PRESENTATION
 
Mars 2010 : Ma vie a commencé par un accident de train. En faite, elle n’a pas réellement commencé par un accident de train mais c’est ce qui a marqué le début de la femme que je suis devenue aujourd’hui. Cet accident qui aurait pu m’être fatal, m’a laissé en vie pour une raison inconnue. Je ne cesse de me demander chaque jour pourquoi moi et pas l’une des six autres personnes décédées. Chaque jour je remercie cette bonne étoile de m’avoir laissé la vie sauve et de pouvoir avoir mis au monde une très belle petite fille : Charlotte. Mais il faut cependant savoir que ma survie à cet évènement tragique m’a tout de même coûté. Il m’a couté un passé et un visage. En effet, à la suite d’un violent traumatisme crânien tous ce qui avait pu se passer dans ma vie a été effacé. Je ne savais plus qui j’étais, ce que je faisais dans ce train, où j’allais, de qui j’étais enceinte, de combien de semaines ou mois … plus rien. Même mon identité disparut avec cet accident. On aurait pu diffuser ma photo afin de retrouver ma famille mais malheureusement, mon visage n’était plus là. J’avais été totalement défigurée, à tel point que durant deux années, j’avais subi de multiples opérations chirurgicales afin de retrouver une apparence physique agréable à regarder. Ce fut les deux années les plus difficiles de ma vie. Je sortais peu, je n’avais pas confiance en moi, je me trouvais laide. On dit que le physique n’est pas important mais c’est faux. Le physique est important. Heureusement que Charlotte était là. Une jolie petite tête blonde qui me redonnait l’envie de me battre dès que je trouvais la vie trop dure. Je fus prise en charge par les services sociaux, placés dans un foyer pour jeunes mères jusqu’à ma majorité, à Londres. Je suivis des cours à distance car avec mes allers-retours à l’hôpital cela n’était pas simple et je fus remarquablement diplômée.
 
Juillet 2012 : Une fois mon diplôme en poche et mes dix-huit ans au compteur, le gouvernement anglais jugea qu’il était maintenant possible pour moi de voler de mes propres ailes et de me débrouiller comme une adulte. Mais à dix-huit ans est-on réellement prêt à rejoindre le monde difficile des adultes ? Moi je ne l’étais pas. Je rêvais de continuer des études, de devenir psychologue tout en assumant mon rôle de jeune maman. Mais sans famille, sans attaches, je me rendis bien compte très vite que cela n’était pas si simple. Je laissai rapidement tomber la fac publique pour enchainer petits boulots sur petits boulots. Je trimais comme je pouvais, terminant en parallèle la reconstruction de mon visage. Pour Charlotte je faisais tout ce qui était possible pour que nous ayons une belle vie.  
 
Avril 2013 : Mon visage étant terminé, je pensais qu’un nouveau départ s’imposait pour nous deux. Je ne voulais plus être la fille introvertie et craintive que j’avais pu être. Non je voulais être une nouvelle femme. Une femme indépendante, forte, belle et courageuse. Avec mon nouveau visage, on me remarqua. Je prenais confiance en moi. Je trouvai quelques petits boulots dans l’évènementiel, me servant de mon image pour travailler. Un jour je rencontrai une jeune femme qui me parla de la double vie qu’elle menait et qui lui rapportait. Son boulot d’escort-girl. Au départ je fus réticente à l’idée de vendre ma compagnie à des hommes, mais les maigres salaires qui rentraient sur mon compte en banque me firent vite changer d’avis. J’avais une fille à charge et je ne pouvais pas me permettre de lui rendre la vie difficile à son âge … C’est alors que ma vie en tant qu’escort-girl commença. Il était facile d’avoir des clients. Des tas de sites internet existaient et les hommes étaient très nombreux à chercher de la compagnie auprès de jolies femmes, le temps d’un diner, d’une nuit ou seulement pour partager des moments de leur quotidien.
 
Septembre 2013 : En quelques mois j’avais réussi à me faire assez d’économies pour quitter le pays et partir pour les Etats-Unis. Un peu sur un coup de tête, je décidai de partir pour Miami, espérant trouver une meilleure vie pour Charlotte qui avait à présent trois ans. Elle allait faire sa rentrée dans une école de quartier. Quant à moi je pensais reprendre mes études et intégrer la fac, mais sans bourse cela m’était compliqué. Je savais que je pouvais plaire, que j’avais un physique avantageux et je m’en servais. Je ne voulais pas retomber dans l’escorting, alors je servis de modèle photo, d’hôtesse dans des évènementiels, je tournai des pubs. Mais c’étaient des jobs instables et où la concurrence était rude. Je ne gagnais pas assez bien ma vie et je me tuais à la tâche plus qu’autre chose à devoir courir à droite et à gauche.
 
Mars 2014 : Je trouvai un job dans un salon de massage. La patronne me laissa une chance malgré mon inexpérience en la matière. Le salaire n’était pas mirobolant mais cela couvrait mes frais et j’arrivais même à mettre quelques sous de côtés certains mois. Au bout d’un an de loyaux services, la patronne me fit part d’un service exclusif qu’il y avait lieu au sein de son salon. Certaines des filles du salon acceptait de faire des massages un peu plus poussés aux hommes qui le demandait. Les pourboires donner en échange de ce service revenait à 45% à la fille et autant dire que même si c’était 45%, la somme restait bien rondelette. J’avais besoin d’argent pour assurer un bel avenir à ma fille. J’accepta sa proposition. Ces petits massages spéciaux n’allaient pas plus loin que des massages intimes avec parfois quelques petits jeux de rôles et cela ne me donnait pas l’impression de vendre mon corps comme j’avais pu le faire en Angleterre.
 
Août 2017 : Grace aux pourboires que je me faisais au salon j’avais pu commencer des études en psychologie. Cela faisais trois ans que je suivais les cours à l’université publique de Miami. Seulement voilà que la patronne du salon décida de fermer boutique pour aller habiter à l’autre bout du globe terrestre en Nouvelle-Zélande. De nouveau, je me retrouvais alors sans travail et avec le risque de ne plus pouvoir continuer mes études. S’il y avait une chose que je savais faire dans ma vie c’était être de bonne compagnie pour les hommes. Finalement, tous me ramenaient un jour à ce point de départ. Je m’engageai alors de nouveau sur la route de l’escorting, à mon compte, avec des clients de bases qui fréquentaient le salon. Petit à petit ma clientèle se mit à grandi et mes économies avec. Je déménageai avec Charlotte, qui avait maintenant 6 ans, dans une belle maison face à la mer. Notre train de vie évolua bien vite. Je n’étais pas fière de ce que je faisais, mais cela me permettait de rendre ma fille heureuse et c’est tout ce qui m’importait à mes yeux.
 
Aujourd’hui : Je continue à concilier mon boulot d’escort la nuit et mes études le jour. J’entame ma dernière année d’un master en psychologie comportementale, mais cela me semble tellement dur parfois. Je commence à douter de la voie que j’ai prise. Je me dis que l’argent est plus facilement gagné en accordant un peu de compagnies à des hommes riches. Je suis rôdée dans ce métier. Je n’ai plus peur d’imposer mes propres règles, mes propres limites de sorte à rendre mon travail plus agréable pour moi. Je sais que si cela vient à se savoir je pourrais perdre Charlotte mais c’est la seule voie que j’ai trouvée jusque là pour lui assurer une vie stable et sans encombre.
Je commence à me poser de plus en plus de questions sur mon passé, avant ma perte de mémoire. Charlotte apprends la généalogie à l’école et demande à savoir d’où elle vient, qui est sa famille et cela me rends triste de ne pas avoir de réponses à lui apporter. J’ai entamé des recherches pour retrouver une trace de mon passé, mais si à l’époque personne n’a su qui j’étais pourquoi y arriverais-je ?