« Aller Carter encore une cuillère et c’est fini ! » Je joignais les gestes à la parole en raclant le reste de purée à l’intérieur de la petite assiette en plastique, spécialement faite pour les enfants. J’amenais ensuite la cuillère à sa bouche. Celui-ci la goba d’une traite, joyeux comme un gosse d’un an devrait l’être. Je souriais grandement. « C’est bien mon fils. » je lui nettoyais la bouche, lui donnait à boire, puis le descendait de sa chaise haute. Je m’asseyais sur le canapé et regardais Carter, qui jouait avec son ours en peluche. Depuis que celui-ci avait commencé à marcher, je n’étais jamais rassuré à 100%. J’avais systématiquement peur qu’il se fasse mal lorsque j’avais le dos tourner. Je devais me rendre à l’évidence, j’étais probablement beaucoup trop protecteur envers mon fils. Mais qui pouvait m’en vouloir ? J’avais dû apprendre sur le tas le boulot de père, avant tout ça, je ne m’y connaissais absolument pas en gosse. Mais je devais bien avouer que plus le temps passait et plus je prenais la main. Et il était plus que temps, Carter avait tout de même 14 mois.
Bref, je regardais les maisons et villa en vente sur Miami. J’avais le plus grand besoin de déménager. Ce sentiment ne me quittait plus depuis que j’avais remarqué dans quel état se trouvait mon appartement. Les murs étaient jaunes à force de toutes ces soirées à fumer, à certains endroits il y avait même des cratères puisque c’est les murs qui prenaient lorsque j’étais en rage. Il c’était passé beaucoup trop de choses au sein de ce petit espace. Il avait trop de souvenir, trop de choses que je n’arrivais plus à supporter au quotidien. Et puis, ce n’était pas l’idéal pour Carter. Je ne voulais pas qu’il vive dans cet appartement miteux de dealer. Je voulais qu’il ai de l’espace, une belle chambre, une maison où le soleil s’infiltrerait partout des bais vitré, un jardin pour qu’il puisse y jouer bref, je voulais le meilleur qu’il puisse y avoir, pour lui. Donc je m’afférais chaque jour à trouver l’endroit parfait. J’avais pas mal d’argent de côté, donc financièrement ce n’était pas un problème. Je défilais la page à l’aide de la souris, l’autre main sur le sommet du crâne de mon fils, lorsque mon portable se mis à retentir. Anteynara… Je fronçais les sourcils. Ce n’était pas habituel que celle-ci m’appelle, je répondais immédiatement. Mes inquiétudes n’étaient pas vaines, elle m’annonçait que Noah avait fait un accident de voiture, et que c’était plutôt grave. Elle ne me donnait pas plus de détail, je raccrochais. « Putain Noah ! » je jurais entre mes dents, me levait d’un bond, prenait Carter, filait l’habiller, puis allait en faire de même, je prenais tout ce qu’il fallait et sortait de l’appartement, mon cœur battait la chamade lorsque j’arrivais à la voiture, je plaçais Carter dans son siège puis filait en vitesse, direction l’hôpital.
« La chambre de Noah Rodriguez ! » J’étais mal poli et j’en avais rien à battre. Pour dire, je ne le remarquais même pas. On m’indiquait le numéro et je fonçais vers celle-ci, poussette en main. J’entrais en trombe dans la chambre, réveillait par la même occasion mon meilleur pote, mais j’étais déjà rassuré de le voir conscient. Je m’attendais à le voir dans un coma, ou pire. Je bloquais la poussette et me rapprochais du lit. « Putain mec, tu m’as foutu la peur de ma vie ! »
« J'ai toujours dis que je vivais 500 pour 500 mètres.. et je crois que c'est pour ça qu'on était comme deux frères..parce que toi aussi.. Peu importe où tu es... que ce soit à 500 mètres ou à l'autre bout du monde, tu seras toujours près de moi et tu seras toujours mon frère. »
Cela faisait deux ou trois jours que j’étais à l’hôpital, quelques personnes étaient venues me voir, ça me faisait plaisir, mais ce qui m’énerve c’est de ne pas me rappeler d’eux. Il y avait apparemment ma meilleure amie et une autre fille que je côtoyais beaucoup. Ça me rendait fou de rien me rappeler. Aujourd’hui c’était plutôt calme, je me faisais chier, je zappais sur les chaînes, quand les médecins ne venaient pas me prendre la tête pour me poser des questions pour savoir si je me souvenais de quelques choses. J’étais enfin tranquille depuis une heure, je voulais pioncer un peu, mais impossible, sûrement parce que je me torturais l’esprit pour essayer de me rappeler de quelque chose, n’importe quoi de ma foutue vie. Peut-être que c’est pas plus mal après tout, peut-être que j’étais un mec ayant fait des choses horribles. Soudain, quelqu’un entra en trombe dans la chambre, un mec, genre un peu badboy avec une poussette. « Putain mec, tu m’as foutu la peur de ma vie ! » Dit-il paniqué. Je l’observais alors comme je le faisais avec tout le monde, c’était peut-être gênant, mais c’était le seul moyen que j’avais pour essayer de me souvenir et ça ne marchait pas beaucoup. Je voyais bien dans son regard qu’il ne comprenait pas pourquoi je les regardais comme ça. – J’suis désolé… J’me souviens de rien depuis l’accident… Je me rappel de rien du tout… Dis-je alors en faisant une légère moue. Je sais que je suis un dur à cuire, les marques sur mon corps en témoigne, mais là, il n’y a rien de pire pour quelqu’un de ne pas se souvenir de sa vie. Déjà que me retrouver avec le bras dans le plâtre et une bonne partie du haut de mon corps en vrac ça me faisait chier, mais ne pas me souvenir de qui j’étais en plus de ça, me cassais royalement les noix.
Depuis que Carter vivait à temps plein chez moi, ça m’était très difficile de passer du temps avec Noah. Enfin, je voulais dire, comme à l’époque. Le bon vieux temps… Là je ne me préoccupais de rien ni personne, là où on ne cessait de se lancer dans des plans complètement galère qui partait automatiquement en couilles à un moment ou à un autre. On était con et insouciant, par choix, parce qu’on le voulait, du moins, pour ma part. Quand vous n’avez pas de responsabilité vous n’avez rien à perdre. C’était mon cas, je n’avais rien à quoi me raccrocher, rien pour me dire qu’il fallait peut-être qu’un jour j’arrête toutes ces conneries. M’enfin, tout ça, c’était avant Carter. Du coup, Noah avait continué les conneries sans moi. D’ailleurs son banquier devait sacrément péter un câble avec toutes les merdes qui lui tombait dessus. Bref, mon fils était devenu ma priorité, ça me plaisait comme ça me faisait chier. Je voulais ma vie d’avant, tout en ayant mon fils, n’était-ce pas possible ? J’aimerais pouvoir à nouveau entrer par effraction dans un zoo, complètement saoul avec mon meilleur pote, tandis que celui-ci se démène afin de voler un orang-outan qui pèse des tonnes. Ou la fois où, toujours saoul et avec ce dernier bien sur, on c’était mis à faire les cons devant le commissariat de la ville, Noah un ukulélé en main, détruisant les oreilles de tous ceux qui se trouvait dans un rayon de 50 mètres alors que je m’éclatais à jeter des paquets entiers de confettis sur la gueule de chaque agent que je croisais. On c’était vite fait coffrer ce jour-là, mais bordel, pour moi, ce n’était vraiment pas de mauvais souvenir. C’était mon meilleur pote et moi quoi, il n’y avait rien d’autre à ajouter de plus. Noah me manquait... Et je regrettais amèrement que ce fusses dans ces conditions que je puisse à nouveau le revoir.
Il me fixait bizarrement, et j’en faisais de même. Il était sacrément amoché, l’accident avait dû être brutal. Il avait même une marque au front qui me faisait penser à ce Harry Potter-là. Ça aurait été marrant, dans d’autre circonstances. Je comptais lui demander s’il avait perdu sa foutue langue dans l’accident quand il m’annonça qu’il ne se souvenait de rien. Il faisait la moue et cette fois c’était à mon tour de l’observer. Je finissais par soupirer. « Look I love ya bro, but I'm really not in a mood so stop your crap. | Ecoute je t’aime bro mais j'suis vraiment pas d’humeur alors arrête tes conneries. » Je jetais un coup d’œil à mon fils qui c’était manifestement endormi. Je reprenais mon attention sur Noah qui avait l’air toujours aussi sérieux. Je doutais. Puis je flippais. « Wait.. You're serious ? You don't remember anything before your accident ? | Attend.. T’es sérieux ? Tu te souviens de plus rien avant ton accident ? » Je m’asseyais, ça valait mieux. « You don't recognize me ? My son either ? | Tu me reconnais pas ? Ni mon fils ? » Je passais une main dans mes cheveux, soucieux de sa réponse.
« J'ai toujours dis que je vivais 500 pour 500 mètres.. et je crois que c'est pour ça qu'on était comme deux frères..parce que toi aussi.. Peu importe où tu es... que ce soit à 500 mètres ou à l'autre bout du monde, tu seras toujours près de moi et tu seras toujours mon frère. »
Plus les heures passaient, plus je flippais de ne plus jamais me souvenir de qui je suis, de comment était ma vie avant, de qui sont mes amis, ma famille… Tout ça me faisait vraiment flipper et j’avais de plus en plus de mal à le gérer, surtout quand je voyais de nouvelles personnes débarquer dans cette foutue chambre d’hôpital, à me parler et me regarder comme si cela faisait des années qu’on se connaissait, -ce qui est peut-être le cas-, mais je m’en souviens pas et ça commençait à me rendre fou. Aujourd’hui, c’était un homme qui entrait dans la chambre, avec une poussette et visiblement je le connaissais lui aussi. Je m’excusais alors auprès de lui en l’informant que je ne me souvenais de rien. « Ecoute je t’aime bro mais j’suis vraiment pas d’humeur alors arrête tes conneries. » me lança-t-il avant de regarder le bambin dans la poussette qui dormait à poing fermés. « Attend… T’es sérieux ? Tu te souviens de plus rien avant ton accident ? » dit-il en s’asseyant, puis reprenant. « Tu me reconnais pas ? Ni mon fils ? » demande-t-il en passant sa main dans ses cheveux. Je secouais doucement la tête de droite à gauche. –Absolument rien ! ni même ce qu’était ma vie avant ça… Dis-je alors doucement la gorge serrée. – Le jour de l’accident, une fille qui s’appelle Geane est venue me voir, elle m’a dit que je m’appelais Noah Rodriguez et que j’étais son meilleur ami, mais rien ne me reviens et j’aimerais vraiment que ce soit une grosse blague crois-moi. Lui dis-je alors en le regardant. – L’infirmière a aussi dit qu’il fallait que j’y aille doucement, mais j’veux me souvenir maintenant, je tiendrais pas plus longtemps sans rien savoir. Confiais-je alors au jeune homme. - Le truc c'est... c'est que les gens qui m'ont rendu visite jusqu'à maintenant, leur visage me parle, mais ça s'arrête là, je n'arrive pas à me souvenir de qui ils sont ou de la nature de mes relations avec ces personnes. Et ça commence à me rendre ouf ! Lui dis-je alors pour essayer de lui expliquer ce que je ressentais. Je regardais de nouveau son fils. - C'est mon filleul non ? Geane m'as fait voir les photos que j'ai poster sur instagram et j'ai vu sa petite bouille et dessous c'était marquer que c'était mon filleul... Lui dis-je alors en le regardant. Bon ce n'était pas un souvenir puisque je me rappelais à partir de la photo que j'avais vu, mais bon, c'est au moins bon signe, je ne suis pas complètement devenu débile.
Jamais de ma vie je n’aurais pensé me voir confronter à cette situation. Comment réagir face à ça ? Je me sentais complètement démuni. D’aussi loin que je me souvienne Noah avait été la seule et unique personne sur qui j’avais toujours pu compter. La seule personne que je considérais de la famille, ce n’était pas mon meilleur ami, c’était mon frère. On avait vécu tellement ensemble. Il avait toujours eu mes arrières, sans lui je ne sais pas trop comment je m’en serais sorti. Toutes ces galères on les a géré ensemble, les meilleurs moments de ma vie, c’est avec lui que je les avais passé. Et maintenant vous me dites qu’il ne se souvenait de RIEN ? Que tout avait été effacé de sa mémoire ? Que je n’étais qu’un simple inconnu ? Je crois que le pire, c’est que ça se voyait dans son regard. Je ne lui disais strictement rien. Il me le confirmait oralement, avant de m’expliquer que le jour de l’accident Geane était venu le briefer un peu et qu’il aurait préféré que tout ceci ne soit qu’une grosse blague. Je baisais mon regard vers le sol. C’est vrai que ça ne devait pas être facile pour lui aussi. Je n’osais imaginer à quel point ça devait être frustrant de ne pas réussir à se souvenir de quoique ce sois. J’écoutais attentivement tout ce qu’il me racontait, je ne voulais pas louper un mot de ce qui sortait de sa bouche. « J'te comprends frero mais essaye de rester calme... Et ils t’ont dit quoi les médecins ? Tu vas retrouver ta mémoire où c’est irréversible ? » On pouvait lire l’inquiétude sur mon visage.Il regardait ensuite mon fils, puis me demandait si c’était son filleul. Je n’eus même pas le temps d’avoir un soupçon d’espoir puisqu’il enchaina en disant que Geane lui avait montré son instagram. Je souriais tristement. « Exact. Il s’appelle Carter. Il a bientôt 16 mois. » Je me rendais compte dans la foulée qu’il ne devait probablement rien savoir sur moi, pas même mon prénom, à moins que Geane l’ait averti. « Moi c’est Wayne au fait. Wayne Everden. » précisais-je tout de même. « Ton frère. Pas d’la même mère mais on s’en branle. » j’enchainais. « Comme tu peux l'constater de par mon accent, j’viens pas d’ici, je suis originaire d’Angleterre. On s’est connus alors qu’on était pas sur le même foutu continent. C’est pour dire. Toi et moi on remonte. On en a vécu des belles. » je pouffais me remémorant de certaines de nos conneries. « Pose moi toutes les questions que tu veux, je tacherais d’y répondre. »
« J'ai toujours dis que je vivais 500 pour 500 mètres.. et je crois que c'est pour ça qu'on était comme deux frères..parce que toi aussi.. Peu importe où tu es... que ce soit à 500 mètres ou à l'autre bout du monde, tu seras toujours près de moi et tu seras toujours mon frère. »
Lorsque je vis le jeune homme entrer dans ma chambre avec une poussette, je me demandais encore qui cela pouvait être et lorsque je l’entendis me dire qu’il n’était pas d’humeur, le faut qu’il m’appelle bro, me faisait un pincement au cœur, puisque visiblement c’était quelqu’un que j’affectionnais beaucoup. Oui parce que ça ne pouvait pas être mon véritable frère, déjà il a un accent que je n’ai pas, et je ne trouve pas qu’on se ressemble physiquement. Et de ce que Geane m’as dit, je ne l’ai pas entendu mentionner le fait que j’avais un frère. Je lui répondis alors que oui, j’étais sérieux, que je ne me souvenais de rien du tout, que ma meilleure amie m’avait dit comment je m’appelais lorsqu’elle est venue le jour de l’accident, mais qu’à part ça, rien ne me revenait et j’aurais vraiment préférer que ce soit une blague. « J’te comprends frero mais essaye de rester calme… Et ils t’ont dit quoi les médecins ? Tu vas retrouver ta mémoire où c’est irréversible ? » Me demandait-il inquiet. – D’après eux, je la retrouverais, ça peut prendre du temps, mais ça reviendras… Ils disent que c’est fréquent quand on prend pas mal de coup à la tête. Dis-je alors en haussant les épaules légèrement. A croire que je passe ma vie à l’hôpital. Je baissais ensuite le regard sur le petit bout dans la poussette qui s’était assoupi et je lui demandais alors si c’était mon filleul, je lui expliquais que Geane m’avait montré les photos que j’avais poster sur Instagram et que je me rappelais avoir vu une photo de lui et moi. « Exact. Il s’appelle Carter. Il a bientôt 16 mois. » me dit-il. « Moi c’est Wayne au fait. Wayne Everden. Ajoute-t-il. Geane m’as effectivement donné son prénom pour me parler de Carter, mais elle ne s’est pas étaler sur le sujet. « Comme tu peux l’constater de par mon accent, j’viens pas d’ici, je suis originaire d’Angleterre. On s’est connus alors qu’on était pas sur le même foutu continent. C’est pour dire. Toi et moi on remonte. On en a vécu des belles. » me dit-il ensuite pour essayer de me rafraîchir la mémoire. Je commençais à me rendre compte que je n’avais peut-être pas tant d’amis que ça, que les plus important, ceux pour qui je pense que je donnerais ma vie sont déjà venus me voir. Wayne et son fils en faisait partie. Je le sentais au fond de moi, comme si c’était une évidence, malgré les souvenirs manquant. « Pose moi toutes les questions que tu veux, je tacherais d’y répondre. » me dit-il ensuite. – Très franchement, j’sais même pas par quoi commencer… Dis-je alors dans un premier temps en réfléchissant. – J’fais quoi dans la vie ? Est-ce que j’ai une meuf ? Geane ne m’en a pas parler… mais pfff y’a trop de choses que je veux savoir. Ajoutais-je ensuite. – Geane m’as déjà dit le principal concernant ma famille… J’sais pas… parle-moi des trucs qui t’vienne à l’esprit… ou alors c’qu’on fait quand on traîne ensemble… J’en sais rien… Soupirais-je alors désespérer.
« Aller Carter encore une cuillère et c’est fini ! » Je joignais les gestes à la parole en raclant le reste de purée à l’intérieur de la petite assiette en plastique, spécialement faite pour les enfants. J’amenais ensuite la cuillère à sa bouche. Celui-ci la goba d’une traite, joyeux comme un gosse d’un an devrait l’être. Je souriais grandement. « C’est bien mon fils. » je lui nettoyais la bouche, lui donnait à boire, puis le descendait de sa chaise haute. Je m’asseyais sur le canapé et regardais Carter, qui jouait avec son ours en peluche. Depuis que celui-ci avait commencé à marcher, je n’étais jamais rassuré à 100%. J’avais systématiquement peur qu’il se fasse mal lorsque j’avais le dos tourner. Je devais me rendre à l’évidence, j’étais probablement beaucoup trop protecteur envers mon fils. Mais qui pouvait m’en vouloir ? J’avais dû apprendre sur le tas le boulot de père, avant tout ça, je ne m’y connaissais absolument pas en gosse. Mais je devais bien avouer que plus le temps passait et plus je prenais la main. Et il était plus que temps, Carter avait tout de même 14 mois.
