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 nothing is easy but everything is possible

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Juliet Tremblay
Juliet Tremblay
Desigual

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(#)Sujet: Re: nothing is easy but everything is possible  |   Lun 13 Sep - 10:36
♛ nothing is easy but everything is possible.


▼▲▼

En acceptant de retrouver le jeune homme aujourd’hui, Juliet n’avait pas songé une seule fois que cette entrevue devienne aussi… déstabilisante. En fait, c’était la première fois depuis leur rencontre qu’elle hésitait à faire demi-tour, trouver le premier prétexte crédible à ses yeux pour justifier de partir, afin de rentrer chez son frère et tenter d’oublier cet épisode qui se rapprochait d’une humiliation. Car si c’était gênant de devoir avouer son ignorance sur bien des sujets, comme l’utilisation d’un téléphone, les différentes plateformes pour regarder des films et des séries ou des expressions bien particulières utilisées par les jeunes d’ici, c’était pire lorsqu’il s’agissait d’un sujet aussi important. Juliet le comprenait dans la tentative d’explications de Spencer, et aussi en voyant toutes les personnes désormais rassemblées dans la rue pour… clamer leurs choix ? Si ce n’était pas important, quel intérêt de sortir dans la rue, et de brandir des pancartes ? Non, Juliet se sentait vraiment stupide, ignorante, et un paquet de mots pour définir une personne légère d’esprit. Elle tenta tout de même de se justifier, sans emprunter la voie des détails, car elle savait que ce chemin ne menait à rien de bon. Dans cette direction, elle allait vers un endroit où elle n’était plus la même, mais une pauvre victime, une personne à plaindre, à materner, à qui elle fallait s’adresser comme à un enfant de trois ans. Et encore, les minis humains avaient la chance d’obtenir des discours fluides, sans pincettes. Elle restait donc évasive, sans pour autant cacher ses craintes si jamais elle venait à déballer sur la table l’entière vérité, car rares étaient ceux parfaitement au courant de sa situation.

La petite Tremblay s’attendait à un changement de comportement, alors même qu’elle n’avait rien dit. Mais son ami était surprenant, et au lieu de poser des questions, ou même trouver le moyen de faire cesser leurs sessions d’apprentissage en photographie, Spencer changea les plans du moment. À croire que les quelques mots de Juliet avaient suffi pour reléguer les prises de clichés au second plan. Il parla d’aller prendre un café, ce qui était suffisant pour brouiller un peu plus la compréhension de Juliet, qui avait déjà du mal naturellement à suivre certaines conversations. Heureusement, elle pouvait compter sur le photographe pour prendre les choses en main, ou en l'occurrence, le bras de la demoiselle pour la guider à travers la foule afin de s’en extraire et rejoindre la terrasse d’un café, à l’atmosphère radicalement plus calme en comparaison de la manifestation. Le silence commençait à s’installer, avant que le jeune homme ne le brise en prenant la parole. Des mots qui incitaient Juliet à se confier sans filtre, et sans devoir craindre un quelconque jugement. Une personne normale aurait dû se méfier, comprendre que certaines révélations étaient trop grosses pour les supporter, mais Juliet n’était pas une personne normale, mais plutôt une fille assez naïve qui, pour l’instant, prenait les choses au 1er degrès, car la subtilité des nuances était encore un sujet d’apprentissage. Une chance pour elle, Spencer n’était pas un mauvais garçon. « D’accord… » dit-elle dans un premier temps, en posant ses affaires sur l’une des chaises encore libre autour de la table. Elle glissa sa main dans ses cheveux, un geste incontrôlé, un tic acquis depuis des années, avant de se lancer. « Quand j’étais petite, vers deux ou trois ans, par là, j’ai fait une crise d'asthme qui m’a conduit à l’hôpital. Sauf que là-bas, des personnes mal intentionnées m’ont kidnappé, et m’ont échangé pour que ma famille pense que j’étais décédée de cette crise, n’ai pas l’idée de me chercher. Et ça a fonctionné, car personne ne m'a cherché. » Une chose difficile à confier, autant que de le dire à haute voix, bien qu’elle n’en voulait pas à ses parents, ni même à Ugo, car ils ignoraient la vérité. « J’ai été élevée dans ce que vous appelez une secte. Un endroit sans électricité, sans eau courante, sans Internet… avec des règles strictes, sans avoir conscience que ce n’était pas le vrai monde, qu’il y avait autre chose derrière les clôtures. Un endroit où les femmes étaient inférieures aux hommes, n’avaient pas le privilège d’avoir une opinion, et ne servaient qu’à être une bonne épouse, et procréer. » Aujourd’hui, avec du recul, Juliet se rendait compte à quel point elle avait été naïve de penser cela, pendant autant de temps. Mais bon, comment aurait-elle pu faire autrement ? Oh oui, Alec lui avait parlé d’un monde à l’extérieur, mais c’était plutôt utopique pour réellement le croire. « J’ai vécu là-bas jusqu’à récemment. J’ai été libérée au début de l’année… ça fait que quelques mois que je découvre la réalité. Et ce n’est pas tous les jours facile de vivre dans un milieu où tout est une découverte, c’est même effrayant, surtout quand il faut gérer les regards des autres qui ne comprennent pas qu’on puisse ne pas savoir se servir d’un téléphone à vingt-six ans, ou qu’on ne connaisse pas Pinterest ou Instagram… » dit-elle finalement, en baissant son regard sur ses mains, qu’elle avait jointe sur la table.


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Spencer C. Hopkins
Spencer C. Hopkins
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(#)Sujet: Re: nothing is easy but everything is possible  |   Dim 19 Sep - 10:29
Juliet&
Spencer

Nothing is easy but everything is possible.

Ce qui devait être une banale séance photos en plein air devenait bien plus. Peu à peu, il découvrait Juliet, enfin, plutôt son passé. Bien sûr, parfois les réactions de la jeune femme avaient intrigué Spencer, mais il était loin d’imaginer ce qu’elle allait lui révéler quelques minutes plus tard. Il ne voulait pas la brusquer et la pousser à lui parler si elle n’en n’avait pas envie, mais il avait l’impression qu’elle en avait besoin, que ce qu’elle cachait avait besoin de sortir. Et lui était plutôt doué pour écouter. Voilà pourquoi, il prit la décision d’écourter la leçon du jour pour aller se poser dans un endroit plus tranquille, loin de la foule réunie.

Assis à cette table, Spencer écouta attentivement le récit de la jeune femme sans la couper une seule fois. Il ne voulait pas risquer qu’elle se stoppe dans son élan. Bien évidemment, il avait un tas de choses à dire et même à demander face à ces révélations, mais cela viendrait plus tard, pas maintenant.

Plus la jeune femme parlait et plus tout lui semblait clair. Ces réactions de la jeune fille qu’il n’avait parfois pas comprises étaient maintenant évidentes. Elle découvrait un monde inconnu. « Pour tout te dire, je ne sais pas non plus utiliser pinterest. » Oui, il préférait dédramatiser un peu la situation avec son humour chaotique avant de se montrer plus sérieux. « J’imagine que ça ne doit pas être facile d’être face à un monde nouveau et d’avoir vécu coupé de sa famille, mais tu ne devrais pas te soucier de ce que pense les autres. Même mieux, tu devrais les emmerder profondément. » Spencer savait que ce n’était pas évident d’affronter le regard des autres. Il avait vécu ça de nombreuses fois alors qu’il vivait dans la rue et bien évidemment cela faisait un mal de chien de voir dans le regard des gens ce qu’ils pensaient de nous. Car oui, le regard ne trompait pas. Il espérait aider Juliet avec ses propos, même si lui, était totalement incapable de ne pas se préoccuper de ce que pourrait penser les autres de lui. Voilà pourquoi il mentait sans arrêt. Ce n’était pas bien et il en avait conscience mais il préférait ça que de lire de la pitié dans le regard des gens. « Tu ne sais pas te servir d’un portable, et alors ? T’as toute la vie pour apprendre ! Je suis persuadé qu’il n’est jamais trop tard. » Spencer avait même envie de se prendre pour exemple en lui expliquant qu’il ne savait pas lire et que pourtant il était en train d’apprendre. Mais c’était de loin le plus mauvais exemple qu’il pourrait lui donner. Il n’était pas vraiment en train d’apprendre. « Essayer » d’apprendre serait plus correct, mais comme à chaque tentative, tout n’était que confusion dans son esprit. Néanmoins, il gardait espoir… du moins, la plupart des jours ! « Je vais pas te laisser tomber parce que tu ne sais pas ce que signifie LGBT ou parce que tu apprends encore à te servir de ton téléphone. Ton passé, tu ne l’as pas choisi, mais c’est comme ça et tu dois vivre avec. J’ai qu’une chose à dire. Si à l’avenir, tu ne comprends pas quelque chose, n’hésite pas. » répliqua le jeune homme dans un léger sourire. Bien sûr, l’histoire de la jeune femme le touchait. Elle avait été enlevée d’une famille aimante pour finir dans une secte où son seul rôle aurait été de se marier et d’élever une ribambelle d’enfants qui aurait connu le même lavage de cerveau qu’elle. Spencer ne voulait pas se montrer intrusif en posant un milliard de questions et de toute manière ce n’était pas son genre, mais il avait une question qui le tracassait. Peut-être n’était-ce pas celle à laquelle on pouvait songer, mais pour lui c’était quelque chose d’important. « Je peux te poser une question ? » demanda-t-il. Lorsqu’elle répondit par l’affirmatif avec un signe de tête, Spencer reprit la parole « Est-ce que là-bas, tu te souvenais de ta famille ? Ou est-ce que tu étais trop jeune et que tu as tout oublié ? »
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