I'm sorry for being me.

Je me sentais affreusement mal parce que j'avais lamentablement échoué. J'avais blessé quelqu'un et je savais qu'elle ne me le pardonnerait jamais. J'avais promis! J'avais promis d'être là pour elle quoi qu'il arrive! Et être enfermé à l'institut Jackson m'avais fait échoué ma promesse et je m'en voulais à mort. Revoir Kaylee m'avait fait penser à elle. Mais je m'en voulais tellement que je n'étais pas prêt à affronter son regard rempli de mépris à mon égard. C'est pourquoi j'avais attendu une semaine avant d'aller à une rencontre à mon groupe de soutien. Je savais que j'en avais besoin plus que jamais, mais je savais qu'affronter Elizabeth allait être pénible. Je m'en voulais horriblement. Aujourd'hui, je voulais affronter tout ça, mais je dois dire que je n'avais pas dormi de la nuit et je m'étais occupé l'esprit à faire mille et un trucs. Une fois 18h20, je m'étais mis à marcher en direction du centre culturel. Je marchai la tête baissée, le dos courbé et mes mains dans les poches. Il y avait du vent qui était un peu fort ce soir, mais si je marchais la tête baissée, c'était pour trouver ce que je pouvais dire à Elizabeth. Puis, arrivé près de la porte d'entrer, j’aperçus Elizabeth... sa chevelure blonde au vent qui attendait devant l'entrée comme elle avait l'habitude de faire pour moi. J'eus envie de rebrousser chemin, car mon cœur était sur le point d'exploser. Je m'arrêtai un instant pour la regarder un instant et je pouvais déjà sentir sa colère à mon égard. Elle s'engouffra à l'intérieur et je la suivis de loin pour pénétrer à mon tour à notre séance du soir. Je m'installai un peu plus loin qu'elle, car j'avais besoin de temps pour réfléchir encore... mais je ne pouvais pas me voiler la face, je ne pourrais jamais savoir quoi lui dire. Les autres du groupes me demandèrent où j'étais passé et je leur déclarais à chaque fois que j'avais dû m'absenter loin. Je tremblais et heureusement que j'avais mon bracelet pour jouer avec. Nous étions assis en rond et nous pouvions partager ce que nous avions sur le cœur alors je parlai.

- Je ne me sens pas bien depuis que je suis revenu...

Je jouai affreusement avec mes mains. C'était devenu un tic assez nerveux depuis l'asile que je devais chasser.

- Je tremble, je panique, je ne veux pas qu'on me touche. Quand je tombe seul la nuit, je sens cette noirceur tellement immense, j'ai peur qu'elle s'infiltre en moi pour s'y installer pour de bon et que je disparaisse entièrement. Je pensais aller mieux, mais maintenant je n'en suis pas sûr... Je m'en veux, à moi, à certaines personnes...  Puis, je sais.... que j'ai blessé des gens et je ne sais pas comment faire pour régler le tout...

Bref, ma vie c'était un peu de la merde en ce moment et je ne savais pas comment avoir la tête hors de l'eau. Normalement, je ne parlais pas devant tout le monde, mais là, j'en avais besoin et je voulais qu'Elizabeth puisse un peu me comprendre... En fait, je ne sais pas trop... je ne voulais pas de sa pitié, je voulais juste qu'elle comprenne. Elle ne savait pas ce que j'avais vécu pendant 3 mois... Elle ne savait pas toute l'horreur.

I'm sorry for being me.

JComme chaque semaine depuis le départ soudain d’Edward, j’attendais sagement devant le centre communautaire dans l’espoir de le revoir revenir. Ça faisait trois mois, 12 semaines… 12 séances que je retournais continuellement chez moi puisqu’il ne se pointait pas. J’étais découragée et je ne comprenais pas pourquoi il ne voulait plus me parler. Ça remontait à la dernière fois, où je l’avais appelé en panique et qu’il était venu chez moi. Il m’avait laissé tomber dans un parc sans me donner des explications et voilà qu’il n’avait même pas répondu à mes nombreux SMS, ni même à mes appels. Il m’avait promis de toujours être là pour moi. J’Avais eu besoin de lui à plusieurs reprises et il restait sans nouvelles. J’étais inquiète d’un autre côté, car bien que je lui en voulais de ne plus me parler. Je préférais m’imaginer que c’était de ma faute et que j’avais tout fait foirer notre amitié que de m’imaginer qu’il lui était arrivé quelque chose de grave. Je ne pourrais même pas m’imaginer d’apprendre dans le journal qu’il lui aurait arrivé quelque chose de fatal.

Un mardi de plus à attendre devant la porte, à frapper le bout de mes souliers contre les petites roches devant moi. Le dos contre le mur de brique, je laissais le vent se faufiler à travers mes cheveux. On était bien dehors, j’étais de moins en moins bien à l’intérieur de moi. Je regardai mon portable. La rencontre commençait d’une minute à l’autre et Edward n’était toujours pas là. Je relevai la tête et c’est à ce moment que je l’aperçu se diriger dans ma direction. Mon cœur s’emballa et je ne pu faire autrement que d’entrer à l’intérieur. Je n’étais pas prête à lui parler. Je voulais le faire, mais il venait de me prendre par surprise et c’était trop pour moi. Trop pour l’instant.

Tous en rond, légèrement à l’extrémité l’un de l’autre, j’avais relevé la tête lorsqu’Edward avait pris la parole.  C’était rare que ça arrive donc il avait toute mon attention. J’avais entendu plusieurs personnes chuchoter dans leur coin, ou lui demander clairement ce qu’il s’était passé, il avait été très vague sur le sujet mais moi, j’avais envie de savoir. Je n’étais pas curieuse de nature mais là, je mourrais d’envie de l’entendre me dire pourquoi il avait déserté pendant si longtemps. Je commençais à avoir beaucoup de peine pour lui, à l’entendre verser ses états d’âme et ses problèmes comme ça. Il était un renfermé comme moi, ça sonnait comme un appel à l’aide. Suite à ce qu’il dit, je ne pu faire autrement que de répondre tout naturellement :

« Les gens qui t’aiment comprendront. Il suffit uniquement de leur ouvrir ton cœur. Même si ce n’est pas facile. »

Tout le monde s’était tourné d’un coup vers moi. J’avais écarquillé les yeux avant de croiser les bras contre moi. Misère! Comme je pouvais détester ça. Je me mordis la lèvre avant de regarder Edward, qui me regardait aussi. Puis, la conversation tourna vers moi. Je regrettais vraiment d’avoir parlé à ce moment-là. On me demanda pourquoi j’avais été absente durant les derniers mois. Super! Maintenant Edward allait être au courant que j’avais laissé tomber les rencontres pendant son absence.

« Rien, j’ai tout simplement été occupée avec le boulot. »

C’était des mensonges, bien entendu mais ça, personne n’était au courant. Je me pinçai les lèvres, en pensant qu’on allait en rester là mais semblait-il que ce n’était pas terminé avec les questions. On voulait savoir quelque chose de nouveau sur moi. Qu’est-ce qu’il y avait de neuf à part le fait que mon seul et unique ami m’avait abandonné pendant plusieurs mois et qu’il revenait comme ça, sans crier gare? Je soupirai en haussant les épaules. Je détestais tellement parler. Au fond, je venais probablement juste aux séances pour avoir l’esprit et la conscience tranquille.

« Euh… j’ai, j’ai recommencé le patin aussi. C’était le métier premier de ma mère et j’ai fais la rencontre d’une grande idole que j’ai depuis que je suis toute petite. Elle m’a proposé son aide pour retourner sur la glace et je m’y sens bien. J’adore ça. »

La dame qui gère la séance me sourit et me félicite d’enfin faire quelque chose, de m’intéresser et d’avoir une passion. Disons que c’était un gros problème aussi puisque mis à part pour venir ici et travailler, je sortais rarement de chez moi. C’était déjà un grand pas. Je baissai le regard lorsqu’on passa à la prochaine personne. Au bout de quelque secondes, lorsque je m’assurai que l’attention n’était plus sur moi, je relevai la tête et je croisai le regard d’Edward que je soutenai pendant un petit moment. Je ne savais pas comment prendre son retour. J’étais heureuse de le revoir, mais j’étais inquiète car il semblait tellement être secoué, tellement bouleversé que ça me faisait beaucoup de mal de le voir ainsi.

I'm sorry for being me.

J'avais la trouille! Oui, c'est que j'avais! J'avais reçu plein de SMS d'Elizabeth et d'appels manqués et je n'avais même pas osé appuyé sur le bouton pour la rappeler et la mettre au courant que j'étais de retour chez moi. Même chose pour Lys, elle m'avait laissé des messages et pourtant je n'avais pas eu la force de l'appeler. En me présentant ici ce soir, je savais que j'allais lui faire face, je savais qu'elle serait fâchée contre moi. Nous nous échangeâmes aucun mot quand je fus arriver au centre et pourtant nous nous avions bien vus. Une fois en cercle, les gens commençaient à raconter leurs peurs, les progrès, leurs moments de tristesses, leurs moments de bonheur et c'est pourquoi je voulais lancer un message et j'espérais vraiment qu'Elizabeth pourrait me comprendre. Un silence planait après mes révélations et je dirais que ça me mettait encore plus mal à l'aise. Puis, Elizabeth, mon amie, pris la parole pour me répondre. Tous les regards tournèrent vers elle.

« Les gens qui t’aiment comprendront. Il suffit uniquement de leur ouvrir ton cœur. Même si ce n’est pas facile. »

Mon regard croisa le sien et ça me fit chaud au cœur qu'elle dise ça pour moi. Je savais alors qu'elle pourrait peut-être me pardonner? Je voulais vraiment pas la laisser tomber et je ne savais pas comment lui dire où j'étais passé, car non, je ne voulais pas lui avouer que j'avais fait une crise de folie, qu'on m'a transporté à l'institut Jackson pour qu'on m'y soigne. Puis, il y avait eu cette histoire d'évasion, car si Kenneth n'aurait pas débarqué, je serai encore là-bas et Elizabeth se serait retrouver toute seule encore plus longtemps. Quelques personnes approuvèrent les dires d'Elizabeth et je continuai à jouer nerveusement avec mon bracelet en le pinçant, à l'étirant et le lâchant sans cesse. Je fus surpris, voire même troublé de constater qu'Elizabeth avait été aussi absente pendant ces derniers mois. Et le fait qu'elle mentionne le boulot, je savais que ce n'était pas vrai... Je savais quand les gens mentaient, mais je n'allais jamais la blâmer pour ça parce que je n'étais pas mieux. Puis, elle parla à son tour pour parler qu'elle avait commencé le patin. Je fus surpris d'apprendre qu'elle aimait ça, je ne savais même pas et pourtant j'avais vu en elle des choses qu'elle ne m'avait pas dites, mais pas sur le patin. Je commençai à me gruger les ongles parce que ça m’inquiétait d'avoir manqué des choses sur sa vie. Je ne savais même pas pour elle et son frère! Après 1 heure, la réunion se termina et je m'étais levé pour partir rapidement à l'extérieur pour prendre une bouffée d'air, c'était tellement difficile de revenir à la réalité. Je fermai les yeux et pris une grosse inspiration tout en regardant le soleil qui se couchait doucement. En rouvrant mes yeux, elle était là.

- Salut... lançai-je timidement.

Je m'étais alors rapproché, mais en gardant une bonne distance.... sachant que nous avions un trouble du touché tous les deux. Je ne lui demanda pas comment elle allait, c'était pas évident dans notre cas d'aller bien. Mais on y travaillait fort... du moins j'y travaillais avant. Maintenant, j'essayais juste d'avoir un semblant de normalité.

- Je... te dois des excuses!

Je regardai par terre tous en mettant mes mains dans mes poches. J'étais sincèrement désolé et si elle pouvait sonder mon coeur, elle verrait cette masse énorme dessus qui fait mal. Je ne savais pas comment lui dire... et je sais que lui mentir c'était impossible pour moi. Je ne voulais pas qu'elle sache pour l'asile, je ne voulais pas qu'elle sache que j'étais fou.

- T'aurais raison de m'en vouloir parce que j'ai échoué dans ma promesse, mais je te promets que si tu me laisse une autre chance Elizabeth Blake, que je ne te décevrai plus jamais et que je tiendrai ma parole jusqu'au bout et plus encore!

J'avais tellement voulu être là pour elle et maintenant, je voulais que ça redevienne comme avant!

I'm sorry for being me.

Je n’avais pas pu m’empêcher de répondre à ce qu’Edward avait dit devant la classe au grand complet. Je regrettais un peu car maintenant, j’avais toute l’attention mais au moins, certaines personnes affirmaient être d’accord avec moi. Je levai les yeux et je constatai bien un changement dans le visage d’Edward. Je ne voulais pas qu’il croit que j’étais fermé à toute éventualité avec lui. Je ne le boudais pas, je voulais lui parler. Je voulais qu’il me parle et je voulais être là pour l’aider car c’était un peu ça être ami avec quelqu’un, non? Je dû ensuite parler un peu de mois et détestais ça. Je ne parlai pas de l’épisode avec mon frère car c’était en dire beaucoup trop sur moi à des gens que je ne connaissais pas et j’étais très difficile à donner ma confiance. Oui, j’étais bornée et j’étais fermée… on me le disait continuellement mais avec ce que j’avais vécu, ce n’était vraiment pas facile.

La rencontre terminée, je m’étais empressée de me lever mais Edward avait filé vers la sortie. Je l’avais suivit du regard avant de prendre mon petit sac pour le suivre jusqu’à l’extérieur. Il était là, accoté contre mon mur de brique où je l’avais attendu pendant des mois, les yeux fermés. Je m’étais arrêté pour le regarder et lorsqu’il avait ouvert les yeux, il m’avait salué.

« Salut » répondis-je simplement.

Je ne savais pas trop comment commencer une conversation avec quelqu’un que je n’avais pas vu depuis des mois. C’était tellement étrange et il semblait tellement différent. J’étais encore bien troublé par ces retrouvailles. Il affirma qu’il me devait des excuses et pour la peine, j’étais d’accord mais je n’allais pas m’en tenir simplement à ça. Je ne répondis rien, continuant à le regarder. Je devais peut-être être légèrement intimidante pour la peine. Je ne voulais pas qu’il soit mal à l’aise, c’était juste que je ne savais pas trop quoi dire à tout ça. Heureusement, il reprit parole. J’étais mal à l’aise, je jouais avec la fermeture de mon sac en l’écoutant me parler. Il me promettait de faire mieux, il cherchait à se faire pardonner mais avec moi, ce n’était pas aussi simple que ça et il allait bien vite s’en rendre compte.

« Tu sais que je ne suis pas du genre à poser des questions car je sais ce que c’est et je déteste moi-même y répondre mais là… je n’ai pas le choix… j’aimerais beaucoup savoir où tu étais passée.»

J’avais dit ça d’un ton très calme, limite avec de l’inquiétude car c’était bien le cas. Je cherchais son regard mais il avait la tête penché. Je m’étais donc approché d’un pas, pour être juste un peu plus près de lui. Peut-être pour créer une espèce d’intimité, va savoir. Avant qu’il ne me répondre quoi que ce soit, j’ajoutai :

« Je me suis fait tellement de soucis pour toi, j’ai imaginé les pires scénarios. »

I'm sorry for being me.

Je savais qu'Elizabeth voulait savoir, je savais qu'elle me poserait la question parce qu'elle se faisait du souci pour moi et je dois dire que j'étais vraiment embarrassé. Elle me regardait et voulait des réponses... Les gens sortaient autour de moi et je dois dire que ça me stressait encore plus alors je fis signe à Elizabeth de me suivre jusqu'au banc le plus près. J'y pris place et elle aussi.

- Je sais pas si je dois te dire Eli... Je... Quand on s'est vu la dernière fois je t'ai dis que... bien qu'on m'avait laissé tombé et là, je sens que l'histoire va se répéter, que tu vas avoir peur, que tu voudras plus venir ici...

En même temps, elle m'en voulait pour ce que j'avais fait, elle m'en voulait d'être parti si longtemps sans lui donner de nouvelle et elle savait que ça avait dû être grave parce qu'elle s'inquiétait et que vu dans l'état où j'étais elle devait penser que j'étais déjà fou. Je me mis à jouer avec mes mains tout en regardant mes pieds devant moi. C'était incroyablement difficile ce soir de revenir à la réalité... je veux dire avec Elizabeth. Je la considérais comme mon amie et je savais qu'elle voulait savoir...

- Ok... bien... Je sais que tu ne me dois rien... mais je vais te demander de m'écouter jusqu'au bout et de ne pas dire un mot ou bien de t'enfuir, dac?

J'avais vraiment peur de sa réaction et je savais que je pouvais dire une partie de la vérité, mais que je pouvais faire taire l'autre partie. Lui dire que j'avais été interner, mais ne pas lui dire que je suis médium. Enfin, tout dépendait de comment elle allait réagir parce que je pense que je devais bien ça à Elizabeth parce que j'avais échoué pour sa promesse...

- Quand j'avais 15 ans... À Vancouver, j'ai été harcelé par une bande d'amis... On me lançait des trucs, on me traitait de gay, de lopette, de bizzaroide, de ... bref..... de tout ce que tu voudras, tu sais comment les jeunes peuvent être durs.

Ça faisait tellement mal de rechasser le passé, je n'avais même pas parlé vraiment de ce qui s'était passé avec mon thérapeute et voilà que j'étais en train de le faire. Je ne sais pas ce qu'elle pensait en ce moment Elizabeth, mais je suis sûr qu'elle est loin de se douter ce qu'était vraiment la suite que j'allais lui raconter.

I'm sorry for being me.

Je savais mieux que personne ce que s’était de continuellement se faire poser des questions. De toujours devoir répondre à tout le monde, essayer de se faire comprendre alors qu’on était persuadé que personne n’était en mesure de le faire. Je ne pouvais pas m’empêcher de questionner mon ami face à son départ car j’avais eu peur. Peur qu’il lui soit arrivé quelque chose grave, peur que je me sois planté par rapport à lui et que j’avais tout gâchée sans réellement m’en rendre compte. Il faut dire aussi que je n’étais pas la personne la plus douée pour les relations sociales donc je pouvais faire des erreurs sans le savoir réellement. Maintenant, Edward ne savait pas s’il devait me le dire, il avait visiblement peur de me perdre suite à ce qu’il allait me dire.

« Edward, tu pourrais me dire n’importe quoi que je resterais toujours là pour toi. »

Je le regardai bien sérieusement pour qu’il comprenne que je ne rigolais pas, que je disais la vérité. Il avait un bon fond, je pouvais le voir. Je lui faisais confiance et ça, ça arrivait que très peu dans ma vie que j’arrive à m’ouvrir à quelqu’un comme je l’avais fait. J’étais peut-être dans le champ aussi, mais j’avais réellement l’impression que mon ami était spécial. Et pas uniquement d’une manière générale, il était spécial pour moi, unique à mes yeux. Il me fit promettre de ne rien dire, de ne pas m’enfuir. Je hochai aussitôt la tête.

« Je te promets. »

J’étais heureuse qu’il se décide enfin à tout me dire. Nous avions marché jusqu’à un petit banc plus loin. Probablement pour avoir un peu d’intimité et ça m’allait bien à moi. Je l’écoutais attentivement et j’avais de la peine de savoir à quel point les gens avait été horrible avec lui. J’avais limite l’impression d’entendre également mon histoire.

« Je peux comprendre mieux que personne à quel point les gens peuvent être méchants, ne t’inquiètes même pas avec ça. »

À l’école, quand j’étais plus jeune et même au lycée, on m’insultait continuellement. On riait car on disait que je n’étais pas à la mode, que j’étais étrange et que jamais personne allait pouvoir m’aimer car je faisais juste peur à tout le monde. Les gens m’appelaient la cinglée. Je rentrais chez moi en pleurant à chaque fois et personne n’avait été là pour me consoler. J’avais froncé les sourcils en soutenant le regard d’Edward.

« Mais pourquoi est-ce qu’ils disaient tout ça? »

I'm sorry for being me.

Elizabeth avait beau me dire qu'elle serait toujours là pour moi, mais je n'en étais pas vraiment sûr parce que j'avais connu ça autrefois. Combien de mes amis étaient venus me voir à l'asile quand j'étais ados? En fait, je n'avais pas vraiment d'amis, mais je côtoyais quelques personnes. Bref, tout ça pour dire que ça me faisait peur qu'Elizabeth... ne veule plus me revoir après ma disparition. Elle m'avait laissé tellement de messages qu'elle avait remplie ma boîte vocale. Je les avais tous écouter et je dois dire que ça m'avait fait pleurer d'être aussi impuissant face à la situation. Je ne savais plus quoi faire et aujourd'hui, j'avais osé sortir de mon appartement pour l'affronter et je fus surpris de constater qu'elle n'avait pas vraiment l'intention de m'attaquer, mais qu'elle voulait comprendre. Elle et moi, on se comprenait depuis les toutes premières fois qu'elle était atterri dans ce groupe de soutien. Je n'avais jamais rencontré une personne comme moi avant et je m'étais dit sur le coup que c'était le destin, qu'elle était là pour me soutenir, m'encourager et que moi j'étais là aussi pour faire la même chose pour elle. Je savais que dire à voix haute mon passé allait me faire mal, mais je devais le faire, pour Elizabeth. Elle m'avait promis de ne pas me juger ni même de se sauver après mes révélations. J'avais commencé par lui parler de mon adolescence, quand j'avais 15 ans.

- Pourquoi? Parce que j'étais différent, je suis différent... Ils ne me comprenaient pas.

Je ne pouvais pas lui dire autre chose que ça... En même temps, je ne pense pas qu'elle était capable de comprendre encore... J'étais hypersensible aussi, je réagissais aux gens autour de moi.  J'avais soupiré et jouer avec mes mains nerveusement avant de continuer mon histoire.

- Un soir après l'école, je marchais sur le trottoir quand je suis passer devant la bande, j'aurais dû sans doute changer de trottoir ou prendre une autre rue, mais je suis passé par là et ils m'ont entouré pour me pousser un après l'autre. Quand j'ai voulu me défendre, on a pris mes bras et on m'a maintenu. Je me suis fais tabasser... Puis.... j'ai fais une crise...

Je savais qu'elle ne comprendrait pas ce que je voulais dire par crise....

- Ça ressemble un peu comme l'épilepsie, mais pas totalement non plus. Je répétais sans cesse de ne pas me toucher et ils l'ont tous fait pour se moquer. Je me suis mis à dire n'importe quoi et ils ont eu peur de moi et sont partis, me laissant sur le trottoir à délirer. On m'a transporté à l'hôpital et mes parents ont signé pour m'envoyer à l'asile psychiatrique.  Au départ, ça devait qu'être 1 mois... mais il s'est transformé en années.

Je baissai la tête.

- Mes parents n'ont pas fait ça sur un coup de tête... les épisodes comme ça, j'en ai eu quelques uns, hallucinations, psychoses et j'en passe. On a dit que c'était la drogue qui avait amené ça, mais je n'en ai jamais pris... et... bref.. .je suis fou!

J'avais dis ça en émettant un demi-sourire. Je ne lui avais pas dit pour les esprits.. il me semble que c'était assez non ? Je savais qu'elle attendait la suite du pourquoi j'avais disparu 3 mois.

- J'ai fait une nouvelle crise à cause d'une fille qui m'a énervé et je n'ai pas sû me contrôler... Il se trouve qu'elle est médecin et elle avait déjà lu mon dossier. Du coup, elle m'a envoyé là-bas... mes parents ne sont jamais venus me sortir de là et Kenneth était injoignable... C'est pour ça que tu m'as pas vu ou que tu n'as pas eu de mes nouvelles pendant 3 mois Eli, je suis désolé!

Je lui avais caché des choses, comme mon évasion et mon don de médium, mais je ne pense pas que c'était nécessaire d'en rajouter ici... Du moins, pour aujourd'hui. Je me sentais déjà assez mal comme ça. Je regardai mon amie et j'espérais qu'elle comprenne, mais en même temps, je ne lui en voudrais pas si elle ne voulait plus me revoir.

I'm sorry for being me.

Je ne voyais pas trop où Edward voulait en venir avec ce qu’il me disait. Il avait beaucoup souffert d’intimidation à l’école. Je passai d’abord qu’il allait m’avouer qu’il était homosexuel ce qui n’aurait réellement pas été grave mais d’un autre côté, on ne s’absentait pas aussi longuement pour une question d’orientation sexuelle, non? Je ne savais pas. Je ne savais pas grand-chose dans le fond et c’était bien pour ça que je ne voulais pas me faire d’idée trop rapidement. Je détestais quand les gens jugeait sans savoir ou en venait facilement à de fausses conclusions donc je ne voulais pas faire la même chose. J’incitai Edward à continuer dans son histoire. C’est ce qu’il fit. Car oui, je savais qu’il était différent mais je ne voyais pas en quoi être différent être une bonne chose. Et puis, qu’est-ce que c’est réellement être différent? Comment est-ce qu’on pouvait baser une normalité dans un monde où personne ne se ressemblent? C’était totalement stupide, mais je pouvais comprendre ce qu’il voulait dire par là.

Je l’écoutai commencer à tout me raconter, fronçant les sourcils de temps en temps. Surtout lorsqu’il m’informa qu’il avait fait une crise. Il dû voir dans mon visage que je ne comprenais pas de quoi il s’agissait. J’avais le cœur gros lorsque j’appris qu’Edward avait passé plusieurs années à l’asile psychiatrique. C’était totalement horrible et bien que je me doutais qu’il avait beaucoup de problème, jamais je me serais doutée une seule seconde que c’était aussi sérieux. D’un autre côté, si quelqu’un aussi faisait attention à moi, peut-être qu’on m’enverra en asile aussi car je n’étais pas mieux que lui avec mes crises de paniques et mon anxiété.

J’ouvris la bouche et la referma ensuite lorsqu’il m’informa que s’il ne m’avait pas répondu, c’était bien parce qu’il s’était fait enfermer à nouveau. J’avais juste envie de pleurer et justement, des larmes me montèrent aux yeux. Je pleurais que très rarement, je n’étais pas du genre proche de mes sentiments donc ça me déstabilisa quelque secondes. J’essuyai rapidement mes larmes en secouant la tête.

« Non non… c’est moi qui est désolée… je… j’ignorais tout ça. J'aurais voulu pouvoir t'aider.... Je... »

Et le pire dans tout ça c'était que je lui en avais tellement voulu que ça me faisait sentir comme une moins que rien. Il n’était pas responsable de rien de tout ce qui s’était passé. J’avais le cœur très gros. Je soupirai. J’avais juste envie de lui prendre la main, de le serrer dans mes bras. C’était la première fois que ça m’arrivait. Je ne ressentais jamais ce besoin. J’approchai même ma main de la sienne et à quelques centimètres, je m’arrêtai, laissant faire car je n’y arrivais tout simplement pas. Je relevai la tête vers lui.

« Mais est-ce que tu vas mieux? Tu sais… si ça arrive à nouveau, tu peux m’appeler moi, je serais venue te chercher mais je doute bien que ça ne doit pas être évident, surtout que je ne savais rien. »

Je pensais un peu à haute voix en fait. Il ne faisait plus soleil et les nuages étaient gris, on pouvait entendre le tonnerre depuis un petit moment déjà.  

« T’accepterais de venir chez moi? Il va commencer à pleuvoir d’une minute à l’autre et j’ai envie de t’inviter à manger… avec moi. »

Et je voulais qu’il comprenne aussi que je n’avais pas peur et que je n’allais pas le laisser tomber.

I'm sorry for being me.

Mon amie resta à mes côtés pour m'écouter et je la vis réagir à tout ce que je venais de lui dire... je sentais son mal être et sa tristesse vis à vis ce que j'avais vécu. En même temps, elle devait avoir pitié de moi, mais bon, ce n'est pas ce que je voulais. Je voulais juste qu'elle comprenne que ce n'était pas parce que je n'avais pas envie de la voir si je n'avais par répondu à ses appels durant ces 3 derniers mois. Je dois dire que j'en avais gros sur le coeur et je voulais tout lui dire, mais je ne sais pas pourquoi, j'en avais pas la force en ce moment, il y avait trop gens qui circulaient autour de nous et qui nous lançaient de drôles de regards. Je voyais qu'elle était triste pour moi et ça me rendait effectivement triste, je m’efforçai de ne pas pleurer, mais je dois dire que je n'y arrivais pas... Des larmes coulaient aussi sur mes joues. Elizabeth voulu me réconforter en disant que je pouvais compter sur elle s'il m'arrivait de faire une crise.

- Tu ne peux pas m'aider Eli, quand ça arrive, je perds tout sens avec la réalité et n'importe qui qui passe par là, me voit comme étant fou.

Mon psychiatre qualifiait le tout comme étant une maladie mentale. Ça faisait peur de dire ça à voix haute, alors je préférais dire que j'étais fou... En même temps, j'étais médium et je n'arrivais pas à voir jusqu'où ma maladie mentale était installée en moi... Ou bien ce n'était que mon côté médium qui me rendait hypersensible... bref... beaucoup trop compliqué pour parler de tout ça maintenant. Il commença à pleuvoir et je dois dire que ça venait de rompre sans aucun doute nos retrouvailles. J'imagine que de toute façon, elle ne voulait plus vraiment me voir. Mais à ma grande surprise elle s'était levée et m'avait invité chez elle. Je l'avais suivi sans un mot et la pluie commença à tomber plus durement et je dirais que maintenant elle transperçait ma veste que j'avais mise sur ma tête et mon t-shirt. Une fois chez Elizabeth je dirais que j'étais bien content d'être au sec, mais je ne sais pas pourquoi j'éclatai en sanglot une fois que je m'installai sur le canapé.

- Je m’excuse.... Eli... J'ai pas voulu te faire de la peine...  Je sais plus quoi faire... Je sais plus quoi faire... Je me déteste!!!! Je ne suis plus capable d'endurer tout ça! Je suis médium... je parle avec les morts depuis que je suis né.... quand je touche les gens je vois leur vie, leur humeur, leur futur..... et ça me rend malade à chaque fois!!!!!!! J'en peux plus!!!!

Je devais être ridicule, je pleurais comme un enfant, mais elle me faisait tellement bien et je savais que je pouvais tout lui dire. Je ne voulais pas trempé son canapé alors je m'étais relevé debout tout en m'efforçant de m'essuyer les yeux, mais je m'installai par terre. J'étais pas bien du tout, j'avais mal et même si j'étais sorti de l'asile, tout allait de travers. Je voudrais qu'Elizabeth puisse m'aider, mais je savais que c'était impossible, je savais que j'étais seul avec ce fardeau!

I'm sorry for being me.

Je ne pouvais pas l’aider, il me l’avait bien dit et ça m’attristait beaucoup. Je voulais être en mesure de pouvoir le faire mais ça semblait bien inutile. Je savais qu’à partir de maintenant, la seule chose que je pouvais pour lui c’était d’être là. D’être son amie et lui montrer que moi, je l’appréciais et que je n’allais pas l’abandonner. Je lui proposai de venir chez moi. Il ne faisait pas beau et je voulais continuer à être avec lui. J’avais besoin de compagnie et je ne voulais pas qu’il rentre dans cet état seul chez lui. Je m’étais levée la première et c’est avec joie que je remarquai qu’Edward me suivit jusqu’à chez moi.

Nous arrivâmes à mon appartement quelques minutes plus tard. Je n’eus même pas le temps d’ouvrir les lumières que je vis que mon ami n’allait pas bien. Il semblait agité, il parlait vite… et j’arrivais à comprendre la moitié de ce que qu’il était en train de me dire. Il était médium? Il parlait avec les morts depuis qu’il était né? Est-ce qu’il était en crise? Est-ce que c’était ça ses crises? Ou bien est-ce qu’il était en train de me dire la vérité? J’avais du mal à tout saisir et je paniquais un peu car je ne savais pas quoi faire. Il était maintenant au sol, tout trempé et moi, j’enlevai mon chandail pour rester en camisole car sinon, j’allais dégouter partout. Je m’approchai d’Edward, je pouvais l’entendre respirer bruyamment. Il faisait noir dans le salon, c’était la tempête dehors et la pièce s’éclaircissait uniquement lors des éclairs. Je me sentais tellement faible par la situation, je ne savais pas quoi faire. J’avais contourné Edward et maintenant, j’étais derrière lui. Il avait le dos recourbé légèrement vers l’avant. Il semblait tellement vulnérable. Ce n’était pas du tout évident comme situation.

Je pris mon courage à deux mains, je pris une grande respiration et me pencha pour me mettre à genoux derrière lui. Je le regardai quelques secondes, approchant mes mains de lui, reculant ensuite car j’étais tout simplement incapable de le faire. Je fermai les yeux et focusais puis, en ayant toujours les yeux fermés, mes mains se posèrent sur ses épaules. J’ouvris les yeux mais je tremblais, j’avais le cœur qui battait réellement vite. Il était tout trempé et il était terriblement chaud. Ses épaules se levaient à chaque respiration et moi, je ne bougeai plus… comme pour m’habituer à ce contact.

« Chut Edward…. Calme-toi. » dis-je d’une voix tremblante.

Je ne savais pas comment il prenait ça de son côté et même moi, j’étais un peu troublée par ce contact physique. Je pensais bien toutefois que puisque ça venait de moi, c’était un peu plus facile à gérer que si un inconnu me touchait par surprise. Mais même encore… Je fis glisser mes mains très doucement puis ce fut ensuite mes avants bras qui touchèrent à ses épaules. Mon corps commençait à se coller contre le sien et je pleurais moi aussi. J’avais les yeux fermés et c’est alors que je l'avais serré contre moi. Je l’enlaçai bien doucement. Je me répétais à moi-même que la seule chose que je voulais, c’était de lui montrer que j’étais là. Que la seule chose que je voulais c’était qu’il ne se sente pas seul et que je voulais qu’il soit bien. Je voulais être magique pour lui comme il était magique pour moi. Mais j’avais peur… j’avais peur de sa réaction et j’avais peur de la mienne aussi. Mais l’important maintenant, ce n’était pas moi… c’était Edward et c’était bien pour ça que je lui chuchotai :

« Ça va aller… je suis là. »