Dean avait tenté de décliner l'invitation de ses deux amis, mais il n'avait pu rivaliser avec tant d'insistance. La recherche de divertissement avait trouvé ses raisons dans les absences trop prolongées du soldat depuis près de six ans, et de ses indisponibilités mystérieuses de ces derniers jours. Il avait maintes fois refusé une sortie, qu'elle ait été dans leur parc favori en plein milieu de la journée, ou dans un café musical en tout début de soirée. Cette nuit, il n'avait d'autre choix que de la passer entouré de ses « potos » du collège, dans cette fameuse boite de nuit branchée où ils avaient pour habitude de s'amuser sagement entre mecs ; est-ce que le mot « sage » était encore d'actualité les concernant ?
Le plus difficile avait été d'en informer Yaël, sa copine, car il ne leur restait que plus ou moins quarante-huit heures à passer ensemble avant qu'il ne reprenne la route du régiment. Il avait trouvé les mots justes, mais l'asiatique avait également remarqué les traits quelque peu attristés de sa brune, et cette faible moue boudeuse au bord des lèvres. Dans d'autres circonstances, il l'aurait sans aucun doute invitée à se joindre à eux, mais leur relation était bien trop neuve pour qu'il ose se le permettre. Dean avait exprimé le besoin de garder leur liaison secrète un temps, juste assez pour qu'ils puissent consolider leur lien avant de s'aventurer sur le chemin couvert de plausibles remarques épineuses.
Alors ce fut naturellement qu'il s'était présenté seul, en couple sous couverture, à ses copains d'antan qui n'attendirent pas pour montrer, d'ailleurs, un brin d'agacement.
On ne t'attendait plus, lâcha l'un d'eux, un verre déjà à moitié vide à la main. Dean leva les épaules, l'air las, avant de se défendre :
il y a une queue pas possible à l'extérieur. Y'avait-il un événement spectaculaire au programme qui expliquait la file ? Il n'avait rien vu à l'affiche, en tout cas. Il fut invité à s'installer sur la banquette de quelques tapotements.
Le principal, c'est que tu sois là, fit l'autre, en se décalant vers la droite,
d'ailleurs, t'es devenu ministre des affaires étrangères entre temps ou... Il se marra , et les deux autres suivirent.
Le militaire n'eut aucun mal à expliquer la difficulté qui se présentait à lui : peu de jours de permission pour trop de personnes à (re)voir. Il y avait des choix à faire, et peut-être pas les plus judicieux, il en était conscient.
Je fais ce que je peux, déclara-t-il avant de refuser un verre d'alcool, - et ce n'était pas parce que la bouteille avait été achetée avant qu'il n'arrive -.
Quoi, t'as pas encore cassé ton jeûne, se moqua celui aux cheveux châtains, également musulman. Dean ne répondit pas, secoua simplement la tête pour faire comprendre que ça n'avait rien à voir. Plus tard, dans la nuit, il allait rejoindre sa douce, et n'avait pas vraiment envie de l'inquiéter avec une odeur aussi forte que celle de l'alcool.
Il avait des principes qui passaient par-dessus la tête à plus d'un, mais il ne comptait pas être influencé et défaire ce qu'il pensait être sa fierté, son honneur en tant qu'homme. Il dévia le sujet de conversation vers un groupe de filles, dont l'une d'entre elles avait opté pour une tenue plutôt excentrique. De quoi attirer l’œil !
Je croyais qu'il y avait un code vestimentaire à respecter pour entrer ici, fit Dean, avant de remarquer que les demoiselles en question s'arrêtaient à chacune des tables qui précédaient la leur.
On parie combien que c'est une femme qui s'apprête à mettre la corde au cou à un homme, fit celui aux mèches décolorées. Oui, déçus par l'amour, les potes du soldat étaient réfractaires au mariage.
Fais gaffe que ce ne soit pas autour du tien, s'amusa à lancer Dean, rieur.
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