attitude de Nessa avait changé du tout au tout. J'avais complètement merdé en lui disant cela. D'habitude, ce genre d'attention, ça plaisait plaisir, mais j'avais pendant un instant oublié que Nessa n'était pas comme tout le monde. Nessa était unique, complètement différente, c'était ça que j'appréciais. Sa situation me rendait profondément triste. Les mots durs et l'attitude distante qu'elle avait à mon égard n'était rien face au désarroi que je ressentais pour elle. Nessa, elle avait été complètement brisé par la vie, j'avais fini par le comprendre. Elle n'avait rien demandé et elle s'en était pris plein les dents. De toute part. Mais qu'est-ce que les hommes avaient bien pu lui faire pour qu'elle ait si peur d'eux ? J'étais loin d'être un méchant. Mais ce n'était pas là son avis. J'étais en train de la perdre et ça ne me plaisait pas du tout. Elle était surtout en train de partir dans une crise de je ne sais quoi du à sa bipolarité. J'étais pas médecin et je ne savais pas tellement comment gérer ce genre de situation. D'ailleurs, je pensais qu'il était impossible de gérer ce genre de moments, il suffisait juste de laisser faire le temps. Quelle maladie, quand même… Je ne l'avais jamais vu dans cet état. Mais paradoxalement, ça me donnait encore plus envie de l'aider. Enfin, il faudrait déjà que je parvienne à la calmer un tant soi-peu.

« Mais mets toi dans ta petite tête blonde, une bonne fois pour toute que je n'ai pas besoin, ni envie que tu m'aide. » Bonjour, bipolarité, comment vas-tu ? Ce commentaire cynique résonnait dans ma tête. Nessa parlait d'un ton étrangement calme, alors que sa rage semblait s'évacuer des pores de sa peau. Elle était tremblante tant elle était énervée. Les situations se ressemblaient. J'avais l'impression que lors de notre rencontre, elle m'avait dit mot pour mot la même phrase. 'Je n'ai pas besoin ni l'envie que tu m'aides'. Purée, mais c'était exactement ce dont elle avait besoin. « T'es un menteur. Un bon menteur je te l'accorde ! Bravo Charlie, t'as pris des cours, non ? » Peut-être parce que je ne mentais pas ? J'avais néanmoins pris le parti de ne pas répondre, de la laisser se déchaîner. Au moins, elle se défoulait. Toute la rage qu'elle contenait était en train de sortir. Elle se sentirait mieux après. Du coup, je l'espérais. « Laisse moi vas-t'en. » fit-elle d'un coup catégorique. Sauf que sur ce point, j'étais encore plus déterminé qu'elle. Je ne bougerais pas le petit doigt. Elle pouvait me hurler, je ne la laisserais pas toute seule, c'était trop dangereux. « Je t'ai dis de te tiré ! Lâche moi ! Je veux plus te voir ! » D'accord. Ce n'était plus Nessa que j'avais en face de moi. Ce n'était pas vrai la Nessa. J'allais ouvrir la bouche pour répliquer quand elle se mit à insulter deux vieux qui marchaient en nous regardant fixement. S'il y avait bien une chose que je ne supportais pas, c'était ceux qui se mêlaient de ce qui ne les regardait pas. « Quoi ? Ca vous intéresse une scène de ménage, connards ?! » Je me tournai vers eux, agacé. Je devais déjà gérer Nessa, pas besoin de m'occuper de deux petits cons. « Très clairement, dégagez, occupez vous de vos petits culs cirés » lançai-je sur le même ton que Nessa. Au moins, nous restions unis dans l'adversité. Je me tournai vers Nessa, qui était très agitée. « Bon, écoute, tu ne veux plus me voir, d'accord. Mais Nessa je te ramène chez moi. T'es pas en état d'aller où que ce soit. Tu viens, tu dors, tu manges. Ensuite je te laisse tranquille, si c'est ce que tu veux ». Je gardai le mince espoir que le sommeil guérirait la crise et qu'elle retirerait ses paroles ensuite, mais on ne savait jamais. « Nessa je ne te demande que ça. De me suivre et de te reposer. Après tu fais ce que tu veux, tu me frappes, tu m'insultes, pas grave. Mais tu me suis ».

auras dû me douter que Nessa réagirait mal. Très mal. Mais je ne pensais pas qu'elle serait ainsi quand même. J'étais vraiment perdu, je ne savais pas comment réagir. J'étais loin d'avoir de l'expérience pour gérer ce genre de situation. Elle voulait que la laisse, mais je ne pouvais pas la laisser dans la rue alors qu'elle était dans cet état. Or, j'étais tenace, et je ne comptais pas la laisser tomber. Le problème, c'était qu'elle voulait impérativement que je la laisse. Et elle n'allait pas supporter bien longtemps que je n'aille pas dans son sens. Je n'aurais jamais du lui dire cela. Je voulais simplement lui exprimer mon soutien, mais apparemment, je n'avais pas choisi les bons mots. Note à moi-même : ne plus jamais utiliser le verbe aimer en présence de Nessa Tate. Mais qu'est-ce qui la dérangeait là-dedans ? Je comprenais bien qu'elle avait du souffrir par le passé, et qu'elle ne faisait plus confiance, soit. Mais moi ? N'avait-elle pas encore compris qu'à moi, elle pouvait me faire confiance ? Peut-être que je m'étais surestimé. Peut-être que j'avais surestimé ma capacité l'aider et à gérer la boule de nerfs qu'était Nessa. Peut-être que je m'étais trompé sur toute la ligne. Peut-être qu'elle ne disait là que ce qu'elle pensait réellement. Je ne savais plus rien. Foutue maladie.

« Qu'est-ce que tu comprends pas dans "je ne veux pas que tu m'aide" ?! Putain, mais tu comprends rien ! Tu peux pas m'aider ! Personne peux m'aider ! Je me débrouille mieux toute seule ! » Bon, d'accord. Le moment était vraiment mal choisi pour argumenter avec elle. J'étais persuadé que les choses pouvaient aller mieux pour elle, qu'elle pouvait s'en sortir. Il fallait qu'elle commence par penser qu'elle pouvait le faire. Cette discussion, je devais l'admettre, ébranlait quelque peu mes convictions. Mais ce n'était qu'une crise, qu'une mauvaise passe. Du moins, je l'espérais. J'étais à la fois attristé par ce qu'elle me disait, peiné par son état et en colère par rapport à moi. Cette crise, c'était bien moi qui l'avait causée. Nessa se leva ensuite et tenta de s'éloigner de moi, mais, vacillante, elle trébucha et se rattrapa au dossier du banc. Je fis instinctivement un geste pour l'aider. « Ne t'avise pas de me toucher. » Je reculai de quelques pas. « Tu crois que parce que je t'ai parlé de cette foutue maladie tu peux m'aider ? Tu peux me comprendre ? Tu crois que t'as le droit de prétendre m'aider et me sortir une connerie pareille ?! Trop tard Charlie, t'es pas dans le bon sens. Tu m'as déjà baiser tu sait, t'es pas obliger de mentir en disant que t'en a quelque chose à foutre de moi. » Là résidait le problème de Nessa. Elle n'avait aucune estime d'elle même, elle se pensait inutile. Et elle ne parvenait pas à faire confiance. Même pas à moi, qui était sûrement, avec Dawson, la personne la plus sincère envers elle de Miami. Je ne connaissais pas ses relations, mais je me doutais qu'elles ne devaient pas être très bonnes. Elle n'aurait peut-être pas eu tous ces problèmes si elle avait été entourée d'amis bienveillants. Quoi qu'on puisse en dire, les amis étaient importants. Sans Blake, Hannah, Aloysia, Alysse… J'aurais sombré depuis longtemps. Mais Nessa n'avait pas eu la chance d'être bien entourée.

Je ne savais vraiment plus quoi faire. J'étais dépassé par sa crise. Ses mots me touchaient cruellement. Parce que oui, j'avais eu le malheur de croire que je pouvais l'aider. Mais ce n'était pas ces quelques-mots, prononcés sous le coup de la colère, qui allait m'abattre. Alors évidemment, je devais admettre que là, j'étais complètement dépassé. Nessa était incontrôlable, déchaînée. D'un côté, c'était peut-être bien que toute la haine et la rancoeur qu'elle éprouvait s'extériorise. Mais Nessa était une bombe et là je ne savais plus quoi faire. « Salut, Nessa » fis-je, un peu découragé, avant de m'éloigner d'elle. Ce n'était pas la chose à faire, mais il fallait avant tout qu'elle se calme. Qui savait ce qu'elle était capable de faire, quand elle était dans cet état ? Je m'éloignais d'elle, tout en lui jetant de discrets coup d'oeil, prêt à intervenir. Je tapais un numéro sur mon téléphone. Il me répondit presque instantanément. « Dawson ? C'est Charlie. Nessa ne va pas bien, pas bien du tout » dis-je simplement. Il était son tuteur, il saurait quoi faire. Du moins je l'espérais. Eh merde, je m'étais attaché à Nessa Tate.


RP TERMINÉ