27/08/2020 | J’avais l’impression que Dieu avait décidé de me punir pour toutes les erreurs du passé que j’avais commises. Je savais que j’avais quitté le sentier de la bonne conduite à plusieurs reprises mais est-ce que cela valait une punition aussi cruelle ? Pourquoi me reprendre l’homme que j’aimais et avec qui je comptais faire ma vie ? Le voir être emprisonné à cause de mon passé avait déjà était plus que suffisant, mais non il avait fallu que la sentence soit accrue. William était mort depuis quinze jours maintenant. Poignardé par un autre prisonnier. Le choc avait été tellement énorme que sur le coup, mon cerveau avait tout simplement décidé d’ignorer cette information. C’est seulement le lendemain de l’appel de la prison que je réalisai ce qu’il venait de se passer. J’avais passé des jours à paraitre forte devant les amis et la famille et puis quand tous le monde était reparti à sa vie, je m’étais écroulée.
 
Cela faisait des jours que je n’étais que le fantôme de moi-même. J’étais en colère et j’évitais le plus possible ma sœur qui se démenait tant bien que mal dans la maison. Je savais que j’aurais dû être plus reconnaissante qu’elle soit là pour moi, mais je n’y arrivais pas. Je n’éprouvais que colère et culpabilité. Je faisais des allers-retours entre ma chambre et l’extérieur de la maison pour aller courir, tout en faisant un arrêt à la salle de bain entre deux. J’évitais toutes les autres pièces de la maison de peur d’y croiser ma sœur. Je ne voulais pas être la méchante fille que j’essayais de contenir.
 
J’éprouvais tout de même quelques remords à mettre de la distance entre nous et malgré toutes la douleur qui m’accablait je pris l’initiative un matin de me lever aux aurores pour préparer un brunch sympa à ma jeune sœur qui dormait à l’étage. Préparer le petit-déjeuner me rappelait des souvenirs douloureux alors j’allumais Amazon Prime et y lançai la série Charmed que j’avais commencé à regarder il y a quelques semaines. Apparemment c’était une série culte des années 2000 qu’il fallait que je rattrape. Je fis cuire une dizaine de pancakes tout en préparant du café et en découpant quelques fruits que j’avais eu la force d’aller chercher au marché la veille. Je m’arrêtai un instant, prise dans l’intrigue de la scène qui se déroulait sur la tablette que j’avais en face de moi et me surpris à sourire légèrement face à la scène humoristique. Lorsque je relevai la tête, je vis Cassandra dans l’encadrement de la porte de la cuisine. Je ne l’avais pas entendue arriver. « Salut. » Il était encore tôt. Peut-être que la cuisine où bien même le son de la série l’avait réveillée ? « J’ai fait trop de bruit ? Je voulais pas te réveiller … Je préparais le petit-déjeuner, c’est la moindre des choses après tout ce que tu as fait ces derniers jours. » Je sentis ma voix se briser légèrement. J’étais prise d’émotion. Je ne pouvais pas nier que ma sœur avait fait preuve d’une grande bienveillance envers moi.
 

Depuis que la prison lui avait annoncé sa mort, ma sœur Kath était telle une zombie. Faisant tout par automatisme.
Nous avions eu de la visite pendant quelques jours, elle faisait la forte devant toutes ces personnes mais je savais au fond d'elle qu'elle se retenait de craquer devant eux.

Lorsque tout le monde était parti elle se referma comme une huitre. Je l’entendais le soir craquer lorsqu'elle pensait que je ne l’entendais pas.
Je savais qu'elle aurait besoin de temps. Je faisais tout mon possible pour lui rendre la vie plus facile. M'occupant de la maison, des repas et toutes ces taches qui autrefois me répugné. Mais je lui devais bien ça à ma sœur. Je voyais bien qu'elle m'évitait autant que possible. Et je ne forçais en rien. Je sais que quand elle sera prête elle viendra me parler. Je lui laisserai le temps et l'espace nécessaire pour qu'elle puisse faire son deuil.

Ce matin je me suis réveillée en sursaut, avec une drôle de sensation au fond de moi. J'entends du bruit dans la cuisine. En regardant l'heure sur mon réveil je commence à paniquer me demandant qui pouvait être là. A cette heure-ci normalement Kath devrait être parti courir. J'avais remarqué cela depuis plusieurs jours. Comme une routine pour elle. Je me hâte de descendre en pija-short ne prenant pas la peine d'enfiler mon peignoir. J'attrape au passage le premier truc que j'ai sous la main, mon livre de chevet de plus de 500 pages. Ça devrait suffire pour assommer l'intrus.

Je m'approche doucement de la cuisine et lorsque j'arrive dans l'encadrement de la porte je vois ma sœur faire un petit déjeuner. Au vu des quantités je me demande qui vient manger. J'esquisse un léger sourire, ça fait tellement du bien de la voir derrière les fourneaux. C’est tellement plaisant de la voir ainsi que je reste ici en faisant aucun bruit, resserrant le livre tout contre moi. Je la vois regarder quelques choses sur sa tablette, et je la vois même avoir un léger sourire devant ce qu'elle voit. Je ne sais pas ce qu'elle regarde mais ça lui fait du bien on dirait.

Elle relève les yeux dans ma direction. Elle ne prend pas la fuite au contraire. J'ai comme l'impression qu'elle tente une approche.

Bonjour Kath. Je lui souris lorsque je la vois un peu embêté par le fait qu'elle m'aurait réveillé en faisant du bruit.

Oh non ne t'inquiète pas tu ne m’as pas réveillé. Je me demandé qui été dans la cuisine c'est tout.

Elle me dit qu'elle préparé le petit déjeuner comme pour me remercier de ce que j'avais fait pour elle ces derniers jours.

Je n'ai rien fait de plus que ce que tu as fait pour moi depuis que je suis revenue. Et puis je suis ta sœur, je dois prendre soin de toi aussi de temps en temps.

J'ose m'approché d'elle pour lui déposer un baiser sur la joue avant de me tourner vers la table où trône un énorme petit déjeuner. J'ai l'impression qu'elle a retrouvé l'appétit et ça fait plaisir à voir.
Je vois qu'elle a dressé la table pour 2 personnes. Ça a l'air délicieux tout ça.

Elle me fait un signe de la tête comme pour m'inviter à m'installer à table avec elle. Ce que je fais bien évidemment. Elle se sert de l'eau chaude sur mon sachet de thé préféré, pêche cassis.

Tu regardais quoi avant que je te dérange ?

Je ne savais pas quoi lui dire, ni par où commencé. Je sais que si elle avait envie de parler de ce qu'il s'est passé il y a quelques jours elle le fera d'elle-même. En attendant j’était prête à parler de tout et de rien, même de la météo.