« Mesdames et Messieurs, veuillez attachez vos ceintures. Nous allons bientôt atterrir à Miami. »

Subitement, j’ouvrais les yeux. Comme pour vérifier si ce que disait le Stewart était vrai. A travers le hublot contre lequel ma tête était appuyée, je pouvais en effet distinguer la ville dans laquelle j’avais passé mon enfance. Ca y est !  J’étais de retour. Cinq ans. Cela faisait Cinq ans que j’étais partie et je n’étais même pas sûre qu’elle m’avait manquée. J’étais plutôt en train de me demander si j’avais bien fait de suivre le conseil d’Erik et quitter la Suède. Je soupirais, exténuée par le voyage, et attachait ma ceinture comme venait de me le répéter une hôtesse de l’air.

C’est sans trop de perturbations que l’avion se déposa sur le Tarmac. Je me levais en vitesse pour pouvoir dégourdir mes jambes qui s’étaient alourdies par le voyage. Cependant, je dus attendre cinq bonnes minutes que ma voisine ait terminée de fouiller dans son sac à main pour que je puisse descendre. Elle n’aurait pas pu faire ça avant ? me demandais-je  en la regardant avec impatience. Puis enfin, ce fut la libération. Je savourais chacun de mes pas, comme si j’étais une de ses victimes d’accidents en pleine rééducation. Peu à peu, j’accélérais mes pas pour me diriger vers la bagagerie. J’y récupérais une valise atrocement lourde. Dedans, au milieu de quelques vêtements mal pliés, se mélangeaient des livres de toutes tailles, de tout auteur et de tout genre. C’était mes coups de cœurs. Des livres qui avaient eu un certain succès en Europe, mais que l’Amérique n’avait jamais pris le temps de découvrir. Des livres que j’allais exposer dans la vitrine de ma nouvelle librairie.

Arrivée dans le hall d’accueil je maudissais Erik à voix basse. Il m’avait promis qu’il viendrait me chercher. Pourtant, il n’était pas là, et j’étais en train de me casser les côtes avec une valise lourde comme du plomb. Non, monsieur avait sans doute estimé qu’il était préférable de rester dans la voiture et m’attendre bien tranquillement au chaud. Je l’imaginais tout à fait en train d’écouter un match de Basket et se retourner avec un air étonné accompagné d’un « Oh ! Désolé ! J’avais pas vu l’heure ! Ca va ? Tu veux que je t’aide à monter ta valise dans le coffre ? ».
En effet, comme je l’avais prédis, la voiture familiale se trouvait bel et bien à l’entrée de l’aéroport. Reconnaissant parfaitement la plaque ainsi que les décorations qu’il y avait dessus. J’y déposais ma valise dans le coffre et j’entrais à la place passagère en trombe. Tout en prenant bien soin de claquer les portes avec force.  

« Je t’arrête tout de suite, lâchais-je d’un ton sec sans regarder mon frère. Je viens de me casser le dos après avoir faillis perde l’usage de mes jambes. Alors tu as intérêt à avoir une excuse valable pour être resté le cul posé dans cette voiture au lieu d’aider ta sœur ! »

Je me retournais alors. Ce n’était pas Erik. C’était Jordan.

« Jo ? fis-je surprise »

Aujourd’hui marquait le retour de ma petite sœur au pays après cinq années d’absences. Je l’avais certes vu quelques fois lorsque j’avais rendu visite à nos grands-parents, mais les discussions avaient été assez brèves voir presque froides. Elle était toujours en colère contre ce que j’avais fait il y a quelques années déjà… Je voulais la protéger, mais elle n’avait pas vraiment apprécié que je m’incruste comme ça dans sa vie personnelle… par contre, d’un autre côté j’avais bien fait. J’avais protégé ma petite sœur. Le temps avait passé depuis, j’avais pris de la maturité, j’étais devenu père, j’avais un boulot que j’aimais et je faisais mon passetemps également. J’avais Lina et on allait avoir un bébé, je ne pouvais pas demander mieux. J’avais appris aujourd’hui que Maja rentrait au bercail… Bah oui, le petit frère m’avait tout balancé d’un coup comme quoi notre sœur était sur le point d’arriver et qu’il fallait aller la chercher… Bon sang! Petit con, il se défilait pour aller la chercher et ça prenait quelqu’un pour y aller.

J’avais pris la voiture du paternel, c’était lui-même qui m’avait lancé les clés en me disant : « Tu vas voir, ça va lui rappeler des souvenirs… » Bah oui papa! Il serait peut-être temps que tu changes de voiture, on est plus ado! Bref, quand Erik m’avait dit à quelle heure arrivait l’avion de Maja, je me suis retenu de l’étrangler à deux mains, j’allais être en retard et j’avais une sainte horreur du retard. J’avais pris les clés de mon père et j’avais pris la direction de l’aéroport, j’allais être dans les temps selon moi pour arriver, mais probablement que j’arriverais seulement au moment où ma sœur sortirait dehors car il y avait un peu plus de circulation que je ne le croyais sur la route. Je me suis finalement garé devant la porte sortie, j’avais déverrouillé les portières pour que le coffre puisse être ouvert lui aussi, mais comme je ne voyais pas ma sœur, je me permis de prendre mon portable et j’envoyai un sms à Lina. #c’est vraiment trop bizarre qu’Erik se trouve une activité de dernière minute…. Le petit con il avait prévu son coup…..#

Pendant que je textais, le coffre s’Était ouvert et quelqu’un avait embarqué de quoi de très lourd avant de refermer. Je regardai dans le rétro et je vis Maja qui s’en venait vers la portière passager. Elle claqua même la porte et me fit savoir qu’elle n’était vraiment pas contente que je ne l’aie pas aidé.

« Bonjour à toi…. Je lui avais laissé un petit dix secondes pour assimiler que je n’étais pas notre petit con de frère. Désolé, je viens d’arriver et je textais ma copine pour lui dire que l’excuse d’Erik était vraiment bidon et qu’il avait prévu me dire juste à la dernière minute que tu revenais en ville…. Mais je suis très heureux de te voir aussi Maja! »

J’avais attenu qu’elle boucle sa ceinture et j’avais pris la route vers la maison. Étrangement, il n’y avait pas autant de circulation sur la route que pour l’aller… c’était le karma faut croire, moi qui détestait être en retard, j’avais eu des petits bouchons et là, pouf plus rien. « T’a fait bon vol au moins ? » J’avais regardé ma petite sœur du coin de l’œil, elle était vraiment très belle, j’étais heureux de la revoir et j’espérais qu’elle resterait le plus longtemps possible. Elle m’avait manqué malgré tout. Nous étions dans la voiture de mon père, il y avait même un siège pour enfant à l’arrière car il lui arrivait souvent d’aller faire les courses avec fille Alva… C’était un grand-père très « gâteau », il aimait la gâter.

Je ne savais pas comment réagir face à Jordan. Il était l’une des raisons de mon départ en Suède. Depuis qu’il avait espionné Josh, je lui parlais à peine. Je ne me confiais plus à lui. Il était presque devenu un étranger à mes yeux.

« Désolé, je viens d’arriver et je textais ma copine pour lui dire que l’excuse d’Erik était vraiment bidon et qu’il avait prévu me dire juste à la dernière minute que tu revenais en ville…. Mais je suis très heureux de te voir aussi Maja! »

Je me contentais de soupirer afin de lui répondre. Puis, j’attrapais mon propre téléphone dans mon sac afin d’envoyer à mon tour un message. Il était adressé à Erik, et je lui demandais pourquoi il m’envoyait le traitre en cadeau de bienvenue. Non, même des années après, je n’avais pas pardonné à Jordan. Je fus même tenté d prendre la parole pour lui répliquer que j’aurai préféré prendre le bus plutôt que de me retrouver dans la même voiture que lui. Mais connaissant nos parents, je n’avais pas envie d’être à l’origine d’un nouveau scandale familial.

« T’a fait bon vol au moins ? »

Je haussais les épaules et plaçais ma tête contre la vitre afin de regarder le paysage défiler. Miami n’avait pas beaucoup changé depuis mon départ. Mais je pouvais apercevoir de ça de là de nouveaux bâtiments, des rénovations, de nouveaux aménagements.

« L’escale à Londres a durée beaucoup plus de temps que prévue, répondis-je enfin. Et ma voisine n’a pas arrêté de bouffer des gâteaux avec une odeur à gerber. Mais sinon, à part ça, ouais. C’était plutôt correct. »

J’avais de la rancune envers mon frère. Mais j’avais aussi du sommeil à rattraper après un voyage aussi long. Alors, pour ne pas m’endormir avant de retrouver mes parents, je me forçais à faire un peu la conversation.

« Alors ? Ta copine ? demandais-je. Elle s’appelle comment ? Ça fait longtemps que vous êtes ensemble. »

Je manquais de lui demander si je pouvais l’espionner afin de savoir si elle dealait de la drogue, mais une nouvelle fois pour nos parents, je m’abstenais.

Je sentais clairement que ma sœur était en colère contre moi malgré toutes les années qui s’étaient écoulées depuis qu’elle était partie. J’aurais pensé qu’elle m’aurait pardonné depuis le temps, sans oublier, mais pardonner au moins…. Apparemment ma sœur était encore plus rancunière que je ne le pensais.  Elle prit son cellulaire, sans doute pour envoyer un message à Erik pour lui donner des bêtises^^, elle faisait, bien, j’allais lui passer un savon moi aussi à ce petit con, il nous avait piégé tous les deux. La famille, c’était important malgré tout ce qui pouvait bien se passer, il fallait passer par-dessus certaines choses, c’est ce que nos parents nous avaient toujours enseigné.  Elle n’avait pas l’air d’avoir envie de me parler, mais elle finirait par ne pas avoir trop trop le choix de le faire, le trajet allait être long si ce n’était pas le cas.

La ville n’avait pas trop changé depuis le départ de Maja, certes, beaucoup de building avaient poussé, mais dans l’ensemble, ça restait quand même la bonne vieille Miami. Ma petite sœur finit par me répondre sur son…. Ses vols car elle parla aussi de l’escale, je n’aimais pas trop avoir à me taper des escales moi non plus, on ne savait jamais ce qui pouvait se passer entre deux vols. J’eus un petit sourire d’ailleurs lorsqu’elle me parla de sa voisine de siège… ça aussi ça pouvait rapidement devenir l’enfer. Surtout que Londres – Miami c’était presque 9 heures de vol alors je pouvais comprendre que si elle avait été coincée à côté d’une voisine désagréable, le vol avait pu être très pénible.

« J’ose même pas imaginer tes heures de plaisir que tu as eu avec cette voisine…. , avais-je répondu à mon tour..  Comment allait mormor et farfar (grand-mère et grand-père en suédois)? . »

J’essayais de faire  un peu la conversation histoire que le retour ne soit pas trop pénible, mais disons que ça pouvait être facilement désagréable compte tenu de la rancœur de ma sœur envers la petite enquête que j’avais fait sur Josh le dealer…. Au moins, il n’avait pas eu le temps de droguer ma petite sœur… et ça j’en étais fier.

« Elle s’appelle Lina! Et on va bientôt fêter notre premier anniversaire. D’ailleurs, je viens d’aller lui chercher une bague… je compte la demander en mariage. avouais-je. Elle s’occupe bien d’Alva, Alva l’aime bien aussi… et puis, Lina a parlé d’adopter légalement la puce… Alva aura une vraie maman et pas juste un père... »

Ça me rendait tellement heureux tout ça. Depuis que Lina avait parlé d’adopter ma fille, je n’arrêtais pas de penser à l’avenir, comment ma fille allait pouvoir s’épanouir davantage avec une maman dans sa vie.

"Qu'est-ce qui t'a donné envie de revenir au pays???"

Après lui avoir parlé de ma voisine dans l’avion, il me demanda comment allaient nos grands parents. J’aurais été tenté de lui dire de leur poster la question lui-même, mais pour ne pas m’endormir, je lui répondis.

« Mormor est de plus en plus dérangée par sa cataracte, répondis-je. C’était souvent moi qui lui faisait sa lecture. Je lui enregistré des cassettes où je lis qu’elle pourra écouter pendant mon absence. Et Farfar est toujours le même. J’ai l’impression qu’il croit qu’il a encore quarante ans ! Il n’arrive pas à se ménager. Un jour j’ai peur qu’il lui arrive un truc ! »

Je soupirais avant de lui demander des informations sur sa copine. Il avait l’air de filer le parfait amour avec elle. Son nom était Lina, il voulait la demander en mariage et elle était prête à adopter Alva.

« C’est super, répliquais-je qu’à moitié convaincu. »

Au fond, j’étais un peu jalouse. Depuis Josh, je n’avais eu que des flirts. Il avait été le seul garçon avec qui j’avais un jour imaginé finir ma vie. Alors le fait que le responsable de notre rupture soit proche de la vie parfaite avait légèrement tendance à m’iriter.

« Qu'est-ce qui t'a donné envie de revenir au pays??? »

Je tournais légèrement la tête lorsque nous passâmes à coté de notre école primaire. Tant de souvenirs se trouvaient dans ce lieu. En vingt ans, j’avais l’impression que ça n’avait pas changé le moins du monde. Il y avait même encore cette fresque hideuse que ma classe avait peinte. Une fois l’établissement hors de vue je répondis à Jo.

« C’est Eric, répondis-je. Il m’a parlé de Lina justement. Il m’a dit qu’il était temps que je la rencontre. »

Je regardais un peu plus mon frère. S’il savait à quel point je l’avais hais pour ce qu’il avait fait ! Et cette rancune était loin d’être totalement partie !

« Au début, je n’avais pas envie de te revoir, avouais-je. Il y a des cicatrices qui sont longues à refermer. Mais ma librairie a pris feu, alors j’ai vu ça comme un signe. »

De nouveau, je regardais l’horizon. Droit devant nous. J’avais hâte d’arriver !!
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J’écoute ma sœur me parler un peu de nos grands-parents et je souris un peu. Ils n’allaient pas en rajeunissant après tout… Farfar était une vraie tête de mule, j’étais certain qu’un jour, Mormor le retrouverait mort d’une crise cardiaque suite à un effort… Nous n’allions pas le changer, il aimait vivre comme ça. J’ignorais si Mormor allait se décider à se faire opérer pour sa cataracte, après tout, elle avait bien le droit de passer le reste de sa vie à mieux voir…

« Tu sais bien comme moi qu’on ne pourra jamais le changer, il est têtu… mais on l’aime quand même! ! »

Elle n’avait pas l’air très convaincue de ce que je lui disais à propos de Lina, soit ça ou bien elle ne voulait pas être heureuse pour moi…. Ou bien elle était jalouse, j’ignorais quelle option était la mieux.

« Je suis heureux! Et toi, est-ce que tu l’es un peu au moins? » lui demandais-je.

Je regardai la route, tout droit devant moi, il m’arrivait parfois de jeter un œil vers ma sœur, mais j’avais aussi l’impression que moins je la regardais, plus elle serait à l’aise de parler, ou moins elle serait fermée à le faire. Puis, elle me dit que c’est Eric qui lui avait qu’il était temps qu’elle rencontre Lina. Ce petit frère… il avait parfois le don de se mêler de ce qui ne le regarde pas, mais d’un autre côté, j’étais content que Maja revienne.

« Est-ce qu’il t’a dit que tu serais à nouveau une tantine? . »

Je ne rajoutai rien de plus attendant de voir si elle avait faire 1 plus 1 ^^, mais par la suite, elle me fit comprendre qu’elle m’en voulait encore et que c’est le signe de sa librairie qui avait pris feu qui sonna le départ pour elle.

« Je suis désolé pour ta librairie, je sais à quel point tu aimes les livres. »

Je ne rajoutai rien de plus. Nous tournâmes finalement dans le quartier résidentiel où la famille avait toujours vécu. On ne tarderait pas à arriver devant la maison familiale où je me garai dans l’entrée avant d’éteindre le moteur. Je soufflai un peu avant de sortir. Je me dirigeai vers l’arrière pour sortir les valises de Maja.