Sa main se dépose sur ma joue, la caressant doucement avec son pouce. J’appuie son geste, attrapant sa main de la mienne avant d’y déposer un baiser. Tout ce que tu voudras... Un prénom mixte alors... C’est vrai que c’est un peu glauque comme demande, mais après tout c’était un être humain avec un cœur, il était vivant et il a le droit comme tout le monde d’avoir une identité, de ne pas juste être « le bébé ». Et je pense que psychologiquement j’en ai besoin, de mettre un prénom sur cet enfant et d’en parler librement, je pense sincèrement que ça peut être une aide dans mon deuil. Je réfléchis quelques instants, un prénom mixte, il n’y en a pas des masses mais nous allions bien trouver. « Gabrielle. » Dis-je finalement. « Ça me fait penser à un ange. » Car pour moi c’est ce que mon enfant est maintenant, un ange. Et lorsque le soleil se couchera, quand je regarderai les étoiles dans le ciel sombre de la nuit, j’aurais toujours une pensée vers ce petit bout qui n’a jamais eu le jour. J’aurais toujours une pensée pour Gabrielle, mon ange perdu.
Je ne sais pas ce que pense James de tout ça et je pense pas que j’ai envie de le savoir. Je sais comment il est et je sais qu’il ne montre pas ses sentiments, voire très peu. Et j’ai vraiment pas envie d’engendrer une dispute c’est vraiment pas le moment. Pas maintenant. Tout me semble futile après ce qui vient de se passer. J’ai juste besoin de sa présence, juste qu’il soit à mes côtés, justement besoin de sentir sa peau contre la mienne, son souffle, de me caler sur sa respiration et d’être juste bien. Parce que je suis toujours bien quand je suis à ses côtés. C’est une épreuve que l’on va surmonter à deux, car c’était son enfant aussi. Même si il ne peut sûrement pas ressentir les mêmes choses que moi – parce que je l’ai porté, le lien était différent – je ne doute pas qu’il y tenait quand même. Mes yeux se plantent alors dans les siens. « Tu n’aimes pas Gabrielle ? » J’ai pas envie qu’il me dise oui pour me faire plaisir. « J’aimerai rentrer à la maison… » Murmurais-je

Et puis d’un coup je me suis demandée comment ça allait se passer à la maison, je veux dire comment je vais me sentir pendant quelques jours ? Mal sûrement, surtout que j’avais mis beaucoup d’espoir dans ce bébé et surtout je m’y suis attachée énormément. J’ai proposé de donner un prénom à ce bébé, une manière pour moi de faire mon deuil j’imagine. Je suis désolé de ne pas savoir quoi te dire, mais je ne sais pas quoi faire, ni quoi dire... Je sais que ça va être compliqué les prochains jours, mais tu es forte, tu vas surmonter cette douleur, tu le dois pour Logan, lui il est toujours là. C’est vrai que mon fils n’a rien demandé lui, de voir sa mère dans cet état, et je resterai toujours là même avec lui mais cela n’empêchera pas la douleur d’être présente dans mon être, je me devrais juste de sourire et d’être toujours la même qu’hier, pour lui. Mon fils est ma vie, mon rayon de soleil. « Alors ne dit rien » Dis-je en prenant sa main et en la posant sur mon visage.
Je dis alors à James que j’aimerai rentrer à la maison, je pense que c’est le seul moyen en ce moment pour me sentir mieux, retrouver mon chez moi, mon lit, mon odeur, cet endroit si rassurant. Oui, je pense que tu vas sortir bientôt, Lily-Anne devrait passer, pour te voir… Bon juste en tant que gynéco, on est bien d’accord. Tu veux dormir un peu ? « J’espère, j’aimerai vraiment rentrer voir Logan et … Bref je veux rentrer. Non, je dormirai à la maison, si j’y arrive. » Dis-je dans un souffle. Bien que je suis épuisée, vraiment épuisée et les sédatifs pour l’avortement me rendent encore un peu vaseuse. Juste à ce moment Lily-Anne fait son entrée dans la chambre, je pose mon regard sur elle, dans l’espoir qu’elle me donne l’autorisation pour sortir de cette chambre et laisser ma douleur derrière moi, juste quelques minutes de répit. Joy, je suis désolée pour votre enfant. Le médecin est venu me voir est m’a expliqué la situation. Comment vous sentez-vous physiquement ? Physiquement ? ise à part que j’ai un mal de chien ? Parce que sincèrement, je ne m’attendais pas à ça. Je hausse les épaules. « Ca va. » Ils voudraient vous garder une nuit en observation … Oh non non, hors de question, juste pas possible. J’ouvre la bouche, prête à dire que non, que je veux partir et qu’on a pas le droit de me retenir ici. Elle lève la main pour poursuivre ce qu’elle a à dire. Sauf si je prends la responsabilité de votre prise en charge à l’extérieur. Est-ce que j’avais vraiment le choix ? L’envie de rentrer à la maison prenait le dessus bien évidement et j’aurais tout fait pour, même si je devais avoir Lily-Anne plusieurs fois par jour à la maison. « Je veux rentrer » Dis-je pour montrer mon accord sur ce qu’elle venait de me dire. Je dois savoir, sincèrement, si vous vous sentez apte à rentrer chez vous Joy. Je sais que c’est beaucoup demander de juger votre état de façon objective mais c’est important. Dit-elle alors que sa main part à la rencontre de la mienne pour la serrer légèrement, montrer son soutien et bizarrement, ça me faisait un bien fou, même si je dois dire que je ne la porte pas dans mon cœur. « Je suis apte, tout ce que vous voulez là, apporter moi les papiers, faut signer des papiers ? Voir le docteur ou juste signer les papiers ? J’ai pas de stylo, tu as un stylo James ? » Dis-je en parlant un peu vite, mes mots s’entrechoquant.