J’aimais la simplicité dans la vie. J’avais toujours vécu modestement et même lorsque j’avais commencé à gagner ma vie plus correctement, je n’avais pas eu un train de vie dispendieux. Mes parents m’avaient inculqué des valeurs que je gardais profondément ancrées en moi. L’argent ne faisait pas le bonheur en était une. J’avais insisté auprès de Derek pour choisir une maison agréable, dans un quartier boisé où il faisait bon vivre pour Maxence. La maison n’était pas extravagante. Un vestibule qui amenait dans la pièce principale à côté de laquelle se trouvait une merveilleuse cuisine. Trois chambres, une salle de bain, un beau petit jardin. Que demander de plus ? Pour moi cela me suffisait amplement. Mais ce n’était pas au goût de mon compagnon qui trouvait la demeure bien trop étroite. Il y avait toujours eu un fossé qui nous avait séparé sur la possession de biens. Lui aimait tout ce qui était extravagant alors que moi j’aimais ce qui se faisait de discret. Pour le moment, j’avais eu gain de cause seulement je savais que cette maison n’était que temporaire et que Derek chercherait à négocier pour avoir quelque chose de plus grand. Malgré tout, je ne pouvais m’empêcher de ranger nos affaires un peu partout dans la maison et de rendre ce cocon chaleureux.
 
Alors que j’organisais la cuisine, la voix du milliardaire dans l’entrée me parvint. « Je suis dans la cuisine ! » lui répondis-je en tâchant de ne pas trop élever la voix. Maxence dormait et je ne voulais pas le réveiller. Si sa sieste pouvait durer encore une heure cela ne serait pas de refus. « Comment ça été avec Violette ? » Le père de famille avait été en effet voir sa fille Violette à leur demeure. Les relations entre eux étaient tendues et je trouvais cela dommage. La jeune femme avait ses raisons d’en vouloir à son père, mais si les deux pouvaient se réconcilier je n’en serais que plus heureuse. J’écoutai attentivement ces propos relatant leur rencontre tout en rangeant une pile d’assiette dans un placard. « Je passerais la voir prochainement. Peut-être que si c’est moi qui lui parle, les choses seront plus faciles. Elle m’a toujours écoutée, alors qui sait … » Je savais que Violette m’avait toujours estimée et s’en était de même pour moi. Mes mots avaient souvent plus de poids que ceux de son propre père alors j’avais sans doute plus de chance que lui de désamorçait la situation tendue. « Je tourne en rond à la maison Derek, fallait bien que je m’occupe. Tu sais bien que c’est pas mon genre de rester à attendre que le temps passe sans rien faire. » Je levai les yeux au ciel avec un sourire amusé. J’avais toujours eu la bougeotte. Même pendant ma grossesse, lorsque le médecin m’avait dit de rester aliter, je ne pouvais m’empêcher de bouger. J’avais constamment besoin d’être dans l’action, de mettre mon temps à profit. Derek s’approcha de moi et j’encadrai son visage de mes mains avant de lui voler un baiser. « Tu peux ranger les couverts si tu veux, dans le tiroir qui est ouvert. » Je pointai du doigt le tiroir qui se trouvait à un mètre de nous. C’était assez drôle de voir que je menais la priorité du déballage des cartons sur la pièce la moins utilisée par nous deux. La cuisine. Aucun de nous ne cuisinait. Un énorme défaut avec un enfant à la maison. Pour le moment cela allait car j’allaitais Maxence mais quand il sera plus grand hors de question de lui donner une boite de chinois du coin. Peut-être devrais-je penser à m’inscrire à un cours de cuisine. Mon compagnon était entrain de jeter non sans délicatesse les couverts dans le tiroir dans un grand fracas. Je fronçais les sourcils et le regarda. « Tu peux faire encore plus de bruit, je crois que Maxence n’entend pas trop bien. » Dans le baby-phone j’entendis mon fils bougeait. Je jetais un coup d’œil à la vidéo sur le petit écran. Pitié, pas maintenant. J’aimais Maxence mais bénéficier d’un peu de tranquillité de temps à autre c’était vraiment précieux. Finalement le bébé s’immobilisa pour retourner dans un sommeil profond. Je soupirai et un petit sourire apparut sur mes lèvres. « Ton agent immobilier a appelé tout à l’heure. Il m’a envoyé la prospection des maisons à Miami selon TES critères. » Je saisis l’ipad posée sur le plan de travail et la tendis à Derek afin qu’il regarde ce qui avait été envoyé. J’étais vraiment pas en accord avec les biens proposés et j’avais tout comme l’impression que mon avis sur la question n’avait pas été pris en compte.
 

Maxence dormait ce qui nous laissait le champ libre pour continuer de déballer les cartons en toute tranquillité. L’inconvénient d’une petite maison c’était que toutes les pièces étaient proches les unes des autres et qu’il ne fallait pas faire trop de remue-ménage. Je mentionnai le coup de fil de l’agent immobilier, un peu plus tôt dans la journée et montra à Derek la liste des biens envoyés. Cela ne me correspondait pas du tout et j’avais bien l’intention de lui faire savoir. Il voulait une autre maison, d’accord, mais avec certaines conditions. Mon compagnon énuméra d’ailleurs mes quelques conditions que je souhaitais pour notre future maison. « T’as oublié le dressing ! Il a une importance de taille tout de même, sans doute plus pour toi que pour moi d’ailleurs. » Parfois j’en venais à me dire que la penderie de monsieur était bien plus fournie que celle de madame. « Et le triple garage on est pas obligé, franchement de la place pour deux c’est largement suffisant ! » Je levais les yeux en l’air en soupirant légèrement. Derek me dit qu’il allait en reparler avec son agent immobilier. Peut-être pourrait-il nous trouver une maison à rénover et que l’on pourrait aménager comme bon nous semblait. Cette idée ne me déplaisait pas. Pourquoi pas après tout, cela pouvait être un bon compromis. Il me parla d’habiter dans un quartier familial. « Je ne comprends pas ce que tu as contre Wynwood. C’est charmant ici. Très culturel et boisé. Je m’y sens bien. » Je me retournai vers Derek qui me tenait entre ses bras. Mon regard plongea dans le sien. Ces beaux yeux bruns m’envoutaient toujours autant. J’étais sans doute l’une des seules personnes à avoir un aussi grand pouvoir de persuasion sur ce grand homme d’affaire et je ne me privais pas de l’utiliser à bon escient lorsque je voulais gain de cause. Il fallait dire que j’étais également une fine négociatrice, je savais où lâchait du leste pour mieux en reprendre ailleurs. Je travaillais peut-être pas dans les affaires comme lui mais je savais négocier et davantage quand cela concernait également mon fils. « Rénover une maison est une proposition à étudier. Tu peux mettre ça sur la liste des critères mais si on a un coup de cœur pour une maison déjà toute prête c’est bien aussi. Je ne ferme pas la porte à ce genre le projet. Coconut Grove, j’en sais rien. Dans un quartier résidentiel alors peut-être ? » Je me sortis de l’étreinte. Ce quartier ne me plaisait pas plus que ça. J’aimais l’ambiance de Wynwood, j’avais eu un sacré coup de cœur pour ce quartier mais cela ne plaisait pas monsieur Watts. Je pris une quelques ustensiles de cuisine dans un carton que je rangeai sur le plan de travail. « Je t’accorde Coconut Grove, si tu me promets que notre maison ne sera pas une forteresse ! » Lâcher du leste pour avoir autre chose en échange. Derek tenait à fortifier notre maison avec un mur, des caméras, un services de sécurité et je ne sais quoi. Pour moi c’était hors de question. Je tenais à me lier d’amitié avec mon voisinage sans qu’on nous prenne pour de riches snobinards repliés sur eux-mêmes. Je ne voulais pas que Maxence vive dans une prison dorée.

On n’arrivait à se mettre d’accord sur certains détails et pas sur d’autres. En même temps, cela aurait été bien trop beau que nos désirs s’accordent si facilement. On était bien trop différents l’un l’autre par moment. Mais à force de discussion et de négociations je savais que nous trouverions un terrain d’entente. Derek ne voulait pas démordre du fait que le quartier dans lequel nous vivions temporairement n’était pas assez bien. Pourtant moi je le trouvais très charmant. Wynwood était en plein réhabilitation et j’étais persuadée que d’ici quelques années le quartier serait parsemé des plus belles villas de la ville. Alors que je pensais avoir gagner, il imposa une condition pour que nous restons dans le quartier. Une maison domotique. « Non. Tu vas pas faire de notre maison un lieu de haute technologie. Je suis d’accord pour qu’Alexa note notre liste de course et enclenche la musique, mais pas plus. » Je savais que la liste des technologies intégrée dans une maison pouvait être aléatoires, mais je savais aussi très bien que la liste qu’aurait en tête Derek était sans doute plus longue que la liste de course pour le mois. Le garage et les caméras n’étaient que la partie immergée de l’iceberg dirons-nous. « Je veux vivre simplement. Garde tes gadgets pour ton bureau. Si tu veux un garage à ascenseur tu utiliseras celui de ta compagnie. Mais hors de question qu’on est ça chez nous. » Je pouvais céder pour les caméras à l’extérieur mais je n’en dis rien. Il se moqua de moi en disant que je pourrais toujours utilise des interrupteurs pour allumer et éteindre les lumières de la maison. Je le regardai et lui fit une petite grimace. Avant que je ne pu lui lancer une réplique cinglante, il s’approcha de moi pour m’embrasser. Je savais ce qu’il tentait de faire et je n’étais clairement pas dupe. Il en fallait plus pour me faire céder. Je passai mes bras autour de son cou et passa machinalement une main dans ses cheveux. « Tes câlineries ne me feront pas changer d’avis tu sais … » Je lui offris un petit sourire malicieux et lui vola un baiser qui devint rapidement très langoureux. Ça faisait deux mois que j’avais accouché de Maxence et un peu plus que mes échanges intimes avec Derek s’étaient arrêtés à des câlins. Je commençais à trouver le temps long et mes envies de faire l’amour me prenait plus intensément en ce moment. Je devais encore attendre un mois, un mois et puis je retrouverais le plaisir de la chair. Je me détachai de mon homme, prenant un peu de distance avant de sombrer dans une folie passagère que je regretterais. Le temps de convalescence après un accouchement était important et je ne voulais pas précipiter les choses.
 
Maxence bougea de nouveau dans son lit. Je jetai un coup d’œil à l’écran. Fausse alerte, il dormait toujours. Le connaissant, il ne devrait quand même plus trop tarder à se réveiller de sa tête et réclamer sa tétée. Je posai mes yeux de nouveau sur Derek. « Je cède pour Coconut Grove si tu te tiens à ne pas transformer notre maison en celle de Batman. » Je préférais encore changer de quartier que de voir mon enfant vivre dans un environnement technologique, qui le rendrait dépendant dès son plus jeune âge et qui le rendrait assisté. J’étais pas contre les nouvelles technologies mais avec parcimonie. Pas besoin de voir sa vie être contrôlée entièrement par les ordinateurs. « Mais en attendant, nous habitons encore ici et … on ne sait pas pour combien de temps donc … aide-moi à faire de cette maison un lieu chaleureux et ordonné s’il te plait ! Les boites ne se rangeront pas toutes seules. » Je lui offris un sourire et lui indiqua de mon index une pile de cartons qui n’attendaient qu’à être ouverte. Je n’en pouvais plus de voir ce bazar s’accumulait un peu partout dans la maison. Je savais que d’ici quelques mois on devrait sans doute refaire les boites, mais peu importe en attendant je voulais que les choses trouvent une place dans cette maison. Qui sait, avec un peu de chance, Derek allait finalement tomber sous le charme de cette maison et on allait finir par rester habiter ici un certain temps. Je souris en pensant à cette idée. J’y croyais pas vraiment car il se plaignait sans cesse que c’était bien trop petit. Il faudrait un miracle pour qu’il change d’avis.
 
Maxence se mit à pleurer et je ne pu m’empêcher de soupirer. « Je vais allaiter Maxence, t’as qu’à continuer de ranger si tu veux. » Je montai à l’étage et entra dans la chambre de mon fils. Un large sourire s’afficha instinctivement sur mes lèvres en croisant le regard de ce petit bonhomme. Je le pris dans mes bras et m’assis avec lui dans le fauteuil d’allaitement de sa chambre. Ce moment que je partageais avec mon fils était toujours le plus beau des moments. Si complice, si unique. Pour rien au monde je ne reviendrais sur mon choix.

Je ne pu m’empêcher de sourire lorsque j’entendis Derek pester contre le lit trop petit pour lui. Tournée sur le côté, les yeux fixés sur mon livre je l’entendais grommeler. Je mis mon marque-page et refermai le bouquin pour me tourner vers le grand brun qui avait les sourcils plus que froncés. « Tu n’auras qu’à aller demain choisir un lit plus grand. C’est pas la place qui manque dans notre chambre. » Même si notre maison était trop petite à ses yeux, il fallait avouer que les pièces étaient quand même de tailles convenables. Un lit un peu plus grand ne prendrait pas toute la surface de la pièce. « Et puis, estime-toi heureux de dormir dans un lit et non pas sur un matelas de camping. La première fois que j’ai emménagée à N-Y, j’avais quasiment pas de mobilier et je n’en suis pas morte pour autant. » Parfois, il était bon de se rappeler qu’on avait quand même de la chance, beaucoup de chance, comparé à certaines autres personnes. Il ne fallait pas prendre tout pour acquis et s’estimer heureux de ce qu’on possédait. On ne savait pas de quoi était fait l’avenir. Je vins me blottir dans ses bras, la tête posée sur son buste. Je pouvais entendre son cœur battre doucement dans sa poitrine. « Je suis contente d’être revenue à Miami. Je sens qu’on va y être bien et d’ailleurs ce sera encore mieux quand je reprendrais le travail ! » Je lâchai un petit rire. Derek savait à quel point j’aimais travailler et combien c’était important pour moi. Même pendant ma grossesse, j’avais tenu à travailler aussi longtemps que possible. Je savais que j’aurais du m’arrêter bien plus tôt mais j’avais tenu à continuer les consultations au dispensaire car cela me tenait à cœur et que je ne supportais pas d’être alitée. Me retrouver enfermée avec Maxence pendant six mois c’est le maximum que je m’étais donné. En janvier, je reprendrais mon poste au cabinet en ville pour mon plus grand plaisir. « D’ailleurs, je vais commencer à me renseigner sur la garderie pour Maxence, je sais qu’il y en a une très bonne près de mon cabinet. » Je regardai Derek. Je savais qu’il n’était pas tellement pour que Maxence aille fréquenter la collectivité trop tôt mais il travaillait et je ne tenais pas à rester à la maison plus de temps. J’allais réduire mes heures au cabinet pour passer le plus de temps possible avec mon fils. Je ne voulais pas qu’il se sente relégué au second plan de ma vie. Et je savais combien il était important de profiter de ses premières années de vies qui passaient bien trop vite.

J’avais envie de reprendre le travail dès le début de l’année 2021. J’aimais être mère mais je détestais être cloitrée à la maison avec mon fils. J’avais parfois l’impression d’être une mauvaise mère en ayant ce genre de pensées, un sentiment de culpabilité s’emparait de moi le temps d’un instant, avant de me rappeler ce que je disais à beaucoup de mes patients : être bon parent c’est avant tout prendre soin de soi. Si l’on veut donner le meilleur à son enfant, il faut pouvoir s’écouter pour être dans la meilleure forme possible. Et personnellement, garantir une santé mentale stable pour moi c’était de reprendre le chemin du cabinet. De ce fait, Maxence allait devoir être gardée pendant nos heures de travail et j’informais donc Derek que j’allais entreprendre des démarches pour trouver une garderie. Mon compagnon refusait cela. Il ne souhaitait pas que Maxence aille en collectivité avant l’âge de ses deux ans. Je le regardai avec de grands yeux.

« Deux ans ? Derek, je ne vais pas attendre deux ans pour aller travailler … » C’était tout bonnement impensable pour moi. « J’ai conscience qu’il est petit et que ce n’est pas l’idéal, mais je ne pourrais pas rester à la maison encore deux ans à jouer la maman au foyer… »

Il semblait être compréhensif au moins sur ce point-là. Il comprenait mon besoin et il allait s’assurer d’être là pour Maxence. Ses lèvres se posèrent sur les miennes avant que je ne puisse le remercier d’être attentif à ce dont j’avais envie. Je me libéra de son étreinte et le regarda un instant.

« Tu as l’intention de t’arrêter de travailler pour t’occuper de lui pendant que je serais au cabinet ? Je croyais que tu voulais reprendre tes affaires ? »

Il souhaitait être là, très bien, mais s’occuper d’un enfant à temps plein et travailler en même temps c’était deux choses clairement incompatibles. Il me dit être prêt à prendre Maxence au bureau avec lui car Derek ne souhaitait pas que quelqu’un d’autre s’occupe de mon fils. Comment se concentrer sur des dossiers avec un bébés qui ne cesse de vous réclamer toutes les cinq minutes ? Je lâchai un petit rire amusé face à ses propos.

« Je crois que tu ne mesure pas l’ampleur de la chose. Je ne suis pas certaine que des collaborateurs apprécient être interrompus lors de vos réunions par des odeurs nauséabondes de couches ou des cris stridents … Je vois pas ce qui te gène dans le faite de confier Maxence à des professionnels. Il y a des garderies très bien à Miami, dont j’ai eu d’excellents retour. Mes parents travaillaient et j’ai été confiée pendant mon enfant et j’en suis pas restée traumatisée. »

Maxence allait avoir six mois en janvier et cela ne m’inquiétait pas de le confier si je sentais que la structure dans laquelle allait était vraiment top. Au contraire, je me disais que ce serait même bien pour lui de se retrouver avec des enfants.

« Tu sais on est pas obligé de le confier toute la journée non plus. Je vais prendre mes lundis matins et mes vendredi après-midi au cabinet autant que possible. Tu peux adapter tes horaires de façon à ce qu’ils fassent de petites journées. Pas besoin de l’y mettre de huit heures à dix-neuf heures … »

J’essayais de convaincre Derek d’avoir confiance en mon choix, mais je savais que cela serait difficile. J’avais des arguments et je les lui exposés. De toute manière, je savais que j’aurais gain de cause. Maxence était mon fils et Derek savait très bien que j’emportais la majorité des décisions le concernant la plupart du temps, et cela même s’il m’aidait à l’élever.