Plusieurs jours étaient passés depuis le retour de Blake. Il appelait tous les jours pour parler à Ania’ où me prévenait quand il était impossible pour lui de le faire. Pour le coup, il semblait s’investir réellement. C’était un bon début. J’espérai seulement que ça dure et qu’il puisse aussi partager des moments « réels » avec sa fille. Je ne lui avais pas encore proposé de la prendre. Je ne savais pas s’il s’en sentait capable et ne voulait pas l’y pousser trop tôt, au risque de tout faire capoter. J’attendais qu’il me le demande, tout simplement.

Lorsqu’il était venu me voir, Blake m’avait proposé de me faire voir des photos et des vidéos de notre passé en commun, à tous les trois et j’avais accepté. Peut-être qu’il serait là ce choc émotionnel… Oui, je tentais d’y croire toujours. Malheureusement, nous n’étions pas encore parvenus à trouver une date pour nous voir. Nous avions tout deux un emploi du temps chargé. Puis je devais avouer que j’avais passer beaucoup de temps à ranger l’appartement pour que tout soit niquel à l’arrivée de Julien. Ca avait l’air de lui plaire en tout cas et ça me satisfaisait amplement. Nous prenions peu à peu nos repères à deux, à Miami. Anastasia l’acceptait bien et ça se passait très bien entre eux et ça, c’était l’essentiel.

C’est au bout de quelques jours que je reçus un sms de Blake. Il proposer un petit repas à trois avec Ania’. Je savais pertinemment que ça ferait plaisir à la petite et c’est pourquoi j’avais accepté. Ca ne gênait pas tellement Julien. Ca lui permettrait de pouvoir bosser depuis son ordinateur tout en prenant du temps pour lui. « Ok, j’apporte le dessert ! » lui avais-je répondu. Mais avant de passer à la pâtisserie, j’avais promis à Anastasia d’aller à la patinoire une petite heure. Je ne dirais pas qu’elle était gracieuse sur la glace, mais elle se déplaçait plutôt bien pour une enfant de son âge. La grâce viendrait en grandissant ! Nous étions donc restés un long moment à la patinoire avant qu’Anastasia en ait marre. A la pâtisserie, c’est elle qui choisit le gâteau… au chocolat, bien évidemment. « Et beh avec chantilly, ça fera bon ! » Ahhh cette gamine avait bon goût.

Nous arrivions chez Blake aux alentours de 18h45. Et le moins que l’on puisse dire c’est que son immeuble était très luxueux ! Grand écart avec mon immeuble à moi. Je sonnai à la porte et il ne tarda pas à nous ouvrir. « Hey ! » souriais-je avant qu’Ania’ ne lui saute dans les bras. « Tiens. C’est Ania’ qui a choisis. -Chocolat !!! » ajouta-t-elle instantanément. « Tu vas bien ? »

( Pando )

Blake avait proposé qu’on se retrouve chez lui, histoire qu’il puisse me transmettre tout un pan de mon passé à travers des photos et des vidéos. Bien sûr, j’étais consciente que ça ne raviverait pas ma mémoire, mais au moins j’arriverai plus à cerner cette relation qui nous avait uni. Du moins c’est ce que j’espérai car même si je n’y avais pas pensé durant mon tour du monde, je me posais de plus en plus de questions. Ca ne concernait pas que nous bien évidemment, ça concernait ma vie durant ces 6 dernières années et Blake avait eu une place importante dans tout cela !

J’avais donc accepté son invitation à diner et avait apporté le dessert. Anastasia avait choisi un gâteau aux 3 chocolats, comme elle les aimait tant et lorsque nous arrivâmes chez son père, ce fut la première chose qu’elle lui dit. La connaissant, elle allait vouloir manger vite, pour goûter au dessert ! « Il faut, il faut, il faut chantilly ! » expliqua-t-elle. Anastasia était une vraie gourmande et pouvait avaler tout aliment sucré et de préférence chocolaté ! « Ca va. » répondis-je dans un léger sourire avant de rentrer dans ce luxueux appartement.

L’appartement était décoré avec goût et je doutais que ce soit Blake qui ait fait ça tout seule. Premièrement, par manque de temps et deuxièmement, car ce n’était pas forcément son truc ! Comme proposé par Blake, je partis m’installais sur le canapé, posant ma veste et mon sac sur une chaise non loin. « Je veux bien une bière. Merci. » demandais-je tout en continuant d’observer l’appartement. « Classe ton appartement ! » lâchais-je. Anastasia, voulait aider son père à apporter les boissons. Elle aimait ça, qu’on lui donne des responsabilités. Blake m’apporta alors ma bière et alors qu’il me la tendait, je remarquai un nouveau tatouage sur son avant-bras gauche. Un tatouage donc le dessin m’était familier. Je lui attrapai le poignet pour l’immobiliser quelques instants afin d’être sûre. C’était un des dessins qu’Ania’ lui avait fait alors que nous étions en Italie. L’attention était très touchante. « Tu es au courant que ça va rester toute ta vie ? » demandais-je en lui lâchant finalement le bras. J’aimais ma fille plus que tout au monde, mais on ne peut pas dire qu’à son âge elle était une grande artiste. Une personne ne connaissant pas l’origine du tatouage, pourrait penser qu’il se l’était fait faire par un ami après une soirée trop arrosée. Alors oui, ça venait de sa fille et au fond, c’était terriblement touchant qu’il ait fait ça, mais… il aurait clairement dû attendre qu’Anastasia développe son coup de crayon ! « C’est panpan ! » expliqua Anastasia. C’est panpan éborgné alors ! pensais-je. Mais les enfants, en général, étaient tellement fières de leurs petites œuvres qu’on ne pouvait pas leur enlever ça ! « Du ketchup. » répliqua alors Anastasia qui était toujours à l’écoute de tous. « Tu ne peux pas manger que du ketchup ma puce. » souriais-je avant de me tourner vers Blake. « Ceux qui te va. » je n’étais pas bien difficile en matière de nourriture.

Blake se leva quelques instants et posa devant moi une boite. Une boite remplie de souvenirs… « C’est… » commençais-je à supposer et Blake acquiesça d’un signe positif de la tête. «Merci… » Je pris quelques secondes avant de l’ouvrir d’une main hésitante. Je savais ce qui m’attendait, j’avais moi aussi trouvé des photos chez moi. Je posai la clé usb sur la table basse avant de regarder les photos développées. J’avais déjà vu certaines, mais pour la plupart, je les découvrais. Je souris devant certaine en voyant Ania’ dans des postures improbables. Avec cette amnésie, c’est ce que je détestais le plus : avoir oublié tout ce qui la concernait. Le reste, je pouvais gérer, mais ça, j’avais du mal. Heureusement, elle était trop jeune pour avoir de réels souvenirs de cette époque et ne pourrait jamais me le reprocher, mais… ça me faisait mal quand même. Anastasia s’était collée contre moi pour pouvoir, elle aussi admirer les photos. « Tu sais qui c’est ? » lui demandais-je alors que j’étais tombée sur une photo de nous trois à la maternité. « un bébé. » dit-elle simplement. « C’est toi. » souriais-je alors qu’elle me prenait la photo des mains pour l’observer plus attentivement. Je repris, quant à moi, le visionnage des autres photos. « On avait l’air bien. »

( Pando )

Blake s’était fait tatouer un dessin d’Anastasia sur le bras. C’était touchant, vraiment. J’en avais un moi aussi en lien avec ma fille, que j’avais fait avant mon accident, mais il restait plus sobre et plus esthétique. Le sien… était celui d’un enfant de 2 ans et demi, alors forcément, pour l’esthétisme, on repasserait. J’espérai qu’il n’avait pas fait ça simplement pour me prouver qu’il pouvait reprendre sa place de père. « Aucune fille ne voudra de toi avec un tatouage pareil sur le bras, je te le dis ! » plaisantais-je dans un léger rire. Elles penseraient toutes qu’il l’avait fait lors d’une soirée trop arrosée. J’aurais pensé exactement la même chose si je n’avais pas déjà vu le motif avant, sur l’un des dessins de ma fille.

Blake nous attendait pour commander et Anastasia savait ce qu’elle voulait : du ketchup. Si je ne la freinais pas, elle en mettrait à tous les repas : dans la purée, dans les haricots, … « Frites, frites, frites ! » Comment contenter un enfant ? Avec des frites et du ketchup. « Va pour un repas bien gras alors. » riais-je. On éliminerait tout ça demain par un footing matinal ! Le sport de haut niveau exigeait une alimentation équilibrée et je respectais ça la plupart du temps. Je faisais quelques écarts comme tout le monde et quand j’avais envie de quelque chose, je ne me privais pas. De toute façon, je faisais assez de sport pour éliminer tout ça, sans problème.

Les photos d’une vie passée étaient là devant moi et j’étais hésitante à les regarder. Pourquoi ? Je n’en savais trop rien… Je pris délicatement le tas de photos et les regardai attentivement. Anastasia s’était jointe à moi. On avait l’air plutôt heureux ensemble. Du moins c’est ce que montrait tout ces tirages. Blake semblait bien s’occuper de la petite et pourtant, du jour au lendemain, plus rien. C’était bien triste d’en arriver là, surtout pour Anastasia. Cependant, elle était encore jeune et tout n’était pas perdu. J’avais espoir que Blake reprenne sa place de père avec Anastasia. Certes des parents séparés ce n’était pas ce qu’il y avait de mieux pour une enfant de 3 ans, mais c’était mieux que pas de père du tout. Elle s’y ferait. C’était monnaie courante aujourd’hui.

Blake s’absenta quelques instants pour commander le repas puis revint rapidement nous rejoindre avant de saisir une photo qui se trouvait dans la boite. Nous étions sur la glace en train de nous entrainer et je me demandais bien qui pouvait avoir pris cette photo. Sa mère ? la mienne ? Peu importait au final. Le patinage, le seul domaine où j’excellais et qui me procurait autant de sensations. Cette photo me faisait sourire. J’avais pour une fois, le souvenir de cette compétition. D’ailleurs c’était l’un des derniers qui me restait sur la glace. J’adressai un léger sourire à Blake face à son compliment. « Et papa gros bras. » répliqua Anastasia en imitant un bodybuilder. Je ris avant de répondre « La première compétition est dans moins de deux semaines. On a clairement nos chances. De toute façon, on a pas le droit à l’erreur. La presse nous attend au tournant. Enfin, elle m’attend au tournant. » avouais-je. J’avoue que je stressais pas mal, même plus que d’habitude. Pourtant je métrisais l’enchainement des figures et des portés. Mon genou ne me faisait pas défaut et je n’avais pas peur de « me jeter dans le vide ». D’après les docteurs, mon amnésie était plutôt un atout pour le patinage. Je ne me rappelais plus être tombée, donc je n’avais plus peur de tomber. Comme quoi, tout était dans ma tête.

( Pando )

Un tatouage, pour une signification et je comprenais bien celle-ci. J’étais touché et je savais qu’un jour Anastasia le serait encore plus que moi. Elle était encore trop petite pour comprendre la signification de ce tatouage. Je plaisantai d’ailleurs à ce sujet gentiment. « Non, tu auras ta chance avec les mamans célibataires quand tu amèneras Ania’ au parc, c’est tout. » riais-je de plus belle avant de rajouter toujours un rire « En contrepartie, tu gagneras d’autres gamins ! »

Le choix du menu de ce soir était fait et nous pouvions à présent nous concentrer sur les photos. Elles étaient révélatrices d’un bonheur partagé, mais d’un bonheur de courte durée. Cela n’avait duré que 6 petits mois. Autant dire, ma plus courte histoire. Du moins, dont je me souvenais. Blake m’avait expliqué la ou plutôt les raisons de notre rupture. Au fond, nous n’étions sûrement pas faits pour être ensemble.

Une des photos était plus ancienne. A cette époque nous étions à notre meilleur niveau et rien ne nous arrêtait. A mes yeux ça ne me semblait pas si loin que ça et pourtant… 7 ans nous séparait de cette photo. Et après 7 ans, je me retrouvais à la case départ… à faire des compétitions que je faisais à l’âge de 18 ans… Néanmoins, j’avais toujours de l’espoir. Je savais que mon niveau et celui de mon partenaire dépassait largement la majorité des concurrents. Je maitrisais l’enchainement et en théorie tout se passerait bien. Mais la théorie et la pratique étaient deux choses différentes et au fond de moi, j’avais peur qu’on mon genou me lâche… Les médecins ne m’avaient pas poussée à reprendre le patinage à haut niveau. Pour eux, ce n’était pas une très bonne idée de faire subir à mon genoux un tel rythme. Pour l’instant, je préférais ne pas m’en soucier. Pour l’instant, j’arrivais à gérer, et la douleur était rare et faible. Il fallait que je mette la compétition de côté et que je garde mon calme.

Blake proposa alors de s’occuper d’Anastasia lorsque ce serait à mon tour de patiner. Oups, et merde… Il allait falloir que je lui fournisse quelques explications et bizarrement, je n’étais pas très à l’aise à l’idée de lui annoncer mon mariage. Je ne savais pas quelle pourrait être sa réaction. En même temps, je n’avais jamais été du genre à foncer tête baissée. J’aimais tout métriser et être sûre de moi avant de faire quoi que ce soit et pourtant… ce mariage était tout sauf réfléchi. Je ne le regrettais pas, loin de là. J’étais heureuse et même si ça devait se finir demain, dans un an ou dans 10 ans, j’aurais le mérite d’avoir vécu ce que j’avais à vivre. « Oh euh… Ania’ sera déjà sur place… Je savais pas que tu comptais venir… et d’ailleurs ne te sens pas obligé… En fait, mon nouveau compagnon devait s’en occuper. » avouais-je. Okay, une chose de faite. « Mais si tu veux venir, tu peux, hein ! Ania’ sera ravie de passer un moment avec toi. Pas vrai ma puce ? » demandais-je dans un léger sourire en me tournant vers la principale intéressée qui se mit à sourire de toutes ses dents.

Après cette annonce, Blake essaya de me rassurer quant à la compétition. « Ouais… c’est ce que j’essaie de me dire. Je connais mon programme sur le bout des doigts. Il faut juste que je fasse abstraction de tout le reste et c’est plus dur que je ne peux le penser. » soupirais-je. Je savais que je pouvais me confier à Blake à ce sujet. Il connaissait tout aussi bien que moi le monde du patinage et il me connaissait aussi. Sur la glace, je m’étais toujours mes émotions de côté. Je n’avais jamais eu de mal jusqu’à présent. En même temps, je n’avais jamais eu à douter de moi non plus.

( Pando )

Blake proposait de s’occuper d’Anastasia lors de ma compétition qui aurait lieu dans moins de deux semaines. Seulement voilà, j’avais déjà prévu le coup et il fallait à présent que j’explique qui s’occuperait de la petite : Julien. J’omis les détails, de toute façon ça ne devait pas l’intéresser. Julien avait proposé de lui-même de s’occuper d’Ania’ ce jour-là. Il savait que j’aurais terriblement besoin de présences familières : lui, ma fille au minimum et si c’était possible : mon frère et ma mère. Mais là-dessus, j’avais un doute.

Blake ne releva pas vraiment mes propos sur mon nouveau compagnon et je crois que, cela me soulageait un peu. Au moins, il n’y avait pas d’ambiguïté. Je souris avant de prendre la parole. « Okay. » Je ne voyais pas de mal à ce qu’il veuille passer du temps avec sa fille. Au contraire, c’était une bonne chose. Il voulait vivre avec elle des moments importants et mon retour sur la glace semblait l’être. « C’est un bon début. » souriais-je avant de reprendre « Si tu veux la prendre un de ses jours, un après-midi, tu peux tu sais… Tu me dis quand tu veux passer la prendre et puis voilà. » Je ne pouvais pas la lui laisser plus de quelques heures pour l’instant. C’était trop tôt pour tout le monde : elle, lui et aussi moi. Je ne sais pas comment ça se passait avant, mais lors de cette dernière année, je ne l’avais pas laissée dormir ailleurs que dans un lieu où j’étais. Pourtant, il allait falloir m’y faire, surtout si le patinage marchait de nouveau pour moi. « Bien sûr, quand tu te sentiras prêt. Je veux pas t’y obliger hein. Je veux juste que tu saches que tu peux. » Mon but n’était pas de lui mettre la frousse non plus, juste qu’il sache qu’il avait le choix.

J’étais inquiète face à cette ridicule compétition et Blake était le mieux placé pour comprendre. Lui aussi était reparti de zéro et dans un domaine bien différent qui plus est ! Pour lui, j’étais toujours la même fille que celle qui était sur la présente et je n’avais pas à me mettre autant la pression. Tout se passerait bien. « Oui, tu as raison. » dis-je sans le fixer, toujours les yeux rivés sur la photo. Les compétitions ne m’avaient jamais autant stressée, ça ne devait pas commencer maintenant. « Merci. » dis-je en lui adressant un sourire sincère.

D’autres photos défilèrent et nous arrivions à la fin du paquet. Blake en attrapa eu. Première sortie à la plage et Anastasia devait avoir seulement 2-3 mois. Elle était déjà bien grassouillette. J’écoutai attentivement le récit de Blake concernant cette sortie à la plage, essayant tant bien que mal de me construire des images mentales. Apparemment, j’étais trop complexée par mon corps d’après grossesse pour pouvoir me mettre en maillot. Je payerai cher pour me retrouver à la plage en tee-shirt et short à maudire mon corps post-grossesse, vraiment très cher ! Blake n’était apparemment pas d’accord sur l’image que je me renvoyais à l’époque. Quelque peu gênée par des compliments dont je n’avais absolument pas l’habitude, du moins venant de lui, mes yeux trouvèrent mes chaussures très intéressantes ! « La plus belle maman ! » répliqua Anastasia avant de me claquer un bisou sur la joue.

Sauver par le son retentissant de la sonnette, Blake se leva pour aller ouvrir. Notre repas était là ! Anastasia se précipita elle aussi vers la porte. Lorsque la porte se referma, je me levai et me dirigeai vers la cuisine. « Je meurs faim ! Pourrais manger un éphant ! » Cette petite regardait décidément trop les dessins animés ! « Viens te laver les mains, avant de dévorer un éléphant ! » souriais-je Blake m’indiqua où se trouvait la salle de bain et lorsque je revins, les plats étaient sur la table, prêts à être dévorés. « Je suppose que tu n’as pas de chaise haute ? » Et quant à moi je n’avais pas pensé à ce détail la.

( Pando )