Un demi-mort oui, un zombie, qui aimerait juste passer de l'autre côté pour de bon. Il regardait son reflet en attendant une réponse à sa question, et ce qu'il voyait face à lui ne ressemblait absolument pas à un être vivant. Ou en tous cas, pas à un être humain. Peut-être que sa condition et les mots des autres s'étaient enfin imprimés dans son corps, et à force d'être traité comme moins qu'humain, il l'était devenu. Ou peut-être que ça avait toujours été ainsi et qu'il venait seulement d'ouvrir les yeux. Avec le docteur oui... Il entendit Chris répondre, de l'autre côté de la porte. Le salaud. L'égoïste. Erwan n'était pas un être haineux, mais là, il découvrait peu à peu ce que ça pouvait être, la rage, et à quel point elle était grande et insensée... Puissante aussi. Comment elle menaçait de tout retourner sur son passage. Comment elle le transformait en une autre personne. L'aveu de Chris... ça n'aidait en rien. « Ah » il lâcha simplement, de cette même voix. Ce n'était peut-être même pas audible, de l'autre côté. Il s'en foutait, ce n'était pas là pour être forcément entendu. Il serra ses doigts autour de la vasque, puis relâcha pour aller s'asseoir en tailleur par terre, contre l'armoire derrière lui. Il n'y avait rien ici, ni médicament ni lame, ni corde. Peut-être qu'il  pourrait remplir la baignoire et s'y noyer, mais non, au moment où son instinct de survie prendrait le dessus, il se propulserait hors de l'eau. Il le savait d'avance, il allait s'épargner la honte de l'échec. Je peux pas te laisser faire ça parce que je tiens trop à toi nigaud! J'étais dans le même état que toi avant de te rencontrer, laisser pour son meilleur ami par la fille qu'il aime! Je n'arrivais pas a remonter, j'étais ivre et droguer H24, je ne sortais pas beaucoup mais quand je sortais, c'était pour coucher avec TOUT ce qui bougeait. Ca provoqua un petit rire à Erwan, qui n'avait rien de joyeux. Oui, avec tout ce qui bougeait. C'était d'ailleurs comme ça qu'il s'était retrouvé ici, chez les putes, à baiser Erwan. Il n'avait été qu'un bout de viande, il n'aurait rien du être de plus que ça. Ca aurait été bien plus simple. Puis j'ai couché avec un mec et je suis venu ici. Sans doute le plus beau jour de ma vie. C'était risible. Erwan se souvenait de ce premier jour, de leur rencontre. Ca n'avait pas été exceptionnel, au contraire, ça avait été plus proche du désastre. Parce que Chris n'avait pas été capable de faire comme tout le monde. Il avait voulu avoir un coeur, jouer le héros pour la petite pute sans intérêt qu'était Erwan. Il l'avait ramené chez lui, comme si tout ça était un film romantique. En tous cas, ça n'avait jamais été un film pour Erwan, il n'avait jamais perdu de vue la réalité, le fait qu'il n'y avait que le Birdcage et rien d'autre. Alors oui, je suis peut-être qu'un sale con d'égoïste, mais que veux-tu? Je suis un connard Erwan! Tu peux me frapper si tu veux, mais je ne te laisserais pas passer l'arme à gauche parce que je tiens à toi et j'ai besoin de toi! Erwan n'avait rien à dire. Il n'était pas un ado en manque d'affection, ému par le moindre petit mot tendre. Surtout pas aujourd'hui. Plus depuis le déclic, depuis que la mort avait sonné à sa porte. Il était parti désormais, il avait quitté le stade de l'innocence. Je te propose un truc Erwan, Viens à la maison le temps de te remettre! Laisse-moi te prouver que la vie vaut la peine d'être vécu! Si je n'y arrive pas, alors je te laisserais tranquille! Il avait envie de pouffer de rire. Peut-être qu'il pouvait accepter, laisser Chris faire ce qui lui faisait plaisir pour se donner bonne conscience, puis retourner à ses occupations quand il finirait par le "laisser tranquille". Erwan ne répondit pas, il ne dit rien du tout, resta simplement là. Puis, après une bonne vingtaine de minutes, il se leva pour retourner au lavabo et se passer de l'eau sur le visage avant de l'essuyer dans la serviette. Il ouvrit la porte et sortit, retournant dans la chambre en ignorant complètement Chris qui était toujours posté non loin de la porte. « Vois ça avec mon patron » répondit-il simplement, comme si ça ne le concernait pas du tout, comme si ça ne lui faisait rien. De toute façon, il ne pouvait pas partir comme il le voulait, il fallait l'accord de son boss. Erwan n'était pas maître de cette situation. « Je ferai c'qu'il me dit de faire... alors s'il veut que j'aille avec toi, j'irai... pas le choix » il ajouta, monotone, aucunement affecté par ce qu'il disait. Il s'arrêta près du fauteuil pour prendre le t-shirt posé dessus et l'enfiler. Juste là, en simple boxer, il s'était senti trop exposé. Il détestait son nouveau lui, encore plus amoché qu'avant, pas méritant d'être montré à qui que ce soit. Et il alla s'installer sur le lit, adossé à ses coussins, regardant Chris qui n'avait pas bougé, se demandant s'il comptait ou non demander cette foutue autorisation. « Ca changera rien, ...fait que retarder » dit-il, le regard perçant, pour bien montrer à son ami que ce qu'il faisait, cette façon de prendre sa vie en otage, il ne le lui pardonnerait pas. Il se pencha ensuite vers la table de chevet pour en ouvrir le tiroir et sortir la paire de menottes qui s'y trouvait, faisant tourner l'objet autour de son index, juste pour s'occuper, passer le temps. Tuer l'ennui. « Y'a d'autres putes ici avec qui tu pourrais oublier ta vie, tu sais » il précisa.

Il  voulait être un sale con égoïste et il l'était en demandant au jeune homme un délai pour qu'il puisse lui prouver que la vie ne méritait pas qu'on lui mette un terme. Il y avait tellement de choses à voir et à vivre qu'une seule vie ne suffisait pas. Il savait aussi que s'il faisait ça, il ne pourrait plus venir voir Erwan ici au Birdcage. Les règles étaient claires, quand vous montrez de l'attachement pour un client, vous ne pouvez plus le revoir. Alors demander qu'Erwan vienne faire sa convalescence chez lui, c'était avoué qu'il tenait à lui. Mais Chris était prêt à prendre se risque. Il attendit alors de longues minutes que le jeune homme lui donne une réponse. Il le regarda passer devant lui sans qu'il ne lui prête aucune espèce d'attention en lui disant de se débrouiller avec son patron. Il le regarda ensuite enfiler un t-shirt puis se positionner sur le lit. Chris se releva de son poste près de la porte et croisa les bras attendant la suite. Il écouta alors le jeune homme parler comme s'il n'avait strictement rien à foutre de sa présence, comme si tout ce qu'il venait de lui dire n'avait aucune importance. Il serra alors la mâchoire l'écoutant lui dire que de toute façon ce n'était que du temps de perdu. Mais quand le jeune homme lui dit qu'il y avait d'autres putes avec qui il pourrait oublier sa vie, Chris laissa échapper un son animal. Il commençait à être quelque peu sous pression et voir son ami dans un tel état lui faisait du mal. Il avança alors tel un félin et vint se placer pour être à quelques centimètres à peine du jeune homme. "Tu peux dire ou faire ce que tu veux, si ton patron accepte, tu vas devoir faire avec jusqu'à rétablissement complet!" Il lui dit entrant alors dans son jeu d'ignorant. " Mais peut-être que ce qui t'emmerde le plus, c'est que j'y arrive ou que j'ai raison! Tu sais que j'en suis capable, que je peux te faire changer d'avis...." Il dit avant de quitter la chambre pour aller voir le patron en question. Il avait joué le mec sûr de lui alors qu'au fond, il était aussi paumé que son ami. Mais il avait dans sa manche quelques coups qu'il comptait bien utilisé. Il savait que Elizabeth et Erwan avait ce lien d'amitié unique qu'il avait lui-même avec Lukas auparavant. Il comptait là-dessus en premier lieu pour faire réagir le jeune homme. Il alla voir le patron d'Erwan et après une bonne heure de négociation et les trois quarts de son compte en banque, il avait la permission d'emmener Erwan avec lui pour sa convalescence. Il savait qu'après cela, s'il ne réussissait pas a faire changer d'avis Erwan, il le perdrait certainement pour toujours et se perdrait lui-même à jamais. Mais il voulait prendre le risque. Il devait beaucoup à Erwan, alors il pouvait au moins faire ça pour le jeune homme. Il prit son temps pour revenir espérant que cela ferait réfléchit le jeune homme. Lorsqu'il arriva dans sa chambre, il avoua sans aucune émotion "Tu es à moi pour 1 mois déjà. Prépare tes affaires, tu déménages!" Dit-il en s'asseyant dans le fauteuil regardant la réaction du jeune homme.

Erwan n'avait aucune liberté, et il le savait bien, il en était tout à fait conscient. Même pour mettre fin à ses jours, il n'était pas libre. L'un de ses seuls amis s'était allié à ses geôliers pour s'assurer que tous les objets possiblement dangereux avaient été retirés de sa chambre. Et tout ce que Erwan pouvait faire c'était rester là et attendre que l'un de ces hommes qui avaient tout le pouvoir prenne une décision le concernant. Jusqu'à présent, il avait vécu dans l'illusion que sa vie lui appartenait un peu, qu'il pouvait en avoir le contrôle ultime et décider d'y mettre un stop. Mais le stop avait échoué, parce qu'il avait eu tort. Rien ne lui appartenait. Il le savait bien, avait été trop bête pour penser qu'il pourrait avoir un peu de contrôle. Trop bête aussi pour penser que Chris était honnête, qu'il était bienveillant. Quelqu'un de bienveillant ne forcerait jamais une autre personne à vivre une vie dont elle ne voulait pas. Peut-être que Chris tenait absolument à garder Erwan près de lui, en vie, mais une fois qu'il serait mort, il savait bien que son ami trouverait quelqu'un d'autre. Il s'en remettrait vite. Erwan n'était pas la seule pute de Miami. Mais il finirait par réussir, il ne comptait pas lâcher l'affaire. Chris s'approcha, vint se mettre à quelques centimètres de son visage, et Erwan soutint son regard. Ce n'était pas dans ses habitudes, lui, le petit soumis, ou du moins, c'était ainsi que le voyaient les gens. Tu peux dire ou faire ce que tu veux, si ton patron accepte, tu vas devoir faire avec jusqu'à rétablissement complet! Erwan ne put s'empêcher de lâcher un petit rire sans joie. « Ouais, je sais. J'ai l'habitude d'être sa marchandise » Le sarcasme dans sa voix n'était pas commun chez Erwan, mais quelque chose s'était définitivement rompu en lui ces dernières semaines. C'était simplement drôle que Chris, qui avait tant cherché à le défendre quelques temps plus tôt, prenait maintenant plaisir à lui rappeler sa condition. Mais peut-être que ce qui t'emmerde le plus, c'est que j'y arrive ou que j'ai raison! Tu sais que j'en suis capable, que je peux te faire changer d'avis.... Erwan secoua simplement la tête, parce qu'il savait bien que non. Chris n'avait rien compris, il se croyait plus fort que tout, peut-être parce qu'il avait de l'argent, qu'il avait du succès, que tout devait toujours être facile à obtenir pour lui. Mais cette fois-ci, ce qu'il voulait était bel et bien hors de sa portée. Il regarda Chris sortir, et resta là, seul, de longues minutes. Il se fichait bien de là où il finirait. Ici ou chez Chris, c'était la même chose. Au moins, s'il restait ici, il n'y aurait pas d'hypocrisie, pas de mots doux pour essayer de jouer avec lui. Non, au Birdcage les choses étaient plutôt claires, et Erwan savait pourquoi il était ici. Finalement, le jeune homme revint. Tu es à moi pour 1 mois déjà. Prépare tes affaires, tu déménages! Oh. Sa gorge se serra, mais il ne pleura pas, c'était trop tard pour les larmes. Il devait se rendre à l'évidence qu'il avait perdu Chris, son ami, celui qui voulait son bien, qui voulait le protéger. Maintenant, ce nouveau Chris était allé conclure un accord avec son boss, avec celui qu'Erwan craignait le plus. Un ami n'aurait jamais fait ça. Il se leva, lentement, à son rythme, parce qu'il n'allait tout de même pas se presser, et il prit son grand sac en cuir pour y mettre quelques vêtements. Il se demandait comment Chris avait fait pour obtenir un mois entier avec lui. « Qu'est-ce que tu lui as promis ? Ca a du te coûter cher... » dit-il en soulevant quelques uns de ses petits strings en dentelle. « Tu vas me louer à tes amis ? Pour couvrir tes frais ? J'dois emmener ça ? Plutôt rouge, rose, noir... ? Je prends les trois, y'en aura pour tous les goûts » il fit, sans regarder Chris et laissant tomber les sous-vêtements en question dans son sac. Il le provoquait, mais au fond, il se disait que Chris en serait peut-être capable, que rien que pour le garder chez lui, il pourrait se mettre à le vendre à d'autres types. Des amis, des associés. Leo avait fait ça, plus d'une fois, alors pourquoi pas Chris. Il ferma son sac une fois que tout y était, enfila un jean et des chaussures, et se tourna vers Chris qui était toujours assis au fond du fauteuil. « Quoi ? Tu veux que j'te suce pour te remercier ? » il lâcha.

Chris était rentré dans le jeu du jeune homme et avait adopté une attitude nonchalante. Il était parti négocier avec le grand patron et avait perdu une grande partie de son portefeuille dans la bataille. Il allait devoir bosser comme un dingue pendant qu'Erwan dormirait pour se renflouer et ça allait être dur. Mais il n'avait pas envie d'échouer. Il voulait que son ami remonte la pente, qu'il voit que la vie valait la peine d'être vécue. Mais pour le moment, il devait continuer de jouer le même jeu qu'Erwan. Il rentre alors dans la chambre et lui annonce la nouvelle tout en allant s'asseoir de nouveau dans le fauteuil. Il s'attendait à ce que son ami lui envoie une pique, qu'il lui dise que cela n'y changerait rien mais certainement pas à voir de la tristesse dans son regard. Il se demanda alors à quoi il pouvait bien penser et se laissa un moment perdre dans ses pensées. Ce sont les paroles du jeune homme qui le firent revenir au moment présent. Quand le jeune homme lui demanda s'il allait le louer pour se faire rembourser, il ne put s'empêcher de serrer les dents. Il l'observa sans aucune émotion en train de laisser tomber ses strings dans le sac en cuir poser en dessous et il se surprit à penser qu'il aimerait lui arracher le string rouge lors d'une partie de jambe en l'air dans la chambre spéciale. Il se frappa alors intérieurement pour arrêter de penser à cela; ce n'était ni le lieu, ni le moment. Il devait faire en sorte que son ami ne remonte la pente pas l'enterrer encore plus. Quand Erwan lui demanda alors provocant s'il voulait qu'il le suce pour le remercier, Chris explosa de rire. En se levant il ajouta rieur " Garde plutôt cette adorable bouche pour m'envoyer des piques, je te trouve très excitant comme ça!" Il dit avec un petit clin d'oeil avant de prendre le sac du jeune homme. Erwan était fragile et il était hors de question qu'il fasse plus d'efforts que de marcher. Il invita alors le jeune homme à passer devant et le suivi. Il prit ensuite un air de nouveau impassible pour passer devant l'accueil et pris bien soin de lancer un "A jeudi" bien sonore à la secrétaire puis regarda la réaction du jeune homme. Il avait pris rendez-vous avec Janko et comptait bien continuer ainsi. Ils allèrent ensuite jusqu'à la voiture et Chris ne changea rien a ses habitudes. Il lui ouvrit la portière, l'aida à s'installer puis alla mettre le sac dans le coffre et s'installa à son tour. Il prit ensuite la direction du centre commercial. Il devait faire le ravitaillement de son frigo et de ses placards pour pouvoir accueillir le jeune homme correctement. Mais comme son ami avait tenté de mettre fin à ses jours, il ne pouvait pas le laisser tout seul à la maison. Ils allaient devoir y aller ensemble et maintenant. Il se gara alors sur le grand parking et tous deux se dirigèrent dans la grande surface. "Bien, comme tu es privée de pas mal de choses après ce que tu as fait, est-ce que tu as besoin d'autre chose, non dangereuse pour ton séjour?" Il demande désireux qu'Erwan soit tout à fait à son aise.

D'autres l'avaient fait avant lui, alors pourquoi Chris ne ferait-il pas pareil ? Il fallait bien qu'Erwan soit rentable, qu'il serve à quelque chose. Il ne reconnaissait plus son ami, de toute façon, et à présent, Erwan se disait qu'il pouvait être capable de tout et n'importe quoi. Il y a quelques temps, il se serait dit que Chris était différent, que jamais il ne lui ferait ce genre de choses, qu'il le traitait comme un humain et non pas un objet. Mais c'était fini, Chris était allé pactiser avec l'ennemi et Erwan n'avait plus personne, se retrouvait entre des mains hostiles une fois de plus. Il était en chemin pour la maison qui fut un temps avait été son refuge, mais tout ce qu'il voyait désormais était une autre prison. Il faisait son sac parce qu'il n'avait pas le choix. Puis il se tourna vers Chris qui attendait assis là. Rien qu'à le voir, quelque chose se serrait en lui, parce qu'il n'aurait jamais pensé que Chris puisse le trahir comme ça, et pourtant, c'était fait. Tristesse, dégout et colère, c'était tout ce qu'il lui inspirait désormais. Il lui demanda, provocant, s'il attendait qu'il le suce, parce que ce nouveau Chris, peut-être qu'il était de ce genre-là. De la même espèce que les autres. Ca le fit rire. Garde plutôt cette adorable bouche pour m'envoyer des piques, je te trouve très excitant comme ça! Excitant. Evidemment, son désespoir était excitant. Il ne devrait pas être surpris, et pourtant, quelque chose se brisa encore un peu en lui, pendant que le jeune homme lui riait au nez. Comme s'il était un enfant, comme si ce qu'il disait n'avait pas à être pris au sérieux. Ce rire était tellement violent qu'il resta planté là, blessé, et ne répondit absolument rien. Tout ça amusait beaucoup Chris, tandis qu'Erwan avait juste envie de se foutre en l'air. C'était affreusement triste. Il sortit en premier de la chambre, suivi de Chris qui portait le sac, et ils descendirent jusqu'à la réception. A jeudi, lança Chris, parce que visiblement il était devenu un vrai habitué. Erwan n'était pas surpris, ils ne s'étaient pas vus beaucoup dernièrement, surtout qu'il avait lui-même été hors service. Il fallait bien que son ami se satisfasse avec quelqu'un. Au moins, ça voulait dire que jeudi, il aurait peut-être l'occasion de finir ce qu'il avait commencé. Il ne réagit pas, et se contenta de sortir. Ils arrivèrent  la voiture, s'y installèrent et se mirent en route. Erwan ne parla pas, ne regarda même pas Chris. S'il venait à ouvrir la bouche, il craignait de se mettre à lui hurler dessus ou lui cracher des insultes. De minute en minute, il sentait la colère monter en lui, ainsi qu'un dégoût profond. Dans son silence, il se perdait dans ses pensées et sa main se serrait, s'enfonçait dans le tissu de son siège. Il comprit qu'ils allaient faire une escale quand Chris entra dans le parking du centre commercial. Erwan suivit sans rien dire quand il lui fit signe de le suivre. C'était terriblement triste de voir des gens tout autour de lui, qui vivaient leur petite vie, faisaient leur shopping en famille, parce que tout allait bien. Et lui, il était là, prisonnier et traîné de force, pris en otage par une vie dont il ne voulait pas. Et Chris marchait près de lui, satisfait de son petit jeu. Erwan avait presque envie de lui sauter à la gorge. Bien, comme tu es privée de pas mal de choses après ce que tu as fait, est-ce que tu as besoin d'autre chose, non dangereuse pour ton séjour? Il y avait une chose qu'il ne supportait pas, qui le mettait en rage, c'était d'être traité comme un enfant. Il ne répondit pas à Chris qui était debout face à lui, attendant sa réponse. Non, il le regarda une seconde ou deux, puis il lui cracha au visage, avec précision et talent, comme s'il avait fait ça toute sa vie. « Je te hais » il répondit simplement, sans agressivité particulière, juste une simple constatation. Il ne voulait absolument rien de la part de Chris. Il ne voulait plus rien de la part de personne. Il voulait une seule chose, et c'était ce que le monde entier avait décidé de ne pas lui donner. Mais il comptait être créatif, et à ce jeu-là, il serait plus fort que Chris. Il trouverait une solution, quand le jeune homme ne s'y attendrait pas. Il n'avait plus vraiment de scrupules désormais.

Chris était plutôt content de lui pour le moment. Erwan était loin de ce maudit lieu qu'était le Birdcage, il était sous sa surveillance à présent et Chris comptait bien faire très attention au jeune homme. Il allait devoir prévenir aussi Elizabeth et Edward de ce qu'il venait de se passer et voir avec eux quand ils pourraient venir voir Erwan. Pour le moment, il devait faire en sorte que le jeune homme recommence à sourire. Mais la tâche s'annonçait plus que compliqué. Ils se dirigèrent alors dans le centre commercial et il lui demanda s'il avait besoin de quelque chose en particulier. La réaction du jeune homme le surprit avant de le faire rire. Il lui cracha littéralement au visage un beau mollard puis qu'il le détestait avec une telle nonchalance que Chris explosa de rire. " C'est bien, moi je t'adore pour deux alors déteste-moi autant que tu veux Bébé!" Il savait que le jeune homme avait ce surnom en horreur et comptait là-dessus pour avoir une autre réaction, après tout, il se comportait comme un bébé capricieux non? Il s'essuya et avança en sifflotant. Ils commencèrent ensuite les courses, prenant un peu de tout et surtout en se remémorant ce que le jeune homme aimait particulièrement. Mais le jeune homme à côté de lui avait plutôt dans l'optique de faire la tronche. Alors Chris eut une idée et il se dirigea vers le rayon femme. Comme il ne pouvait pas laisser Erwan tout seul de peur qu'il ne fasse une connerie monumentale pour la seconde fois, il prit une robe au rayon grande taillée et l'enfila au-dessus de ses fringues. Il prit un grand chapeau, une capeline, et le posa sur sa tête. Pour parfaire son look clairement grotesque, il chercha des boucles d'oreilles à pinces et les clipsa à ses oreilles. Il regarda alors le jeune homme et fit un petit tour sur lui-même avant de le regarder dans les yeux : " alors comment tu me trouves? Sexy non?" Dit-il avec un grand sourire, espérant faire réagir le jeune homme d'une façon plus joyeuse.

Chris le traitait comme un enfant, comme si ce n'était qu'un jeu. Et Erwan était là, absent, simplement à le regarder, observer ce type qui avait été son ami, et il constatait qu'il s'en fichait bien du mal qui le rongeait. Erwan ne voulait rien de tout ça, il ne voulait pas être ici, avec ces gens, il ne se sentait plus comme part de ce monde. Et Chris, ça le faisait rire. Il trouvait ça amusant, il torturait Erwan en lui faisant comprendre de façons diverses et variées qu'il n'avait pas la moindre liberté. Il agitait ça sous ses yeux, comme un bout de viande devant un animal affamé. Erwan voulait s'ôter la vie pour échapper à ses liens et à sa prison, et Chris continuait de lui rappeler qu'il n'était qu'un objet, un esclave, destiné à être passé d'un maître à l'autre. Quand la haine et le dégoût atteignirent leur paroxysme, il lui cracha littéralement au visage, regarda sa salive s'écraser sur sa joue, juste sous son oeil. Et il exprima sa haine avec trois petits mots. Chris explosa de rire. C'est bien, moi je t'adore pour deux alors déteste-moi autant que tu veux Bébé! A chaque fois, c'était un nouveau choc, à chaque fois Erwan était surpris de la cruauté de son ancien ami. Il resta là sans réagir, face à cet homme qui riait de lui. Qui trouvait son mal-être et sa souffrance amusants. C'était terriblement blessant, ça le mettait dans une rage folle, et au lieu de se mettre à hurler ou à le frapper, il se ferma simplement et suivit Chris dans ses courses sans broncher. Comme sa colère devait bien s'exprimer d'une façon ou d'une autre, les larmes commencèrent à couler sur ses joues, et continuèrent encore et encore. Il suivait Chris comme un robot, sans poser de questions, et sans que quoique ce soit lui importe, continuant de pleurer silencieusement. Il ne calcula même pas vraiment ce que Chris faisait au milieu du rayon de mode féminine. Il s'en fichait royalement et avait l'esprit ailleurs. alors comment tu me trouves? Sexy non? La voix attira son attention, et il se tourna, leva les yeux pour regarder l'homme qui lui parlait. Il était habillé comme un idiot, avec des vêtements et accessoires de femme au-dessus des siens. Chris lui souriait comme un imbécile, fier de sa connerie, parce que visiblement, c'était le moment de rire. « T'as l'air idiot » répondit-il simplement, le dégoût dans sa voix et son visage, sur lequel coulait toujours ses larmes. « Tu me dégoûtes » ajouta-t-il encore. Et finalement, les mots sortirent de sa bouche, parce que même s'il n'avait pas envie de parler à Chris, il était trop en colère et trop blessé. « Je comprends pas ce que je t'ai fait pour que tu me traites comme ça... pourquoi t'as besoin de m'humilier et me torturer... t'as du voir les autres le faire et te dire qu'au final c'est marrant... ouais » dit-il, simplement, contenant sa colère comme il le pouvait. Il sentait de grosses larmes de rage monter, et il n'avait aucune envie d'être là, face à cet inconnu, alors à peine sa phrase finie, il se tourna et commença à s'éloigner en baissant la tête et cachant son visage dans une de ses mains. Mais évidemment, Chris ne le laissa pas partir, le rattrapant en posant une main sur son bras. « ME TOUCHE PAS ! » il hurla, se dégageant violemment. « Me touche plus jamais » ajouta Erwan en faisant quelques pas en arrière, pour garder une distance, en tentant comme il le pouvait de contenir ses sanglots.

Vu que le jeune homme en face de lui agissait comme un enfant il décida de jouer son jeu à fond. Il voulait que le jeune homme réagisse, qu'il sorte de son mutisme, qu'il lui parle. Il voulait retrouver le jeune homme d'avant, celui avec qui il parlait, à qui il se confiait. Il mijota un plan pendant qu'ils faisaient les courses et l'exécuta quand ils arrivèrent dans les fringues, allant jusqu'à dans celui des femmes pour se déguiser et avoir l'air le plus con possible. Erwan lui répondit alors qu'il avait l'air idiot ce qui fit sourire Chris jusqu'à ce qui lui dise qu'il le dégoutait. Chris se rendit alors compte que le jeune homme pleurait. Depuis quand pleurait-il exactement? Il ne saurait le dire. Il l'interrogea alors du regard  jusqu'à ce que celui-ci veuille bien ouvrir la bouche.« Je comprends pas ce que je t'ai fait pour que tu me traites comme ça... pourquoi t'as besoin de m'humilier et me torturer... t'as du voir les autres le faire et te dire qu'au final c'est marrant... ouais » Ces paroles choquèrent Chris au plus haut point mais lui envoyaient la vérité en pleine face : Erwan était vraiment au plus mal. Il ne faisait même plus la distinction entre une comédie et la réalité! "Erwan... je..." Commença-t-il en voulant rattraper le jeune homme qui commençait à fuir.  « ME TOUCHE PAS ! » il hurla, se dégageant violemment. « Me touche plus jamais » ajouta-t-il en faisant quelque pas en arrière laissant un Chris quelque peu sur le cul. Il enleva alors son déguisement ridicule et soupira avant d'ajouter : "Tu agis comme un gamin égoïste Erwan, alors je rentre simplement dans ton jeu!" Dit-il avant de passer sa main dans les cheveux d'un mouvement d'impuissance. " J'ai l'impression que t'as pas envie d'être ici avec moi alors que si je t'ai sortie du Bird c'est pour que tu ailles mieux.... Pas pour te louer ou je sais pas quoi!" Soupire-t-il ne sachant trop comment lui parler pour qu'il comprenne vraiment. "Tu crois que j'ai ressenti quoi quand je t'ai vue dans cet état? Je croyais qu'on était ami Erwan? J'ai cru j'allais mourir... enfin, pas mourir mourir, mais que mon coeur était en train de se briser! Putain tu crois qu'Elizabeth va dire quoi quand elle va apprendre ça? Pourquoi t'as fait ça? je comprends que tu sois pas bien depuis... ça, mais Elizabeth et moi on est tes amis non? Ça compte pas ce qu'on ressent pour toi? Tu n'as pas confiance en nous?" Demande-t-il comme s'il était au bout de sa propre vie. "Je veux juste que tu me parles Erwan! Que je puisse savoir quoi faire pour que tu ailles mieux et que tu guérisses bien!" soupire-t-il de désespoir.

Chris debout devant lui, déguisé en femme, à se croire drôle, comme si c'était le moment pour rire, et comme si Erwan en avait la moindre envie. C'était simplement cruel de sa part, et Erwan était un peu choqué de minute en minute en voyant à quel point son "ami" prenait plaisir à se moquer de lui, à détruire le peu d'estime de soi qu'il lui restait. Sentant que ses pleurs montaient, il se tourna et commença à s'éloigner. Il ne voulait plus voir Chris, il ne supportait plus tout ça. Erwan... je..., il entendit, et voilà que la main de Chris se posait sur son bras, ce qui lui arracha une réaction violente. Il ne voulait pas que Chris pose ses mains sur lui, il ne voulait plus jamais que Chris le touche. De toute façon, son "plus jamais" serait restreint et de courte durée. Ses jours étaient comptés, et il espérait que sa vie soit la plus courte possible dès à présent. Chris retirait la robe et le reste, sous les yeux méfiants d'Erwan. Tu agis comme un gamin égoïste Erwan, alors je rentre simplement dans ton jeu! osa-t-il lui lancer, comme si c'était de sa faute, alors qu'il n'avait rien demandé. « C'est toi qui me traites comme un gamin ! Tu crois que c'est un jeu ? T'es stupide ? » Tous les hommes qu'il avait rencontrés s'amusait à l'infantiliser, le priver de ses libertés, le punir. Chris était simplement un de plus sur la liste. J'ai l'impression que t'as pas envie d'être ici avec moi alors que si je t'ai sortie du Bird c'est pour que tu ailles mieux.... Pas pour te louer ou je sais pas quoi! Erwan allait exploser. Sa tête allait exploser, son coeur allait exploser. « Mais je t'ai rien demandé, je t'ai dit de partir tout à l'heure » il répliqua de suite, parce que c'était évident qu'il ne voulait pas être ici. Pas après tout ce qui était arrivé dans la chambre, et comment Chrisse moquait de lui depuis avant. « Pourquoi j'voudrais être avec quelqu'un qui me rit au nez ? Qui m'écoute pas, qui respecte pas mes choix ? » Ca lui semblait dingue. Tu crois que j'ai ressenti quoi quand je t'ai vue dans cet état? Je croyais qu'on était ami Erwan? J'ai cru j'allais mourir... enfin, pas mourir mourir, mais que mon coeur était en train de se briser! Putain tu crois qu'Elizabeth va dire quoi quand elle va apprendre ça? Pourquoi t'as fait ça? je comprends que tu sois pas bien depuis... ça, mais Elizabeth et moi on est tes amis non? Ça compte pas ce qu'on ressent pour toi? Tu n'as pas confiance en nous? Tout ce que Chris disait ne faisait qu'énerver Erwan d'avantage. « Laisse Elizabeth » il souffla simplement, fatigué de devoir s'expliquer. Je veux juste que tu me parles Erwan! Que je puisse savoir quoi faire pour que tu ailles mieux et que tu guérisses bien! Alors Chris croyait que tout à coup, après ça, ils allaient parler comme des amis, comme si ces dernières heures n'avaient pas eu lieu ? « Guérisse de quoi ? Je suis pas malade, j'ai pas à guérir... C'est pas parce que je prends des décisions que tu comprends pas que subitement je suis malade. » dit-il, exaspéré, marquant une pause. « Je veux bien venir avec toi parce que j'ai pas le choix, mais me demande pas de te parler ou d'être ton ami, c'est fini » il dit, avec un ton de finalité.

Même si cela pouvait blesser son ami, il se devait de rester franc avec lui et de lui dire la vérité. Il agissait comme un connard par ce que le jeune homme lui-même agissait de la sorte. Il était inquiet pour lui et ne voulait pas qu'Erwan soit mal. Il ne voulait que son bonheur rien d'autre. Alors il lui demanda pourquoi il avait agi comme un égoïste, pourquoi au final il voulait nous faire souffrir! Chris ne comprenait pas vraiment. Il savait que son ami avait vécu des choses tellement atroces qu'il s'était juré de punir les connards qui avaient fait tout ce mal a son ami. Mais pourquoi son ami ne tenait-il plus à la vie?  Pourquoi voulait-il les abandonner?  Mais la seule réponse qu'il obtient fut celle d'un jeune homme qui coupait les ponts même avec son amitié! "Alors là tu rêves! Tu reste Mon ami que tu le veux ou non et je vais veiller sur toi-même si tu n'en à pas envie! Après tu veux plus me parler, bien, mais tu va vite te lasser!" dit-il un petit peu en colère. Pourquoi ne voyait-il pas qu'il ne voulait que son bien?  Cela exaspérait Chris au plus haut point. Ils reprirent alors les courses dans un silence de plomb. Le jeune homme essaya d'avoir un minimum de conversation en lui demandant s'il voulait des produits de beauté ou d'hygiène en particulier mais, il n'eut pour réponse, que de simples hochements d'épaule. Alors il dut faire au mieux en fonction des très légères expressions du jeune homme. Il dut en prendre plus qu'ils n'allaient en avoir besoin mais le jeune homme voulait que son ami est tout ce qu'il voulait. Alors il se retrouva avec un caddie très très chargé. Ils passèrent en caisse puis allèrent à la voiture puis retournèrent dans la grande villa du jeune homme. Chris laissa le jeune homme s'installer où il voulait et en profita pour enlever tous les trucs dangereux. Côté salle de bain vu qu'il avait un rasoir électrique, il n'y avait pas de danger le dedans. Il avait acheté une brosse à dents électrique elle aussi pour le jeune homme alors, les seuls trucs dangereux de la maison, c'était les couteaux de cuisine et les produits ménagers. Il rangea les courses et commença à préparer le repas. "Erwan, tu veux manger quelque chose de spéciale ce soir? " Demande-t-il pour savoir s'il avait des envies particulières.