrive, il salive d'avance. « Les produits d'origines animales sont cancérigènes, ils induisent les maladies cardiaques, le cholestérol, le diabète et j'en passe ! » Il hausse les épaules. « Je fais découvrir ça dès que je peux, après, ça reste un choix de vie, mais tu m'as demandé comment manger sainement, alors voilà la réponse : devenir végétalien, ce qui consiste à ne RIEN manger d'animal, ni viande, poisson, laitage, œuf, rien... » Il sourit encore avant de poser la question que Sev devait lui avouer aussi avant de se figer un peu. « Oh... » Puis d'avaler ce qu'il a en bouche. « Je suis désolé. » Genre vraiment. « Je sais que c'est le cycle de la vie, mais c'est toujours douloureux je pense. » Il n'en sait pas grand-chose, il n'a perdu personne comme ça encore. Personne de proche. « C'est une bonne excuse pour avoir arrêté, ça va, t'auras juste un petit blâme et aucun massage à la prochaine séance en punition. » Il essaie d'être léger, de plaisanter, sans être irrespectueux, ne sachant pas vraiment si ça marche. Il mange avec appétit, regardant le jeune homme. « Ose dire que c'est mauvais, et on ne se reverra plus jamais ! » Il sourit en coin et reboit un peu avant de demander de l'eau, puis de continuer à manger avec appétit, dans un joli sourire à moitié dissimulé.

« Je travaille pas le dimanche. » Il le regarde. « Mais si tu viens et que c'est ton jour de sport, alors je viendrai. » Il le fixe. « Je décalerai mon moment de plongée pour venir et m'occuper de toi. » Il hoche la tête. « Parce que quelqu'un qui est prêt à venir le dimanche malgré une semaine chargée, c'est quelqu'un qui en vaut la peine. » Il le fixe avant de lui sourire, puis de continuer à déguster son repas.

« Mince moi qui pensais que tu étais un robot. »

Dit-il pour le taquiner, bien avant qu'il apprenne qu'il détenait une jambe en titane. Sevastyan gloussa avant de rétorquer : « ça y est ? Tu ne peux plus te passer de moi ? »

Il se doutait que Benjamin faisait cela pour l'aider à poursuivre le sport. L'assistant avoua ensuite qu'il avait tout de suite accroché avec son coach. D'habitude il aurait été beaucoup moins patient s'il avait juste voulu s'envoyer en l'air, mais pour une fois il ne désirait pas que ça, il avait envie de s'intéresser à la personne d'autant plus qu'il était quelqu'un que l'on avait envie d'écouter. Maintenant qu'il lui avait avoué être hétéro où du moins pas con, Sevastyan n'avait pas envie de forcer les choses, bien au contraire, il souhaitait apprendre à le connaître : « C'est un bon début. » il rit avant de faire son sourire dont il avait le secret, parce qu'il était tout simplement un mec souriant :

« A vrai dire je n'ai pas parlé du bateau parce que je pensais que tu en avais un. »

Comme il avait perdu sa jambe en mer et qu'il semblait faire de la plongée. D'ailleurs il pouvait constater qu'il ne semblait jamais s'arrêter, Benjamin avait l'air d'un homme dynamique. Quand il évoqua que le matin il avait du mal avec sa jambe, Sevastyan ne pu s'empêcher de le taquiner une fois de plus en lui disant le plus sérieux du monde pour faire rire : « Et tu as pensé à y mettre de la glue ? » Il lui adressa un sourire complice avant de reprendre son sérieux et de boire une gorgée de son Mojito.

« J'ai quand même plus de chance de me faire renverser dans la rue, me faire tuer par un client tueur en série plutôt qu'en mangeant un steak frites tu ne crois pas ? On est tous condamné à mourir alors pourquoi se priver des bonnes choses ? »

Les deux hommes avaient une opinion différente de leur mode de vie, mais c'était ce qui était justement très intéressant. Sevastyan était prêt à faire des efforts pour découvrir son univers : « T'es un moine bouddhiste ou un truc du genre ? » il rit avant de reprendre son sérieux, il était censé avoir perdu son père. « Tu n'as pas à l'être, ce n'est pas toi qui l'a tué après tout. » Heureusement que son père n'était pas là, il l'aurait enterré vivant, dans les familles russes, ça ne plaisantait pas. « On finit par s'y faire ne t'en fais pas...il doit être bien là où il est... » Oh oui, il était dans leur somptueuse baraque tandis qu'il se démerdait à suivre chaque mois. Bizarrement, même s'il était devenu « pauvre », Sevastyan souhaitait jouer les riches où du moins le paraître, il avait après tout son petit air de bourge mine de rien.

« Ah non ça c'est cruel ! C'est ma partie préférée dans ton entraînement ! »

Reznikov fit une petite tête de chien battu avant de goûter le plat. Le steak était étrange, mais il ne trouvait ça pas si ragoutant. « Je dois admettre que ce n'est pas mauvais ! » Il sourit « Reste à voir si je serai capable de tenir ce genre de régime. » Oui, il le voyait ainsi pour se priver de nourritures qu'il adore. En revanche, Sevastyan fut surpris de la proposition de Benjamin. Ce dernier semblait sérieux et prêt à sacrifier son jour de repos pour l'entrainer. Il en était touché parce qu'il ne lui en avait pas demandé autant.

« Tu n'es pas obligé... » un silence : « Merci » Il le regarda dans les yeux « Peut-être que je pourrais t'accompagner à la plongée, fin je veux dire que je resterai sur le bord de la plage, mais je pourrais te tenir compagnie en guise de remerciement. » Après tout Sevastyan pourrait toujours l'y conduire en voiture, puis même voir comment il se débrouillait même s'il ne risquait pas de le suivre dans les profondeurs, il en avait trop peur.

« Well, j'économise ! J'ai le permis, manque plus que le bateau, mais ça coûte cher quand même ! Un ami me passe le sien en attendant quand j'ai besoin ! » Bah ouais, même si ses parents sont aisés et qu'ils l'ont bien aidé pour ses prothèses et ses soins, lui n'est pas encore si riche, mais il économise, et un jour, il aura le sien, il en est sûr.

« Parce que les choses vegan sont bonnes. C'est juste de l'appréhension, je t'assure ! Je fais des cupcakes divins et personne ne se doute que y'a zéro œuf et lait dedans ! » Il hausse les épaules. « Les gens aiment ce qui est superficiel. Même si les profondeurs sont vraiment bien, ils restent sur des impressions, c'est pour ça que je ne parle pas de ma jambe. » Il sourit malgré tout. On a tendance à trop se baser sur les on-dits. Il espère changer ça, et même si Sev ne devient pas vegan, il lui aura montré son univers au moins, c'est déjà ça !

La remarque sur le moine bouddhiste lui arrache un sourire. « ça mais le sexe en plus ! » Parce que l'abstinence, non merci, il a donné à vrai dire depuis l'accident. C'est rare lorsqu'il tombe sur quelqu'un qui fait fit de sa jambe. C'est trop étrange pour le commun des mortels. C'est dur parfois d'avoir juste une chance lorsqu'on est différent. M'enfin, il ne compte pas s'arrêter à ça à vrai dire. Il s'en fiche pas mal.

Il s'excuse pour le décès, les mots de Sev le font sourire, c'est vrai, il ne l'a pas tué, mais quand même. « Oh, sans doute va... » Quoi que, il aime bien vivre lui, même si c'était dur par moment. Il aime ce qu'il a eu quand même. C'est sa vie à lui après tout.

« Ah non ça c'est cruel ! C'est ma partie préférée dans ton entraînement ! » Là, il rit ! « Tu sais que plus tu vas t'habituer au sport et moins t'en auras des massages hein ? » Cruelle vérité oui, mais moins les muscles sont en souffrance et moins ils ont besoin de massages ! Donc bon. Mais p't'être que pour lui, il fera un effort, peut-être. « Faut que ce soit un état d'esprit avant un régime, sinon tu n'y arrivera pas. » C'est une vérité vraie. Il le fait d'abord pour la cause animale, puis environnementale, puis pour sa propre santé.

Il voit la gêne de Sev lorsqu'il parle de venir juste pour lui le dimanche, mais hé, c'est ça aussi être un bon coach et un ami potentiel. « T'as peur de l'eau ? » Il le regarde en continuant de manger. « C'est tellement bien de plonger pourtant... » Enfin, il ne peut pas dire autre chose, il connaît ça depuis qu'il a 12 ans. Il sourit à nouveau. « Pourquoi pas. J'te balancerai les déchets et en guise de merci, j'te ramènerai un beau coquillage. » Il sourit tout en mangeant, avant de finir son assiette bien remplie, puis son verre et de regarder l'heure. A force de discuter, on ne voit pas le temps passer. « Il va falloir que j'y aller. Il faut que je me change et prépare la salle du cours collectif de pilate avant que les élèves arrivent. » Et digérer aussi un peu. Il le regarde longuement, frottant ses paumes sur ses cuisses par légère nervosité sans savoir quoi dire. « Merci pour le repas alors... » Il le regarde encore, se lève et lui tend la main simplement, sans savoir quoi faire d'autre. « Tu sais où me trouver. »

Sevastyan l'écouta tout en étant pensif lorsque la conversation déboucha sur les bateaux. Lorsqu'il était encore le fils à papa pourri et gâté, le jeune homme en possédait un, enfin c'était le yacht de son père, mais il l'utilisait souvent pour faire des soirées où s'éloigner du bord afin de profiter de l'océan. Reznikov songea à peut-être aider l'asiatique, il devait bien avoir un client ou une cliente qui devait en posséder un et qui en échange de ses services pourrait le lui prêter puis peut-être que s'il continue à côtoyer Benjamin, il ferait en sorte d'économiser pour lui en offrir un, c'était déjà de la folie, car ils se connaissent à peine, mais Sev' pensait qu'il en valait la peine.

« Tu es un vrai cordon bleu ? »

Il sourit amusé, Reznikov était horrible en cuisine, il n'arrivait même pas à faire cuire un œuf, trop habitué à appeler sa Nanny ou à commander. Néanmoins, le jeune homme était intrigué concernant les beignets, il n'était pas contre l'idée que ce dernier lui en fasse. Concernant sa jambe, il pouvait le comprendre, enfin pas totalement, car il ne l'avait jamais vécu, mais il est vrai que l'on vit dans un monde justement où il y a énormément d'apriori. Sevastyan devait admettre qu'il en avait toujours eu, c'était un véritable petit con avant que son papa d'amour lui coupe les vivres. Depuis qu'il avait appris à se démerder, il évitait de trop juger, après tout il était gay, il se prostituait – même s'il n'aimait pas véritablement ce mot – il côtoyait des gens qui n'étaient pas forcément riches, il était à présent plus terre à terre.

« Beaucoup se sont moqués de toi ? »

Il l'observa tout en n'osant pas imaginer les moqueries de certains. Sevastyan se mit à rire concernant sa remarque sur le sexe. Au moins il ne faisait pas vœux de chasteté c'était déjà ça, il n'aurait pas besoin de le demander en mariage pour franchir un jour le pas. Reznikov fit une petite moue concernant les massages, comme un enfant qui venait de se faire confisquer sa console de jeux :

« Je devrais aller me faire bichonner au spa...mais ça ne sera pas pareil... »

Il sourit amusé avant d'écouter ses conseils sur comment être vegan. Sevastyan se renseignerait un peu pour en savoir davantage et peut-être lancer un sujet de conversation avec son coach pour le surprendre. L'assistant dégusta son assiette tout en jetant de temps à autre des regards en direction de Benjamin :

« Non ce n'est pas tellement ça, disons que j'ai plutôt peur des profondeurs, je trouve ça frustrant d'être confronté à l'obscurité totale puis les animaux marins peuvent être parfois flippant. » il rit, il se sentait stupide de dire ça : « Wouah des déchets, génial j'en ai toujours rêvé ! » dit-il ironiquement avant de sourire quand il évoqua un coquillage, c'était déjà plus « mignon ». Sevastyan termina son assiette quand Benjamin annonça qu'il devait partir, il avait encore des cours à donner. Ce dernier semblait aussi embarrassé que lui parce qu'il ne souhaitait pas que ce repas se termine, ils n'avaient même pas pris le dessert. Instinctivement, le jeune homme regarda sa montre, il avait l'impression que son coach prenait la fuite, c'était frustrant et encore plus lorsqu'il lui tendit la main. Sevastyan sortit de sa poche un portefeuille pour y sortir une carte de visite – bien évidemment, il ne donnait pas celle de son second taff – avant de le ranger et il finit par se lever pour la lui serrer tout en le tirant légèrement vers lui afin que leurs souffles frôlent leurs peaux. L'assistant le regarda dans les yeux avant de lui murmurer :

« J'ai passé une très bonne matinée en ta compagnie. » avec sa main libre, il déposa à l'intérieur de la poche du polo de Benjamin sa carte : « Tu peux m'appeler à n'importe quel moment de la journée. » il lui fit un clin d’œil avant de se reculer et de lâcher sa main pour s'asseoir. Il lui adressa un sourire en coin.

« J'aime cuisiner. » Devenir vegan, c'est passé aussi du côté obscur de la force dans la cuisine. Il ne savait pas faire grand-chose avant de commencer à s'y mettre sérieusement pour avoir des repas corrects, diversifiés, variés et riches. Alors bon, c'était juste un micro effort. « Et c'est plutôt bon. » Il l'avoue dans un demi sourire tout en hochant la tête, parce qu'après tout, c'est plutôt vrai.

« Hm… Moqués n'est pas vraiment le terme. Je ne sais pas si se faire traiter de « dégueulasse » est vraiment une moquerie en soit. » Il hausse les épaules. « J'vais pas m'en plaindre, mais ouais, quand les gens savent ce qui est arrivé, y'a deux solutions : soit la pitié « oh mon pauvre, tu dois en souffrir, c'est affreux... », soit le rejet « oh mon dieu, mais c'est dégueulasse, comment tu peux vivre avec ça ! » Les gens sont juste cons. » Il hausse à nouveau ses épaules, souriant malgré tout. C'est pas ça qui le foutra à terre ou qui lui fera perdre de sa confiance en lui. Oh non…

Ils parlent des massages et Sev est presque trop mignon. « Je devrai me faire payer mes doigts de fée. » Il a toujours aimé ça. Son premier cobaye, c'était sa mom lorsqu'elle revenait de longue journée épuisante au salon de coiffure et qu'elle avait mal aux jambes. Il est un « Mama's boy » comme on dit de toute façon. Encore maintenant, il suffit qu'elle dise qu'elle est un peu fatiguée pour qu'il la fasse s'asseoir et lui masse les pieds.

« Les animaux marins sont fascinants ! » Il ne va peut-être pas lui dire de suite qu'il a fait un selfie avec un grand blanc… Il risque de le prendre pour un fou, totalement même. Mais l'animal était si paisible pendant que lui, prenait des photos de reconnaissance pour pouvoir poser des sondes et des radars. Il n'avait jamais vu un requin si tranquille et amical à vrai dire, les autres étaient toujours restés en retrait. Il préférera toujours ses moments avec les requins-baleines ou les orques. Et sa rencontre avec une méduse géante. Mnah, il aime l'océan. « Je sais, je sais, je fais des cadeaux de rêve. » Il rit un peu, mange, joue avec son verre…

Et il se rend compte du côté trop simple, trop tendre, trop… peut-être trop séducteur aussi du moment. C'est étrange pour lui, vraiment. Il pourrait encore prendre un dessert, mais il a besoin de souffler, de se remettre les idées en place, se dire qu'il apprécie juste le moment. Que ce n'est rien. Alors il se lève, prétexte, et avance un peu.

La suite, il ne s'y attendait pas vraiment. Il déglutit lourdement et fixe le brun, interdit devant ce qu'il fait, détournant un peu la tête en sentant son souffle sur sa peau presque frémissante, tout en n'arrivant pas à détourner son regard du sien. Il le laisse mettre la carte dans sa poche et lorsqu'il est libéré, il enfonce ses mains dans ses poches, sans savoir quoi dire. Avalant sa salive, il va vers la caisse pour parler à la serveuse avant de sortir. Quelques minutes plus tard, elle avance et dépose une coupe de champagne, un café et une belle part de cheesecake vegan aux fruits exotiques devant Sev. « Le repas vous est offert par la maison. » Elle lui sourit poliment et retourne à sa caisse.