TIMOTHY &
HELENA

Timothy s’était emporté contre moi parce que je semblait prendre le parti de sa mère, ce qui était vrai en faite. Le jeune homme avait tout autant un caractère de merde que moi. Quand il était contrarié il était du genre à s’emporter, comme c’était le cas. Je n’avais pas voulu le blesser ni même le froisser, mais j’avais parlé avec sincérité de ce que je comprenais des choix qu’avait fait sa mère. Je n’ajoutai rien pour ne pas alimenter une dispute. Je pouvais comprendre sa colère. Il finit par s’excuser de s’être énervé. « C’est rien. Je sais que c’est difficile. » Il lui fallait du temps pour pardonner le secret de sa mère et c’était compréhensible. J’espérais qu’un jour il comprenne pourquoi elle avait agi comme ça. Je le questionnai sur ce que moi j’avais bien pu avoir comme rôle dans toute cette histoire. Avais-je accepté la situation sans broncher ou bien on m’avait forcé la main ? Tim n’avait pas de réponses à m’apporter. C’était un peu frustrant mais en même temps je me disais que j’avais de la chance d’avoir Charlotte aujourd’hui, malgré tout …
 
Je demandais ensuite au jeune homme de me raconter comment tout avait commencé entre nous, enfin le côté romance de notre histoire. Il m’expliqua que c’était par une histoire d’amitié banale. On trainait ensemble depuis tout petit et puis les choses avaient changés après la mort de son père. On se plaisait et au lors d’une bagarre le jeune homme m’avait embrassé. Un sourire se glissa sur mes lèvres, amusé par ce moment innocent entre deux adolescents. Et puis, le temps d’un instant je ressentis quelque chose que je ne connaissais pas. Comme si mon esprit associait à cette histoire des sentiments enfouis. C’était étrange mais pas plus étrange que ma demande faite au jeune homme. Il se mit à rire. « Peut-être … » dis-je doucement. Le vin avait peut-être des effets secondaires sur mon corps et mon esprit mais ma question restait quand même assez sérieuse. « Je veux juste savoir si ça me fait quelque chose de t’embrasser. Peut-être faire revenir quelques souvenirs en réactivant des actes associés à eux. Tu comprends ? » Mon explication était peut-être un peu bancale mais pour moi elle semblait très bien fondée. Alors que je ne pensais pas qu’il allait accepter ma demande, sa réponse fut tout de même positive. Je le regardai quelques secondes. C’état étrange car je n’avais pas froid aux yeux habituellement avec les hommes, mais là, je ne savais pas trop comment agir. Timothy s’approcha de moi et ses lèvres se posèrent sur les miens, doucement, tendrement. C’était étrange. C’était comme si je me rappelais avoir vécu cela mais sans pour autant réussir à retrouver le souvenir associé. Je répondis à son baiser, me laissant entrainer par une vague d’émotion, de sentiment. Et puis nos lèvres se détachèrent et Timothy me regarda en attendant une réponse. « Je … J’ai l’impression que … » balbutiai-je légèrement. «  J’ai pas d’image de souvenirs qui me viennent, mais je sais au plus profond de moi avoir vécu ça, d’avoir déjà ressentis ça … » Ressentis quoi ? Je ne le savais pas. De l’amour ? J’en savais rien. Je ne pensais pas avoir été amoureuse d’aussi loin que je m’en souvienne. C’était sans aucun doute des sentiments enfouis avec l’accident au plus profond de moi mais je n’arrivais pas tellement à savoir quels étaient-ils. « C’est étrange, c’est un peu comme quand tu sens une odeur et qu’elle te rappelle quelque chose d’imprécis. Tu sais que tu la sentis quelque part, que ça te fait du bien car c’est surement lié à quelque chose d’heureux mais sans réussir à situer le contexte exact de l’odeur. » Le cerveau était comme une grosse boite noire qui enregistrait tout et c’était incroyable qu’il puisse se souvenir de détails comme ceux-ci. « Et si on couchait ensemble pour voir ce que ça fait ? » Je le regardai, plantant mes yeux dans les siens. Je sentais que je l’avais déstabilisé. Je gardai mon sérieux quelques secondes avant d’exploser de rire et de terminer mon énième verre de vin. « Respire, je blague … enfin sauf si tu en as envie … » Je lui offris un sourire en coin en m’enfonçant dans ma chaise. Je doutais qu’il accepte une telle proposition et je ne savais pas trop comment me situer vis-à-vis de ça par rapport à Timothy. Je savais couchais sans sentiments, je le faisais bien assez souvent pour juste prendre mon pied sans que l’affect ne prenne le dessus. Mais avec le père de ma fille … l’enjeu n’était pas le même. Je ne pouvais pas prendre le risque de gâcher la relation, quelle qu’elle soit, entre nous et indirectement la relation qu’il pourrait-pouvait y avoir entre Charlotte et Timothy.
 

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Oui, j’étais en colère contre ma mère et il me semblait que cela était légitime. Elle m’avait menti. Elle m’avait vu souffrir, elle m’avait vu me rendre responsable de la mort de Britany et elle n’avait rien fait pour changer ce sentiment. Non, elle m’avait laissé croire ça. Quelle mère pouvait faire ça ? Non, je suis désolé, j’avais beau essayé, je ne la comprenais pas ! Et oui, ça me mettait hors de moi qu’Helena puisse prendre son parti. Ma mère était dans le faux, un point c’est tout. Je m’excusais néanmoins, ça serait bête de dégradé notre relation dès le début, puis ce n’était pas elle la responsable. Ce n’était pas elle qui m’avait menti.

Lorsque la pression fut retombée et l’ambiance plus calme, Helena me demanda de lui raconter notre histoire. C’était plutôt surprenant qu’elle me le demande maintenant. J’avais toujours cru qu’elle ne préférait pas savoir puisque de toute façon elle ne se souvenait pas. Néanmoins, je pris la parole et lui racontai du mieux que je pouvais. Cela ressemblait à une histoire banale entre deux adolescents, mais c’était la nôtre ! La surprise continua lorsqu’Helena me demanda de l’embrasser. L’alcool devait avoir trop agi sur son organisme. Pour moi, c’était le cas !

La jeune femme m’expliqua qu’elle espérait que cela lui déclenche une sorte de déclic qui ferait remonter ses souvenirs à la surface. Je pouvais comprendre son espoir, mais sincèrement, je n’y croyais absolument pas… On s’était retrouvé depuis quelques temps maintenant et le déclic aurait dû avoir lieu. Or pour l’instant, c’était le néant. Alors je doutais qu’un simple baiser puisse être efficace. Peut-être que retrouver sa famille, ça, ça serait vraiment utile pour sa mémoire. Bien que je ne croyais pas à sa théorie, j’acceptai. C’était plutôt bizarre de devoir embrasser une personne dans ce genre de contexte. Un baiser pour rendre service… c’était bien la première fois que ça m’arrivait ce genre de truc !

Lorsque mes lèvres se posèrent sur les siennes, tout un flot de sentiments m’envahis. Je me revoyais, jeune adolescent à côté de Britany. C’était enivrant, peut-être un peu trop. Voilà pourquoi je rompis ce baiser avant de dépasser les bornes. Est-ce qu’au moins il avait été utile ? Pas vraiment, elle avait une sensation de déjà vu, mais rien de concret. Même si je n’y croyais pas vraiment, c’était une nouvelle déception. A croire qu’elle ne se souviendrait jamais ! « Ressentis ça ? » répétais-je interloqué. « Euh… ouais… » répétais-je quand elle compara ça à une odeur. Je n’avais pas tout saisi, mais qu’importe.

« Et si on couchait ensemble pour voir ce que ça fait ? » Cette question raisonna dans mon esprit. Elle ne pouvait pas être sérieuse, si ?! Après le baiser, ça, comme si c’était tout à fait normal. Je ne savais absolument pas quoi répondre tant la question était surprenante. Dans un autre contexte, okay, je n’aurais peut-être pas dit non… mais là… Je me relâchai lorsqu’enfin elle avoua qu’elle rigolait ! Enfin, à la fin je n’en savais rien. C’était le genre de personne qui dit « c’est une blague », mais sans trop l’être. Okay, elle avait définitivement trop bu. Du moins, c’est ce que je préférais en conclure. C’était la mère de Charlotte, mon ex, et jamais cette idée ne devait me traverser l’esprit, JAMAIS…. « Bon je vais rentrer chez moi. » c’est préférable, faillis-je rajouter. « Demain, vers quelle heure ? » lui demandais-je. Je supposais tôt, en général, les enfants se lèvent aux aurores le jour de Noël. Cela allait me faire une courte nuit, mais qu’importe, je n’étais pas un gros dormeur de toute façon.

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Dans les films on pouvait souvent voir la personne amnésique avoir de gros flashs de souvenirs bien détaillés où tout d’un coup elle se rappelait toute sa vie d’avant et tout finissait par aller pour le mieux. Pour moi ce n’était pas ça. Le baiser n’avait pas déclenché de flashs mais plutôt des émotions enfouies quelque part au fond de moi. C’était une expérience un peu étrange et qui ne m’aidait pas beaucoup. J’avais tenté de l’expliquer à Timothy, mais j’avais l’impression qu’il ne comprenait pas bien ce que j’avais voulu lui dire. Je ne m’obstinai pas à trouver comment lui expliquer autrement car tout simplement je ne savais pas comment faire. Sur le ton de la blague je proposais à mon ex de coucher ensemble pour voir ce que ça pouvait déclencher. Dans le fond ce n’était peut-être pas une si mauvaise idée … quoi que. Le baiser n’avait rien donné de très concluant et je n’étais pas réellement certaine que ce soit le cas avec du sexe. La réponse du jeune homme ne fut pas un non catégorique. Timothy m’informa qu’il devait rentrer chez lui et puis me demanda à quelle heure il devait être là pour ouvrir les cadeaux. Ma déformation professionnelle/scolaire me faisait penser que s’il n’avait pas répondu non c’est qu’il n’avait pas certainement pas envie de le dire. Je pouvais me tromper mais quelque chose me disait qu’il essayait d’être correct au détriment de ce qu’il avait réellement envie. Mais je pouvais me tromper … Je ne relevai pas la chose mais un sourire amusé s’afficha légèrement sur mes lèvres. Je me leva de ma chaise en même temps que mon invité. Je mis mes mais sur mes hanches en lui barrant un peu le passage devant sa chaise. « Alors, premièrement il est hors de question que je te laisse rentrer chez toi en ayant bu. J’ai une chambre à l’étage toute prête. Pas la mienne hein, une chambre d’amis. » Je me mis à rigoler. « Et puis deuxièmement, j’ai besoin d’aide pour sortir les cadeaux du garage et pour les mettre sous le sapin. » Je plantai mes yeux dans les siens, les mêmes que ceux de ma fille. J’étais contente de pouvoir attribuer les yeux de ma fille à un visage. Même si le mien avait été déformé et reconstruit, je savais qu’elle ne pouvait les détenir de moi. « Essaye pas de négocier, tu me feras pas changer d’avis. Je suis maman, oublie pas, alors les négociations ça me connait. » Je fis un signe de tête pour qu’il me suive jusque dans le garage.
 
J’alluma les néons pour nous éclairer les récupéra les paquets dans une malle qui était planqué sous une grosse couverture. Je donnai à Timothy un cabas en plastique dans lequel il y avait les cadeaux avec nos différents prénoms et puis je récupérai le nouveau vélo de Charlotte caché derrière un tas de cartons et de babioles. Heureusement que ma fille avait interdiction de venir ici sans moi sinon je ne savais pas où j’aurais caché ce machin. On retourna dans le salon pour disposer le tout sous le sapin. J’étais toujours heureuse de pouvoir disposer les paquets cadeaux à Noël. Même si parfois, à certaines périodes, les temps avaient été durs, j’avais toujours réussi à assurer un Noël décent à ma fille. Elle avait toujours été ma priorité dans la vie et elle le serait toujours. « Allez viens que je te montre ta chambre. » Je posai ma main quelques secondes sur son avant-bras en passant devant lui. On monta à l’étage. En passant devant la chambre de Charlotte je regardai si elle dormait bien. Tout semblait ok alors je tirai la porte en faisant attention à la laisser un petit peu entre-baillée. Je me dirigeai vers une seconde chambre à la porte fermée, la chambre d’amis. J’appuya sur l’interrupteur qui alluma le plafonnier. « Voilà. Je t’ai sorti une serviette de toilette si tu veux prendre une douche. La salle de bain et au bout du couloir. Je pense que tu n’as pas besoin de mettre de réveil, Charlotte viendra très certainement te réveiller pour ouvrir les cadeaux. » Chaque année c’était la même chose. Elle venait en trombe dans ma chambre et sautait dans mon lit jusqu’à ce que je me lève. Elle savait qu’on ouvrait toujours les cadeaux ensemble et pas question de dérogeait à cette règle. Avec son ère dans les parages, je me ferais un plaisir de l’envoyer le réveiller lui aussi. Alors que je m’apprêtais à sortir de la chambre je m’arrêtai et me retourna vers le jeune homme. « Merci d’être venu. C’était vraiment cool ce soir. Je suis certaine que Charlotte a apprécié ta présence. » Je m’avançai vers le jeune homme et le serra dans mes bras chaleureusement. Moi aussi j’avais apprécié qu’il soit avec nous ce soir. Je ne savais pas trop où toute cette histoire de famille allait nous mener mais ça semblait prendre un bon départ. Je relâchai le jeune homme. « Bonne nuit. A demain. » Je quittai la chambre pour retrouver la mienne. J’enleva ma tenue, enfila un jogging et un débardeur et me glissa sous mes draps. Demain ce serait l’ouverture des cadeaux. Demain ne pourrait être qu’une chouette journée. Au lieu de trouver le sommeil rapidement, je restai les yeux rivés sur le plafond, les petites étoiles luminescentes qui brillaient faiblement. Ce baiser avec Timothy restait au bord de mes lèvres et les sensations qui étaient liées à celui, également. J’arrivais presque à être nostalgique de ce temps dont je ne me rappelais pas. Cette fille que j’avais été avais eu de la chance d’avoir vécu une histoire d’amour avec un garçon aussi gentil. J’en serais presque jalouse en plus d’être nostalgique.
 

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Rien ne se passa. Enfin « rien »… rien qu’elle n’espérait du moins. Aucun souvenir ne lui revint à l’esprit et au final, ça ne m’étonnait pas trop… Ce genre de chose n’arrivait que dans les films et nous n’étions pas dans un film… Même si je n’avais pas vraiment espéré que ça marche, j’étais tout de même déçu. C’est bête je sais… En plus de 8 ans, aucun souvenir ne lui était revenu à l’esprit. Ce n’était pas maintenant que ça allait commencer. Même nous retrouver n’avait eu sur elle aucun électrochoc… Peut-être en retrouvant sa famille et notamment sa sœur… Au final c’était probablement le seul espoir…
Même si aucun souvenir ne lui était revenu à l’esprit, c’était une sensation de déjà-vu. « Ca reviendra un jour… » tentais-je pour la rassurer, mais je pense qu’elle s’était rendu compte que moi-même je n’y croyais plus… Sa deuxième idée pour débloquer ses souvenirs était pour le moins surprenante et déroutante. Elle blaguait sans vraiment blaguer et je savais que si j’avais dit oui, la toute de suite elle ne m’aurait pas dit « Non, mais je plaisante. » Non, elle m’aurait amené jusqu’à sa chambre. Seulement ça, ce n’était pas une bonne idée. Nous avions bu et nous le regretterions immédiatement après. Nous n’étions pas deux inconnus pouvant se permettre une nuit de sexe sans lendemain. Non, il y avait un Charlotte et nous avions un passé trop important en commun. Bref, en deux mots : Mauvaise idée ! Il était donc préférable pour elle comme pour moi que nous que je rentre à mon appartement. La jeune femme s’y opposa. Apparemment j’avais trop bu. « Trop » était un bien grand mot, mais plus que la consommation autorisée, c’était certain. « Okay, okay, j’obtempère ! » riais-je en levant les mains tel un malfaiteur arrêté par la police. Elle avait aussi besoin d’aide pour installer les cadeaux. Je la suivis jusqu’au garage où étaient cachés les cadeaux. « Tu veux que je te dise ? Les enfants de nos jours sont bien trop gâtés ! » Et je ne disais pas ça que pour Charlotte, ils l’étaient tous et même si ça nous faisait plaisir de leur faire plaisir, ce n’était surement pas la meilleure chose pour eux !

Alors qu’elle m’amenait à ma chambre pour la nuit, je découvris l’étage de sa maison. Encore une fois, je me demandais bien comment elle pouvait se payer une telle baraque. Cela me paraissait toujours hallucinant que la fac l’aide autant. « Okay, merci. » souriais-je alors qu’elle avait pensé à me laisser une serviette de toilette. En quittant la chambre, elle me remercia une nouvelle fois pour ma présence. « J’espère… » souriais-je légèrement. Il était bien trop tôt pour se prononcer. Helena me prit alors dans ses bras. Surpris dans un premier temps, je lui rendis cette étreinte dans un second temps.

Alors qu’elle quitta la chambre, je me laissai tomber sur le lit. J’étais fatigué certes, mais il était rare que je m’endorme aussi tôt. Je ressassai les images de la soirée dans mon esprit et je ne savais plus trop quoi en penser. Embrasser Helena m’avait fait revivre tout un tas de souvenirs et surtout tout un tas d’émotions. Nostalgique ? Très certainement. En tout cas pour l’heure, j’étais incapable de dormir. Je sortis alors de mon jean, mon paquet de cigarette. C’était la seule chose qui me permettait de me calmer et de réfléchir. Oui, ce n’était pas le meilleur moyen, mais à la mort de mon père cela m’avait bien aidé et depuis, je n’avais jamais tenté de m’arrêter. J’ouvris alors la fenêtre en essayant de faire le moins de bruit possible et restai là plusieurs minutes encore. Le sommeil allait être long à venir…

Comme l’avait prédit Helena, le réveil se fit en fanfare. Charlotte criait à travers le couloir, toute excité, que le père Noël était passé. Je regardai l’heure à mon portable : 7h15. Dur, dur ! Néanmoins, j’attrapai rapidement ma chemise et mon jean posé au sol et les enfilai. C’était dur de me dire que je ne serai pas là pour voir mon frère déballé ses cadeaux… J’espérais qu’il ne s’en vexe pas…

 

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HELENA

Allongée sur un lit, un crayon dans la bouche, je regardais un livre de mathématiques. Je ne comprenais rien au sens des fractions qui se dressait sur la page. Le problème exposé me semblait incompréhensible. Je lâchai le crayon sur le bouquin et me retourna sur le dos pour contempler le plafond en soupirant. Une représentation de notre galaxie s’étendait au-dessus de ma tête. Je ne deviendrais jamais astronaute, les maths et moi étions clairement incompatibles. Je sentis le lit s’affaisser sur mon côté droit et une tête d’un jeune garçon apparut devant mes yeux. Je ne pu m’empêcher de sourire en le voyant. D’une oreille distraite je l’écoutai me dire de ne pas abandonner et que ce n’était pas bien compliqué. Un autre soupir s’échappa de moi. Je le repoussai d’une main doucement pour le faire tomber sur le côté. Mon regard le suivit. Un rayon de soleil passa à travers la fenêtre, ma fenêtre de chambre, et me réchauffa le visage. Je pris le livre, le cahier et le crayon et les envoya valser à terre pour me concentrer plutôt sur le jeune homme. Je montai sur lui et lui vola un baiser. Ses mains se glissèrent sous mon t-shirt, lentement avec un peu de maladresse. Je repris notre baiser qui s’intensifia au fil des secondes. Je voulais plus du garçon. Mes lèvres se décollèrent des siennes et je plongeai mes yeux dans les siens. Un je t’aime s’échappa des lèvres du garçon.  « Je t’aime aussi … »
 
 
« Timothy. » lâchai-je en ouvrant les yeux. Le lit bougeait dans tous les sens sous le poids des sauts de Charlotte qui tentait de me réveiller. Je la regardai légèrement perdue. Je passai une main dans mes cheveux alors que je sentais mon cœur battre dans ma poitrine. Ce que je ressentais était étrange. Comme si ce rêve avait été réellement vécu à l’instant. « Charlotte arrête de sauter dans tous les sens. » suppliai-je ma fille tandis que je sentais un mal de tête se pointer. Je saisis mon portable et regarda l’heure. Trop tôt pour être levé mais déjà bien assez tard pour une petite fille impatiente d’ouvrir ses cadeaux. « Le père noël est passé, lève-toi maman ! Dépêche-toi ! » Si je n’aimais pas tant ma fille je l’aurais rembarrée vite fait en lui disant d’aller se coucher pour me laisser dormir encore quelques heures. Mais je ne pouvais pas gâcher ce moment de bonheur, alors j’opta pour une parade plus subtile pour gagner quelques minutes. « Et si tu allais réveiller ton pè… Timothy ? » Je me rattrapai sur le mot père, ne sachant pas tellement si c’était encore trop tôt ou non pour le dénommer comme cela devant ma fille. Après tout c’est bien ce qu’il était, mais je ne savais pas. Charlotte quitta ma chambre pour se rendre dans la chambre voisine et aller fanfaronner qu’il était temps de se lever. J’attrapa un sweat-shirt pour mettre par-dessus mon débardeur et sortis de ma chambre en réarrangeant légèrement mes cheveux dans un chignon à la va vite. Je croisai le Timothy qui sortait de sa chambre. « Ça va ? Bien dormi ? » lui demandai-je en m’avançant vers lui. Je lui adressai un sourire. « MAAAAAAMAN ! TIMOTHY ! VOUS VENEZ OU QUOI ? » cria Charlotte du bas de l’escalier. Je levai les yeux au ciel en riant. Je descendis à l’étage inférieur pour retrouver ma fille qui s’impatientait, Timothy sur mes talons. « Tu es sûr au moins que ce sont tes cadeaux ? Peut-être que le père noël est juste passé pour Tim et moi qui sait … » Ma fille me fit une grimace désinvolte et me tira la langue. Je me posai sur le tapis du salon, adossée au canapé. Charlotte pris un paquet cadeau et s’apprêta à l’ouvrir quand je l’arrêtai. « Tu pourrais peut-être donner son cadeau à Tim, qu’on ouvre tous ensemble nos paquets non ? » Charlotte laissa tomber son paquet et s’empressa de prendre un petit paquet pour le donner au jeune homme. C’était de ma part. Je ne connaissais pas encore assez bien Timothy pour savoir quoi lui offrir. Du coup j’avais décidé de lui offrir un album photo avec les moments clés de la vie de Charlotte, un peu comme j’avais fait tout au long de sa vie pour moi. Charlotte avait pris un paquet cadeaux qui se trouvait être celui offert par Timothy.

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La nuit fut courte et peu reposante pour tout un tas de raisons. Nous nous étions couchés tard certes, mais ce n’était pas ça qui me travaillait le plus. C’était tout le reste… ce rôle de père que j’avais du mal à endossé, la trahison de ma mère, Helena, le baiser que nous avions échangé… bref, c’était le bordel dans ma tête ! Le réveil se fit en fanfare et ce n’était pas vraiment étonnant. Charlotte était bien trop excité à l’idée d’ouvrir ses cadeaux. Comme tous les enfants ce matin, elle allait vouloir tester tous ses jouets aujourd’hui. J’espérais sincère qu’il n’y en avait pas beaucoup où il fallait monter des trucs. Habituellement, avec mon frère c’est moi qui m’y collais. Et le pire c’est qu’on ne peut pas dire que mon frère soit très patient. Plus de deux minutes pour monter un jouet ? Trop long pour lui !

J’enfilai mes vêtements à la hâte et rejoignis Helena dans le couloir. Charlotte était déjà en bas. « Ca va, merci. » souriais-je et avant que je n’ai pu lui retourner la question. Nous nous fîmes rappeler à l’ordre. Accompagné d’Helena, je ris avant de descendre l’escalier. Le sapin était entouré de tout un tas de cadeau. Alors que Charlotte allait ouvrir son cadeau, sa mère lui fit une remarque. Elle m’avait donc fait un cadeau. C’était gentil de sa part, même si, si elle ne m’avait rien fait, je ne m’en serais pas vexé. Moi aussi je lui avais fait un cadeau. Ce n’était rien de transcendent, et pour une partie, ce n’était même pas quelque chose d’acheté… en fait c’était son journal intime, enfin celui de Britany. Elle l’avait tenu à la minute où elle avait su écrire. A sa mort, sa sœur me l’avait donné pour que je puisse comprendre pourquoi elle s’était éloignée de moi et tout le reste. Elle était persuadée que la réponse était là-dedans et je l’étais aussi. Seulement, je n’avais jamais eu le cran de l’ouvrir puis comme son nom l’indiquait, un journal intime, c’était intime. Peut-être que ce petit cahier lui apporterait des réponses sur son ancienne identité. A côté de ça, je lui avais acheté un simple bracelet en tissu. Vous savez ceux qu’on doit nouer autour du poignet et où il écrit des petits mots sympathiques du style « meilleure maman au monde », « Petite – râleuse – gourmande », … Adolescents, c’était une habitude pour moi de lui offrir ça à Noël. Elle adorait ce genre de babioles. Bon, je doutais franchement que ce soit le cas aujourd’hui, mais je ne connaissais pas encore assez ses goûts pour me permettre un achat hasardeux. Sur ce dernier il y avait simplement écrit « Un jour j’irai à New-York avec toi. ». Référence à la chanson ? Non, plutôt au bracelet que je lui avais offert des années plutôt et qui m’avait permis de la reconnaitre il y a plusieurs mois.

Alors que Charlotte ouvrait son premier cadeau, le mien, j’ouvris le mien. C’était un album photo de Charlotte. Je souris en voyant la première de couverture. Surement une photo prise à sa naissance. Encore une fois, je pris conscience de tout ce que j’avais loupé. C’était une vraie claque que je me prenais dans le visage. « Ohhhhh trop bien ! le jeu des dinosaures que je voulais !! » s’écria Charlotte, me sortant de mes pensées. Au moins, je n’avais pas fat d’impair pour son premier noël ! Me tournant vers Helena, je mimai un merci de mes lèvres. Charlotte ne comprendrait sûrement pas que je dise ça à haute voix. Je ne pris pas le temps de regarder les photos de l’album. J’espérais que Helena ne le prenne pas mal. Elle ne devait pas croire que son cadeau ne me plaisait pas. Au contraire, c’est juste que je préférai être seul pour me plonger dedans. Charlotte enchaina le déchirage de papier cadeau jusqu’à tomber sur son vélo. Elle poussa un cri, vraiment ravie de ce cadeau. Le papier cadeau déchiré jonché le sol et Charlotte ne savait absolument pas par quel cadeau commencer. Helena lui indiqua qu’il serait peut-être mieux de prendre un petit déjeuner avant de jouer. Charlotte s’exécuté et en deux minutes elle avait engouffré son petit déjeuner et filait déjà sous la douche. J’aidai alors Helena à jeter le papier cadeau. « Je ne l’ai jamais lu… C’est ta sœur qui me l’avait donné. Elle supposait que ça me permettrait de comprendre, mais je suis jamais arrivé à lire la moindre ligne. Donc ne t’en fais, pas tous tes secrets sont bien gardés. » riais-je.

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Il était temps d’ouvrir les cadeaux à présent. Charlotte était tout excitée et cela fait plaisir à voir. Timothy m’avait offert un petit quelque chose qui pouvait avoir l’air de rien comme ça, mais qui avait un sens profond. C’était mon journal intime de ce que je pu comprendre en feuilletant rapidement les pages. Je sentis une boule au niveau de mon estomac en voyant mon écriture. Tout était là-dedans. Celle que j’étais en réalité, qui j’avais été et un grand nombre de souvenirs oubliés. Je regardai le jeune homme avec un sourire attendrissant. Il avait touché dans le mile en m’offrant cela. Le carnet était aussi accompagné d’un petit bracelet en tissus comme celui que j’avais au poignet. Lorsque mes yeux s’attardèrent sur son visage, mon rêve me revint en mémoire et je me sentis un peu bizarre. Ce rêve, ce souvenir, je ne sais pas comment je devais le nommer, m’avait troublée. La joie de ma fille me sortis de mes pensées alors qu’elle ouvrait le cadeau de son père. « Le père noël est vraiment parfait. » dis-je en regardant Timothy. Je lui fis un petit clin d’œil tandis qu’il me remerciait pour le cadeau que je lui avais offert. Finalement on avait eu la même idée de se faire des cadeaux un peu ‘sentimentaux’. Une fois les paquets ouverts je dis à Charlotte de prendre son petit déjeuner et sa douche avant de jouer avec ses jeux. Elle s’exécuta, sans doute trop impatiente. Telle une petite tornade elle monta à l’étage.

Timothy m’expliqua que c’était ma sœur qui lui avait donné mon journal intime lorsque j’avais disparu mais qu’il ne l’avait jamais lu. Il aurait pu avoir des réponses et il avait préféré maintenir mon intimité même en me croyant morte … Je ne comprenais pas vraiment pourquoi il n’avait pas cherché des réponses. « J’ai sans doute fait mention de ma grossesse. Tu aurais pu savoir pour Charlotte … » dis-je en jetant les papiers dans la poubelle de la cuisine. Je pense qu’à sa place j’aurais lu les derniers mois écrits. Ces derniers mois qui avaient été si étranges et qui l’avait plongé dans de l’incompréhension. Je ramassai les affaires du petit-déjeuner de Charlotte qu’elle n’avait pas pris la peine de ranger et puis fis couler du café. « Je devrais téléphoner à ma famille. » lâchai-je subitement. Je baissais le regard sur le carrelage de la cuisine. Ça faisait plusieurs mois maintenant que je savais que j’avais une famille quelque part qui m’attendait. Enfin non, elle ne m’attendait pas vu qu’elle me croyait morte. Mais j’avais une famille à qui je manquais sans aucun doute. Je ne me sentais pas prête, mais y aurait-il un bon moment, un moment où je serais réellement prête à me confronter à mon passé ? J’en savais vraiment rien. « Je pense que je vais lire ce journal et puis je les contacterai. Je veux comprendre qui j’étais et d’où je venais. » Je soupirai. Je me retournai vers le placard dans mon dos et en sortis deux tasses pour nous verser du café. « Café ? Ou chocolat chaud, thé, à ta convenance ! » demandai-je tout de même au jeune homme. Je nous servis et donna une tasse au jeune homme. J’entendais l’eau de la douche qui coulait. Je regardais la pendule. D’ici quelques minutes j’irais la sortir car la connaissant elle allait y rester pendant une éternité.

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HELENA

Les cadeaux de Charlotte furent déballés en moins de temps qu’il ne faut pour le dire. Elle avait l’air ravi de tous ses cadeaux et ça faisait plaisir à voir. Quant à Helena je lui avais fait un tout autre cadeau : son journal intime. Ca pouvait paraitre bizarre mais, ça pourrait l’aider à savoir qui elle était. Sa sœur me l’avait confié peu de temps après sa mort, enfin non, après son accident plutôt… Je me posais tout un tas de questions à l’époque et sa sœur avait pensé que le lire m’aiderait. Seulement, je n’avais jamais eu le cran de le faire. J’avais préféré être dans le doute plutôt que d’apprendre qu’il y avait un autre gars. Ce n’était d’ailleurs peut-être pas le cas. J’avais rapidement ranger ce petit cahier jusqu’à l’oublier. C’est en faisant un peu de tri dans mon armoire que j’étais tombé dessus il y a deux semaines. J’avais été à nouveau tenté de l’ouvrir, mais maintenant que je savais qu’Helena était en vie, je trouvais ça malsain. C’était son jardin secret, même si elle l’avait complètement oublié.

Charlotte était monté se laver afin de profiter de ses nouveaux jouets. Il ne restait donc qu’Helena et moi dans la cuisine. J’énonçai alors le fait que je n’avais jamais ouvert son journal. « A l’époque je n’imaginais absolument pas que tu puisses être enceinte. » riais-je. Non ce n’était absolument pas ça qui m’avait inquiété. « Pour être franc, j’avais pas le cran de le faire… J’avais peur d’apprendre qu’il y avait quelqu’un d’autre… J’ai préféré resté dans le doute, plutôt que de savoir… Je sais… c’est très con. » avouais-je avant qu’elle n’affirme qu’elle devrait appeler sa famille. J’étais content de l’entendre dire ça. Ca n’allait pas être évident, mais c’était essentiel pour qu’elle puisse avancer. « C’est une bonne chose. » souriais-je avant de rajouter « Tu étais très proche de ta sœur, appelle là en premier, ça sera probablement plus simple. » lui dis-je. Peut-être serait-ce plus facile pour elle de parler à sa sœur qu’à ses parents. J’avais l’impression que ce journal lui serait utile d’une certaine manière. Elle n’allait peut-être pas retrouver la mémoire en le lisant, mais elle en apprendrait plus sur elle-même. « Café, je finis tard, je vais en avoir besoin. » souriais-je. On bu alors notre café discutant quelque peu. Je ne pus rester bien plus longtemps puisque je devais aller travailler.