Hayden était de nouveau son mon emprise. Je le sentais. Elle était à moi, je l'avais récupéré. Finalement, ça n'avait pas été aussi dur que je l'avais imaginé. J'aurais cru qu'elle se livrerait à moi avec beaucoup plus de réticence et de difficultés. De toute façon, elle n'avait jamais su me résister, c'était ainsi. Je la connaissais par coeur, en long, en large et en travers ; je savais exactement quoi lui dire pour qu'elle retombe dans mes bras. Tout ce que j'avais à faire, c'était de lui faire croire que ces deux années m'avaient changé. Que j'étais devenu un homme bon, que je pensais à elle et que j'avais diminué les conneries. J'aurais tout fait pour la récupérer, pour qu'elle me revienne. Et je n'avais aucun remords à lui mentir aussi effrontément. Cela ne me gênait en aucune façon de lui faire croire que j'avais changé. Elle ne demandait que cela. D'un côté, cela me prouvait qu'elle me connaissait vraiment mal. J'étais un menteur pathologique et je ne me remettais jamais en question. Je ne changerais jamais, pour rien ni personne, pas même pour elle. Mon ego était beaucoup trop gros pour cela. Mais Hayden voulait cette illusion, et j'étais prêt à lui donner. Pendant un temps, du moins. Je voulais pour le moment qu'elle me refasse à nouveau totalement confiance, que je récupère cette emprise de j'avais sur elle auparavant. J'étais plutôt bien parti. J'avais l'impression d'avoir face à moi la Hayden que j'avais rencontré quand nous avions douze ans. Face à moi, face à mes paroles et à mon regard, elle perdait tous ses moyens et redevenait la petite fille perdue qu'elle était restée au fond d'elle-même.

Hayden m'avait embrassé, et pour moi, c'était la preuve que mes belles paroles avaient fonctionné. Au début, elle avait essayé d'être forte et de me résister, mais il avait bien fallu qu'elle se rend à l'évidence : elle ne le pouvait. L'attraction entre nous était trop forte, même moi je devais l'admettre. Pendant un long moment, je m'étais dit que je ne lui adresserais plus jamais la parole ; pire, que j'allais lui pourrir la vie pour me venger qu'elle m'ait abandonné comme une vieille chaussette. Je lui en ai tellement voulu. Et pourtant, malgré toute cette rancoeur que j'avais pu éprouver à son sujet, je m'étais vite rendu compte que je ne pouvais tout simplement pas me passer d'elle. Elle m'était absolument indispensable. Comme je le disais souvent, Hayden était mon point de repère, et sans elle, j'étais totalement perdu. Je le montrais beaucoup moins qu'elle, mais moi aussi, j'avais besoin d'elle. Elle m'obsédait. Je l'aimais comme un fou furieux, même si je ne lui avais jamais dit sincèrement. Je la sentis se crisper alors que je mentionnais le nom de Lily-Anne. J'avais choisi mes mots avec soin, pour aborder ce sujet. Lily-Anne était un véritable poison. Son seul but était d'éloigner Hayden de moi, tout simplement parce qu'elle était d'une possessivité maladive. Je l'étais moi aussi, et Hayden se retrouvait par conséquent dans une position très délicate. Comme si nous nous battions pour elle, en fait. La dernière fois, elle avait préféré suivre cette pimbêche plutôt que de me suivre moi, et je blâmais presque entièrement Lily-Anne pour cela. Je savais qu'Hayden était naïve, facilement manipulable, surtout par ceux en qui elle avait confiance ; Lily-Anne en avait profité pour me l'arracher. Je ne l'aimais pas, non, pire, je la détestais. Je savais de source sûre que cette pétasse se trouvait à Miami en ce moment même, et il me tardait de la revoir. « Je sais ce que va dire Lily, mais je ne peux pas lui cacher le fait que tu sois revenu, ni si notre histoire recommence, c'est ma meilleure amie.. » me dit-elle avec un sourire forcé. Ah, les filles… Elles sont toujours comme cela. Toujours à se raconter leur vie de A à Z. Pourquoi avaient-elles constamment le besoin de s'étaler sur à peu près tous les sujets de conversation ? « Je sais. Mais nous devons prendre notre temps, justement… Voir si cela peut encore fonctionner entre nous… Et Lily-Anne n'a pas besoin d'être au courent dès maintenant. Je veux dire, il n'y a rien de fait pour le moment. Pourquoi se précipiter pour lui annoncer cela, hein ? » Je parlai d'un ton doux qui, je dois dire, ne m'allait pas du tout. En moi-même, j'avais envie de secouer Hayden pour la convaincre que Miss Cooper ne servait à rien dans notre relation, qu'elle n'avait absolument rien à y faire. « Mais dis moi... comment tu sais qu'elle est en ville et que nous avons repris contact? » Eh merde. Je ne m'étais pas montré assez prudent. Vite, Jules, improvise un truc. « Ah, parce qu'elle est en ville ? Je l'ignorais. Je pensais que tu allais lui envoyer un sms, ou que tu allais l'appeler. Je n'étais même pas au courant que vous n'étions plus en contact » dis-je simplement. Ce dernier point était plutôt vrai. Et même si je l'avais su, j'avais complètement oublié. L'eau avait coulé sous les ponts depuis, et la prison m'avait, je dois dire, quelque peu chamboulé les neurones. « Je dois retourner bosser, je... je suis désolée, mais c'est urgent. De toute façon, on.. va se revoir. Appelles-moi. » me dit-elle en m'embrassant sur la joue. « Je l'espère » souris-je avant de la voir disparaître au loin.

Mission accomplie, pensai-je.