On ne peut pas dire que je faisais le ménage très souvent. Ce n’était mon activité préférée. Je dirais même que je ne faisais jamais chez moi alors c’était encore pire lorsque j’étais chez les autres. Toutefois, Lily aurait piqué une crise si j’avais laissé tout au milieu du salon sans nettoyer. Je ne savais pas trop si ce que je faisais été vraiment bien mais au moins ça avait l’air propre. De plus, ça me permettait de me concentrer sur autre chose. Je savais que Madison était revenue mais elle ne disait pas un mot et je ne savais pas quoi lui dire non plus. J’avais avoué mes fautes et à présent j’étais un peu mal à l’aise. Elle allait se sentir mal pendant une semaine et ce serait uniquement à cause de moi et de mes idées stupides. Je venais de terminer, c’était impeccable et j’étais fier de moi quand la voix de Madison était parvenue jusqu’à mon oreille. « J’ai menti. Je ne te déteste pas non plus. Je t’en veux Kenneth mais je ne te déteste pas. » Mon regard s’était à nouveau posé sur elle. Un sentiment de soulagement était en train de me parcourir. Je n’étais pas du genre sensible ou facilement vexé mais j’étais tout de même rassuré de savoir qu’elle ne me détestait pas. Les gens qui s’approchaient de moi et qui s’attachaient à moi, finissaient toujours par m’en vouloir à un moment ou à un autre. Je m’étais habitué et j’arrivais toujours à me convaincre que ce n’était pas ma faute mais celle des autres. « Et maintenant que je sais que tu m’en veux, j’aimerai savoir pourquoi ? Qu’est-ce que j’ai bien pu faire pour te mettre en colère ? » Me demanda-t-elle. Je détournai mon regard d’elle pour me concentrer sur la serpillère. Il fallait que je range et que j’évite sa question. Si je voulais m’enfuir, j’étais quand même assez coincé. Je n’avais pas d’autres logements où je pourrais dormir ce soir. « Parce que jusqu’à preuve du contraire, c’est moi qui suit supposé être en colère contre toi. C’est moi qui est toutes les raisons de l’être. » Elle avait raison mais au fond ça ne changeait pas grand-chose. La liste de ses reproches devait être longue. Je n’étais pas sûr que ce soit la personne qui m’en voulait pour le plus de choses. La compétition était grande. « J’ai le droit de l’être parce que lorsque tu es partis la première fois Kenneth sans donner de nouvelle, j’ai été jusqu’à penser que tu étais peut-être mort jusqu’à ce que Geane me dise que ce n’était pas le cas et que tu étais juste parti comme tu l’as toujours fait en laissant les gens qui t’aiment derrière toi. » Ce n’était pas vraiment une surprise. J’avais bien dû lui dire à un moment ou à un autre que je m’étais barré de chez moi à l’âge de dix neuf ans sans prévenir personne et juste pour pouvoir faire le tour du monde. J’avais bien dû lui raconter à un moment ou à un autre. Ça n’avait jamais été un regret pour moi. Je ne m’en étais jamais voulu. J’avais adoré ce voyage et ce que mes proches avaient pu ressentir à cet instant, je m’en foutais totalement. C’était la meilleure décision que j’avais prise. « Je ne veux pas paraître sans cœur mais est-ce que tu attends des excuses de ma part pour être partit sans dire au revoir ? » la questionnais-je en fronçant les sourcils. « Tu veux que je m’excuse pour la première fois ou la seconde fois après avoir libéré Edward ? » demandais-je aussi vite. Je supposais qu’elle m’en voulait surtout pour la première fois. La seconde fois n’avait été qu’un bref passage dans sa vie. J’étais beaucoup trop mal au point et en vrac pour rester à Miami, à cet instant. De toute façon, je serais sans doute mort. « Je ne veux pas me disputer avec toi mais à quoi est-ce que tu t’attendais de ma part ? Je suis comme ça. J’ai toujours été comme ça. Je pars quand les choses se compliquent ou simplement parce que j’en ai envie. Il suffit que je croise un bus avec une destination qui m’intrigue pour partir, sans même prendre mes affaires. C’est dans ma nature. Je ne peux pas te demander pardon pour ça. Parce que je sais que je peux recommencer et que ça sera au-dessus de mes forces de résister à la tentation de tout quitter. J’aime ça. J’ai besoin de ça. Ça fait partie de moi. » Répondis-je finalement en la fixant. C’était honnête. Je ne pouvais pas lui promettre que c’était la dernière fois et que j’étais bien décidé à rester. Je l’avais fait trop de fois avec beaucoup de personnes dont Geane. Après un énième soupire, j’étais allé ranger la serpillère avant de m’effondrer dans l’un des fauteuils. « Tu devrais écouter Geane. Je l’ai toujours fait. » Finis-je par rajouter. « Il est tard. Tu as des draps propres que j’ai posé sur le canapé… Tu peux dormir ici cette nuit. » C’était hors sujet mais puisqu’elle n’avait pas bougé, c’était une manière pour moi de l’inviter à s’avancer au lieu de rester dans son coin.

Certes, elle disait ne pas vouloir d’excuses mais je ne comprenais pas ce qu’elle attendait de moi. J’avais fait ce que je faisais toujours. J’étais partit en abandonnant tout dernière moi. Ma famille, mes amis, tout le monde. Ce n’était pas la première fois qu’on me le reprochait et j’avais essayé de changer ce trait de ma personnalité mais c’était plus fort que moi. La sensation qu’on éprouve quand on part sans rien avoir préparé à l’autre bout du monde tout seul après une réflexion d’une seconde, c’était jouissif. Personne ne pourrait m’enlever ça et je n’avais de compte à rendre à personne. J’étais d’ailleurs vraiment sourd d’oreille quand on m’en parlait et je ne cessais de me défendre comme un lion acharné. Je n’avais jamais mentit à Madison ou cacher cette partie de moi. J’étais comme ça. C’était aussi simple que ça. Il n’y avait rien à comprendre et rien à expliquer de plus. « Je vais être cash avec toi. » Je n’aimais pas du tout le début de sa phrase. Je sentais que ça n’allais vraiment pas me plaire. Je m’étais enfoncé un peu plus dans mon fauteuil en remarquant qu’elle n’avait toujours pas bougé de son coin. C’était mauvais signe. Je sentais que les règlements de compte étaient sur le point de commencer. « Je ne vais pas tourner autour du pot. Tu es comme tu es et je ne te demanderai jamais de changer. Je serais hypocrite de te demander ça parce que je suis tombée amoureuse de l’homme que tu l’es. Et j’ai pas l’intention de te parler de ça non plus. Je t’ai dit que je t’aimais et tu n’y as pas donné suite. C’est ton choix. Mais le truc c’est que tu manques de respect à tout le monde. » Je m’étais mit à soupirer tout en continuant de l’écouter. Je n’allais pas l’interrompre. Ce n’était pas mon intention. Cependant, je n’étais pas d’accord avec elle. Je ne manquais pas de respect aux autres. Ils savaient à quoi s’en tenir avec moi. C’était comme ça et pas autrement. « Ok, tu aimes les voyages, partir vers l’inconnu et c’est ton droit. Mais tu le fais en manquant de considération pour les autres et je trouve ça inadmissible. La moindre des choses c’est de prévenir ton entourage. Geane est ta sœur et tu ne l’as pas prévenue. Tes parents, pareilles. Edward est ton colocataire et pourtant, rien du tout. Tu fais ta vie comme si tu étais tout seul mais à partir du moment où certaines personnes se donnent la peine de t’apprécier et de t’aimer, tu leurs doit un minimum de respect et de considération. » Elle semblait marquer une pause. J’avais remarqué la main sur son ventre. J’aurais pu lui demander si ça allait mais je préférais attendre qu’elle m’en parle d’elle-même et sauter sur l’occasion pour me justifier sur un point important à mes yeux. « Je te l’ai dit. Je ne préviens pas les gens, je suis comme ça. En ce qui concerne ma famille, je n’avais pas à les prévenir. Je n’ai pas de famille. » Dis-je simplement. J’espérais que ça ne partirait pas en débat. D’après ce que j’avais compris, ce n’était pas l’amour fou avec son frère. Et apparemment ma sœur était devenue proche d’elle. On se doutait qu’elles finiraient par former un club contre moi. Elle avait continué sur le second sujet. La soirée à l’hôtel. Elle m’avait soi-disant trouvé insultant et elle ne voulait pas s’excuser pour ça. A ses yeux, je lui aurais parlé comme à une pute et je mourrais d’envie de lui répondre que si je lui parlais comme à une pute, elle aurait beaucoup de chance. Je respectais les putes et d’ailleurs je ne les appelais pas comme ça. C’était insultant. J’aimais beaucoup les prostituées. J’avais beaucoup de copines dans ce milieu. J’avais préféré me taire sur ce sujet. Fermer les yeux une seconde pour profiter du silence et me retenir de dire des choses que j’allais certainement regretter le lendemain en me réveillant. « Et j’aimerai que tu sois francs avec moi et que tu me dises pourquoi tu m’en veux ? » me demanda-t-elle. « Je t’en veux de m’avoir frappé, c’est évident ! » répliquais-je aussitôt. « Tu comptes rester debout toute la nuit ? » la questionnais-je. Elle dormait peut-être debout dans un coin tous les soirs. « Tu ne tiendras pas. Tu devrais t’allonger avant de me forcer à devoir te porter parce que tu seras tombé ou me forcer à ramasser ton vomi par terre. Bon sang, Madison. Viens t’allonger sur ce canapé. Tu pourrais m’écouter pour une fois ? » Dis-je en croisant les bras avant de me lever de mon fauteuil. « J’ai compris. Tu m’en veux. Tu ne t’excuseras pas pour m’avoir frappé parce que tu penses que c’était justifiable. Il est tard… On a dit ce qu’on avait à dire. C’est le moment pour toi d’aller au pays des rêves ! »

Elle avait croisé les bras à son tour. Apparemment ma réponse n’était pas assez satisfaisante à ses yeux. Je m’en fichais. Je voulais juste qu’elle s’allonge, qu’elle s’endorme et que je puisse être en paix sur mon merdique fauteuil alors qu’elle prendrait mon canapé. « Non ce n’est pas le moment. En revanche, c’est le moment pour toi d’être franc et d’arrêter de me prendre pour une idiote. Je veux savoir pourquoi tu es en colère contre moi ? Vraiment. Tu étais en colère bien avant que je ne te frappe et ce n’est pas pour rien que tu m’as demandé de sortir de ta vie et je veux savoir pourquoi. » Elle m’énervait, elle me m’était à bout. La soirée avait déjà été éprouvante et j’avais tenté d’être gentil avec elle pour me faire pardonner. Mais elle en demandait encore, encore et encore. Elle ne m’écoutait jamais et elle osait se demander ce qui me m’était en colère contre elle. J’avais enterré le sujet le plus brûlant mais si elle voulait que je m’embarque sur ce sujet j’allais le faire. J’étais épuisé, et j’allais péter un câble. Son attitude arrogante de se déplacer pour ce mettre juste devant moi, c’était la goutte d’eau. Elle me provoquait. « Ah ouais ? Tu veux vraiment savoir ce qui m’énerve le plus chez toi ? » la questionnais-je agacé. J’étais lancé, plus personne ne pourrait m’arrêter à présent. Je voulais tout lui balancer à la gueule et j’étais même prêt à répliquer si elle osait me frapper encore une fois. « Tu n’es qu’une saleté de putain de grosse hypocrite. » commençais-je en haussant le ton. J’avais la mauvaise habitude de dire pas mal de gros mots quand j’étais énervé ou que je me disputais avec quelqu’un. Mon vocabulaire était assez fleurit mais je ne m’en rendais pas compte. Dire des gros mots était pour moi une façon de rester un peu plus calme. « Je ne te dois absolument rien du tout. Tu aimes te faire passer pour la victime dans notre relation parce que tu m’as dit que tu étais amoureuse de moi et que je ne t’ai rien répondu mais ce ne sont que des mensonges ! Tu ne m’aimes pas. » Rajoutais-je en haussant le ton encore plus qu’il ne l’était pour le moment. J’étais à la limite des cris mais je me retenais un peu pour l’instant. J’étais loin d’avoir fini. « A chaque fois que je te croise, t’es avec un mec différent et si tu me crois assez con pour ne pas avoir appris le nombre de mecs que tu t’es tapée pendant mon absence, c’est que tu as vraiment une basse opinions de moi… Moi au moins, j’étais payé pour ça. » Et Bam dans tes dents Campbell ! J’avais fini par respirer un peu avant de reprendre pour le dire sur un ton beaucoup plus calme et la mâchoire serrée. « Coucher avec le mec de ta cousine ? Le père de son bébé ? J’ai de la peine pour toi… je ne sais même pas pourquoi je t’autorise à rester sur son canapé. Tu ne le mérites pas… J’espère au moins que ça en valait la peine et qu’il a su te faire grimper au rideau parce qu’il faut tomber bien bas pour faire ça. » On aurait pu croire que j’allais m’arrêter là. J’en avais déjà assez dit. Mais non. J’aimais bien m’enfoncer de toute façon. « Ne redis plus jamais que tu es amoureuse de moi. Tu ne sais pas ce que c’est d’aimer quelqu’un. Et avant de donner des leçons sur le respect familial aux autres, tu devrais te regarder dans un miroir. » J’avais prévu de m’arrêter là. Je m’étais même éloigné d’elle comme si j’avais voulu rejoindre la salle de bain pour aller dans une autre pièce. Mais finalement, j’étais revenu sur mes pas. « Tu sais ce que je vois quand je te regarde ? Une hypocrite mythomane et une grosse déception... »

J’avais craqué. Ce n’était pas la première fois que je perdais le contrôle. Une partie de moi ne cessait de se répéter qu’elle le méritait et que c’est elle qui m’avait forcé à dire tout ça. Une autre partie de moi, se disait que je devais peut-être en conclure quelque chose. Une dernière partie était écœurée que ma colère l’emporte encore une fois. J’étais colérique. Je m’emportais facilement en étant grossier. Ce n’était pas ma faute. On avait tous des défauts. J’en avais peut-être un peu plus que les autres. Pourtant, j’avais sentit à de nombreuses reprises qu’il était peut-être temps pour moi de me taire et que j’en avais assez dit. Mais ma bouche continuait de s’ouvrir encore et encore pour déversait ce flot de paroles. Je ne voulais pas être le méchant. Je n’étais pas le méchant. Alors pourquoi est-ce que je m’étais sentit aussi mal quand j’avais vu cette larme couler sur sa joue ? Je m’étais préparé pour les coups. J’aurais nettement préféré une baffe plutôt que cette larme. Je l’avais regardé mettre ses chaussures et partir à moitié à poil de l’appartement. Toutefois, je n’avais pas bougé d’un centimètre. J’étais toujours debout, prêt du fauteuil, en train de me poser dix milles questions dans mon crâne. Je ne voulais pas faire du mal à Madison ou la blesser. Ce n’était pas mon intention. Ou peut-être que si, je n’en sais rien. Seulement, à aucun moment, je n’avais pensé la faire pleurer. Je n’étais pas quelqu’un qui s’amusait à faire pleurer les filles. J’étais un idiot. Et je l’avais été encore plus en la laissant s’en aller sans essayer de la retenir. Je ne sais pas ce qui s’était passé pour que je me mette à courir jusqu’à la porte. Mon cerveau n’était clairement pas à l’endroit. Je ne réfléchissais même pas à ce que je faisais. Cependant, lorsque mon pied gauche s’était enfoncé dans les morceaux de vase par terre, ce fût comme si toute cette dispute revivait une seconde fois dans ma tête. Je ne pensais pas que j’y avais été peut-être un peu fort. Non. J’en étais persuadé. Je m’étais agenouillé pour retirer les morceaux qui s’étaient enfoncé dans ma peau avant de tous les ramasser un à un. Je les avais tous jeter dans la poubelle quand je venais de regagner le salon et que Madison le traversait pour rejoindre la chambre de Geane. J’avais commencé à la suivre dans le but de m’excuser même si je cherchais mes mots et que je ne savais pas comment commencer cette putain de phrase. Seulement, alors que je m’approchais de la pièce à mon tour, la porte se referma brutalement. Ma main s’était posée sur la poignée et j’avais pensé l’ouvrir mais c’était hors limite pour moi. Lily m’avait bien dit de ne pas rentrer dans cette pièce et je ne le voulais pas tellement non plus. J’étais resté plusieurs secondes qui se transformèrent en minutes face à cette fichue porte. « Madison ? » l’appelais-je en posant mon front contre la porte. « S’il te plait. » murmurais-je en tendant l’oreille. Rien du tout. Pas un bruit. Je ne savais pas si elle dormait ou si elle m’ignorait. Je préférais opter pour la première solution même si c’était peu probable. Je m’étais donc éloigné de la porte pour rejoindre le canapé après avoir éteint toutes les lumières. Je n’arrivais pas à dormir, ni même à fermer les yeux une seconde. J’avais donc rallumé après une dizaine de minutes, une petite lampe pour ne pas faire trop de lumière. Je m’étais mit à marcher doucement jusqu’au téléphone que j’avais attrapé avant de rejoindre le canapé. A cet instant, je ne voulais parler qu’à une personne. Bailee. Elle savait comment me faire retrouver le sourire et j’avais envie de me changer les idées. Manque de chance, je tombais sur son répondeur. « Bailee, c’était moi. Je voulais juste te parler alors… quand tu auras ce message, rappelle moi. Tu me manques. » Dis-je à voix basse avant de rapprocher. Tout était plus facile quand j’étais avec elle. En réalité, tout était plus simple lorsque j’étais dans cette cure et loin de cette horrible ville. Je me plaignais. Encore. Je ne savais faire que ça. A court d’idée et par manque de sommeil, j’avais pris l’un des magazines posé sur la table basse. Un magazine qui recensait des tonnes de métiers différents. Lily m’en avait ramené plusieurs. Selon elle, je pourrais peut-être trouver encore ma voie grâce à eux. Je n’étais pas convaincu mais j’en avais attrapé un avant de me diriger à nouveau jusqu’à la chambre de Geane. J’avais plaqué mon dos contre le mur du couloir avant de glisser contre celui-ci pour me retrouver à terre. Puis, j’avais ouvert le magazine dans le but de commencer à le lire.

Les pages se succédaient les unes après les autres mais je n’étais pas concentré. Je n’arrivais même pas vraiment à lire. J’avais l’impression que les mots bougeaient et que les lettres changeaient sans cesse de place. Bon sang, je devais être fatigué ou préoccupé. Je voulais vraiment faire une nouvelle tentative et m’excuser mais mes gestes s’étaient répétés à l’identique. Je posais ma main sur la poignée avant d’abandonner une nouvelle fois pour me rasseoir devant la porte. Si elle avait pris une autre chambre, ça serait différent. Seulement, la chambre de Geane était hors limite pour moi. Avec un peu de chance, elle sortirait de la pièce par elle-même. C’était ce que je m’étais dit trente minutes plus tôt. J’avais entendu Madison ouvrir la fenêtre de sa chambre puis plus rien. J’avais patienté en faisant les cents pas mais je n’arrêtais pas de me demander si elle ne s’était pas enfuie par la fenêtre dans le but de ne pas me croiser. Je me demandais aussi si elle allait bien. Dans son état, ce n’était pas très prudent de la laisser sans la moindre surveillance. Oh mon dieu et si elle avait sauté à cause de mes paroles ? Finalement, ma main s’était une nouvelle fois posée sur la poignée. Contrairement aux autres tentatives, j’étais rentré tout doucement. J’étais prêt à en assumer toutes les conséquences. Mon regard s’était dirigé vers le lit, personne. Puis vers la fenêtre ouverte. Madison était là. Allongée sur la banquette devant la fenêtre. Je m’apprêtais à parler pour commencer à lui dire que je regrettais tout ce qui s’était passé tout à l’heure mais elle ne semblait pas m’avoir vu. C’est en m’approchant un peu plus, que j’avais remarqué qu’elle s’était endormie. Je me sentais bizarrement soulagé. Au moins, je ne me disputerais plus avec elle ce soir. Il pleuvait fort dehors et il faisait vraiment froid. Cela me faisait du bien mais elle risquait d’attraper froid. J’avais poussé un peu la fenêtre sans la fermer complètement pour laisser encore un peu l’air passé puis j’avais attrapé l’une des couvertures du lit pour la déposer sur Madison. C’était mieux comme ça. Je m’étais retrouvé à faire demi-tour pour ressortir de la chambre de ma sœur. Je n’aimais pas rester là. Je n’y avais pas ma place. En refermant la porte après mon passage, je me sentais affreusement mal. Je n’arrivais même pas à définir ce que je ressentais. J’avais la sensation d’avoir échoué. Je ramassa le magazine à terre puis me dirigea vers le salon pour m’allonger sur le canapé. J’avais recomposé le numéro de Bailee, encore sur répondeur. Je détestais ça. Je recommença donc une troisième fois, sans plus de succès. Je le fis une bonne vingtaine de fois avant que le sommeil ne me gagne à mon tour.