@Cassio GrecoCette ville est une renaissance pour moi. Même si j'adorais mon pays, l'Espagne, et que je me languissais déjà de savoir quand j'allais y retourner pour quelques semaines, il n'en était pas moins que je remerciais la chance que j'avais eu de réussir à me construire une vie ici, après tout ce que j'avais vécu dans mon pays. J'avais demandé une seconde chance, une vie plus calme et paisible et jusque là, je recevais ce que je souhaitais. Mon bar fonctionnait bien, j'arrivais à garder l'ambiance familiale que je souhaitais, on faisait quelques soirées à thème sympathiques, j'avais engagé une nouvelle serveuse adorable, j'avais rencontré des gens intéressants. Que demander de plus? Personne n'était trop au courant de mon passé, ce qui m'évitait de devoir en parler et ouvrir une plaie pas cicatrisée.
Une de ces personnes intéressantes que j'avais rencontré était Cassio. Un vrai pote, maintenant, en dehors de mes collègues de travail. Étonnante amitié naissante, d'ailleurs, car Cassio était un italien pure souche. En général, on a tellement les sangs chauds nous les latinos qu'on a du mal à se regarder en face. Si ça se trouve, en Europe, on aurait eu plus de mal à nouer le lien qu'ici. On se retrouvait, deux européens, à parler du pays, à se servir des bouffes bien de chez nous, chez l'un, chez l'autre ou au bar, à parler de tout et n'importe quoi. Un vrai poto quoi, un frère comme on dit. C'était vraiment agréable de pouvoir compter sur une amitié pareille, quelqu'un qui nous comprends, quelqu'un qui ressent la même nostalgie du pays.
Je fermais mon bar quand il passait la porte. Comme souvent, on se retrouvait à la fermeture pour se boire des verres et bouffer à l'oeil. Je venais lui taper dans la main quand il arrivait. heeey ça va? lui demandais-je alors en lui souriant. bon écoute pour ce soir j'ai tenté une recette de chez toi, j'ai regardé sur le net. Je saaais que tu vas me dire que ça a rien à voir avec la Sicile mais sois sympa, steuplait. lui fis-je alors en riant. Je sortais nos assiettes du chauffe plat vers le bar où on s'installait toujours. quoi de neuf? lui demandais-je ensuite pour entamer notre conversation.