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 Mon salut dans la fumée

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(#)Sujet: Mon salut dans la fumée  |   Mar 27 Juin - 7:36

Mon Salut dans la fumée


Kathelyn Parks + Céleste Landre + Libre
C
a faisait deux jours que j'étais à Miami et, sous l'effet du jet lag, toujours totalement à l'ouest. J'avais trouvé une auberge de jeunesse miteuse en plein centre ville, jusqu'à ce que je tombe rapidement sur l'annonce d'un appart qui se libérait deux rues plus loin. Loyer pas excessivement cher, et mes économies me le permettaient. C'était pas du grand luxe mais pour commencer, c'était parfait. Et puis, quelle aubaine de trouver un pied à terre si rapidement! Je ne pouvais pas cracher dessus. Tout s'enchaînait comme je l'espérais.

J'avais bien préparé mon voyage financièrement, à défaut de l'anticiper proprement question boulot... J'avais de quoi tenir les trois premiers mois, mais il me faudrait trouver rapidement du travail, et j'étais parfaitement consciente que je ne décrocherais rien dans le cinéma tout de suite. Il me faudrait m'acclimater pour commencer, rencontrer les bonnes personnes, et surtout, m'amuser un peu. La conquête du 7ème art était aussi un prétexte pour moi. Un prétexte pour m'évader un peu et sortir de ma zone de confort.

A Surrey, au sud ouest du Grand Londres, je commençais à végéter. Un an que je galérais après avoir enchaîné des stages en plateau, et les contrats se raréfiaient de plus en plus. Le contact était difficile. Les USA m'attendaient. D'ailleurs, j'avais pensé à Los Angeles dans un premier temps. C'était un peu là que tout se passait... Pourquoi avais-je changé d'avis? Parce que je ne voulais pas arriver tout de suite au coeur de l'action. J'aimais bien le challenge et l'alternative de la Floride qui m'avait toujours fait rêver avec son ciel azur éclatant et ses palmiers à perte de vue. La population me conviendrait peut-être mieux, aussi... Ca serait l'étape avant le grand saut, le temps de poser mes marques sur la terre de Christophe Colomb.

Pour être honnête, je n'avais même pas encore cherché de job. J'avais passé ces dernières 48 heures à me remettre du trajet, et à fouler de mes pas nerveux le goudron brûlant de la ville, en quête de ses beautés. J'avais pris quelques photos, flâné comme une touriste, avais fait un tour à la plage, trempé le bout de mes orteils dans l'eau, observé les passants... Mais ce soir, c'était le soir où je sortais. Seule, bien évidemment, mais je comptais bien y remédier. Il me faudrait trouver des alliés pour rendre mon séjour agréable. Pour m'intégrer. Sinon, tout capoterait indubitablement. Seule, je n'étais pas bien. J'avais besoin de la foule. Le brouhaha, même s'il ne m'était pas adressée, m'extirpait de la solitude et de mes angoisses. Je ne pouvais pas rester sans rien faire à m'apitoyer sur mon sort. Ca, c'était pas possible.

Au détour d'une promenade cet après-midi, j'avais découvert ce bar. The Seven Devil Bar. Ses lumières et éclats de voix m'avaient attirée. J'avais de la chance: il n'était qu'à un bloc de mon appart. J'avais donc pris la décision d'y revenir vers 21H, l'heure où l'ambiance commençait à s'échauffer.

Effectivement, en arrivant devant l'enseigne festive, les éclats de voix se firent plus enivrés qu'auparavant, et les rires plus présents. Certains étaient là pour s'oublier, d'autres cherchaient simplement à s'amuser, se détendre après une journée de durs labeurs, et d'autres encore ne voulaient que se montrer, se pavaner, ou bien tout bonnement, se détruire. De quelle catégorie faisais-je bien partie? Il me semblait être celle qui voulait s'amuser, sans trop penser.

Je me dirigeai donc vers le comptoir pour commander un breuvage qui me détendrait. Rien de bien fou pour commencer.

- Une bière siouplé, dis-je au barman.

Il me regarda bizarrement, comme s'il avait compris que je n'étais pas du coin, puis me fit un grand sourire. Ce satané accent me trahirait à chaque fois, c'était certain!

J'aspirai une longue gorgée en scannant la foule. Les verres s'entrechoquaient, et mes oreilles bourdonnaient. La musique était forte mais il n'était pas impossible d'écouter les conversations environnantes. Certains me toisaient, l'air surpris. Sans doute se demandaient-ils pourquoi une jeune fille solitaire était accoudée au comptoir... Je n'en avais que faire, à vrai dire. Il fallait bien commencer quelque part. Et le premier qui me prendrait pour une traînée, je lui ferais connaître toute l'acidité de ma sympathie la plus hypocrite.

J'espérais toutefois qu'une bonne âme m'accoste tandis que je guettais les groupes aller et venir. Malheureusement pour moi, il y en avait beaucoup, des groupes. Ce qui rendait l'intégration plus difficile. Puis mon regard se posa sur cette jeune fille un peu plus loin, et son air mystérieux, comme écorchée derrière une façade de contentement fugace. Qu'elle était belle! J'étais fascinée par la beauté, et l'âme qu'un corps laissait deviner me fascinait d'autant plus. On pouvait lire tant de choses dans une fossette, une pupille, ou un geste plus ou moins bien assuré... J'étais hypnotisée par toutes ces âmes, et par cette brune en particulier. Certaines d'entre elles étaient probablement perdues, d'autres dans le déni, et d'autres encore, complètement happées par la magie de l'instant. Moi aussi, je voulais être happée et dans le déni. C'était ce que j'étais venue chercher ici. Un instant futile.

En me saisissant de ma chope, je décidai de me diriger vers l'inconnue et de profiter de son accalmie. Peut-être qu'elle était venue avec des amis, mais pour l'heure elle était bel et bien seule. Fallait pas perdre de temps.

Mon approche était presque comique. A tâtons, j'allai vers elle, levai les yeux vers le plafond, mine de rien, limite si je sifflotais pas, puis m'adossai au mur à ses côtés avant de la regarder de plus près. Grand sourire aux lèvres, je me décidai enfin à lui parler.

- Salut! C'est chouette ici, lui lançai-je en hochant la tête au rythme de la musique. Tu es avec des gens? osai-je.

Pouah. Aurais-je pu sortir une banalité moins déconcertante? Probablement pas. Mais qu'y avait-il d'autre à dire pour engager une conversation? Peu importait finalement. Mon regard avenant l'inciterait certainement à me répondre, quoiqu'il en soit. Jusqu'à présent, je n'avais jamais eu trop de mal à me lier aux gens. C'était ce qui me définissait le mieux, me lier. A défaut de l'être totalement, je savais mettre à l'aise.


By Melody

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