Sur le moment, il n'avait pas réfléchi. Et pourtant, il en aurait eu le temps puisque ses collègues l'avaient finalement traîné à un café à la sortie du bureau, persuadé d'avoir la raison de son attitude si distante depuis son arrivée dans leur cabinet. Et il n'avait pas démenti face aux sourires compatissants et aux paroles rassurantes qu'on lui servait à tour de bras.

Et pourtant, sitôt sorti du café, il avait réagi à l'instinct et était venu directement frapper à cette porte. Malgré le fait qu'il ait été déterminé à ne plus approcher Edward ni de près, ni de loin. Mais c'était avant ça. Et il n'était pas encore si tard, et visiblement il y avait encore quelqu'un dans la pièce, de ce qu'il pouvait en juger à travers la vitre floutée de la porte.
Edward était là et il n'avait aucune idée de comment il serait reçu cette fois. Certainement aussi mal que la première fois, même s'il se trouvait à son bureau plutôt qu'à son appartement. Mais cette fois-ci, il ne se posa pas trente-six mille questions avant de frapper à la vitre de l'agence de détective privé & médium, au premier étage d'un immeuble un peu miteux.

Sa mère l'avait appelé plus tôt dans l'après-midi -en pleine réunion en fait- pour lui annoncer sa demande de divorce avec son père. Père qui serait alcoolique depuis des années... Et lui, n'avait strictement rien vu.
Il n'avait certes jamais remis les pieds au Canada depuis qu'il avait littéralement fui, trouvant tous les prétextes possibles inimaginables pour refuser toutes les invitations de ses parents, qui s'étaient faites de plus en plus rares au fil des années. Sa mère venait à New-York trois à quatre fois l'année pour y faire les boutiques toujours suivie de son ombre silencieuse de mari... Et lui apprenait soudainement que le parfait petit couple que représentait ses parents à ses yeux vacillait depuis des années.

Et il avait besoin de savoir depuis quand ! Juste pour être sûr qu'il n'était en rien responsable de cela. Et surtout, que ses parents n'ai jamais appris ce qui s'était passé avec lui... Parce qu'il n'arrivait juste pas à se défaire de l'image de son père tapant du poing sur la table devant sa rébellion et son refus de suivre Curtis lors du premier week-end "détente" proposé. Qu'il avait finalement fait, comme tous les autres qui avaient suivis.

Alors il frappait la vitre avec l'énergie du désespoir tout en priant pour que l'ombre qu'il devinait derrière celle-ci était bien celle d'Edward et non pas une quelconque secrétaire. Pour soupirer de soulagement lorsque ce fut bien Edward qui lui ouvrit.

"Je sais, tu ne veux pas me voir ! Mais juste une chose..."

Parce qu'il ne voulait pas qu'il lui claque la porte au nez. Il voulait bien rester debout au milieu de la pièce -même du couloir s'il le fallait !- mais il fallait qu'Edward l'écoute !

"Mes parents divorcent. Il parait que mon père est un alcoolique notoire depuis des années et ma mère serait complètement dépressive. Et c'est vrai qu'elle a pas arrêté de pleurer au téléphone en s'excusant de... Je sais pas quoi." Et c'était bien ce qui l'inquiétait... Ces excuses dont il ne connaissait absolument pas la raison. Ou plutôt qu'il refusait d'imaginer ce que ça pourrait être.

"Je n'ai jamais remis les pieds au Canada du jour où j'en suis parti. Mais toi, oui. Tu as bien dû présenter Elizabeth à tes parents, le mariage ou je sais pas..." Ou le décès de son père mais cela, il préféra ne pas le dire. "Mais je suis sûr que tu y es retourné ! Est-ce que tu sais quelque chose ? Depuis quand ? Depuis quand ils sont comme ça ?"

Il voulait bien croire qu'il devait donner une image plutôt désordonnée de lui. Mais il était bien trop inquiet -affolé même- pour se préoccuper de cela. Jusqu'à ce qu'il termine sur une supplique alors qu'il posait une main sur la porte pour le cas où Edward la refermerait sur lui.

"S'il-te-plait Edward, j'ai besoin de savoir..."

Alors qu'il priait pour que ses plus grandes craintes ne se soient pas réalisées. Parce qu'il aurait voulu avoir pu au moins préserver ses parents, à défaut d'avoir pu le faire avec Edward.

J'avais essayé de vivre ma vie comme si de rien n'était depuis la visite surprise de Wayne à mon appartement, mais je dirais que ça m'avait beaucoup plus troublé que je ne le pensais. Je n'avais pas réussi à trouver le sommeil cette fameuse journée là et ses paroles résonnaient toujours dans ma tête. Il était à Miami et je ne comprenais toujours pas... Comment un gars comme Wayne peut passer de Vancouver au Canada à Miami en Floride dans les États-Unis? Disons que mon cerveau n'arrêtait pas de se poser des questions et j'essayais toujours de comprendre quel métier il pouvait faire parce que ça n'avait pas été clair... Mais c'était plutôt superflu comme questionnement. Le plus important c'était de comprendre sa venue... J'aurais pu croire qu'il était venu s'excuser, mais je n'en avais pas reçus vraiment... J'étais plutôt perdu. Maintenant qu'Eli et moi ça allait de mieux en mieux, je la laissais un peu seule avec Juliette, sinon James ou Sky pouvaient aidé malgré leurs difficultés. Je devais toujours gagner ma vie et ainsi faire vivre ma famille, alors je devais quand même prendre des contrats autant en médiumnité que détective... mais je l'avoue, j'avais surtout des petites vieilles femmes qui désiraient toujours connaître leur avenir comme si j'étais un diseur de bonne aventure. Elles se trompaient sur moi.

Alors que j'étais en train de regarder des clichés d'une affaire que j'avais en cours, j'entendis frapper à la porte.. Un autre client? En ouvrant, je compris que non. J'étais plutôt bien surpris de retomber sur Wayne.... Lui que j'avais essayé de chasser de ma tête depuis les derniers jours, mais qui me hantait toujours. Tout de suis mes sourcils se froncèrent sur mon front... Pourquoi il était venu à Miami s'il ne faisait que passer au final? Il cachait bien ses intentions parce que je n'arrivais pas à déchiffrer son visage... Dire qu'on faisait juste se regarder lorsqu'on avait 14 ans et on comprenait tout. Mon ancien ami commença à m'expliquer un problème familial dont il vivait... Sur le coup, je compris alors qu'il était venu ici pour me demander de l'aide à comprendre. Quand il eut fini de me dire tout ce qu'il avait à me dire, je le fis entrer et je le fis fermer la porte... Ça n'aurait pas été très professionnel de le laisser là devant la porte en exprimer ses problèmes à la vue des passants même si ici il y avait pas foule.

- Alors t'es ici pour que je te donnes des infos sur tes parents...

J'imagine que c'était ça, mais je n'avais pas compris pourquoi, il avait débarqué chez moi la dernière fois et qu'il n'avait rien dit. Ça avait été très bizarre notre conversation aussi. Je m'installai derrière le bureau et commençai à prendre des notes... Ça ne me dérangeait pas de prendre ce cas... mais il devait payer.

- Sache que tu dois verser une somme de 200$ pour que je puisse commencer les recherches, est-ce que tu peux me payer maintenant?

Ça faisait "je cours après ton argent", mais c'était comme ça que je fonctionnais et même si je le connaissais, je ne faisais pas de traitement de faveur.

- Je suis retourné une fois au Canada, c'est vrai... pour mon voyage de noces pour tout savoir, mais je n'ai pas vu mes parents, ni même tes parents il faut dire. Ce que je peux faire c'est de faire des téléphones, mais si... tu veux augmenter la somme, je pourrais me déplacer sur place pour faire mon enquête... mais c'est toi qui voit.. Est-ce si important pour toi Wayne de savoir depuis quand tes parents se sont éloignés? Pourquoi toi tu n'es pas proche d'eux et tu ne leur demandes pas toi-même?

C'était bien de faire toutes les démarches, mais j'avais besoin de poser des questions à mon tour pour savoir ce qui se passait dans sa vie... Loin de ses parents et maintenant sous le choc d'un divorce?

Rentrer, fermer la porte et rester debout au milieu de la pièce, il commençait à bien connaitre le rituel ! Il s'y plia donc sans difficultés d'autant que cette fois-ci, il n'était pas là en visite amicale. Du moins, il savait qu'il ne serait pas reçu en toute amitié.

Et au froncement de sourcils d'Edward, il sut qu'il ne s'était pas trompé. Il n'avait aucune envie de voir "l'expérience" de l'appartement se renouveler ici mais il n'avait pas vraiment le choix. Quelque part, il savait que c'était idiot parce que ce divorce avait forcément à voir avec son histoire dix ans plus tôt mais il voulait se laisser une chance de croire que non. Quitte à devoir faire une nouvelle fois avec Edward cherchant à se débarrasser de lui...

"Oui, j'ai appris cet après-midi qu'ils divorçaient et j'ai besoin de savoir ce que tu aurais appris sur eux..."

Il ne savait pas à quoi exactement il s'attendait. Peut-être un refus net et catégorique ou un long soupir suivi de vagues explications données sur le bout des dents... Bref, quelque chose mais certainement pas à cela ! "Pardon ?! 200 $ ? Juste pour me dire ce que tu sais !?"
Il hallucinait. Littéralement. Il le regardait les yeux écarquillés de surprise alors qu'il réalisait qu'Edward allait bel et bien lui faire monnayer ce qu'il savait. Et c'était... comme tomber dans un puits sans fond. Comment en étaient-ils arrivés là ? Dix ans et ils étaient devenus des étrangers l'un pour l'autre alors qu'ils avaient été juste inséparables toute leur enfance...

Et puis, il tilta. Commencer les recherches ? Mais quelles recherches ?!

"Hey, mais attends ! Non, non, non, non, non, pas d'enquête ! Surtout pas d'enquête ! Pas de téléphone, ni rien ! Absolument rien... Je voulais juste savoir... ce que tu savais toi, c'est tout."
La bourde ! A croire qu'il ne faisait que ça dès qu'Edward était concerné, bourde sur bourde... Parce qu'il n'était évidemment pas question qu'Edward fouille dans son passé ! Jamais !

Mais surtout, une chose le frappait. Edward qui lui avait parlé, et non sans amertume, des études qu'il avait eu lui la chance de faire, exigeait maintenant d'être payé immédiatement. La conclusion lui sauta à la figure, Edward manquait d'argent pour vivre ! Pas étonnant qu'il mangeait des pâtes et faisait la fête face à de malheureux cupcakes... Et pour le coup, il était plutôt content de ne pas être resté manger, il n'aurait pas voulu piocher dans leur ration journalière !

"Mais euh... Edward... Tu as besoin d'argent ? Parce que j'ai des économies ! Ici, ça va, je suis payé normalement, je me plains pas mais à New-York, j'étais super bien payé. Donc c'est pas un souci, je vais t'aider."

Et ça sortait du coeur ! Parce qu'il n'était évidemment pas question de laisser Edward ou même sa famille -celui-ci en serait trop malheureux !- mourir de faim. Alors bien sûr qu'il aiderait, et il en sortit même sa carte de crédit pour la lui tendre. "On va dire la formule la plus chère pour ne pas qu'il y ait de téléphone, déplacement et tout le reste ?" Et il se moquait bien du montant que celui-ci lui prélèverait.

Par contre, il ne s'attendait pas à cela. Avoir fait le voyage une fois au Canada -pour le voyage de noces en plus- et n'être même pas allé voir ses parents... Alors que lui savait depuis dix ans ce qu'il en était. Une chape de culpabilité lui tomba dessus au point qu'il en aurait bien eu envie de faire des allers et retours dans la pièce. Mais bon, c'était tu restes debout et tu ne bouges pas...

"Tu n'es jamais retourné voir tes parents, même au décès de ton père ?"

Ça lui semblait tellement aberrant. Pas que dans son propre cas, ça soit beaucoup mieux mais jusqu'à ce coup de fil en plein après-midi, il ne s'en était jamais senti coupable. Là, la culpabilité -associé à ce qu'Edward lui apprenait quant à sa propre famille- l'étouffait. Edward qui se tenait là face à lui, à la fois si proche et si inatteignable...

"Oui, c'est important. Essentiel même. Mes parents venaient me voir trois à quatre fois par an à New-York et ma mère faisait les boutiques. Ils faisaient du tourisme. La parfaite petite famille américaine moyenne. Sauf que... On ne se parle plus depuis des années. Que des banalités sans importance. Ils... Ils ne savent même pas que je suis gay ! Ma mère me demande toujours quand je vais enfin leur présenter une petite amie..."

Si ça n'avait pas été aussi triste à en pleurer, il en aurait certainement ri ! D'un rire jaune, amer et plein de larmes...

Wayne s’était présenté de nouveau sans prévenir dans ma vie et je dirais que je ne trouvais pas cela facile, mais pas du tout. Cette fois, il s’était présenté à moi dans l’espoir d’obtenir des informations sur ses parents puisqu’ils étaient en plein divorce. Je n’étais sans doute pas la bonne personne pour lui donner des informations puisque j’ai quitté Vancouver il y a longtemps. Même si j’avais fait une petite escapade pour ma lune de miel, je ne m’avais pas informé de qui que ce soit de ma famille ou de la famille de Wayne. Il fut surpris que je veuille lui demander 200$ pour faire des recherches…

- Je pense que tu ne comprends pas bien, je suis détective, c’est mon métier de m’informer, mais pour y arriver j’ai besoin d’argent… Je crois que tu pensais que j’aurais déjà toutes les informations nécessaires? Pas du tout… Je ne peux pas t’aider là-dessus, j’ai arrêté de m’informer de tout ce qui concerne Vancouver… ta famille inclut.

Donc, s’il voulait vraiment avoir ces informations, il allait devoir payer. Je ne sais pas trop ce qui se passa dans la tête de mon ancien ami, mais tout de suite il voulut m’aider pour l’argent. Sur le coup, j’étais bien surpris, mais en même temps, je me sentais un peu insulté là maintenant qu’il veuille m’aider…

- Wayne, ça va! Je me débrouille, je ne roule pas sur l’or, c’est vrai, mais je ne veux pas accepter la charité par toi.

Je repoussai sa carte de crédit. Pas question de la prendre. C’était un peu bizarre de sa part d’ailleurs, c’est comme s’il voulait se faire pardonner? Il ne comprenait pas pourquoi je n’avais pas vu mon père à sa mort… Pourquoi je n’avais pas vu mes parents à la lune de miel… Beaucoup d’informations personnelles, mais en le voyant devant moi, je savais qu’il ne partirait pas sans obtenir de réponse complète de ma part…

- Wayne… Tu ne comprends pas je pense. Mes parents m’ont enfermé dans un asile psychiatrique sans venir me voir et sans m’écouter. J’en ai bavé, je leur en veux. Si j’ai quitté le Canada c’est à cause d’eux! Je ne leur dois rien! Puis j’ai appris la mort de mon père par ma mère en visite ici…

J’avais vu ma mère rapidement, mais je ne lui avais pas parlé. Je n’avais pas voulu le faire. C’était trop douloureux! Dire tout ça à Wayne l’était tout autant. Je ne sais pas si je devais vraiment tout déballer, mais je l’avais fait. Je ne pouvais pas pardonner ce qui s’était passé en un instant… C’était impossible. Bouddha ne serait pas fier de moi pour ce coup là, mais je n'avais pas la force de pardonner. Par contre, ce qui me troubla plus que tout…. C’était que Wayne venait de me dire qu’il était gay. Que… Quoi? Je me laissai tombé sur ma chaise parce que là je dirais que j’étais encore plus dépassé! Les questions tournaient dans ma tête sans arrêt.

- Gay? Dis-je tout haut et surtout trop fort.

Je ne m’attendais vraiment pas à ça… Je revois nos instants ensemble alors que nous avions 15 ans. J’avais posé mes lèvres sur les siennes parce que j’étais tombé amoureux de lui et pourtant, il m’avait bien repoussé. J’avais surmonté mon problème du touché juste pour ça et pour finalement me faire dire que ce n’est pas ce qu’il voulait. Un sentiment de culpabilité m’avait aussitôt envahi. Mon problème ne s’était pas amélioré, mais pas du tout… j’ai dû partir en institut psychiatrique pour soigner “mon problème”.

- Ça fait longtemps?

Dans le fond, il ne m’aimais juste pas, c’est ce que je dois en conclure?

Pourquoi s'était-il précipité ici ? Il avait agit instinctivement sans réfléchir, juste parce qu'il savait où trouver Edward. Ce qui était en soi, totalement idiot. Mais c'était trop tard maintenant, il était là. A réaliser qu'Edward en était à peu près au même point que lui. Sauf que lui pouvait retourner à Vancouver sans faire de crises d'angoisse. Mais les différences semblaient s'arrêter à peu près à ça.

Et surtout, il prenait conscience que s'il voulait obtenir des informations supplémentaires, sans passer par ses parents et sans qu'Edward fouille son passé, il ne pourrait le faire qu'auprès d'une seule personne. La seule qu'il ne voulait surtout pas revoir et qui lui donnait des sueurs froides rien qu'à l'évocation de son nom...
Est-ce qu'il pourrait vivre avec ses doutes ? Sans jamais savoir ce qu'il en était réellement ? Alors même qu'il y avait toutes les chances qu'il soit la cause directe du divorce de ses parents... Et est-ce que le savoir y changerait quelque chose ?

Il en était là de ses réflexions lorsqu'il comprit les difficultés financières d'Edward. Alors que ce n'était en rien un souci pour lui que de l'aider ! Mais il ne fut cependant guère étonné de se voir opposer un refus alors qu'il se défendait aussitôt sur ses intentions. "Ce n'est pas de la charité ! Mais c'est normal de s'aider entre am..." Il ne termina pas sa phrase, préférant à la place ranger sa carte dans son portefeuille. Parce que ce n'était sans doute pas la meilleure des choses à dire alors qu'il se tenait toujours debout au centre de la pièce et qu'il pouvait être renvoyé à tout moment. Alors qu'aussi nunuche que ça pouvait être, il voulait pouvoir rester autant qu'il le pouvait juste pour pouvoir graver dans sa mémoire le maximum d'images d'Edward.

Parce qu'il se savait être sur des sables mouvants. Une nouvelle fois, il ne pouvait que lui assurer que ses parents n'étaient pour rien dans son internement. Et sans réelles explications, il doutait qu'Edward prenne ses paroles pour argent comptant, même s'il essaya tout de même.

"Je t'assure que tes parents n'y étaient pour rien dans ton internement. Ce n'était pas eux ! Je ne peux pas te dire mais... On est juste deux à connaitre toute l'histoire et... Bon sang Edward, je t'assure que ce n'était pas eux qui ont voulu ça !"

Il se sentait mal, la culpabilité l'étouffait et il dut inspirer profondément. Le dérivatif sur ses propres parents fut donc plus que bienvenu mais il ne s'était pas attendu à une telle réaction. Clairement pas ! Edward en était tombé sur sa chaise... Il voulait bien croire que ce soit une surprise, mais à ce point-là ?

"Oui, gay. Je sais que pour un hétéro, c'est un peu compliqué à admettre mais ça arrive parfois. C'est comme ça, on ne choisit pas."

Il s'agissait donc d'y aller en douceur, juste pour faire comprendre à Edward que ça ne changeait en fait pas grand chose. Qu'il était toujours lui. Quant au Ça fait longtemps?, il le regarda avec toute la gêne du monde inscrit dans ses prunelles. Il n'allait pas avoir d'autres choix que de mettre les pieds dans le plat. Chose qui ne le gênait en rien d'habitude mais là... C'était tout de suite nettement plus compliqué.

"Euh... Depuis le début ? J'ai toujours été comme ça ? En fait, même lorsque tu m'as embrassé, je l'étais déjà ? Mais ne t'inquiète pas, j'avais bien compris rien qu'à voir ta tête que ça ne t'avait pas plu du tout ! Et c'est normal pour un hétéro ! Donc, pas de souci là-dessus. Je sais bien que tu n'avais fait cela que pour tester et rien de plus..."

Parce qu'il s'agissait avant tout de rassurer Edward sur son statut d'homme viril, hétéro, et fier de l'être !

"Et je ne voulais pas te le cacher non plus ! Je voulais te le dire après le baiser mais comme ça t'avait pas mal perturbé, j'ai remis à plus tard et... Ensuite... Il y a eu le reste."

Qu'il ne voulait surtout pas remettre sur le tapis. Bref, ce n'était plus des sables mouvants mais carrément un terrain miné là !

J'avais jeté un mauvais regard à Wayne lorsqu'il avait voulu terminer la phrase en m'appelant un ami... Bien entendu, il s'était vite rendu compte que ça ne faisait pas de sens depuis le temps qu'on ne s'était pas vu. On n'était plus des amis et il y avait de bonnes raisons pour ça. Sa venue pour parler de ses parents semblait quand même vraie... Je le voyais inquiet. Je retrouvais les mêmes mimiques et gestes que lorsqu'il était ados et qu'il s'en faisait pour quelque chose. Nous n'étions pas populaire à l'école, nous étions surtout les rejetés... On s'y était fait, mais quelques fois ça avait été dur de subir de la part des autres. Je ne voulais pas de son argent, ça tombait du ciel et je ne le voyais pas d'un bon oeil. Il fallait qu'il le comprenne! Je répétai la même chose pour mes parents et mon ancien ami me mentionna que mes parents n'avaient rien à voir avec mon internement.

- Je ne sais pas ce que tu veux dire Wayne par là! Mes parents ont signés, ils m'ont envoyé là... Je ne comprends pas pourquoi tu les défends. Ils ne sont pas venus me visiter, ils m'ont abandonné. Je ne vois pas pourquoi tu te fais un plaisir de me rappeler cette époque, juste de me rappeler, ça me rend malade!

J'avais été clair maintenant là-dessus, penser à ces moments là, c'était juste horrible pour moi. Je m'étais senti trahi et surtout abandonné pendant des années. J'avais réussi à survivre, à me forger une carapace et quitter le Canada pour errer aux États-Unis. J'ai volé, j'ai menti, j'ai profité de bien des gens pour réussir à m'en sortir. Aujourd'hui, j'essaye de marcher droit. Wayne continua de me parler de trucs pour ses parents, mais je dois l'avouer, le mot "gay" m'avait vraiment accroché. Je ne pouvais pas croire qu'il l'était. Une fois de plus, je venais de recevoir une claque dans la figure par la vie. Je m'étais assis parce que là c'était un peu trop pour moi à absorber. Je restai muet pendant plusieurs secondes comme pour chercher ce que j'allais dire.

- J'étais mal parce que tu sais que je ne pouvais pas toucher personne... Tout simplement. J'ai appris à surmonter ça au fil des années, Elizabeth m'a aidé.

Le fait de me faire tourner le dos par Wayne ne m'avait pas aidé à me sentir mieux... J'avais préféré ne plus toucher personne pendant des années, mais les envies d'avoir une relation avait été plus forte. Lysianna avait été ma première petite amie parce qu'elle avait bien voulu de moi, mais ça s'était plutôt mal terminé... Elizabeth avait été vraiment d'une grande aide, mais aussi mon voyage au Tibet avec les moines.

- Je ne savais pas... Tu aurais dû me le dire oui.

Je n'étais pas très bon pour déceler quoi que ce soit. On était toujours ensemble la plupart du temps en plus. Je le regardai un instant, décidément, j'avais du mal à avaler cette nouvelle.

- Je... Hum... Bon... pour tes parents, tu voudrais que je fasse quoi vu que je n'ai pas eu de contact avec eux depuis 10 ans non plus?

Mon ton avait changé, je ne sais pas trop pourquoi je sentais moins de colère subitement, mais j'étais prêt à aider Wayne avec ses parents s'il voulait vraiment que je fasse quelque chose. Wayne prit place sur le siège devant mon bureau.

Les choses ne se passaient pas bien. Ce qui n'était pas une nouveauté. Mais c'était juste que là, il avait le sentiment de perdre pied. Il avait donc fait face au regard mauvais d'Edward sur la qualification d'ami qu'il n'avait apparemment pas retenue à temps, et surtout à ses propos accusateurs sur ses parents. Et peut-être valait-il mieux en effet qu'Edward ne sache jamais ce qui s'était réellement passé. Parce qu'après un tel discours, il serait difficile pour lui de prendre conscience de la réelle pression à laquelle Curtis avait soumis ses parents. L'internement ou le scandale à l'école sur leur fils "terrorisant" les autres élèves parfaitement normaux eux... La bonne blague ! Surtout lorsqu'on savait que c'était lui l'élève soit-disant terrorisé.

Quant à... Elizabeth. Forcément Elizabeth. Qui avait elle réussi là où il avait échoué. Il en serra les poings mais ne rajouta rien à cela. Qu'aurait-il pu dire de toute façon ?

Surtout qu'à l'époque, il n'y avait eu qu'Edward qui comptait. Bien qu'il ne soit pas sûr que cela ait beaucoup changé depuis. Mais au moins il avait depuis appris à faire avec la surprise, la gêne et même parfois le rejet poli des gens à qui il annonçait son orientation sexuelle. Et il pouvait définir rien qu'à regarder Edward qu'il n'était pas bien loin de cela.

Et s'il ne serra pas les poings à la réaction d'Edward sur son coming-out, son expression et surtout le pli pincé de ses lèvres parlaient pour lui. Du moins jusqu'à ce qu'il fasse savoir à Edward ce qu'il en pensait réellement. Avec certes, un ton un peu vif et juste assez acide pour lui démontrer qu'il avait parfaitement compris que la nouvelle n'était pas forcément la bienvenue.

"Vu ta réaction, je ne pense pas non !"

Pourquoi fallait-il qu'il se sente toujours si épuisé lorsqu'il parlait à Edward ? Sans doute parce que si le Edward qu'il avait face à lui était quasi identique à celui qu'il avait connu, son comportement lui était totalement étranger ? Et qu'il n'y avait plus que lui à se raccrocher à un passé qui n'existait plus ?

"Rien... Ne fais rien. Je ne veux pas que tu fouilles dans mon passé. Crois-moi, tu n'aimerais pas ce que tu y découvrirais. Alors fais comme pour tes parents et laisse tomber, c'est encore le mieux."

Pour rajouter alors qu'il reprenait ses réflexes d'avocat prêt à reprendre et retourner tous les arguments qu'on lui avait donnés.

"Et de toute façon nous ne sommes pas amis, non ? Il n'y a donc aucune raison pour que tu te préoccupes de mes parents, ou de moi."

Soupirant, il avoua finalement à mi-voix. "En fait, je crois que je connais déjà la réponse. C'est juste que... j'aurai aimé qu'on me dise que je me trompe."

Lui par contre allait devoir voir au problème. Et sans compter sur l'aide d'Edward, même s'il ne savait pas encore comment il allait faire. S'asseyant, et sans même attendre une quelconque invitation à le faire qui de toute façon avait toutes les chances de ne jamais arriver, il tenta de faire le point.

Ses parents allaient divorcer. Et il ne pourrait rien faire contre cela. Son père risquait de se foutre en l'air alors que sa mère ne s'en sortirait pas mieux. Leur parler au téléphone ne ferait qu'amener davantage de larmes pour l'un et de silences pesants pour l'autre. Quant à se déplacer là-bas, c'était juste physiquement impossible pour lui. Alors quoi ? Attendre que les choses se produisent et ne rien tenter ? C'était encore pire...
Et ce n'était pas sans le ramener à Edward et à ses parents. Ou à Edward lui clamant qu'Elizabeth l'avait aidé, elle. Et c'était douloureux de prendre conscience que tous ses doutes se révélaient exacts. Ces mêmes doutes d'ailleurs, qui l'avaient directement projeté dans les mains de Curtis...

Secouant la tête, n'ayant même aucune idée de combien de temps il était resté silencieux plongé dans ses pensées, il la releva enfin pour croiser le regard d'Edward.

"C'était vrai alors. Je n'ai jamais pu t'aider là-dessus..."

Ce n'était même plus des interrogations. Juste un constat amer. Aussi amer que celui qu'il faisait au sujet de ses parents. Décidément, il aurait tout raté.

"...Je suis désolé."

Il n'aurait même pas su dire par rapport à quoi il s'excusait. De ne pas avoir su aider ? D'être venu à Miami ? De venir remuer un passé dont Edward ne voulait plus entendre parler, lui compris ? Sans doute un peu tout cela, et davantage encore.
Et il aurait sans doute dû se lever et partir d'ici... Mais il ne parvenait juste pas à le faire.

Mon ancien meilleur ami me demanda de laisser tomber, de ne rien faire quant à ses parents. Il me disait qu'il ne voulait pas que je fouille son passé parce que je risquais de tomber sur des trucs plutôt sombres. Je me croisai les bras un instant, juste le fait qu'il le mentionne, je dirais que ça m'intriguait. À nouveau, je me pinçai les lèvres, disons que  ça devenait compliqué avec lui, il venait pour une autre chose et finalement il repartait avec rien.

- J'aurais pu le faire en tant que professionnel... pas comme ami parce qu'on ne peut pas dire que nous le sommes à nouveau.

Pas certain que je veuille le devenir à nouveau non plus. J'étais quand même sensible à sa situation avec ses parents, mais je ne pouvais pas oublier le malheur et la tristesse que j'avais ressenti quand je vis qu'il ne venait pas me visiter.

- Bon écoute, tes parents se séparent, comme la majorité des Canadiens après 7 ans de mariage... Tu as encore tes deux parents... peut-être que vous vous entendez pas bien, mais quand même... T'as pas eu des parents qui t'ont poignardés dans le dos.. même si tu dis que ce ne sont pas de leur faute.... Pourquoi au juste?

Ça, je dirais que c'était troublant, pourquoi il pensait que mes parents étaient innocents? C'était ridicule de penser qu'il n'avait rien fait... Ils m'avaient lâchement envoyé là-bas même après que je leur ai dit comment je me sentais. J'appelle pas ça des parents, eux qui ne prennent pas soin de leur enfant. Wayne, il avait eu une famille pour s'occuper de lui... pas moi. Voilà toute la différence. C'était difficile d'entendre parler tout ça, Wayne en prit soudainement conscience, car il s'excusa... Mes yeux s’agrandirent un instant, je le regardai, il avait l'air sincère... Il avait l'air dérouté. J'avais espéré entendre ses mains il y a longtemps déjà et maintenant ils étaient prononcés... Ça me soulagea un instant comme si un poids s'enlevait.

- Moi aussi...  J'aurais aimé que tout se passe différemment...

Je posai ma main sur son bras un instant laissant la barrière mentale s'enlever un instant pour puiser dans Wayne ce que je pouvais y trouver. Je voyais une détresse, une tristesse infini que tout de suite j'enlevai mon bras parce que c'était difficile à gérer.. Je regardai Wayne dans les yeux. Il venait de comprendre que j'avais pu voir quelque chose.  Je me râclai la gorge...

- Écoute, j'ai pas été sympa avec toi depuis que tu es arrivé... Je m'excuse aussi... Dis-moi Wayne quelle est la vraie raison de ta venue ici et est-ce que tu vas rester longtemps?

Vraiment ces questions j'y tenais parce que que je ne pouvais pas croire qu'il était venu juste ici pour me parler d'assurances ou pour me parler de ses parents. Il avait dû faire ses recherches et il savait que je me trouvais ici, alors qu'est-ce qu'il cherchait vraiment ?

Edward aimait décidément appuyer là où ça faisait mal. Oui, ils n'étaient plus amis et il pensait l'avoir maintenant parfaitement compris. Par contre le laïus lénifiant sur ses parents, il s'en serait bien passé. Oui, des gens divorçaient tous les jours mais pas ses parents ! Du moins, il voulait croire que si mais il savait mieux. Et ce qu'il soupçonnait le terrifiait.

Parce que si ses parents devaient apprendre ce qu'il en avait été pour lui, il savait déjà qu'ils ne s'en remettraient pas. Et que ce serait bien le genre à Curtis de s'amuser de ce genre de situation, surtout sachant que ça faisait des années qu'il refusait obstinément de remettre les pieds au Canada.
Il était donc plongé en pleine réflexion lorsqu'il sentit la main d'Edward se poser sur son bras. Et il en fut tellement surpris qu'il plongea aussitôt son regard dans le sien cherchant à comprendre d'où sortait cette soudaine sollicitude. Parce qu'ils n'étaient pas censés être amis, non ? Mais Edward l'avait touché de lui-même, et pour... tenter de le rassurer ? C'était juste inattendu et tellement... Pour réaliser avec une horreur grandissante qu'Edward venait en fait de le "lire".

Choqué au-delà des mots, incapable de faire le tri entre le bonheur qu'Edward ait pu poser sa main sur lui, l'incompréhension d'un tel geste surtout après lui avoir autant assuré et avec tant de force qu'il ne devait pas compter sur son amitié, et l'angoisse à l'idée de ce que celui-ci ait pu voir. Et il tentait surtout de réguler -discrètement- sa respiration. Parce que ce n'était pas le moment de faire une nouvelle crise. Et puis Edward ne semblait pas particulièrement perturbé -peut-être un peu plus gentil ?- il ne devait donc pas avoir vu grand chose... Mon Dieu, il priait pour que celui-ci n'ai rien vu de compromettant ! Ce serait juste atroce si celui-ci en découvrant son implication dans son internement, le rejetait juste après avoir fait un petit geste vers lui... Et il désirait cela, avec une force aussi incroyable que dévastatrice maintenant qu'Edward avait initié le premier contact, il voulait juste qu'il se rapproche encore de lui, ne serait-ce qu'un peu, mais... sans avoir pour objectif de le "lire". Et c'était juste impossible, n'est-ce pas ?

Sur une impulsion, il s'était levé pour aller jusqu'à la fenêtre autant pour se donner de l'air que pour avoir le temps de reprendre ses esprits dans ce maelstrom d'émotions qu'il ne parvenait plus à gérer. Alors qu'ironiquement, Edward lui posait exactement la même question qu'Elizabeth.

"Elizabeth..." Il se reprit puisqu'il fallait bien appeler les choses par leur nom. "Ta femme... m'a posé exactement la même question. Et je crois... que je lui ai fait peur. Je ne sais pas ce qu'elle a vu dans mon regard mais elle m'a tout juste dit au revoir et est partie en se sauvant." Les mots avaient encore du mal à sortir mais il s'obligeait à répondre le plus honnêtement possible à ce qu'il pouvait. Histoire de compenser au minima tout ce qu'il ne disait pas. "C'était juste quelques cartons à faire et des démarches administratives via le net. Il n'y avait même pas besoin de changer de pays, de demander un visa ou de faire je ne sais quoi d'autre. Rien de bien compliqué en somme. Et... Oui, je compte rester ici." Même si ce n'était pas New-York et qu'il avait toujours autant de mal avec cette ville. Mais il n'était pas ici pour la ville de toute façon.

"Par contre s'il-te-plait, ne cherche plus à me "lire"... Je vais te dire ce que je peux te dire mais le reste, c'est à moi de faire avec. Et c'est surtout personnel, des choses qu'on ne peut dire qu'à un ami, chose que tu n'es pas j'ai bien compris..."

C'était un peu facile de retourner l'argument mais il était avocat après tout.

"Assieds-toi parce que tu vas en avoir besoin. Alors Curtis..." Décidément, c'était le jour des reprises mais il doutait qu'Edward puisse mettre un visage sur Curtis sans son nom de famille. "Enfin, Monsieur Craigs, notre prof principal si tu te rappelles... On pensait qu'il ne se préoccupait que des élèves populaires, ceux avec qui il aimait bien rire et plaisanter, et... En fait, ce n'était pas vrai. Il portait attention à tous ses élèves. Même à nous. Et un peu trop à nous d'ailleurs. Il trouvait que... qu'on avait une relation trop fusionnelle, il ne trouvait pas cela sain qu'on reste tout le temps ensemble et qu'on ne se mélange pas aux autres... Enfin, tu vois le genre..."

Il ne mentait pas. Après tout ce n'était pas pour rien que Curtis était venu le trouver dès qu'il avait vu l'occasion se présenter. Et après la catastrophe du baiser, il en avait été suffisamment perturbé pour que cela se voit et surtout pour que Curtis fonde sur lui avec sa façon d'être si sympathique, et totalement fausse. Mais ça, il l'avait compris trop tard.

"Ce type est un grand malade, et je pèse mes mots. Il a un besoin maladif de tout contrôler, en permanence. Il aime avoir les gens sous son pouvoir. Et je sais de quoi je parle, crois-moi... Alors tes parents, c'était du pain béni pour lui. Il ne leur a pas laissé le choix, soit tes parents signaient et l'internement se faisait en toute discrétion, soit il s'arrangeait pour créer un scandale à l'école te faisant passer pour un psychopathe et faisait en sorte à ce que cette étiquette te reste collée à vie sur le dos. Tes parents ont juste fait ce qui était le mieux pour toi en fonction du choix qui leur avait été laissé. Ils étaient coincés. Curtis est plutôt bon dans ce genre de choses..."

Là, il voulait bien croire qu'Edward puisse tomber des nues.

"Après, pour le fait qu'ils ne soient pas venus te voir, la culpabilité à certainement joué à plein là-dedans. Et j'en sais quelque chose..." Et pour  cause, il le regardait avec toute la culpabilité du monde inscrite dans son regard. "Est-ce que tu as une bouteille d'alcool quelque part ? Je serai prêt à boire n'importe quoi là..." Après tout dans les films, les détectives privés avaient toujours une bouteille planquée dans un des tiroirs de leur bureau, non ?

Wayne s'était levé pour aller regarder par la fenêtre... Je lui avais demandé pourquoi il était ici et il m'avait dit qu'il avait rencontré ma femme. Je fronçai les sourcils, elle ne m'avait pas dit ça... Oh j'imagine qu'il voulait dire la Elizabeth qui avait perdu la mémoire... Enfin, pas de problème, mais je dirais que sa réponse me troubla aussi. Je ne comprenais pas toujours Wayne en fait dans ses réflexions... On s'était sans doute perdu trop longtemps de vue.

- Donc...? Tu ne lui as pas répondu? Je ne crois pas aux coïncidences... Me cherchais-tu?

J'attendais toujours sa réponse à la question. Pourquoi diable avait-il choisi Miami? Il avait le droit de venir ici mais quand même, je ne crois pas aux coïncidences. Sans doute que ce n'était pas compliqué... Il vivait sans doute ailleurs aux États-Unis avant de s'établir ici. Puis, il me demanda de ne plus lire en lui sans sa permission... Je me pinçai les lèvres... Il savait donc ce que je venais de faire... mais il ne savait pas ce que j'avais vu en fait. J'y avais vu une certaine détresse, un déménagement, mais il avait retiré trop rapidement sa main pour que je vois plus loin. J'inclinai positivement la tête, c'est vrai que je n'avais pas le droit de faire ça. Je voulais savoir par contre pourquoi il disait que ce n'était pas la faute de mes parents pour mon internement. Il me raconta un truc au sujet de notre ancien prof.

- Tu ne m'as jamais parlé de ça... Mr. Craigs... je le détestais... d'ailleurs pas toi?

Puis, il continua à parler et je dirais que ça devenais de plus en plus fou comme histoire. Il était en train de dire qu'il avait obligé mes parents à me vendre à l'asile. Je pouvais pas croire que c'était vrai... Je regardais Wayne dans les yeux un instant, il avait l'air persuadé...

- On avait 15 ans.. j'étais celui qui était toujours choisi le dernier... On me trouvait trop bizarre... Dis-moi quel scandale aurait-il pu y avoir? Mes parents étaient les adultes dans cette histoire là et ils ont préféré m'envoyer là-bas. Tu avais 15 ans Wayne... Tu ne pouvais pas rien faire t'étais un gamin. Si Mr. Craigs a dit des trucs sur moi c'était sans doute pour être méchant encore... ça ne m'étonne pas du tout. Mais... Tu penses ça... mais mes parents sont les réels fautifs dans cette histoire...

Je ne voulais plus débattre là-dessus, c'était un bout de mon passé que je voulais oublié... Bien entendu, jamais je n'aurais cru qu'un professeur serait dans l'équation par contre. Mes crises à l'école étaient si fortes que ça ne m'étonne pas s'il y a eu des plaintes. Wayne me demanda à boire et je fouillai dans mon gros tiroir de droite de mon bureau. J'avais une bouteille que je n'avais jamais ouverte. Je n'étais pas un grand buveur d'alcool en fait... Je l'ouvris et je sortis cette fameuse bouteille... C'était du rhum. Wayne me fit signe qu'il en voulait. Je trouvai deux verres à café dans le tiroir à café et nous servis. C'était un peu bizarre de boire en fait.

- Écoute, je comprends... Ça m'a tué par contre, tu peux pas savoir à quel point... T'étais mon seul ami.